Auteur Sujet: Le vide  (Lu 21652 fois)

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Edwina

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Le vide
« le: 27 mars 2013 à 21:35:35 »
Bonsoir
Je viens de découvrir ce forum qui m’a été conseillé par  un centre d’aide.
J’ai parcouru vos messages en me demandant  « Peut-être est-ce trop tôt, peut-être ne saurais-je pas faire face à ce que je pourrais exprimer, écrire, lire. »
Le vendredi 22 février, mon fils s’est endormi pour toujours. Il n’a pas supporté cette vie qui lui reprenait tout ce qu’il avait construit.
Trop fragile, il n’a pas supporté la perte de son travail, de ses enfants, de sa femme, de sa maison et le coup de grâce : son avenir qu’il a vu sans espoir. Il n’a pas supporté la malhonnêteté, l’hypocrisie et l’injustice.
Ses appels au secours que nous avons entendus, sans pouvoir  être assez forts pour lui rendre l’espoir, nous laissent un goût amer et une culpabilité sans nom. 
Je dois me battre avec moi-même pour ne pas tomber dans la rancune et la noirceur.
Tout s’est déclenché  ce jeudi  21 février où il a du quitter sa maison et où il est retourné le vendredi pour y entreprendre ce long voyage sans retour.
Il m’a laissée désemparée avec un immense vide en moi.
Je ne souffre pas, c’est seulement ce vide qui remplit mon être.
Voilà ma réalité depuis ce jour…le vide

Mélie

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #1 le: 28 mars 2013 à 18:21:10 »
Bien sûr nous comprenons, je comprends ce que vous êtes en train de vivre, mon fils s'est suicidé en octobre 2010, il allait avoir 29 ans, dans un contexte presque identique, difficulté financière, chômage,  paroles détestables d'un beau père, fatigue extrême il construisait sa maison, dépression...
il nous a laissé dans ce vide immense, sa compagne, ses enfants, et nous même ses parents.....
ce vide ne sera jamais comblé, mais nous avançons avec des moments de colère, d'apathie, et aussi de doux moments avec ceux qui nous accompagnent.
C'est si récent pour vous que l'on peut dire que vous êtes encore en état de choc, une sorte d'hébétude.....je pense qu'en lisant sur le forum le parcours de ce deuil difficile, avec ces différentes phases alternées, on peut en effet mieux comprendre pour ce qui me concerne je peux dire que je vis cette alternance de mieux et de moins bien, les moments d'apaisement aussi sont là peut-être plus longs mais un rien peut faire resurgir la peine.
 vous aurez ici une oreille attentive, soyez assurée de ma sollicitude bien chaleureusement à vous

Edwina

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #2 le: 29 mars 2013 à 17:28:46 »
Bonsoir Mélie et merci d’avoir répondu à mon cri d’incompréhension.
Les moments que j’ai vécus avant son « «départ », tournent en boucle dans ma tête.
Et le jeudi avant son acte lorsque nous l’avons ma sœur et moi ramené chez moi, devant ce désespoir à l’état pur, en voyant son immense détresse, ne pas avoir su trouver le moyen de le serrer sur mon cœur et effacer tout ce qu’il a du subir avant d’arriver à cet acte final.
Il en a eu assez de se battre.
A 37 ans alors qu’il avait une peur immense de mourir à 50 ans, comme son père, de maladie.

Incompréhension, colère contre lui, contre ceux qui au lieu de l’aider, ont profité de son état de faiblesse pour le pousser de plus en plus vers la fin.
Ne pouvoir crier ma rage car il y a deux enfants avec qui je dois garder un lien fort. Pour lui, pour sa mémoire. Bien sûr c’est lui qui a pris la décision finale et ma tête peut le concevoir mais pas mon cœur.
Souvent quand la colère gronde, je me dis « pas de noir dans mon cœur ».
Parfois j’arrive à éloigner ce noir, parfois pas.
Au centre d’aide, on me dit que c’est un processus normal.
De même lorsque je parcours les messages du forum, je vois que ce sont toutes les phases par lesquelles ont doit passer.
Heureusement, je suis bien entourée par ma famille, mes amis. C’est précieux et aussi douloureux car ils ne peuvent vraiment comprendre ce qui se passe en moi. Parfois leurs recommandations, leur besoin d’aider, s’heurtent à ma révolte et je souhaiterais qu’ils m’oublient.
Je sais que je suis injuste car ils veulent bien faire.
Pour le moment, je me dis une heure à la fois, un jour à la fois.
J’ai un grand besoin de normalité, de faire comme d’habitude mais ce ne sera plus jamais pareil.
Mon fils Philippe était mon seul enfant
Et vous avez-vous d’autres enfants ??
Cordialement

Mélie

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #3 le: 30 mars 2013 à 08:42:07 »
bonjour Edwina
Mon fils Adrien était l'ainé, j'ai un autre garçon et une fille (27, et 23 ans) qui vivent à présent à l’extérieur. je comprends que pour vous c'est infiniment plus difficile.
comme je l'ai vécu les premiers temps, vous êtes encore dans un état de sidération, au début je me repassais les évènements en boucle, comprendre le geste, le pourquoi, sentir que notre amour ne l'a pas retenu, la culpabilité aussi de n'avoir pas fait assez, la colère contre son geste et la colère vis à vis de celui qui a été nuisible pour sa vie.
j'ai lu quelques ouvrages l'un traitant du deuil après suicide (Dr Faure) je vous conseille de le lire, puis divers livres témoignages de parents sur le suicide, comprendre a été ma quête sur de très longs mois; comprendre aussi la dépression et les risques des antidépresseurs qu'il ne faut jamais arrêter brutalement ce qui fût certainement le cas pour Adrien. Comprendre pourquoi la veille de son geste (il s'est pendu) il semblait apaiser aller mieux ! quel triste erreur !
j'ai décidé aussi de me faire aider et j'ai été accompagnée presque sur 2 ans par une psychiatre et une psychologue, cela permet de vider d'évacuer le trop plein, je tiens aussi un petit cahier où je note ce que je ressens aussi pour vider le trop plein et crier mon amour à mon fils, trouver les moyens pour exprimer votre peine est salutaire.
Ce qui est difficile c'est l'absence de certains , le décalage entre ce que vivent les autres et soi-même, leurs petits problèmes nous semblent bien dérisoires à présent, par contre les maladresses peuvent nous déstabiliser, un évènement lié à une perte me rend plus vulnérable ainsi je viens de perdre un chat qui était particulièrement gentil et affectueux et de nouveau je vais moins bien.
Comme vous le dîtes "c'est une heure à la fois et un jour à la fois", le sommeil est souvent très perturbé pendant de longs mois, et il faut être vigilant, pour ma part j'ai refusé tout médicament chimique hormis une ou deux fois quand je n'en pouvais plus, l'acupuncture et l'homéopathie ainsi que des plantes m'ont aidée au niveau des troubles du sommeil.
Vos petits enfants comment vont-ils, les voyez vous souvent ?
autant que vous en avez besoin, vous aurez mon écoute.
prenez bien soin de vous aussi !
bien cordialement

Maria

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #4 le: 01 avril 2013 à 19:29:16 »
Bonjour Edwina, perdre son enfant de cette façon est si difficile, si culpabilisant, on voudrait pouvoir rembobiner le temps, consoler, dire tout ce qu'on n'a pas dit, combien de fois ai-je rêvé de prendre mon fils dans mes bras, de l'embrasser, lui dire que je l'aime. Comme vous, j'ai revécu tous ces moments, j'ai essayé de comprendre mais peu à peu j'ai compris et admis que jamais je ne pourrai tout expliquer. Comme Mélie, j'ai lu beaucoup de livres et celui du Dr Faure m'a beaucoup aidée, j'ai intégré aussi un groupe de parents où j'ai pu libérer ma douleur et la partager sans jugement de la part des autres parents mais j'ai rencontré dans ce groupe beaucoup de délicatesse et d'attention. Parler aussi a été libérateur et écrire, écrire encore et encore. J'ai réussi à échapper aux médicaments, j'ai eu peur de sombrer pourtant mais peu à peu, je remonte la pente avec des hauts et des bas, on est plus fragile quand on a vécu cette grande douleur mais aussi plus attentif. Cela fera deux ans le 3 juillet que Pierrick, mon dernier enfant, est parti à l'âge de 32 ans et j'y pense chaque minute, à chaque instant mais c'est maintenant comme s'il faisait partie de moi, je lui parle, je repense aussi aux moments joyeux et j'essaie de l'imaginer libre et apaisé. Edwina, c'est si proche ce départ pour vous, c'est une plaie à vif et c'est courageux de venir ici car je me souviens aussi de la peur que j'ai eu d'écrire ce que je ressentais dans les premiers mois mais aussi de l'apaisement que j'ai trouvé, vous n'êtes pas seule et nous sommes là pour partager votre chagrin.  Bien cordialement. 

Edwina

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #5 le: 01 avril 2013 à 22:39:37 »
Bonjour
Hier a été un jour « sans ».

D’habitude  à Pâques nous fêtions la journée ensemble ses beaux-parents, moi et la petite famille. On jetait les œufs dans la pelouse et les enfants s’amusaient à ramasser les œufs que « Madame la cloche » avait apporté. Cette année je suis restée là, seule. Ma sœur m’avait invitée à dîner mais j’ai refusé. Je l’ai vue dans l’après-midi.

Quelques explications pour comprendre la situation qui est difficile et parfois je me demande si les actes que je pose sont corrects.
Le 27 mars, c’était le 5ème anniversaire de mon petit fils. Il a eu la rougeole.
Pour parer au choc que l’absence allait provoquer, l’anniversaire avait été programmé dans un lieu de jeux avec ses petits camarades. Beaucoup avaient la rougeole aussi et donc ça a été reporté au 17 avril.

Il faut savoir que lorsque ma petite fille est née, je travaillais toujours.
Malgré cela, lorsque ils avaient besoin de moi, j’étais là. Entre ma petite fille et moi s’est crée tout de suite un lien particulier. L’année suivante, j’ai pris une retraite anticipée et de ce fait j’étais plus disponible. J’ai mis ma vie entre parenthèses et lorsque ma belle fille téléphonait, j’allais garder mon trésor.   Puis son frère est né et je me suis occupée des deux. Depuis qu’ils allaient à l’école, j’y allais moins. Je ne me suis jamais imposée.

Le lendemain de la mort de leur père, j’ai demandé à voir les enfants.
J’ai senti une réticence mais néanmoins nous sommes allés chez les beaux parents où ils se trouvaient.  Là j’ai eu un drôle de sentiment.
Ensuite il y a eu la crémation et puis le silence.
Au bout de 15 jours, j’ai envoyé un mail demandant à voir les enfants. Ma belle fille m’a dit avoir eu envie de me téléphoner
mais parait-il, je lui avais demandé de me laisser tranquille un certain temps. Je n’ai pas souvenir de ça.
Comme je n’habite pas dans la même ville, nous avions pris un RDV pour discuter de la voie à suivre par rapport aux enfants. Il a été reporté car le temps était mauvais. Nous nous sommes vues un vendredi, seules.
Elle a essayé de s’expliquer quant à ses agissements vis-à-vis de mon fils. Mais comme j’étais au courant, ayant assisté à beaucoup de choses depuis Noël et ayant reçu de mon fils un genre de "journal" (reçu alors que je ne pouvais plus rien faire) ou il décrivait ce qu'était sa vie pendant cette période, elle s’est vite rendue compte qu’avec moi elle ne pouvait raconter l’histoire à sa façon. J’y ai vite mis un terme en lui disant que je ne voulais rien entendre que c’était un problème entre elle et elle. Que chacun avait son fardeau à porter et j’étais dans l’incapacité d’assumer le sien, qu’elle devait assumer ses actes jusqu’au bout.
Les rapports ont toujours étés très bons entre elle et moi.

Pour résumer, elle voulait que tout redevienne comme avant et elle ne voulait pas devenir simplement la mère de mes petits enfants.
Je n’ai pas répondu car pour moi, plus rien ne pourra être comme avant. J’ai essayé de lui expliquer que pour elle Philippe n’était qu’un étranger qu’elle a aimé a un moment donné mais pour moi c’était mon bébé.

Le dimanche suivant, elle est venue avec les enfants dîner et passer l’a-m chez moi. Elle aurait préféré que comme d’habitude j’aille chez eux mais j’ai refusé. Je suis dans l’impossibilité de remettre les pieds dans cette maison. Rien que d’y penser, j’ai la nausée. Trop de choses se sont passées avant et puis ce fameux jeudi où ma sœur et moi l’avons ramené brisé chez moi.
J’ai revu avec plaisir les enfants mais tout était très impersonnel.
A un moment où ma belle fille était au téléphone donc hors de notre vision, ma petite fille m’a pris la main et à mis sa tête sur mon épaule.
Ils n’ont pas parlé de leur père.
Lors d’un énième coup de fil que son père  a donné à ma belle fille et qui concernait les « Dodge » de mon fils, j’ai été choquée par la conversation qui s’est déroulée devant moi ainsi que par le ton employé.
J’ai eu la sensation qu’on voulait se débarrasser au plus vite de tout ce qui lui appartenait.
Lorsque ils sont partis, je lui ai envoyé un mail en expliquant ce que j’avais ressenti et en lui disant que peut-être ses enfants pourraient lui reprocher un jour, d’avoir effacé toutes les traces des passions de leur père. Je lui ai dit aussi que je voulais voir les enfants seule car je voulais qu’ils me « parlent » comme avant.
Pour le moment, ils sont partis en Bretagne jusqu'à vendredi et ensuite ils viendront chez moi.

Je ne vous cache pas que j’ai peur, peur de ne pas faire les choses correctement, de ne pas savoir renouer ce lien si précieux.
Peur de tomber dans le ressentiment et la noirceur. Si les enfants n’avaient pas été là, personne n’aurait plus entendu parler de moi, j’aurais effacé tous ces gens de ma vie. Ces gens qui depuis la crémation n’ont plus donné signe de vie. Ni par sms ni par un mot. Mais voilà les petits sont là.

Il y a autre chose qui m’interpelle. Lorsque je lui ai demandé si elle faisait suivre les enfants, elle m’a dit que sa psy lui avait dit que le meilleur psy pour eux c’était leur mère. Lorsque j’en ai parlé au psychiatre et au centre d’aide, ils m’ont dit que c’était impossible qu’elle puisse les aider efficacement car elle était elle-même en état de stress postraumatique et de ce fait dans l’incapacité de les aider efficacement.

Je dors très peu et mal. Pour le moment, je ne prends aucun médicament. Depuis longtemps, je me soigne par homéopathie. Je suis une inconditionnelle des médecines douces, fleurs de Bach, plantes etc... Si je peux et pour le moment c’est le cas, je continuerais ainsi. Jeudi je retourne au centre. Dès que je pourrais lire car pour le moment j’ai beaucoup de mal à me concentrer, je lirais le livre du Dr Faure ainsi que ceux que ma sœur et mes amis m’ont gentiment apporté. j'écris aussi beaucoup, je l'ai toujours fait.
Voilà pour aujourd’hui
Merci de me prêter une oreille attentive.

Edwina

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #6 le: 01 avril 2013 à 23:35:39 »
Bonsoir Maria
Merci d’être là.
Un soir de la semaine passée, j’ai plongé dans les photos. Ce fut un voyage pénible et dur. J’avais envie de revoir mon fils heureux. Et aussi choisir pour ses enfants des souvenirs heureux. Des souvenirs qu’ils pourront regarder quand ils seront tristes. Je ne sais pas quand je leur donnerais ces photos. Je verrais en fonction des évènements. 

Depuis que mon fils est parti de cette façon, j’ai pris conscience du fléau qu’est le suicide. Du nombre inquiétant de jeunes qui pour une raison ou l’autre, préfèrent mettre un point final à leur vie. Et tout cela ajoute à ma confusion et à mon incompréhension.

Vous, Méli et tant d’autres avez passé le cap des premières fois. Ces premières fois dont j’ai si peur, moi qui n’ai jamais eu peur de rien. Peur aussi depuis qu’il est parti, de ce vide qu’il m’a laissé. Peur aussi de ne pas ressentir sa présence en moi. Je n’ai qu’une envie, comme vous l’avez si bien dit, c’est de remonter le temps, de me réveiller et de découvrir que ce n’est qu’un cauchemar. Et puis la brume s’en va et la réalité est bien là, cruelle et insensée. Puis je me dis que là où il est, il ne souffre plus, il ne doit plus se battre, il est en paix.
Demain il y aura 40 jours qu’il est parti.
Cordialement

Mélie

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #7 le: 02 avril 2013 à 10:16:29 »
bonjour Edwina
j'ai lu avec attention vos messages et je retrouve les mêmes interrogations, nous avons en communs beaucoup de choses comme le fait d'avoir aussi deux petits enfants : une petite fille (l'aînée) dont je me suis bcp occupée et avec laquelle j'ai un fort lien et un petit fils qui est plus attaché à son papi, vu le contexte on peut le comprendre : dans une nuit il a perdu son papa alors qu'il n'avait que 21 mois).
la relation avec la belle famille est une relation très souvent complexe, nos liens avec ma belle fille étaient très bons, au moment du drame même cela nous avait pas mal rapproché, on était si inquiet pour elle, pourtant le jour du drame elle s'est écrié "j'ai tué votre fils"
Nous l'avons rassurée, nous étions tous si ébranlés, le vide immense était devant nous.....les premiers mois nous étions si préoccupés pour que tout ce passe au mieux pour elle et les petits nous nous mettions en quatre, prenant les petits autant qu'elle en avait besoin, elle a heureusement trouvé un travail rapidement, et proche de chez nous, cela nous rassurait, nous mettions en sourdine notre peine....
la belle famille s'est très peu manifestée, mais il faut dire qu'il y a eu un fort travail de sape  du vivant de mon fils, notamment de la part d'un beau-père qui a été réellement méchant, lui on ne lui pardonne pas, je ne veux pas le haïr, mais souhaite ne plus jamais le voir, car nous lui avons écrit (mon mari et moi) pour que l'on se rencontre pour pouvoir s'expliquer, il n'a jamais manifesté aucun regret.
Sans rentrer dans les détails, avec la belle famille (les parents de mon ex belle fille sont séparés) mais nos points de vue n'étaient pas les mêmes, et à présent un fossé s'est creusé....
Ma belle fille  a décidé puisque les assurances ont remboursé les emprunts de leur maison suite au décès de mon fils, de continuer ce que mon fils avait fait, la maison était faite à moitié il fallait faire tout l'intérieur, nous l'avons aidé pour ce projet puisque tel était son désir (ce que sa propre famille n'approuvait pas) nous l'aurions aidé quelque soit son choix, elle a été efficace et a mené ce projet à bien.
A présent depuis un an elle vit dans cette maison, elle a un nouveau compagnon, et tout redevient beau pour elle (même si elle restera blessée à jamais). mais nos relations se sont passablement distendues après son déménagement dans la maison, cela s'est fait plus ou moins inconsciemment, nous ne l'a voyions plus qu'en coup de vent pour récupérer les petits, les vacances l'année dernière ont mis fin à une bonne entente....beaucoup de tristesse et de colère, et la phrase de ma belle fille "j'ai tué votre fils" est revenu dans nos têtes, mais il faut avancer avec ça et faire le tri du vrai du faux ne pas trop accabler l'autre mais j'avoue que j'ai eu des pensées très violentes à son égard (elle est jeune, très centrée sur elle, et pas toujours juste dans sa manière de "relationner")
nous n'avons à présent de relations que pour voir nos petits enfants, elle a promis que jamais elle ne les éloigneraient de nous;
les relations sont moins tendues cette année, même si nous restons vigilants, j'ai perdu confiance en elle,  car nous avons été échaudés par certaines de ses attitudes.
Ce que me disaient les psy c'était de faire taire la colère pour ne voir que ce qui me faisait du bien : voir mes petits enfants cela devait être ma priorité.
heureusement pour nous, nous les voyons  une fois dans la semaine, et avons avec eux une relation très privilégiée. nous faisons les anniversaires et fêtes diverses sans la maman et sans la belle famille et c'est mieux ainsi.
Le cap de la première année a été difficile, je me disais tu ne pourras plus dire l'année dernière il était là, il faisait ceci avec nous.....
et chaque date anniversaire est un moment difficile, nous renvoyant comme au jour du drame, les larmes qui se tarissent reviennent alors dans ces périodes là.....
Pour votre belle fille essayez de ne pas aggraver votre relation, accordez lui de n'être pas dans la même pensée que vous, ce  qui est évident c'est que la relation ne sera plus jamais ce qu'elle était auparavant, les sentiments peuvent se mélanger et devenir pesants, mais il faut absolument préserver des liens avec vos petits enfants qui ont besoin de relations apaisées, vous devez à présent voir plus la mère de vos petits et la respecter dans ce rôle là, même si l'on peut ne pas être d'accord. je pense qu'il faut se donner du temps pour voir si d'autre liens peuvent naître avec votre (ex) belle fille.

En ce qui concerne les affaires de mon fils, elle nous a donné la plupart des vêtements qu'il portait mon mari met quelques sweat à son fils, ma petite fille a un tee-shirt à son papa qu'elle utilise comme doudou.
nous avions récupéré son camion mais à présent nous lui avons redonné, récupérer ses outils, mais elle nous les réclame pour bricoler mais mon mari tient absolument à les récupérer ensuite, espérons que cela ne soit pas encore sujet à disputes.

je sens à travers vos écrits que la relation avec votre belle fille ne va pas aller de soi, en tant que maman on pense souvent que nous souffrons plus qu'une belle fille, il était notre enfant même s'il était adulte, nous lui avons donné la vie et le connaissions mieux que quiconque.....la vie va reprendre différemment pour elle et  pour vous, cela est certain, mais elle doit avoir pas mal de culpabilité ce qui fausse beaucoup la relation, essayer d'être la plus juste possible.
Chaleureuses pensées à vous

Edwina

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #8 le: 05 avril 2013 à 11:02:15 »
Bonjour,
depuis quelques jours je ne vais pas bien et je suis actuellement dans l'impossibilité de mettre de l'ordre dans ma tête.
Je vous écrirais sous peu.
A bientôt
Cordialement

Mélie

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #9 le: 05 avril 2013 à 14:59:32 »
Edwina
Pas de souci vous faîtes au jour le jour, je vous souhaite de trouver des moments d'apaisement
mes pensées chaleureuses
à quand vous irez mieux !

Edwina

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #10 le: 12 avril 2013 à 22:48:59 »
Bonsoir,
Ces 10 jours ont été difficiles. Des bribes de pensées venaient en vrac dans ma tête, je ne savais plus aligner deux mots, je ne finissais pas mes phrases etc…
Au centre, mon parler était décousu mais ils m’ont rassurée et j’ai pu faire du bon travail. Non pas que ça aille beaucoup mieux maintenant mais le fait que je sache que c’est « normal »….ça me rassure.

Certains faits que j’avais occultés me sont revenus ainsi que la colère. La psy m’a fait comprendre que c’était là, dans ces locaux, que je devais exprimer cette colère. Là je pourrais parler sans crainte, sans jugement et sans mettre en péril cette nouvelle relation que pour les enfants, je dois mettre en place.

J’ai vu les enfants mardi. Je suis allée les chercher et ma belle fille est venue les reprendre le soir. J’avais mis des photos de mon fils dans un cadre, inconsciemment pour « ouvrir » une porte. Mon petit fils les à vues mais ils n’ont pas parlé longtemps de leur père. L’après-midi nous avions décidé de fêter son 5ème anniversaire, en retard. La famille de ma sœur au complet est venue et ça nous a fait à tous grand plaisir d’être réunis.
Les enfants ont été très « chouettes » et se sont bien amusés.
Par moments ma petite fille semblait triste et ma sœur à vu une larme couler.

Après leur départ alors qu’elle se frottait les yeux, je lui ai demandé ce qui se passait et elle m’a répondu qu’elle avait de l’eau dans les yeux. Je lui ai demandé si elle était triste et lui ai dit que moi aussi j’étais parfois triste.
Demain ils reviennent. Ensuite comme ils reprennent l’école, il faudra régler cela au mieux, pour tous.

Lorsque ma belle-fille est venue les rechercher, elle m’a de nouveau reparlé de mon probable retour chez eux et que ce serait mieux pour toutes les fêtes qui allaient venir. Je lui ai simplement redit que pour moi, il était impossible pour le moment d’y retourner, vu tout ce qui s’était passé. Pour le reste, je n’ai rien dit car je me demandais si elle comprenait réellement la portée de ses mots. Aller fêter quoi que se soit dans cette maison remplie de souffrance, entourée de SA famille et sans mon fils, impensable.

Elle a aussi commencé à me parler de sa difficulté face aux problèmes domestiques qu’elle rencontrait. Mais je ne voulais pas en entendre d’avantage et gentiment, j’ai changé de conversation. Je comprends ses difficultés, elles étaient prévisibles vu que mon fils faisait presque TOUT dans la maison en plus de s’occuper des enfants. Mais pour moi, il n’est pas question de le remplacer. Je pense que c’est à sa famille de le faire ou à elle d'apprendre. Pourtant, ça me fait de la peine de la savoir dans cette situation.

Ma belle fille aussi est très centrée sur elle-même et a été très gâtée par sa marraine. Je la connais depuis 15 ans et je sais à l’ avance ce qu’elle va dire et faire. C’est pour cette raison que je reste sur mes gardes.

Vos petits enfants ont-ils été suivis par un psy ? du moins votre petite fille ?


A bientôt
Bon w-end

Mélie

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #11 le: 13 avril 2013 à 22:43:05 »
Edwina je viens juste de vous lire, mais je vais prendre le temps de vous répondre, à très bientôt

Hors ligne Méduse

  • Membre Héroïque
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  • Messages: 781
Re : Le vide
« Réponse #12 le: 14 avril 2013 à 12:12:32 »
Bonjour,

J’aimerais juste vous témoigner mon affection. Je ne suis pas tout-à-fait dans votre situation puisque je n’ai pas de petits-enfants. Ma fille ainée a mis un terme à sa vie terrestre en février 2011 à 25 ans. J’ai une seconde fille qui a fêté ses 25 ans, moment douloureux puisque maintenant elle va « dépasser » sa sœur ainée.

Je ne vais pas parler de mon cheminement dans le deuil, puisqu’en beaucoup de points, je me retrouve dans les témoignages de Mélie et de Maria.

Edwina, vous avez écrit : « Heureusement, je suis bien entourée par ma famille, mes amis. C’est précieux et aussi douloureux car ils ne peuvent vraiment comprendre ce qui se passe en moi. Parfois leurs recommandations, leur besoin d’aider, s’heurtent à ma révolte et je souhaiterais qu’ils m’oublient. » Effectivement, personne ne peut comprendre s’il n’a pas vécu le deuil de son enfant. Je pense qu’il est utile de dire à ses proches ce qu’on attend d’eux. C’est la lecture des différents livres sur le deuil qui m’a donné le courage d’expliquer que c’était normal que le deuil de son enfant soit long et que j’avais juste besoin d’une écoute sans conseils. Que de parler de mon enfant et des événements me faisait du bien.
Les modules-vidéo m’ont fait du bien aussi.

Vous dites aussi que certaines personnes n’ont plus données signes de vie après la crémation. Sur le forum, on voit bien qu’après quelques jours, le silence s’installe souvent. Je crois plutôt que les gens ont peur de « déranger » ou ne savent pas quoi dire. Une personne de ce forum avait écrit à son entourage qu’elle était mal et qu’elle avait besoin d’aide. Aussitôt, ses amis se sont manifestés.

Le forum m’a fait « rencontrer » d’autres personnes qui vivent le même drame que moi et me sortent de la solitude dans ce vécu douloureux que personne ne peut comprendre. Maintenant, ma vie est assez cloisonnée : je ne parle pratiquement plus qu’ici du deuil. Dans mon quotidien, j’évoque bien des souvenirs avec ma fille ainée, sans parler des événements qui entourent son suicide et j’ai l’air « normal » et le travail me donne toujours des « pauses » de ma peine.

Personnellement, je me refuse aussi de prendre des tranquillisants. Mais je n’ai pas fait attention à ma santé physique (en dehors du travail et d’autres obligations que je continuais à assumer, je restais couchée pendant des mois) et je le paie maintenant. Je me demande même si je retrouverai mes forces un jour. Un apport de vitamine D peut être nécessaire si on se terre trop chez soi, surtout après cet hiver gris.

Pour ce qui est des affaires personnelles, je trouve que c’est très douloureux. Les avis et façons de faire diffèrent totalement. J’ai vidé le studio de ma fille et ramené ce que je pouvais. Maintenant, tout est entassé à la maison et aussi les affaires de mon mari qui est mort d’un AVC sept mois plus tard sont toujours comme il les a laissées. Mon mari ainsi que mon père étaient d’avis qu’il fallait jeter ou donner les affaires de notre fille. Moi, j’aurais eu l’impression de la « jeter » elle-même. Au décès de ma mère, il y a 35 ans, mon père avait demandé à ma sœur et moi de trier et donner ses vêtements dans la semaine après son départ.

Un conseil qui m’avait aidé, c’était d’être attentive aux « signes ». J’en ai reçu de nombreux de ma fille ne pouvant être du domaine du hasard. Les livres avec des témoignages sur les NDEs rassemblés par des médecins que j’ai lus ensuite, m’ont confortée dans la certitude que la mort n’est qu’un passage. C’est d’un grand réconfort pour moi bien que l’attente de retrouver ma fille soit longue.

J’ai une grande colère contre cette société matérialiste qui broie tant d’humains. Le prix humain des licenciements et de l’insécurité et en plus de l’intolérance et indulgence envers ceux qui ont des moments de faiblesse doit être énorme.

Edwina et Mélie, je vois qu’il n’est pas facile d’être grand-mère. Je vous souhaite d’arriver à maintenir des liens apaisés avec vos petits-enfants et leurs mères. Cela doit être d’autant plus difficile pour celle-ci, si elles se reprochent leurs querelles de couples. Elles ne sont que des humains imparfaits aussi. Edwina, vous avez raison de « vider » votre colère au centre et ici. Puissiez-vous trouver de l’apaisement.

Prenez bien soin de vous

Méduse

Mélie

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #13 le: 14 avril 2013 à 13:58:15 »
merci Méduse pour votre intervention, cela fait du bien de se sentir écoutée comprise,


voilà je réponds aussi à Edwina :

Edwina bonjour !, peut-être pouvez-vous m’expliquer comment vous voyez votre belle fille, car à travers vos propos je ressens que vous lui en voulez particulièrement qu’elle n’a pas été une bonne compagne pour votre fils ?
En ce qui me concerne, mon fils, ils se sont connus tout juste pendant 5 ans ½ , 6 mois à peine il mettait en route leur premier enfant, ils étaient jeunes, bien sûr avec l’impatience de la jeunesse, milles projets, ils habitaient tout proches de chez nous, dans leur histoire ils ont déménagés  5 fois, avec deux séjours dans notre maison. Un deuxième enfant, une maison qui se construisait, une maison bien trop grande ( à l’image de mon fils qui avait tant besoin de surmonter son manque de confiance en lui-même) des soucis financiers du moins les travaux allaient durer plus longtemps que prévus, ils ont pris la décision d’habiter un mobilhome sur le chantier de leur maison , il était suffisamment spacieux  et confortable mon fils l’avait bien réaménagé, et puis soudain le désir de ma belle fille d’un coup de travailler avec son père sur Marseille, (lui vivait mal que sa fille vive en mobilhome c’était inadmissible pour lui, il nous a dit qu’il allait mettre les moyens (ont a compris plus tard….), et a agit en sorte de la persuader de le rejoindre dans son entreprise , mon fils ne voulait pas en entendre parler au début, il voyait trop l’influence qu’avait son père sur sa fille, mais par amour il a cédé et ce fut la descente  pour mon fils…..
Aussi mes sentiments pour mon ex belle fille, ont connu des hauts et des bas (6 mois très difficiles), et comme je vous le disais maintenant nos relations sont courtoises mais nous ne faisons plus rien ensemble.
Aussi pour votre propre belle fille, je crois comprendre votre réticence, vous  dîtes elle veut que vous reveniez habitez chez elle ?
Vous pouvez me répondre en mode privé si vous le souhaitez, vivez vous à présent seule ?
Pour ma part lors de nos difficultés relationnelles avec mon ex belle fille, les deux psys me disaient que ma priorité était de voir mes petits enfants et que cela seul comptait. Donc après divers échanges assez durs avec ma belle fille (j’étais en colère après elle pour diverses raisons, et au fond de moi je lui trouve des responsabilités par rapport à ce qui est arrivé…) en même temps la colère même si on peut la vivre un certain temps est destructrice pour soi –même et pas du tout positive pour mes petits enfants. Et puis je me suis dit que je ne pouvais pas la juger aussi sévèrement car perdre un compagnon est aussi très douloureux, 
Même si je crois peut-être à tort que perdre un enfant, son enfant est impossible à réparer.
Elle a présent répare sa vie, elle vit en couple, dans la maison de mon fils….moi je n’y met plus les pieds c’est trop douloureux, et puis je ne souhaite pas rencontrer son compagnon pour le moment, même si à son encontre je n’ai rien à lui reprocher, sympathiser avec lui, cela me semble impossible….
Vous avez raison d’exprimer à votre belle fille cette impossibilité d’être dans la maison où a vécu votre fils…..soyez la plus sincère possible. Tout ne pourra pas être dit je vous l’accorde,  privilégiez vos petits enfants. Quel âge ont-ils ?
Le petit au début du décès de son père (qui a eu lieu dans nuit)  a eu d’énormes difficultés à s’endormir, il allait régulièrement s’assurer que sa mère était dans sa chambre, et refusait de s’endormir, il a vu une seule fois une pédopsychiatre qui a dit qu’il fallait qu’elle soit ferme pour ne pas rentrer dans un rituel, elle a donc choisit de l’enfermer la nuit, elle l’embrassait bien sûr le rassurait mais pour ne pas qu’il vienne la voir elle l’enfermait dans sa chambre et le laissait pleurer... A présent il a 4 ans il évolue positivement mais il lui manque le vécu avec son papa, il ne se souvient plus, et  il ressent que pas rapport à sa sœur il lui manque ces moments  de complicité avec son père. Il est très attaché à son papi (mon mari)
Ma petite fille évoque son père de temps en temps, il lui arrive de parler de sa tristesse et de pleurer, elle sait en fait, elle l’a compris que son père s’était suicidé, j’attends qu’elle me pose des questions et je lui réponds (je lui ai dit que je lui dirais toujours la vérité,  mais que pour certaine chose il fallait qu’elle grandisse) elle évolue positivement même si elle restera (ils resteront)  je le pense fragilisée(s) par la perte aussi brutale de son papa.
Je reste vigilante pour eux 
Je vous souhaite plein de  force pour avancer, et de doux moments avec vos petits enfants.

Edwina

  • Invité
Re : Le vide
« Réponse #14 le: 26 avril 2013 à 14:43:02 »
Bonsoir,
Depuis le 15 j’étais  en panne totale. Pas d’internet, pas de télé, pas de téléphone. Heureusement il me restait le GSM. Au moment où j’avais le plus besoin de communiquer, gros problème général. Ce matin, j’ai été reconnectée.

Merci Méduse pour votre intervention. Votre fille était vraiment très jeune. Il est vrai que notre société n’est pas au top pour les aider. Je prends seulement maintenant conscience de l’ampleur du phénomène « suicide » et je suis effrayée que l’on n’ait  pas ou peu de moyens de l’enrayer.
Seulement, il ne faut pas se laisser aller. Il faut sortir de chez vous. Personnellement, samedi  je suis allée marcher. J’ai fait 5 km en pleurant. J’habite près d’un cours d’eau et le parcours est agréable. Je me sentais mal et donc je suis sortie, il y avait du soleil et je n’arrêtais pas de penser que lui ne profiterait plus de cela.  Néanmoins, lorsque je suis rentrée chez moi, ça allait mieux.
Moi aussi je crois aux signes. Lors du décès de mon père, de mon ex-mari, plein de choses me sont arrivées.  Pour mon fils, c’est le silence total. Par contre, mes amies, elles font des rêves ou mon fils leur apparaît et quand on décortique les symboles, ceux-ci sont apaisants et beaux.

Mélie, je ne sais pas comment communiquer avec vous en « mode privé ».

En réponse à votre question « comment je vois ma belle fille ?? Mes sentiments sont mitigés.
En fait, je ne sais plus trop ce que ressens pour le moment car je passe de la colère pour la façon dont elle a agi, à la pitié car sa situation n’est pas des plus réjouissante. 

Pour comprendre.
Je la connais depuis 15 ans. Nous nous sommes toujours bien entendues dès le début. Mon fils et elle se sont connus lorsqu’elle faisait ses études dans notre ville. Elle était malgré mes réticences, plus souvent chez nous qu’à son studio.
Ensuite, ils ont pris un petit appartement  et ont commencé leur vie à deux. Mon fils ne voulait pas se marier. Ayant reçu en héritage de son grand-père de l’argent, ils ont décidé de construire leur maison. La marraine de ma belle-fille a mis l’équivalent pour que tous les deux soient sur le même pied. Ceci en gros.

 Lorsque j’ai connu sa famille, j’ai eu un drôle de sentiment. Une image me passait par la tête et est revenue régulièrement.  Celle d’un insecte pris dans une toile d’araignée, toile qui l’entourait peu à peu pour former un cocon. Puis ils se sont mariés. Lors de la construction de leur maison, ils ont habité chez les beaux parents. Quand enfin ils sont entrés dans leur maison, j’ai entendu souvent ma belle-fille dire qu’elle ne se sentait pas chez elle. Je lui ai conseillé de « s’approprier » la maison.   Maison qu’ils ont conçue à deux. Mais elle ne voulait rien faire dans ce logis. Ils se sont au début partagé les tâches mais au four et à mesure, je me rendais compte que mon fils en faisait de plus en plus. Mais je me disais qu’il était adulte et que c’était son problème. Puis le premier enfant est né. Ils avaient l’air heureux. Ensemble ils ont « vécu » cette grossesse. Ils travaillaient tous les deux. Mon fils avait choisi de travailler comme agent de sécurité la nuit, pour s’occuper de sa fille. Avant il travaillait dans un garage (il était mécanicien) qui avait fermé pour cause de faillite. Ma belle fille est professeur de chimie.  A l’époque, j’ai arrêté le travail et là j’ai commencé à les aider. Pour faire la jonction car en plus il était pompier volontaire. J’allais chez eux et y dormais une nuit ou deux suivant le planning. J’y suis toujours allée lorsque ma belle fille me le demandait.

En 2008 mon petit fils est né et en 2009, j’ai pour la première fois entendu mon fils dire qu’il n’était pas heureux et qu’il souffrait de solitude. Il s’en était aussi ouvert à la marraine de ma belle-fille qui avait essayé d’en parler avec sa filleule. Sans succès. Personnellement, je ne pouvais intervenir mais quand ma belle-fille me parlait d’un problème ou l’autre, j’essayais de la faire réfléchir. Elle vivait comme une éternelle étudiante. Une enfant trop gâtée.  Mon fils s’occupait de la maison, de la lessive, des enfants, de tout ce qui était travaux de finition et il travaillait. Elle rentrait, allait dans son bureau avant de dire bonjour aux enfants et à son mari. Préparait un semblant de souper (mauvaise cuisinière) et retournait dans son bureau. En écrivant ces phrases, je me rends compte que peut-être j’aurais du m’en mêler plus.  Mais j’avais élevé mon fils pour qu’il soit autonome et je pense qu’il n’aurait pas apprécié mon intervention. Elle nous disait avoir beaucoup de travail mais elle oubliait que ma sœur et la plupart de mes amies étaient dans l’enseignement supérieur. En fait elle reconnaissait elle-même, rester des heures sur internet et puis vite, elle faisait son travail. Et donc allait se coucher très tard. Son bureau c’était sa « bulle ». Sans me mêler de leur vie, je lui ai dit à plusieurs reprises que plus tard elle regretterait d’être passée à coté de tout ce que ses enfants auraient pu lui apporter. Ces dernières années, se sont écoulées entre haut et bas. Disputes et réconciliations. Les enfants allant à l’école, j’y allais beaucoup moins. On fêtait les fêtes ensemble, j’allais aux fêtes de l’école pour que mon fils ne soit pas seul etc.… Souvent lors de ces fêtes, ça se passait mal car le père étant alcoolique, il y avait toujours un problème. A chaque Noël, je me disais « c’est le dernier » puis comme je savais que mon fils aurait de la peine car on  avait toujours passé le réveillon de Noël  ensemble, j’y allais à contrecœur. Pour lui et les enfants.

J’ai vu mon fils changer, devenir de plus en plus nerveux.  Et il commençait à rabrouer sérieusement sa femme.  Quand je lui en ai fait la remarque, il m’a dit « elle m’énerve, si tu savais comme elle m’énerve ». Je pensais « ils vont divorcer ». Mais alors comme par enchantement ça allait mieux. Entendons-nous, mon fils n’était pas un ange, il avait ses défauts. Ils s’y sont mis à deux pour détruire leur mariage. Je suis très lucide. Mais c’était leur vie, je ne pouvais la vivre à leur place. Ma belle fille est très manipulatrice, centrée sur elle-même, avec un ego surdimensionné. Elle dit d’elle « je suis parfaite ». Souvent je lui demandais « parfaite mais dans quel domaine ? ». Elle riait. Quand ma belle fille racontait une dispute, elle ne mentait pas mais oubliait souvent d’y inclure son rôle. Au début je me suis laissé prendre puis je  lui ai fait savoir que je n’étais pas dupe.
Voilà pour cerner un peu leur personnalité du moins en surface car par après beaucoup de choses ont surgi au grand jour et j’ai mieux compris le comportement de mon fils.  Mais pourquoi n’a-t-il rien dit ?

Ma belle fille ne veut pas que j’aille habiter chez elle (c’est maintenant chez elle), mais que j’y retourné pour garder les enfants, faire le jardin (je le faisais pour lui et pour lui apprendre lorsque je ne serais plus à même de le faire, quelle ironie) pour que nous puissions fêter ensemble comme avant toutes les fêtes (anniversaires, Noël etc.) Impensable pour moi. Il est hors de question que j’aille remplacer mon fils dans ses tâches. Voilà le fond de sa pensée.  De plus elle souhaiterait que nos relations redeviennent comme avant. Elle m’a dit qu’elle ne voulait pas me perdre aussi. Pour le moment, j’ai demandé à voir les enfants (6 ans et demi et 5 ans) deux fois par mois. La 1ere fois elle est venue aussi mais je lui ai dit que c’est seulement les enfants que je voulais voir. Pour qu’ils me parlent comme avant, spontanément.

Le mardi, je suis allée les chercher en train car je n’ai pas de voiture et elle est venue les rechercher. Le samedi idem et là j’ai retrouvé vraiment mes petits enfants. D’eux-mêmes, ils ont parlé de leur papa et ma petite fille m’a demander à voir les photos de « papa petit ». J’ai raconté plein d’anecdotes marrantes et ils on beaucoup ri. Puis je leur ai demandé, s’ils voulaient des photos de leurs moments heureux avec leur papa (j’en avais préparé au cas..) et nous avons classé les photos dans des petits albums en se souvenant des bagarres à trois dans le trampoline,  du jeu da cache-cache etc... Nous nous sommes beaucoup promenés et avons passé une bonne journée.

Lorsque leur maman est venue les rechercher, dans la conversation, elle m’a dit qu’elle n’aimait pas le mot suicide, qu’elle préférait parler de maladie. Et là, j’ai eu envie de lui dire que le mot suicide la ramènerait inévitablement  à sa responsabilité. Je n’ai rien dit mais je pense qu’elle a compris à mon expression ce que je pensais. Et c’est ça qui me fait dire que mes sentiments sont ambivalents. Je passe de la pitié à la colère et à l’envie de la blesser. Elle à joué un jeu trop malhonnête pour que je l’oublie. Et sa stratégie lui a sauté au visage. Car je pense qu’elle n’a jamais imaginé une fin de ce genre. Mais il faut garder un statu quo pour les enfants.
Elle m’a fait part encore une fois de ses difficultés domestiques, mais j’ai coupé court. Je ne veux pas le savoir. Je sais qu’elle sera obligée d’avoir recours à sa famille. Famille qui lui faisait honte souvent. Et c’est vrai que ses appels tendent à ça. Que je l’aide pour ne pas avoir à faire appel à eux.
Mais comme me dit la psy « ce n’est pas votre problème, c’est n’est pas votre  vie ».  Je dois m’occuper de moi et des enfants, point. Mais tout ça est difficile, très difficile.
A bientôt