Tes enfants reviendront, quand tu seras consolidée et si tu évites le naufrage.
On ne peut pas changer le passé mais on peut toujours agir sur l'avenir. Je sais que c'est difficile quand on est au fond du gouffre mais il faut bien essayer de reprendre un certain contrôle. La méditation m'a beaucoup aidé. Par méditation, j'entends par là le fait de se poser des questions existentielles sur la vie, sur l'avenir, sur le spirituel, pas des questions sans réponses. Pour les questions sans réponses (pourquoi il ou elle est morte, qu'est ce qui se serait passé si j'avais fait ceci, etc...), à un moment, il faut arrêter une théorie, même si elle n'est pas confirmée, et se la tenir pour acquise, du moins un temps. L'idée c'est de ne pas tourner en rond avec des questions sans réponses.
La méditation m'a conduit à arrêter l'hypothèse que l'âme existait forcément au-delà du corps (ce qui a balayé toutes les considérations matérialistes et la conception que j'avais du monde autrefois). Partant de ce principe, l'âme de l'être aimé est quelque part. Où, que fait-elle, comment ça marche ?
Ça, ce sont aussi des questions sans réponses de notre vivant et je n'ai pas la prétention ni les capacités de creuser vers ce chemin-là, je dis juste qu'il y a quelque chose au dessus du corps et du matériel.
Partant de ce même principe de base, notre âme, elle, souffre terriblement certes, mais elle a encore des choses à faire dans notre corps sinon elle serait, elle aussi, parti. J'aurais bien aimé partir mais si je reste c'est que j'ai encore des choses à faire.
Ou alors en prenant les choses sous un autre angle : puisse que je reste, je vais faire encore des choses.
L'un dans l'autre j'en suis arrivé à la conclusion qu'il fallait faire des choses.
Alors évidemment, avec le chagrin, la brume qui obscurcit notre lucidité et un cerveau retourné, l'action est difficile et ralentie.
D'un autre côté, si je souffre parfois et si tout est si confus, j'ai acquis une autre vision du monde et c'est peut-être une force. Ou peut-être juste une théorie fumeuse que mon cerveau malade a élaboré histoire de se donner une raison de rester ! Je n'en sais rien, je pagaye et je n'aurais pas la réponse de mon vivant !
Personnellement je n'espère pas rester trop longtemps et moisir des années dans un appartement qui pue avec un vieux chat ou dans une maison de retraite à regarder les rediffusions de l'inspecteur Derrick, mais ça, ce n'est pas moi qui déciderai et c'est un autre débat.
Enfin, j'ai aussi une sorte d'héritage laissé par l'être aimé que je peux pérenniser. Peut-être même que cet être aimé ou autre chose m'aide un peu.
En conclusion, tu es là, tu restes, comme moi, je ne prétends pas qu'il y a un grand tout qui diligente l'existence et le destin de chacun, d'ailleurs ça je n'y crois pas, mais s'il est impossible de répondre à la question "pourquoi il ou elle est parti(e) ?", on peut répondre à la question "pourquoi je reste ?"
Pour les enfants, les proches, parce qu'on a des choses à faire et à apprendre. Pour certains c'est moins évident et il faut trouver les raisons qui font qu'on reste, ou alors ça veut dire qu'il faut agir pour que ces raisons existent.
Si tu as de temps en temps un sursaut, c'est tout de même positif, peut-être que ces sursauts vont devenir plus rapprochés dans le temps, plus longs, pour passer de l'état de simples "sursauts" à celui de situations plus durables, espacées de moments de peine évidemment ou d'angoisse, ou de doutes... Peut-être faut-il profiter de ses sursauts pour agir dans ces moments-là, pour réfléchir, méditer, ne pas laisser filer ces moments et les utiliser au mieux, un peu comme quelqu'un paralysé qui, de temps en temps, pourrait se lever. Ces moments sont précieux, déjà. Ensuite, il faut espérer qu'ils deviennent donc plus nombreux, plus longs et plus courants.
Mais dans tous les cas, si tu restes c'est que tu as des choses à faire ou que tu peux faire des choses !
Hé, on ne demande pas de sauver le monde et de combattre Donald Trump, mais de faire des choses, quoiqu'elles soient ! C'est tout simplement exister au minimum, avec ses angoisses, son malheur, mais aussi une humanité plus développée et peut-être d'autres capacités.