Bonsoir à tous et à toutes,
Je me joins à cette discussion. L'homme que j'aimais s'est suicidé il y a demain deux mois. Il s'est jeté du neuvième étage alors que nous étions au téléphone ensemble pendant 2 heures durant lesquelles j'essayais de le garder en vie. Et quand j'ai compris qu'il allait vraiment le "faire", j'ai pensé qu'il allait prendre des médicaments, alors je n'ai pas trop paniqué, je n'ai pas cru que c'était pour de bon, un geste aussi radical d'une défenestration...Quand le téléphone a coupé, j'ai appelé les secours et sauté dans ma voiture, je croyais qu'ils allaient le sauver.
Ce n'est qu'en arrivant en bas de son immeuble que j'ai vu le corps ...
il a sauté en criant qu'il m'aimait, il a crié cela dix fois, cinquante fois...
Alors oui, je me suis longuement reproché de n'avoir pas compris qu'il allait se tuer, je me suis reproché de ne pas avoir trouvé les mots qui l'auraient sauvé, retenu... je me dis que j'étais sûrement la seule à pouvoir le persuader de vivre, par la force de mon amour, ma volonté de vivre à ses côtés... et j'ai échoué.
L'homme que j'avais au téléphone n'était pas mon amour, mon amant, celui avec lequel je voulais vivre longtemps. Je suis obligée de me dire que ce n'était pas vraiment lui. Parce que si c'étais vraiment lui, comment expliquer qu'il ait sauté en me criant son amour. Comment expliquer qu'il ait commencé notre conversation en me disant "d'abord tu sais que je t'aime plus que tout au monde".
C'est d'une telle absurdité ! La psy aussi me dit qu'il nous manque un élément du puzzle.
J'ai heureusement dépassé la culpabilité. Il me reste par contre ce sentiment énorme de non-sens, d'absurdité.
Il m'aimait, il voulait vivre avec moi, nous faisions des projets ...
Ce que je ne vous ai pas dit encore, c'est qu'il était marié à une femme en phase terminale de sclérose en plaque. Il s'en occupait seul à domicile, depuis 12 ans, refusant toute aide, refusant que quiconque entre chez eux. On savait tous les deux que ce serait long et atroce, mais en même temps, que cela n'était plus qu'une question de mois.
Le week end précédent, on faisait des projets : des habits neufs, les vacances de la Toussaint, Noël, s'inscrire ensemble à une chorale, à la piscine ...
Ce soir là, d'après ce qu'il m'a dit au téléphone et d'après les rapports de police, elle serait entrée en agonie. Il a voulu soulager ses souffrances.
j'avais compris assez vite dans la conversation qu'il allait tuer sa femme qui râlait à côté de lui, mais je n'avais absolument pas pensé qu'il allait sauter par la fenêtre avec elle.
Il vivait les derniers temps plus avec moi qu'avec elle, il ne supportait plus la maladie, changer sa femme, la laver, les nuits blanches à son chevet, il commençait à accepter l'idée de prendre une aide médicalisée... De moi, il exigeait beaucoup. Il voulait être sûr de mon engagement, je lui répétais que c'était ce que je voulais, vivre avec lui, même dans plusieurs années, même avec son chagrin ... Il disait qu'il avait beaucoup de chance car il avait aimé une femme à 25 ans (sa femme), et maintenant il en aimait une autre (moi). Il disait que j'étais la deuxième femme de sa vie, et je vous promets qu'il était sincère !
C'est ce qui est dur à comprendre : juxtaposer la sincérité de son amour avec le côté définitif de son geste : sauter du 9ème !
Alors je ne comprends pas, je ne comprends plus cet homme que j'aimais plus que tout.
Demain, cela fera deux mois...
Je l'aime encore tant...
Mirele