Oula, alors là, vaste débat !...
Pour les obsèques de mon mari, 300 personnes au moins étaient venues de loin et même de très loin, j'ai reçu des messages de NZ, de Thaïlande, d'architectes navals connus (il construisait des grands voiliers alu), du Groupe Bé...eau, on a beaucoup pleuré, beaucoup parlé et beaucoup promis... et puis très vite, "d'épouse de..." je suis devenue "personne"... en l'espace de quelques semaines.
C'était il y a 5 ans...
L'année suivant son décès, pas une fleur, pas un coup de fil, pas un mot, personne à la messe en son honneur sauf mes enfants et ma belle-mère... Oui, les cimetières sont pleins de gens indispensables... c'est bien vrai. Il l'avait été... mais ne l'était plus...
A mon départ de Bordeaux, il y a 1 mois, je ne comptais plus qu'un couple de relations fidèles, presque des amis... Point barre.
Alors les amis d'avant, ils deviennent ceux qui "n'osent pas", ceux qui "ont trop de chagrin", ceux qui ne veulent pas fréquenter une "veuve potentiellement dangereuse", ceux que ça "emm.... de" tout bonnement, oui, y'en a plein les rues quand la mort frappe, et puis peu à peu ça se délaye, et il n'y a plus d'amis d'avant... Il n'y a plus d'amis du tout.
La mort isole dans un premier temps, parce qu'on vit dans notre bulle de souffrance et qu'on se rend inaccessible. Notre douleur nous appartient, et je ne crois pas qu'on veuille vraiment la partager. Par pudeur, par impossibilité, par orgueil... en tous cas, elle est à nous et on la boit jusqu'à la lie. Ensuite, c'est trop tard. Les portes se sont fermées, impossible de renouer le lien. Seuls les plus fidèles sont restés, on compris, ont accepté notre isolement, mais ils sont peu... Les autres "ont leur vie" comme ils disent pour se dédouaner de leur indifférence. Grand bien leur fasse, leur heure viendra, nul n'est épargné par la mort et notre force, c'est que nous nous savons ce que ça veut dire et que nous avons survécu... Eux pas encore !
De toute façon, en perdant notre conjoint nous apprenons la solitude et tous les apprentissages qui vont avec. Et ça demande une énergie folle. Personne ne peut comprendre, s'il ne l'a vécu, la difficulté du deuil. Et même dans ce cas, le temps nous fait oublier la douleur du premier instant. Je sais que j'ai oublié l'horreur du 02 septembre, comme on peut oublier la douleur d'un enfantement. On sait que ça fait très mal, mais on ne sait plus vraiment comment... Je sais aussi que je ne voudrais pas revivre ce que j'ai vécu, pour rien au monde !
A la décharge des "amis d'avant", je dirais que nous étions probablement comme eux autrefois. Nous étions nous aussi des "amis d'avant".
M.