Bonjour à tou(te)s,
Cela fait 9 mois que mon fils unique s'est suicidé. Il avait 16 ans, je l'ai trouvé pendu dans notre garage le matin de la rentrée.
Rien ne laissait penser qu'il aurait un tel geste, il n'a laissé aucune lettre, aucun signe.
Oui, il était mal dans sa peau comme souvent les ados le sont.
Oui, il avait des problèmes relationnels avec son père (nous nous sommes séparés alors qu'il était bébé) et ne voulait plus le voir depuis plus d'un an.
Oui, il était addict au virtuel, s'enfermant de plus en plus dans sa chambre, séchant fréquemment les cours.
Oui, je l'ai emmené voir un psy.
Oui, nous étions une famille recomposée heureuse et unie et nombreux sont ceux (famille, amis, voisins) qui ont été éberlués par son geste n'ayant rien vu venir.
Oui, je m'inquiétais pour lui, essayais de parler avec lui (mon mari également), il restait mutique.
Oui, nous partagions aussi de bons moments ensemble, rigolions, jouions, nous aimions, c'est indéniable.
Oui, il avait été un enfant adorable, rieur, câlin, curieux.
Oui, il était intelligent, sensible et manquait de confiance en lui.
Oui, cet acte est d'une violence rare, on erre hébété comme dans un champs de ruine.
Oui, notre vie a explosé mais notre famille reste soudée.
Oui, j'ai ressenti de l'incrédulité, de la stupeur, une douleur atroce, du soulagement pour lui qui devait tant souffrir, de la colère, at aussi une forme d'acceptation, d'apaisement mais rien n'est linéaire.
Oui, j'ai affaire à des proches ou non (dont un psychiatre) qui n'y comprenent rien, qui ne sont pas dans l'empathie ou qui pensent que nous sommes responsables.
Oui, je suis aussi bien entourée, nous avons et recevons encore de belles preuves d'humanité, d'amitié.
Oui, j'ai toujours atrocement mal, ai l'impression parfois que je vais devenir folle.
Oui, je culpabilise, réécrit tout en sachant d'avance la fin et me sens responsable "si j'avais fait plus, moins..."
Oui, j'apprends à vivre avec, avec l'absence, avec le manque, avec la souffrance physique et psychologique.
Oui, j'ai envie de vivre, d'être encore heureuse, d'y croire, pour lui aussi, que sa mort ne soit pas vaine.
Oui, il vit en moi et, aussi, à travers moi.
Oui, je l'aime, au-delà du temps et de l'espace, mon envolé.
Merci de m'avoir lue.
Je vous envoie amour, courage, compassion, espoir.
Tâchons de conserver l'audace de vivre pour honorer nos morts.
Ci-dessous un extrait de "César, l'enchanteur" de Bernard Montaud que je trouve très beau
"RECHOISIS, EN SON NOM, TA VIE,
ET TU HONORERAS SA MORT.
Car honorer un mort,
c'est seulement être vivant
grâce à lui.
C'est ainsi, les morts disparaissent
pour que nous apparaissions.
Ils nous laissent leur absence
pour que nous affirmions notre présence.
N'évite pas les morts qui te sont chers.
C'est tout l'art du deuil:
savoir se trouver par eux."