Faire les courses.
Faire les courses pour la maison, je le fais seul depuis plusieurs mois déjà, ma chérie n’avait plus la force pour m’accompagner. Ça n’était pas un problème pour moi, parce que je pouvais choisir ses plats et ses aliments préférés et selon ses envies du moment. Mais depuis son décès, faire les courses n’a plus aucun intérêt, et il y aussi cette sensation bizarre lorsque je suis dans un hypermarché, j’ai l’impression qu’il y a moi puis tous les autres, comme si nous n’étions pas à la même vitesse, ou bien décalé dans le temps, d’être seul parmi tous les autres, je ne saurais mieux vous expliquez. Je ne sais pas si vous avez vécus cette sensation de solitude au milieu des autres, en tout cas ça n’a rien d’agréable ?

A la maison, c’est moi qui cuisine depuis pas mal d’années déjà, mais cuisiner, cela n’est plaisant que si vous cuisinez pour quelqu’un, cuisiner pour soi-même, c’est sans intérêt. De plus, je n’ai plus envie de rien, je me contente de me nourrir plus ou moins correctement, mais sans aucun plaisir. Cela est vrai aussi pour tout le reste, plus rien ne m’intéresse. Aucune motivation pour quoi se soit.
J’accepte les invitations d’amis ou de la famille pour ne froisser personne et parce qu’un moment viendra où il y en aura de moins en moins. Lors de ses soirées, c’est pareil, je ne sens pas à ma place, je participe tant bien que mal, mais mon esprit est ailleurs, les personnes présentes évitent la plupart du temps de me parler Odile, je n’en parle pas non plus, pour ne pas gêner, pourtant, j’aimerais qu’on m’en parle, même si cela m’est douloureux et me tire des larmes, je préfère cela au silence.
Finalement, là où je suis le mieux c’est chez moi, seul, je peux penser à elle et verser mes larmes sans déranger personne…
Amitiés a vous toutes et tous

Thierry

Je ne sais pas si vous avez vécus cette sensation de solitude au milieu des autres, en tout cas ça n’a rien d’agréable ?

oh oui je crois qu'ici tout le monde connait, a connu ... c'est normal mais peut être avais tu ressenti un équivalent pour vous deux "seuls" au milieu des autres quand votre fils Ludovic a décidé de quitter la vie en 2011 ?
c'est une constante dans le deuil cet isolement, car définitivement plus rien n'est pareil ...
ce n'est qu'avec celles et ceux touchés comme nous que l'on peut se sentir inclus dans un groupe d'où , me semble t'il, l'utile réconfort de se retrouver entre endeuillés !
Même si, je mets le bémol , parfois on n'a pas les mêmes réactions, ici nous avons eu parlé.

Ton deuil est TRÈS frais pas encore 3 mois ...
On t'invite c'est un bon point même si tu as envie de rester seul, moi au contraire on m'oubliait totalement  ... ce n'est pas mieux !

Tu as vécu avec le deuil de tes soeurs et ton père, puis Ludovic les phases de deuil, tu les connais de l'intérieur mais écouter et lire Dr Fauré sur ces phases peut nourrir ton mental et poser des repères pour te rassurer sur la normalité ....
Bien sûr va falloir traverser toutes les dates anniversaires heureuses et malheureuses seul sans Odile pendant la première année et les fêtes classiques ... C'est très long, usant la seule force sera ton amour pour elle et votre fille la vivant de votre Nous  ...
Tu sais et tu as lu que l'on fait vivre notre aimé.e par nous pour rester près  ... c'est un chemin

tu peux relire ou lire
http://forumdeuil.comemo.org/vivre-le-deuil-de-son-conjoint/tentative-de-comprendre-pourquoi-le-sautres-nous-gardent-a-distance/

c'est dans le fil en guise de table des matières
le film
https://vimeo.com/180723705
et celui là
spécial perte conjoint
https://youtu.be/_53i0gzT3WI
Phares dans la tempête du deuil - Conférence de Marie-Noël Damas
https://youtu.be/TSbtgWtACGs

extrait du livre lettre à ceux qui veulent nous aider
https://mieux-traverser-le-deuil.fr/lettre-a-celui-ou-celle-qui-veut-maider/?fbclid=IwAR0CkH_zV9ev6hiOMK8pXSDo0DKTJsShbakFlFeAThjgjJ8KJrhuJ7m-jlE

peut être lire ces livres

écrit par un veuf :

    "Veuf" de Jean-Louis Fournier https://www.livredepoche.com/livre/veuf-9782253167310 voir extraits https://www.babelio.com/livres/Fournier-Veuf/281299
    la plus que vive Christian Bobin  https://www.babelio.com/livres/Bobin-La-plus-que-vive/23971
    https://www.babelio.com/livres/Bobin-La-plus-que-vive/23971/critiques
    livre : Jacqueline Jacqueline
    https://www.seuil.com/ouvrage/jacqueline-jacqueline-jean-claude-grumberg/9782021486155

    "Je ne sais pas comment ce livre va être reçu, mais j’ai peur, mais j’ai peur que ce soit un succès. Comment vivre en produisant des succès que le malheur commande ? "
    Jean-Claude Grumberg, dramaturge et écrivain

    https://www.franceculture.fr/emissions/par-les-temps-qui-courent/jean-claude-grumberg
    l'ange aux yeux bleus Thierry Trivès https://www.langeauxyeuxbleus.org/
    "Vous n'aurez pas ma haine"  de Antoine Leiris
    https://www.ladepeche.fr/article/2016/05/09/2340754-aurez-haine-recit-bouleversant-antoine-leiris-perdu-femme-bataclan.html
    "La vie, après"
    https://www.babelio.com/livres/Leiris-La-vie-apres/1174230

tout cela occupera ton temps autour du deuil en te montrant que tu vis des choses "normales"

viens écrire nous raconter
voire participe au groupe
http://forumdeuil.comemo.org/vivre-le-deuil-de-son-conjoint/groupe-whatsapp-skype/

et prends soin de toi comme Odile voudrait !
amitiés

Bonjour, si vous saviez a quelle point je suis touché par votre récit ... je m'appel julien et j'ai 34 ans , ma femme Meghann avais 35 ans cela faisait 16 ans que nous vivions ensemble et tout comme vous , c'était Tout !
nous n'avons malheureusement pas eu d'enfant car nous étions tellement bien et fusionnel comme ca alors nous avons repoussé se projet ...
Cela fais 3 semaines et les journées se suivent et se ressemble ...
merci de m'avoir lu ,
cdl julien

Bonjour Juju44,
Je suis très peiné d'apprendre que toi aussi, tu as perdu ton épouse. Tu as bien fait de venir sur ce forum, ici tu seras écouté, compris et en aucun cas, tu ne seras jugé.
Comme te l'a conseillé Qiguan, ouvre ton propre fil et raconte nous ton histoire, exprime ta douleur, tes sentiments, parle nous de Meghann, si bien sûr, tu en ressens le besoin.
Je suis sûr que tout comme à moi cela s'apportera un peu de réconfort. 
Sois le bienvenu ici, parmi ceux qui sauront t'écouter et possiblement, t'apporter des réponses grâce à leurs vécus.

Amicalement.
Thierry

Bonsoir Thierry,
Je me retrouve totalement dans ce que tu décris. Faire les courses a été un parcours du combattant dans les 1ers mois. Passer devant les rayons des bonbons par exemple, il en mangeait devant la télé le soir, ou tout ce que j'achetais pour lui spécialement, ça a été très dur, les larmes me venaient automatiquement, merci les lunettes noires...  Et je me disais, "plus jamais" et ça qu'est ce que ça fait mal ... Maintenant j'ai un autre automatisme, je ne passe plus dans les rayons en question.
Comme toi les repas sont devenus compliqués, il n'y a plus de partage., d'où le manque d'appétit, de goût.
 Quant aux invitations durant lesquelles tu te sens à part, l'ai vécu dès le début et ça perdure. Oui on se sent spectateur et non pas acteur. On observe les autres, leur bonheur, leur joie de vivre qui nous fait revenir un bond en arrière, du temps ou on vivait comme eux, avec les hauts et les bas d'un couple.
Au fil des mois, tu apprendras qu'on ne peut plus parler aux autres de nos aimés. Ils n'osent pas franchir la ligne rouge tout simplement.
C'est assez rapide, au bout de 2 à 3 mois, la plupart lâchent l'affaire, ils ont l'impression d'avoir rempli leur mission, on n'a pas la même notion du temps hélas.
Mais il reste encore des plus proches, qui continuent à appeler toutes les semaines, mais eux aussi s'essoufflent trop vite.
Au final, je constate qu'après 13 mois, il n'y a que moi qui puisse lui parler, me retrouver avec lui, seule avec lui, vivre des moments priviligiés dans le silence de notre maison comme tu le disais :
Finalement, là où je suis le mieux c’est chez moi, seul, je peux penser à elle et verser mes larmes sans déranger personne…
C'est exactement ça pour moi aussi

Bonjour Loma et Poète endormi,
Je viens de vous lire et encore une fois, savoir que ce que je vis, est connus et partagé par d'autres, cela m'apporte sinon du réconfort au moins un peu de soulagement.
Je prends conscience que les petites choses du quotidien, très banales, auparavant, sont devenu si importantes pour moi, car tout simplement plus possible aujourd’hui.
Je pense, au petit bisou du matin en guise de bonjour, lui demander « ça va, tu as bien dormi ? », Préparer son café, « tu veux manger quoi à midi ?». Toutes les petites choses si banales d’une journée ordinaire, mais qui maintenant me manque terriblement, si je devais n’en retenir qu’une en particulier, c’est la nuit, ne plus senti la chaleur de son corps allongée contre moi, pas facile de trouver le sommeil dans ces conditions.
Je me sens si fragilisé aujourd’hui, j’ai perdu ma confiance, ma joie de vivre, mon optimisme naturel. Odile n’est pas partie seule, une partie de moi est partie avec elle. Mes journées sont maintenant peuplées de « choses plus possibles ensembles ».

Merci à vous amies endeuillées de me faire part de votre vécu, c’est très précieux et apprécier.

Thierry.

Bonjour Thierry,
Après avoir lu les différents messages, je me permets d'intervenir car ton dernier message sur les "petits riens" de la vie de tous les jours qui ne seront plus jamais font écho également pour moi.
Les petites attentions de tous les jours, les "bonjour ma belle, bien dormi" comme tu le dis et tant d'autres choses dont il faut apprendre à se passer.
Bien que les anciens ici nous montrent le chemin, il est sacrément difficile de se passer de sa moitié (au sens propre du terme).
Courage à toi, il ne faut pas lacher

Merci Loma, Phil et Qiguan, pour vos retours.
J'ai lu à plusieurs reprises sur différents fils, des personnes qui écrive, en résumant « je ne vis pas, je suis en mode survie ». Oui, c’est bien quelque chose qui me correspond aussi en ce moment.
Ce qui m’a surpris, c’est la fragilité et la perte de confiance que j’évoquai plus tôt. J’avais toujours eu le sentiment qu’Odile se reposait entièrement sur moi, pour gérer le quotidien et s’était très bien ainsi. Je m’aperçois aujourd’hui combien sa seule présence était essentielle à mon équilibre. Bon sang que s’est compliqué la survie sans elle !

Qiguan, tu m’as demandé dans un président message, si lors du décès de notre fils, je n’avais pas déjà ressenti ce sentiment « d’être seul parmi les autres ». Non rien de comparable, peut-être justement parce que je n’étais pas seul pour faire ce deuil, Odile contrairement à moi, a été formidable à ce moment-là, notre couple a bien résisté à cette épreuve, ça n’est pas toujours le cas.
Le deuil d’Odile est bien plus douloureux et intense que celui que j’ai vécu pour mon fils. Je ne saurais expliquer pourquoi, a par que Ludo avait laisser une lettre dans laquelle, il expliquait le pourquoi de son suicide. Cela nous a permis, d’accepter plus facilement son geste, sinon de le comprendre. Cette lettre, parce qu’elle existe et qu’elle donne une explication, une justification a son choix, à tout changer, je crois, pour faire notre deuil avec plus d’apaisement, même si le manque est et sera toujours là.

Amitiés à toutes et tous
Thierry