Je me rappelle notre dernière nuit ensemble à la maison, dans notre lit. Je me rappelle, c'était la fin du pire week-end de ma vie, nos derniers moments chez nous, dans cet environnement que l'on a créé à notre image et où on etait si heureux. Je me rappelle, depuis le vendredi on nous avait confirmé sa place à la maison de soins palliatifs pour le mardi suivant. Un week-end d'une intensité émotionnelle sans mot, où j'ai été tiraillée, déchirée, hors de moi. Notre bulle allait éclater et cette seule idée me terrorisait. J'ai chambranlé et changé d'idée au moins 100 fois durant ces 3 jours. Je n'arrivais pas à me résigner à le sortir de notre nid d'amour. J'étais démolie... J'avais entretenu notre bulle avec tellement d'ardeur depuis plusieurs mois... Jusqu'à la dernière minute de ce lundi je lui ai dit qu'on n'était pas obligés, que s'il souhaitait rester je trouverais des solutions, je lui ai proposé plein de choses, tout pour ne pas quitter notre maison. Au final c'est lui qui a tranché. Il m'a dit "on ne s'en va pas en prison, si on n'aime pas ça, on n'a qu'à revenir". Bien sûr chéri... Mais prends le temps d'y penser, on en reparle tantot. Je n'étais pas rendu 10 pas plus loin, "Amour, on s'en va, on est venu à bout de ce qu'on pouvait faire par nous-mêmes". Je suis retournée à la visite en bas, décidée à aller de l'avant le lendemain matin, maintenant qu'il avait lui-même approuvé.
Ce soir là, je me suis couchée à côté de mon homme, qui respirait différemment. On s'est tenu la main, collé les pieds, j'ai pris le temps d'apprécier le moment. Mais en dedans de moi c'était la catastrophe. Je savais que le lendemain nous allions quitter ensemble mais que je reviendrais un jour sans lui. Qu'il ne reverrait plus jamais ces lieux qu'il aimait. Que c'était notre dernière nuit ensemble dans notre bulle d'amour. Que c'était le début de la fin... Savoir tout ça à des avantages et aussi quelques inconvénients.
Ironiquement c'était le week-end de Pâques.
Son coeur a cessé de battre 5 jours plus tard... Dieu que j'ai aimé cet homme. Et je l'aimerai au delà de mon dernier souffle.