S'il y a bien une chose où j'arrive à trouver l'envie malgré ma douleur c'est bien aider les autres
sans doute car en aidant je m'aide moi même ... ça fait du bien de se sentir un peu "utile"
L'endormissement et le réveil sont presque comme au début, en tout cas dans les larmes.
Et cela dure à présent depuis plus d'un mois si je ne connaissais pas intellectuellement cette phase je serai désespérée de mon état !
Là non en sachant je sais que je vais le traverser, que cela diminuera, stoppera, puis bien sûr reviendra aussi autrement mais que c'est la longue phase obscure ! Alors je l'accepte
et l'accepter m'aide ! Je ne lutte pas contre !
je ne me force plus à trouver des choses pour biaiser avec cette douleur, je laisse venir, j'accepte, je sais qu'il faut passer par là tôt ou tard, peu ou longuement selon les personnes.
Là chaque chose résonne en moi, comme un écho avec les souvenirs, c'est un bruit, une odeur, une image, une fleur, un cri d'oiseau particulier, un rayon de soleil ou l'image de la neige qui en venant semble percer une porte vers des souvenirs, qui sortent en salve se mêlant c'est étrange à vivre car il y a la douleur et la douceur mêlée. J'y trouve la richesse de 40 ans de partage en une large palette de résonances et échos.
Ces réactions sont constantes, sans répit, venant parfois au milieu de la concentration pro et déstabilisant car il faut accuser le choc et se ressaisir pour assurer la responsabilité pro.
C'est comme s'il était en "particule" dans tout, dans tout ce que je vois, sens, entends, comprends, goûtes, touches cela fait un effet de tourbillon permanent et j'en ai une sensation de vertiges.
Oui je sais que je le porte en moi, comme il le voulait, qu'il est heureux, je n'en doute pas. Je fais de mon mieux.
Mais tout était imprégné de lui avant : mes réflexions, mes pensées, mes projets, tout et là je ne sais pas faire ...
je me sens décalée car je ne peux pas faire comme avant mais en même temps il est là en moi et ce , je sais, pour toujours, je ne sais pas faire que pour moi.
D'ailleurs ce mot : moi n'a plus le même sens.
Je crois que dans le monde où il est le temps n'existe plus comme ici; qu'il ne souffre pas du temps alors que moi je souffre de ce temps qui nous sépare depuis le dernier moment et le futur auquel je crois et dont je ne connais pas la date.
3 mondes se superposent : le passé qui résonne en tout surgissant à chaque chose, le monde du lien avec lui, ce monde unique qui se crée peu à peu, s'enrichit et le monde dit "réel" !
Naviguer pour toujours entre et avec ces mondes est sans doute une richesse, comme un bénéfice venant du deuil que l'on ne peut connaître que par le deuil mais que c'est cher payé !
Même quand j'exulte de joie en jouant à fond avec ma petite fille par exemple, il y a une sorte de filtre, voile où le manque est là, où dans l'absence je lui communique intérieurement certaines choses à la vitesse de la pensée où je crois trouver des réponses de ce qu'il dirait, penserait, vrai que l'on se connaissait si bien ...
Oui ce qui me manque qui en sera jamais remplacé c'est l'échange.
Car dans toutes les facettes de notre relation seul l'échange interpersonnel avec l'unique qu'il était ne sera jamais remplacé.
Je peux retrouver avec les uns, les unes et les autres des parties d'échanges mais pas l’échange comme c'était avec lui
j'imagine en parlant avec des personnes veuves ayant continué leur chemin dans une nouvelle relation de couple que tout peut retrouver une nouvelle expression mais je sais que l'échange unique ne sera jamais continué avec une autre personne, si la vie me proposait ce cheminement de continuation, ce sera le début d'un autre échange unique mais celui qui manque restera un manque
ça il faut arriver à l'intégrer : intégrer ce manque tout en restant ouvert à retrouver à combler des vides de l’absence et si les choses se font (j'imagine) arriver à vivre avec cela : le manque et le nouveau
en effet comme m'a récemment expliqué une personne veuve (avec qui j'ai l’occasion de parler régulièrement) qui plus jeune avait vécu un divorce : quand on est veuf, on n'est pas célibataire et pas divorcé c'est autre chose ! ...
d'autres personnes veuves m'ont eu dit que là était d'ailleurs la difficulté de nouvelles relations de couple : que le partenaire sache comprendre, accepter tout ce qui découle de cela et sache le respecter ! voire l'accompagner ...
Les saisons avancent : 9 mois il reste devant le printemps
ce printemps qu'il a toujours tant aimé et où il a toujours eu une appréhension car en écoutant Brel "oui" répétait il "c'est dur de mourir au printemps"
je sais que le printemps pour moi ne sera jamais plus le même car il aura été le berceau de l'opposition vie-mort.
Quand on me dit "prends soin de toi, fais attention à toi" je ne sais pas ce que cela veut dire en fait.
J'aurai pu porter encore des années la charge de l'aider, de l'accompagner dans ses difficultés qui duraient depuis 11 ans mais là je ne sais pas faire pour moi, je ne comprends pas ce que cela implique en fait.
Certes je veille sur des bases : équilibre alimentaire, surveillance du minima de sommeil, minima d'activité physique ... mais à part ça ...
Comme je l'ai déjà dit quand je reçois : baisers, caresses, gestes tendres de ma petite fille je les "bois" en double, j'en fais un plein cela est un baume par rapport à l'absence mais cela ne comble pas le manque, le manque au delà du geste, le manque de l'échange unique ! et c'est ce qui m'est cruellement douloureux !
merci le forum d'être là pour pouvoir y user ma peine !
Lu dans le livre de Nadine Beauthéac (introduction de 100 questions sur le deuil)
"Je crois par exemple, que l'enjeu pour l'endeuillé est de refaire un jour
confiance à la vie. Celui du délaissé de l'amour sera de faire confiance à une personne, ce qui est très différent"
je viens de visionner
https://www.youtube.com/watch?v=X7CWAY0sJqE de
https://www.facebook.com/vincenthamain vu en conférence en Octobre