Michel, mon compagnon, mon Breton Préféré comme je l'appelais, est décédé inopinément le 5 mai dernier.
Après m'avoir déposée au bureau, il est allé, comme tous les matins, prendre son petit café au bistrot près de chez nous et, de retour à la maison, s'est installé dans le fauteuil pour se reposer un peu. 20 ans de travail de nuit dans la presse quotidienne l'avaient rendu insomniaque et il avait pris l'habitude de faire des petites siestes pendant la journée, seulement voilà.... ce jeudi-là, il ne s'est pas réveillé et je l'ai trouvé mort en rentrant de mon travail. D'après les recoupements que j'ai pu faire, c'est arrivé vers 9 h 15. Le médecin m'a dit qu'il n'a pas souffert.
Il avait 55 ans et rien ne pouvait laisser supposer qu'il partirait aussi brutalement.
Nous vivions ensemble depuis un peu moins de 10 ans et n'avions pas d'enfants.
Mes parents sont décédés depuis très longtemps (ma mère en 1977 et mon père en 1989) et je n'ai plus aucun contact avec les quelques membres de ma famille qui me restent. Mon compagnon était dans la même situation.
Nous vivions en vase clos, si je puis dire. Il avait quelques amis/connaissances, que je ne fréquentais pas. De même, il ne fréquentait pas les miens.
Cela nous convenait très bien mais maintenant qu'il est parti, je me retrouve toute seule. Les gens m'évitent soigneusement, promettent de m'appeler et ne le font pas, etc.
Heureusement qu'il y a mes collègues de travail (qui sont vraiment très gentilles avec moi), sans quoi je n'aurais personne à qui parler.
Nous nous entendions relativement bien, mais il y avait parfois des tensions entre nous. En effet, nous ne roulions pas sur l'or et au lieu d'éviter les dépenses inutiles, il gaspillait notre argent en cigarettes (2,5 paquets/jour, quand même !!!), petits cafés, magazines de voile, etc. et moi, je devais jongler avec mon unique salaire (il n'avait pas de revenus et n'avait droit à aucune allocation de quelque sorte que ce soit) pour essayer de nouer les 2 bouts. Je me privais de tas de choses alors que lui ne se refusait rien ou ne faisait pas attention (son dernier exploit : une contravention à 110 EUR parce qu'il s'était garé n'importe comment !!!), et je n'arrivais pas toujours à cacher mon exaspération et ma frustration.
Bien sûr, j'ai beaucoup de chagrin depuis qu'il n'est plus là et il me manque terriblement. Mais, pour être honnête, je dois vous avouer que je ressens aussi une petite pointe de soulagement tout au fond de mon cœur, et je m'en veux.
Enfin, si j'avais réussi à le convaincre de se pacser avec moi, il aurait pu avoir une couverture sociale. Il serait allé chez le médecin et on aurait pu le traiter, puisqu'il avait manifestement un problème cardiaque.
Seulement voilà, un pacs lui paraissait trop "assujettissant".... alors que bien des problèmes matériels auraient, ainsi, pu être résolus. Je lui en veux d'avoir plus pensé à sa chère liberté qu'à son/notre bien-être. Et je me sens coupable, maintenant qu'il n'est plus là, de garder cette rancune au fond de moi.