Bonjour à tous,
Voilà. Dans quelques jours il y aura un an que l'homme que j'aime s'est "éteint", comme on dit.
Je regarde en arrière, je revois la veille de sa mort, ma brusque prise de conscience : C'est impossible, et pourtant c'est réel, il va mourir. Invraisemblance absolue, paradoxe inimaginable, irrecevable, non, c'est impossible, mais si, c'est vrai, mais non, ça ne peut pas finir comme ça, et pourtant si, il est mort le lendemain.
Les premiers mois abominables, les heures de marche-errance au hasard des rues, les yeux gonflés de larmes, où le trouver? comment l'appeler? Le manque permanent, lancinant, sa voix, ses bras, sa chaleur. Mon arrivée sur ce forum et les mots doux de Suzy, Bruno, Pascale, Christine, d'autres, beaucoup d'autres. Les heures de travail accumulé pour ne pas rentrer, ne pas me retrouver face à mon vide de lui. Les réveils coup de poignard dans ma demi-torpeur, la petite phrase du matin: Il est mort. Les journées, les unes après les autres, comme la traversée du précipice, en équilibre, funambule: Avance, allez, avance! Les dimanches qu'est-ce que je vais faire de ma peau? Les copains qui font ce qu'ils peuvent, allez, viens, tu dois te changer les idées! Changer, mais pour penser à quoi? Les soirs, petits quarts d'heure douceur en retrouvant mon lit, souvenirs, son rire, c'était à moi, tout ça. Mais non, il n'est pas complètement parti, je le sens, là, en moi, chaque soir, mais qu'est-ce que ça veut dire? Croire en la vie après la mort? Est-ce que ce qui est non-perceptible est tout de même réel? Comment concilier l'horreur et l'acceptation? Pourquoi continuer?
Voilà, un an. J'ai tenu. Je ne sais pas où je vais, mais j'avance. Et oui, maintenant j'ai compris, il est mort. Est-ce que, s'il n'y a vraiment rien que le néant, après la mort, j'aurais réussi à traverser cette année? Je ne sais pas. Evidemment il y aura encore beaucoup d'angoisse, de vide sidéral, mais il y a aussi des moments de repos, de calme, de sérénité profonde. Pourquoi? Je ne sais pas. J'ai changé, par moments les dérisions de la vie ne m'atteignent plus.
Je pense à vous tous, les nouveaux qui arrivent, presque chaque jour, sur le forum, beaucoup de jeunes, accompagnés de petits. Comment faire quand on a des petits bouts qui demandent de l'attention, et qu'on n'a pas envie? Pas le choix, se forcer, leur donner, et s'accrocher de toutes ses forces à la certitude que ça va aller, bientôt, bientôt.
J'ai réussi à passer ça, beaucoup d'autres l'ont fait, vous y arriverez aussi. Avancez, doucement, au bout de cette traversée infernale il y a des grandes journées de repos sans souffrance. J'ai trouvé sur ce forum les seuls qui ont pu répondre à mes questions: Pourquoi continuer, quand on a perdu l'essentiel? Pourquoi on y arrive? Parce qu'on s'est aimés, c'est tout.
Je vous embrasse tous. Lauren