Le vide, le vide, le vide
tout est gris, plat,
pour contrecarrer ce néant, je vous copie un texte que j'avais publié sur un blog en octobre, quand mes souvenirs d'Emmanuel étaient tout frais, quand je le sentais encore là, presque présent
aujourd'hui, presque 4 mois, tout cela me semble irréel
comme un reve qui hélas ne m'aide pas à vivre
et je n'arrive plus à écrire
ressuciter ce vieux texte, c'est aussi trouver une justification à ma peine, pouvoir me souvenir que oui cet homme m'aimait
Muriel
i]C'est un samedi soir sans mes enfants. Notre dernier sans eux, l'avant-dernier tout court. Le 16 septembre.Il a fait un temps radieux et chaud toute la journée, une de ces journée de fin d'été qui retient la lumière, et on sait que c'est une des dernières, alors on en goûte chaque instant avant de plonger dans l'automne.. Tu étais déjà resté tard, trop tard, pour le thé. Tu revenais vers 21 heures. Alors je t'ai bâti une cabane.
Il allait faire frais et je voulais que nous restions dehors. Sur les côtés du balcon, j'ai tendu la couverture verte, la rose, le plaid brun que nous avions choisi ensemble. Au sol, j'ai mis toutes les couettes propres de la maison. Des bougies . Les coussins bleus et dorés du vieux canapé. Par-dessus, la couette neuve de mon lit. Avec ma jupe violette.
Lorsque tu es revenu, tout était prêt ! Tu as écarquillé les yeux comme devant un immense cadeau à Noël. Tu étais pressé d'essayer les coussins, j'ai même pensé que tu allais sauter dessus. En fait, tu as plongé dedans.
On s'est blottis comme des gamins, sous la couette bien au chaud. Cocotte s'est glissée discrètement sur nos pieds mais elle ne nous gênait pas. Les bougies se reflétaient dans la porte vitrée, multipliant le reflet des petites flammes dansantes. On a fumé. On a regardé les étoiles et je t'ai réexpliqué la constellation du Cygne mais tu ne voyais pas les ailes, ni la tête. On a parlé tout bas, de tout, de rien, surtout de rien. On s'est tus. Tes yeux se fermaient tout seuls. De temps en temps l'un de nous chuchotait : "Qu'est-ce-ce qu'on est bien!".
Tu es resté tard. Tu disais : "Tu es extraordinaire, tu es une magicienne", et tu retardais le moment de partir. Tu es resté trop tard. Vers minuit, tu as renfilé tes gros godillots. J'avais mal, à chaque fois, de te voir lacer tes chaussures. D'ailleurs, la semaine suivante, tu as acheté des bottines à fermeture éclair.
Une dernière clope, puis nous nous sommes quittés précipitamment, presque sans parler.Tes yeux brillaient trop fort et moi aussi j'avais les larmes aux yeux mais je ne voulais pas te le montrer. Tu espérais revenir, si Teresa dormait. Elle était très réveillée alors tu n'es pas revenu. J'ai refusé que tu m'aides à ranger : une bonne magicienne ne divulgue pas ses secrets. ! En rentrant, tu m'as envoyé un sms : " Même pas froid. Sans doute étais-je encore revêtu du doux manteau de bien-être que tu m'as permis de porter ce soir. Bonne nuit."[/i]