Dure journée... 43 ans aujourd'hui, et les congés qu'Isa avait posé qui tombent à plat puisqu'elle n'est plus là, comme ces proches qui lancent un « joyeux » anniversaire qui n'a de joyeux que la tentative faite par eux pour tenter de chercher un peu moins de peine dans ma voix. Je relis les mots que nous nous échangions lorsque nous nous sommes rencontré, les promesses faites, dont celle que la maladie a détruit concernant une vie à accompagner l'autre jusqu'au bout. Je l'ai fait, de tout mon coeur, de toute mon âme, mais cette saleté de cancer lui a fait faillir à la sienne. Je l'ai accompagné mais elle ne me le rendra pas...
Nous nous voyions déjà, deux petits vieux sur notre banc, tenant notre canne d'une main et de l'autre celle de l'autre, dans laquelle une légère pression suffisait à dire qu'il restait de l'amour.
Aujourd'hui, ma main est vide, à tout jamais. Sa main a quitté la mienne et ses lèvres ne toucheront plus jamais les miennes. Reste les souvenirs, les anniversaires passés à deux, les petites attentions de ces jours particuliers qui me manquent, qui laissent un goût amer au fond de la bouche.
Et ce téléphone qui sonne, sonne encore, que je hais particulièrement plus aujourd'hui, cette joie feinte pour consoler qui ne fait que blesser plus encore et rappeler l'absence. Et ces faux semblant pour ne pas heurter, ne pas montrer.
Ma mère appelle... Elle se bat elle aussi contre la même maladie qu'Isa. Même si elle semble mieux s'en sortir, la crainte, la peur instaurée par ce mal là restent présents dans sa voix à elle. J'installe le sourire dans la mienne, même si les larmes coulent encore. Ne surtout pas montrer ma détresse du jour pour ne pas l'affoler... Et au dépôt du combiné, m’effondrer, tout simplement.
Demain sera un autre jour. 1Ere, 2eme, 3eme phase. Que sais-je, où en suis-je ? Juste une succession de jours, quelques uns avec, beaucoup sans. Sans moral, sans envie, sans joie. Ces jours et semaines qui passent se ressemblent. Je repasse ces émotions, tentant de les user pour appliquer scolairement les propos tirés ici et ailleurs qui me conseillent de le faire. Mais une photo, un bibelot acheté à deux me renvoient à la même détresse, et un moment, celui d'aujourd'hui particulièrement, me jette à la face cette trop lourde absence. Comment user ces sentiments là alors que le temps ne suffisait pas, déjà, à user ceux qui étaient présents entre nous ? J'ai l'impression que jamais je ne sortirai du chagrin et du manque ! Notre amour a été bien plus fort que de nombreux écueils, il s'en est même renforcé, et maintenant qu'il est accompagné de cette absence, comment espérer pouvoir l'user ? Mystère !
Bon, c'est un jour sans, un de plus, un des plus fort, un jour de plus et particulièrement difficile à passer, et demain sera un autre jour, de peine, sûrement, peut-être aussi fait de quelques joies ? Nous verrons demain...
Patrice