Bonsoir Caroline,
Merci pour ce gentil message. Comment décrire Bruno ? Il était le contraire de tout ce que j'avais vécu. Ce que j'aime en lui c'était sa constance, sa douceur. Il était un vrai gentil. Trop gentil parfois. Les messages de sympathie que nous avons reçus aux obsèques parlaient de sa gentillesse, de sa bonté. Il avait rendu service à tant de gens par son écoute attentive.
Nous revenions d'un cour séjour en normandie. Je lui avait dit que chaque jour, je découvrais de nouvelles qualités. Contrairement aux autres hommes qui partaient "avec un capital de points et qui à chaque fois, par leur comportement, avait -1 point -1 -1..." lui c'était le contraire. Au début, je n'avais pas très envie de le fréquenter. Il ne correspondait pas à l'image "virile" que j'avais dans la tête.
Il a fait du forcing. Je crois, je sais qu'il est tombé amoureux avant moi. J'ai appris à le connaître à aimer sa sensibilité, sa grandeur d'âme. Il me disait "tu es tout pour moi". J'aimais qu'il m'aime autant. C'était la première fois de ma vie et j'ai 48 ans. C'est un amour qui s'est construit petit à petit.
Il avait le sourire toujours. De l'humour. Nous ne nous disputions pas vraiment. Il n'y a pas de choses sur lesquelles j'ai de réels regrets du genre "si j'avais su, j'aurais fait telle ou telle chose". Non, nous étions un couple simple, mais avec une réelle intimité de l'esprit.
Mais ce que j'aimais le plus, c'était cette constance dans ses sentiments. Même quand nous étions en désaccord sur quelque chose. Difficile de se disputer avec lui ! et pourtant, en chipie j'y mettais une sacrée bonne volonté parfois.
Il était facile à vivre, participait à tout dans la maison. Nous pouvions parler de tout. Moi, j'ai toujours peur de tout. Les démarches, les problèmes.... Il me disait "ne t'inquiète pas, je m'en charge".
Il organisait et me faisait participer au choix des sorties, des activités. Nous faisions tout ensemble et du coup, rien n'était une charge. Nous avons fait quantité de choses en un peu plus d'un an et demi : ciné, voyages, famille, vacances, lido, théatre, center parc, promenades.... Une vie en accéléré.
Je lui disais qu'il se rapprochait du prince charmant... et pourtant au début, il ne me plaisait pas du tout !
Avec son décès, j'ai eu l'occasion de voir qu'il n'avait pas une grande part d'ombre. Il était tel qu'il semblait être. Pas de gros secrets. C'est la première fois que je rencontre une vraie personne.
Ses défauts ? oui il en avait : il ne me laissait pas trop mon individualité. Mais il faisait des progrès et avait commencé un livre sur le sujet :"osez la vie à 2". Nous devions le lire à tour de rôle. Nous voulions tant que notre couple fonctionne.
C'était presque trop beau. Je crois que j'ai eu beaucoup de chance mais si peu de temps. La vie n'offre pas de tels cadeaux plusieurs fois. Alors quel avenir ? revivre dans ma tête en boucle mon histoire ?
C'est tellement difficile. J'ai honte de me plaindre avec la chance que j'ai eue. Et pourtant je n'arrête pas de pleurer. c'est comme si j'étais une fontaine. Je suis égoïste quand je pense qu'il y a tant de souffrance par le monde.
J'aimerais te croire Caroline, quand tu dis que cela ira mieux... Es tu passée par tout ce chemin ? combien de temps souffre t'on ?Est ce normal de ressentir une douleur physique ? Ses bras me manquent tant ! Il était si rassurant, je me sens perdue sans lui. Et pourtant avant lui, je vivais sans ce manque. Comment quelqu'un peut prendre autant de place dans notre vie en si peu de temps et laisser tant de vide ?
La semaine prochaine, je vais sur la tombe de Bruno, où sont ses cendres. Ce n'est d'habitude pas mon truc. Mais là, j'en ai besoin. C'est en province et j'irai avec sa maman. Je n'ai pas de culture religieuse. Lui croyait en Dieu, c'était très important pour lui. Depuis mars, je suis allée à l'église me disant que j'y trouverais peut être la paix. Mais parfois j'en veux à ce Dieu s'il existe... alors, je me dis que si je lui en veux, c'est que je lui reconnais une existence... et je pleurs encore.
Merci pour cet espace qui m'a permis de parler. C'est difficile et mes larmes coulent en même temps que j'écris. Je ne sais pas trop qui cela peut intéresser... Peut être juste que ça me libère. Il y a bien un moment où il n'y a plus de larmes... je suis une vraie fontaine depuis 3 mois.
Merci