Bonjour à tous,
Cela fait quelques mois maintenant que je passe régulièrement sur le forum afin de lire les commentaires, essayer d'y trouver des pistes à suivre, des témoignages ressemblant à mon histoire, quelques choses pour m'aider quand j'en ressens le besoin.
Et ça fait plusieurs mois que je me dis que je devrais y déposer mon témoignage afin d'aider ceux qui en ont besoin, et certainement également m'aider moi-même, comme pour déposer un fardeau bien lourd le temps d'une pause.
J'ai 51 ans, je suis veuf depuis novembre 2023, après 25 ans d'union parfaite. et j'ai 3 enfants encore ados.
Ma femme est décédée à la maison, en pleine journée, les enfants l'ont trouvé inanimée dans son lit, et je n'ai pas pu la réanimer, c'était trop tard. Son cœur avait décidé de s'arrêter dans son sommeil.
Jamais je n'aurais pensé devoir vivre ça, tenter de ramener à la vie l'être que l'on chérie le plus au monde. sans succès, et devoir faire face à l'impossible.
Dés cet instant, le monde s'est effondré sous nos pieds, et j'ai senti mon âme et mon corps se liquéfier.
Très vite, les symptômes physique du deuil ont débuté: fatigue, douleur à la poitrine, angoisse, etc.. Le corps est mis à rude épreuve et la cicatrisation fait mal.
Et il s'est passé quelque chose en moi, quelque chose qui m'a dit de me battre pour mes enfants. de ne pas me laisser sombrer.
Dés les premiers jours, je me suis mis à marcher, à faire des marches dans les bois autour de chez moi. des marches d'une heure environ.
Et je me suis mis à courir, j'ai repris le footing que j'avais arrêté il y a quelques années.
Dans ces moments j'avais l'impression que le sport m'aidait à évacuer ce que j'avais besoin d'évacuer qui me pourrissait l'esprit. J'en ai fais des courses ou des marches en pleurant.
mais au final, ça m'a énormément aidé.
Depuis je n'ai pas arrêté, et je pense que j'en aurais certainement tout le temps besoin pour me sentir bien. je pratique 2 fois par semaine environ, marche ou course.
J'avais perdu 5 kg la première semaine entre le décès et les obsèques, sans faire de sport, juste avec le stress. Quand j'ai constaté cette perte de poids, je me suis dis autant profiter de ça et en reperdre 5 autres. c'est ce que j'ai fais et je me suis senti bien mieux dans mon corps dans les semaines suivantes.
Je me suis également énormément documenté sur le deuil. J'ai avalé des dizaines de podcast, de conférences, d'articles , de passages de livre, j'ai lu le livre de Christophe FAURE (vivre le deuil au jour le jour), un indispensable selon moi.
J'ai cherché à comprendre ce qu'il m'arrivait, par quelles étapes j'allais passé et comment j'allais devoir les gérer.
Je n'ai pas voulu prendre de médication, malgré la fatigue et la tristesse, j'ai fais le choix de ressentir pleinement mes émotions et ne pas les dissimuler derrière un traitement.
je pense qu'il est important de pouvoir exprimer sa tristesse, laisser les larmes couler, peu importe le lieu et le moment ou l'on se trouve.
Plus je me documentais, plus je ne me retrouvais vraiment dans aucun schéma du deuil tels que je les trouvais, en terme de temporalité, ou en terme d'ordre des phases.
C'est important de connaitre ce qui se passe lors d'un deuil, mais il faut aussi se laisser la liberté de le vivre à sa propre vitesse et en écoutant sa tète et son cœur.
Pour ma part les choses se sont donc déroulés de la façon suivante: j'ai repris le boulot au bout d'un mois (grosse erreur, je me suis écroulé 2 mois plus tard et suis reparti pour une arrêt de 6 ou 7 semaines).
Avec le recul j'aurais du prendre mon temps dés le début, mais ma tête me disait certainement de reprendre pour occuper mon cerveau et occulter tout le reste.
Puis est venu la question de la solitude, dés le 2eme mois. Je ne suis pas un animal solitaire, et je vivais très mal le fait d'être seul. je me suis donc inscrit sur une appli de rencontre et j'ai rencontré quelqu'un. c'était évidemment beaucoup trop tôt, mais dans cette situation on ne maitrise pas forcement tout.
Ca a duré 2 mois puis j'ai fini par tout stopper car je n'étais pas prêt, de toute évidence il fallait que je traverse encore quelques phases.
j'ai consulté une psychologue, ça m'a beaucoup aidé. je n'avais jamais pratiqué, et c'est un vrai exutoire, il ne faut vraiment pas hésiter à aller consulter pendant un deuil.
Par la suite j'ai rencontré quelqu'un, il y a quelques mois, et ça se passe beaucoup mieux, je me sens prêt et je le vis sans culpabilité, ou honte ou peur du jugement.
Je me réveille parfois le matin avec une sensation de vide, de profonde solitude, mais ça passe relativement vite. peut-être que je ressentirais ça très longtemps, voire toute ma vie mais je le dépasse.
Et puis on peut tout à fais vivre son deuil et avancer en même temps, l'un n'empêche pas l'autre. il faut juste être conscient du moment auquel on peut le faire, sinon on va se faire du mal (à soi et à l'autre).
Mon récit peut paraitre un peu décousu, et peu donner l'impression que je n'ai pas souffert.
C'est tout le contraire en fait, j'ai terriblement souffert, comme jamais auparavant, et comme jamais je n'aimerais souffrir de nouveau (et pourtant ça arrivera, c'est la vie), mais j'ai choisi de ne pas subir cette souffrance totalement.
Et aujourd'hui si je fais ce témoignage c'est pour essayer de donner des clefs à ceux qui viennent ici les chercher afin de trouver leur chemin comme moi je l'ai fais.
Donc si je devais résumer:
- Documentez vous, il est important de comprendre le deuil (on devrait en parler avant de le subir d'ailleurs, nos société vivraient certainement mieux).
- Prenez le temps qu'il faut pour vous arrêtez si vous avez une activité professionnelle. le monde ne s'arrêtera pas sans vous.
- Laissez vous vivre vos émotions, c'est tellement salvateur.
- Ne prenez pas pour règle établie ce que vous allez lire ou entendre. Chacun avance à son rythme, parfois plus ou moins vite. parfois très vite, parfois très lentement. Et alors? vivez dans votre temporalité. j'ai lu tellement de témoignages ou on dit qu'on ne se remet pas en couple avant plusieurs années que ça culpabilise ceux qui n'attendent pas ce temps.
(On n'oubliera jamais notre conjoint(e), on l'aimera toujours, d'une manière différente, mais on est pas obligé de vivre dans la douleur tout le reste de notre vie non plus).
- Pratiquez une activité sportive (selon vos capacités bien sur, mais rien que la marche fait du bien à l'esprit).
- Ne vous empêchez pas de tenter d'aimer à nouveau quand vous vous sentez prêt. quand il n'y aura plus ce sentiment de culpabilité).
- N'ayez plus peur du jugement des autres, vivez votre vie. ils ne seront jamais dans votre tête. (et puis il faut dire qu'un deuil ça fait le tri dans l'entourage, il reste les amis fidèles, ceux qui soutiennent et ne jugent pas, les autres on s'en fout).
- Si vous avez des enfants, dites vous que vos enfants ont besoin de vous voir heureux pour être eux-mêmes heureux.
J'espère sincèrement que mon expérience pourra aider certains d'entres vous. Ne serait-ce qu'un personne, ça aura servi à quelque chose.
je vous souhaite de retrouver la voie du bonheur