La nature s'éveille, les jours rallongent, les oiseaux chantent...Les gens se promènent en famille, les enfants crient dans les jardins; bref, la vie continue...Je vis mon troisième printemps depuis le départ de mon amour, et, une fois de plus, je réalise que , contrairement à ce que j'avais pensé, ces belles journées ensoleillées qui reviennent ne me font pas particulièrement de bien. Au contraire...
Aujourd'hui, je ne peux que constater, en repensant à la belle époque du bonheur, à quel point ma vie a changé...
Début de week-end: Je me suis réveillée vers 8h par les chants des oiseaux. Les rayons du soleil essayaient de se frayer un passage à travers mes stores. Eh bien, me suis-je dit, il fait beau. Je vais me lever et je profiterai de ma journée...Oui mais, profiter ? Comment ? Il y a 3 ans, on se posait même pas la question, on se levait, on déjeunait et on planifiait notre journée: une marche, une balade ou simplement un passage au marché. On était heureux d'aller boire un café sur une terrasse de bistrot qui revivait...Puis on faisait nos courses ensemble,on rencontrait des amis, la vie était belle, tout simplement... Ce matin, j'étais levée assez tôt, le soleil inondait ma maison. J'ai pris mon petit déjeuner, sans joie, debout dans ma cuisine,puis j'ai bu mon café en tapant sur mon ordinateur. " Tiens" , me suis-je dit, " je vais aller faire qqs courses"...Et, tout de suite après : " Des courses, pourquoi faire ? J'ai bien assez de restes dans mon  frigo...Besoin de rien..." Et j'ai commencé à traîner d'un coin à l'autre de ma maison, m'asseyant, tantôt à mon ordi, tantôt dans un fauteuil, feuilletant le journal sans joie...A nouveau, le silence de la maison m'a paru insupportable. Alors, j'ai mis de la musique... Je me suis dit qu'il faudrait faire un peu de ménage...et puis, non pourquoi faire ? Avant, j'adorais remettre mon ménage en ordre le samedi matin, car ainsi j'étais libre de cette corvée pour le week-end. Et puis, mon amour me faisait toujours une petite remarque qui me faisait plaisir, du genre  Ouh Ca sent le propre, chez nous!...Maintenant, que je fasse le ménage ou non, personne ne le remarque, alors...
A midi, j'ai grignoté un petit reste sur un coin de ma table ( je pense que c'est la 3ème fois de la semaine que je mange le même repas!!)Et puis...je me suis forcée à aller me balader ...seule...avec ce poids sur le coeur...Mais bon, il faut bien sortir, il faut profiter de voir cette belle nature qui renaît, même si au fond de moi, j'en crève...A la patinoire, il y avait un tournoi de hockey et plein de monde. Je m'y suis arrêtée, j'ai rencontré des amis, j'ai bu un verre sur la terrasse du restaurant. Il faisait chaud, ç'aurait pu être si agréable...Les gens que j'ai rencontrés me parlaient avec insouciance. Tous étaient de bonne humeur et bien sûr, tous se disent que moi, plus de deux ans après, je dois avoir repris le dessus...S'ils savaient...! Bien sûr, j'ai " repris le dessus", comme chacun le souhaite, mais s'ils pouvaient imaginer ce que signifie " reprendre le dessus" quand on a perdu son essentiel..." Reprendre le dessus", c'est juste avancer malgré tout, c'est juste se forcer à faire des choses dont, le plus souvent, on n'a pas envie, c'est juste essayer de redonner un nouveau sens à sa vie parce qu'on n'a pas le choix...Quand je regarde en arrière et que je mesure le chemin parcouru, je me dis que oui, j'ai avancé, irrémédiablement, mais est-ce que j'avais vraiment envie de poursuivre ma vie de la façon dont je vais la poursuivre ? J'ai eu la force de me fixer de nouveaux objectifs: vendre ma maison, prévoir un séjour en Afrique...Mais finalement, si la vie m'avait épargnée, n'aurais-je pas préféré finir ma vie dans ma maison en compagnie de mon Jean-Da adoré ?
Sans doute...Tout ce que je sais, c'est que la vie dans ma maison sans mon Jean-Da n'a plus la même saveur...Les chants des oiseaux ne sont plus les mêmes, le soleil ne brille plus de la même façon... Aujourd'hui, je ressens terriblement le vide à mes côtés... Et, je n'ai pas de projets pour ce soir. Ce sera télé, plateau-télé et dodo... Et demain ? Sans doute une belle journée ensoleillée à aller me balader...seule...
Suzy

Le bonheur ? C'est ces petits riens, en apparence insignifiants qui font que l'on se sent bien, c'est se réveiller à deux le matin, c'est un regard, un sourire, un mot, un échange...C'est faire des projets, c'est se réjouir de se revoir, c'est le ( la) sentir présent(e) même quand il(elle) n'est pas là, c'est lui raconter notre journée le soir, c'est parler, rire, s'aimer..., c'est être DEUX...
Non, l'être humain n'est pas fait pour vivre seul. J'écoute en ce moment une chanson de Leny Escudero qui correspond tout-à-fait à mon état d'esprit du jour : " Etre seul, c'est vivre seul au milieu de la foule; et ça fait mal, tu sais, ça fait comme une boule...Au milieu du désert, on est pas seul tu sais, on est perdu, c'est pas pareil..."
Suzy

chère Suzy,
Beaucoup d'émotion en te lisant... beaucoup de tristesse de savoir que cette douleur que je ressens d'autres la vivent
J'aurai pu écrire tout ce que tu as écrit, cela ne te rendra pas ton être aimé mais peut-être que ce partage sera un peu de réconfort
Pour moi la vie a basculé en quelques minutes un doux soir de septembre, il y a 18 mois. C'est le deuxième printemps sans lui, mais l'absence et l'impossibilité de le revoir, de lui parler et de le serrer dans mes bras sont des douleurs insupportables pas faciles à partager même avec des amis bienveillants qui poursuivent leur vie, moi j'ai plutôt l'impression de survivre
pas facile de partager avec les autres ce que l'on ressent, peur d'être rabat joie, impression d'être sur une autre planète
Avec Alban une soirée où rien n'était prévu, un we libre c'était bien, selon l'envie il y avait toujours des bons moments, ces petits riens insinifiants qui font les plaisirs de vivre
ce que j'aimais n'a plus le même gout ni la même couleur: pas envie de faire le ménage, plus envie d'aller gratter le jardin et les fleurs, de décorer la maison, de ballader...tout peut attendre car j'y vois mal le sens
je pense à toi et à tous ceux qui n'ont pas écrit mais qui vivent la même épreuve
marie7

Nous qui avions hâte que l'hiver se termine enfin, que les beaux jours arrivent, je redoute maintenant ce moment, ces journées interminables car toutes les balades en vélo, les festivités, les barbecues, les baignades, nous ne les ferons plus jamais ensemble et il faudra que je fasse semblant, pour les enfants. J'aimerais qu'il pleuve tous les jours pour avoir le prétexte de rester à la maison devant la télé et regarder des stupidités, comme tu l'as dit Elodie (à propos, j'habite à Lyon aussi).
Pour moi, le printemps n'aura plus aucune saveur, ni rien du tout d'ailleurs.
Je vous embrasse tous et bon plateau télé !
Karine

3 mois aujourd'hui...c'etait un samedi egalement...sauf qu'aujourd'hui comme vous dites ça sent le printemps, le renouveau. et franchement cette vie a apprivoiser sans lui, et bien je n'en veux pas.

j'aurai aimé que mes proches me parlent de lui aujourd'hui, qu'ilsme  disent: nous aussi on se souvient, mais non ils se sont appliqués a parler de tout sauf de lui, sauf de cette date. Quelle tritesse, quel sentiment de solitude absolue... il n'y a que vous pour comprendre

demain sera le debut du 4eme mois sans lui, 4 eme mois d'une vie sans saveur

sofi

Chère Susy,
moi aussi, je ressens beaucoup d'émotion en te lisant. Moi aussi, j'aurais pu écrire ce que tu écris. Par contre, une grande différence, c'est que je ne vis pas seule. J'ai encore 2 de mes 3 enfants qui vivent avec moi.
On va passer notre 1er printemps sans lui, puisqu'il nous a quitté le 1er Novembre. c'est cette période qu'ont choisi mes 2 premiers petits fils, pour naître. Des jumeaux que je vais devoir accueillir seule, sans leur papi.
Bon courage à tous.

Autre belle journée ensoleillée...c'est dimanche cette fois...le dimanche, c'est encore pire que le samedi...Le samedi, on peut se forcer à aller faire des courses, les rues sont animées, on risque de rencontrer du monde...Le dimanche, c'est la pire des journées quand on est seul(e). A qui téléphoner en cas de blues ? Tout le monde est en famille ou en couple; chacun se ressource à sa façon et c'est bien normal. Je me souviens que nous-aussi, on aimait être tranquilles le dimanche...Depuis le début de mon deuil, je dois reconnaître que j'ai été très entourée par mes amis. J'ai souvent été invitée; on m'a beaucoup téléphoné...oui , mais rarement ( pour ne pas dire jamais!) le dimanche! Si je faisais quelque chose le dimanche, c'est que c'était moi qui l'avais organisé ( invitation, sortie, balade...).
Et ça demande de l'énergie d'organiser des activités pour ne pas être seule...Alors, je laisse aller, en sachant que je serai seule et qu'il faudra bien que je fasse avec...
Qu'il me tarde maintenant d'être en juillet et de pouvoir recommencer cette nouvelle vie que je me suis choisie...Etre en Afrique, complètement hors contexte. Mener une vie que je n'aurais jamais connue avec mon Jean-Da, être dans un environnement dans lequel il n'a pas sa place...Ne pas me dire à chaque coin de rue " tiens, il m'attendait toujours ici..." ou " on adorait aller manger là..."
Aujourd'hui, dans ma maison, je ne me sens déjà plus vraiment chez moi. J'y ai entamé le dernier printemps, je vais encore juste pouvoir y vivre le tout début de l'été...Je ne vais pas dire que mon coeur ne se serre pas en me disant que je tire un trait sur les 13 ans de bonheur que nous y avons vécu, que je vais partir vers des horizons nouveaux où j'aurai perdu tous mes repères...
Pour moi, c'est une sorte de défi. Je veux me donner une chance de recommencer qqch de nouveau, qqch de susceptible de m'apporter de vrais plaisirs. Et si ça ne m'apporte pas ce que j'attendais, je sais que je peux revenir en Europe, mais dans un cadre complètement différent: un appartement dans une autre commune, un mobilier différent que j'aurai choisi seule, un voisinage différent. Mon amour sera toujours là, son souvenir restera à jamais dans mon coeur, mais je n'aurai plus constamment le sentiment de le voir surgir au coin de la maison, de le revoir sur la terrasse entrain de cuire son pain dans son four à pain, de l'entendre siffloter en coupant son bois...Au début, ce sentiment me rassurait...Aujourd'hui, cela m'oppresse...Cela rend le vide à mes côtés de plus en plus insupportable...Et pourtant...Cela fera 27 mois la semaine prochaine...
Je vous embrasse chers frères et soeurs de douleur qui, comme moi, passez un triste dimanche à faire le bilan de votre vie...
Suzy

Bonjour Suzy et vous tous,

Nous avons souvent échangé Suzy au début de ton deuil, car j'avais aussi perdu mon mari brutalement quelques mois plus tôt, je ne sais pas si tu t'en rappelles.

J'ai beaucoup avancé comme toi, j'ai été très occupée. Bientôt 3 ans que je suis seule et celà devient de plus en plus pénible, j'ai des jours euphoriques et d'autres au plus profond du trou. Je sais aujourd'hui qu'il me sera très difficile d'avancer toute seule. J'aimerais rencontrer quelqu'un un jour, le lendemain je n'en ai plus du tout envie, toujours la même chose : ces montagnes russes qui nous font souffrir, je me demande si l'on peut en guérir un jour.

Moi je vis avec mon fils de 18 ans, qui est devenu schizophrène suite au décès de son père : la double peine en quelque sorte. Je me dis toujours que s'il ne vivait pas avec moi, la vie me serait plus légère, mais en fin de compte je n'en sais rien, je suis une plaie à vif depuis la mort de Bruno.

Je suis toujours en plein décalage avec ceux qui m'entourent, ils vivent joyeux au présent, alors que ma vie à moi s'est arrêtée le 21 avril 2009.

Karine, on ne se connaît pas mais j'habite à côté de Lyon, si tu veux que l'on se rencontre un jour.

Je vous embrasse tous, à vous lire.