FORUM "LES MOTS DU DEUIL"

Comprendre et vivre son deuil => Vivre le deuil de son conjoint => Discussion démarrée par: mirele le 10 décembre 2012 à 18:27:51

Titre: épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 10 décembre 2012 à 18:27:51
Bonjour à tous,
Me revoilà après quelques jours d'accalmie. J'ai continué à venir sur le forum. Mais je n'ai rien écrit. Pas la force, pas le courage. Je crois que j'entame une nouvelle phase de mon deuil : je suis exsangue, lessivée. Je ne ressens plus rien. Ni la souffrance, ni le manque, ni le désespoir, ni la colère : rien !
Le vide absolu dans mon coeur.
J'ai parfois une velléité d'entreprendre un truc, du rangement, et puis je m'arrête, fatiguée avant d'avoir commencé.
Avec les autres, je n'ai rien à dire. Même parler d'Emmanuel ne m'intéresse plus. J'en ai marre de ressasser la même histoire affreusement courte et triste de nos six petits mois de bonheur. mais je n'ai absolument rien d'autre à dire.

L'une d'entre vous a écrit qu'elle avait un cerveau de poule. j'ai le sentiment d'avoir un un cerveau d'huître. Je reste assise là, vide et bête, et sans conversation ni mémoire ni concentration... Et je suis prof, alors devant les élèves ....

Est-ce que vous croyez que je commence une vraie dépression ? ou bien est-ce normal ?

Je commence à m'inquiéter, ma confiance en moi en prend un nouveau coup, je me sens si bête !!!!!

Merci

Muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: chrisam le 10 décembre 2012 à 18:36:18
Que te dire, moi-même je suis dans un état pas possible
2 mois qu'elle décédée après 30 ans de vie ensemble 24h/24

LE GOUFFRE

Je voudrais t'aider mais pas possible pour le moment
D'autres vont venir te soutenir

Courage, courage et encore du courage
Mais ces personnes qui sont ici, vont te dire la même chose mais ça a plus de valeur, car nous sommes dans le même état d'esprit que toi et nous savons ce que perdre un proche provoque en nous.

Christian
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: clara le 10 décembre 2012 à 18:51:57
Chère Muriel,
oui tu es normale ... j'ai fait un fil, il y a longtemps "impression d'être de glace" page 7 de "vivre le deuil de son conjoint"
je ne pense pas que ce soit une dépression (mais je ne suis pas médecin ...)
tu es juste fatiguée, exténuée de toutes les émotions qui se bousculent ... alors, ton corps,ton cœur font riposte et te font une carapace en acier pour te permettre de "souffler"

Ça doit être très dur d'enseigner dans ces conditions ... très très dur

tu pourrais peut-être penser à te faire arrêter jusqu'aux vacances  :-\

j'enseigne moi même un sport de loisir, mais je ne peux pas pour l'instant ... je n'ai pas l'énergie pour transmettre, pour partager ...

je te souhaite, une nuit de réconfort et (je suis fan de bougies en ce moment) j'allumerai une bougie à 19h pour toi  :)

Je t'embrasse

Claire
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: ROUBOU35 le 10 décembre 2012 à 18:58:28
Bonsoir

je peux te rassurer en te disant que j'ai aussi ressenti ce vide et cette absence d'émotion il y a quelques temps et me posais des questions devant le flot de pleurs que je lisais ici,...et puis c'est revenu, sans savoir pourquoi et la douleur avec.
La fatigue permanente aussi , peut-être due aussi à un sommeil entrecoupé.
Et donc un manque de concentration, pas envie de lire, des oublis, obligée de tout noter etc..et parfois du mal à m'exprimer
 Et forcément dans ce métier où il faut toujours avoir une pêche d'enfer, être en quelque sorte sur une scène de théâtre, sans compter cette période de conseils de classes , fin de trimestre, réunions de parents... c'est épuisant.
Cela me semble normal. Mais pour savoir si c'est une dépression, il vaut mieux consulter ton médecin.
Viens ici ressasser ton histoire, je ne l'ai pas lue et si cela te permet d'évacuer encore, ce forum est là pour ça.
Courage pour cette dernière ligne droite avant un peu de repos.
Dominique

 
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: melusineb le 10 décembre 2012 à 19:03:52
Muriel,

Je pense que ce que tu éprouves est tout à fait normal. Après la mort de mon mari, je me suis longtemps sentie hébétée, complètement vide et exténuée. La moindre activité, même anodine, m'était insurmontable. Le mot même de 'fatigue' ne me paraissait pas adéquat pour décrire cet épuisement total, à la fois physique et intellectuel, que je ressentais, et que rien ne semblait pouvoir améliorer. J'étais absolument incapable de me concentrer. Lire ne serait ce que deux lignes m'était impossible. Regarder un film jusqu'au bout également. J'avais la nette impression que je n'avais plus de cerveau, que toutes mes facultés intellectuelles avaient définitivement disparues. J'aurais été incapable d'enseigner dans cet état, je te trouve vraiment très courageuse.

Comme toi, je me sentais aussi souvent anesthésiée. Je n'éprouvais pas le besoin de parler avec les autres, je n'avais rien à leur dire.
Cet état a duré plusieurs mois en ce qui me concerne. J'en suis sortie très progressivement, sans vraiment m'en rendre compte - je ne me suis pas réveillée un matin en me sentant 'en forme'. J'ai ressenti le besoin de plus parler avec les autres, mais seulement dans un second temps.

Le deuil est vraiment quelque chose d'intime, et son déroulement est propre à chacun. Mais je suis passée par une 'phase' très similaire à ce que tu décris. Je me souviens que j'étais très inquiète, je n'en voyais pas la fin, je me disais que je passerai le reste de ma vie dans cet état, et qu'il fallait que je m'y fasse. Et cette pensée me désespérait.

Je voulais juste que tu saches que cette 'phase' passera avec le temps, que tu n'es pas la seule à la traverser, et qu'elle est normale.

Je t'embrasse


Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 10 décembre 2012 à 19:49:24
Oh merci,

Vos réponses me réconfortent un peu. Un peu seulement. Même faire une phrase, c'est dur. Au clavier, j'inverse sans arrêt des lettres et je suis obligée de me relire, j'ai l'impression d'être dyslexique.

Ce qui m'inquiète le plus est cette absence d'émotions. Même le chagrin, bof, je ne le ressens plus vraiment.

Quant à m'arrêter... je ne sais pas. J'ai déjà été arrêtée il y a une semaine, en fait je n'ai repris que depuis jeudi... alors j'ai travaillé 3 jours, et quand je dis travailler ... Pendant ma semaine d'arrêt, j'ai eu deux jours d'intense douleur, puis je me suis réveillée un matin, j'étais comme ça...j'ai dormi sans arrêt, 10 heures par nuit plus une sieste. Par contre, depuis que j'ai repris, je ne dors plus ou très mal.

Peut être que j'angoisse inconsciemment de retourner dans le collège où mon homme travaillait avec moi, où nous nous sommes rencontrés ...

C'était magique en fait.
notre histoire qui s'est construite petit à petit, à l'insu des collègues, qui ne savaient rien (nous étions un couple illégitime)

Il s ne savaient rien au point qu'ils ont appris notre relation...le matin de sa mort, quand je la leur ai annoncée : "Ah, mais comment tu sais ce qui est arrivé à Emmanuel ? -- Je sais parce que j'étais avec lui "

Je devrais peut être demander une mutation ? Mais on dit bien qu'il ne faut pas prendre de décisions hâtives après un deuil ... Je vois le mal que j'ai quand je fais les courses... je mets deux heures à choisir entre des escalopes de poulet et des escalopes de dinde, ou alors choisir entre deux paquets de gateaux, suuuuper compliqué pour moi en ce moment

Je reste devant les rayons, immobile en apparence mais dans ma tête, c'est chaos et bataille pour me décider !!!!!!!!!! pathétique

Encore merci de votre soutien

Je vais essayer de regarder "L'impossible Monsieur Bébé", il paraît que c'est un film anti déprime, mais je n'arrive pas à suivre un film entier !!!!!!!!!!!!

Je vous embrasse tous,

Muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Corail le 10 décembre 2012 à 20:09:36
Bonsoir Mirele,

Je suis "malheureusement" exactement dans le même état que toi.
Je ne ressens rien, absence d'émotion, plus envie de parler de mon histoire aux autres, aucune envie.

Le pire, comme tu le dis, c'est cette absence d'émotion, de chagrin. Je dirais même que c'est ça qui est désolant que le reste !

J'en ai parlé à ma psy (sujet de notre dernière séance), je lui ai en gros dit "c'est comme si mon deuil était fini, comme si j'avais fait une croix sur tout ce qui a existé, comme si ça n'avait jamais existé... alors que je devrais être triste, me dire qu'il n'est pas là quand je m'endors, etc."... Elle m'a dit que j'étais encore un peu dans la phase de choc. Chouette, au bout de 4 mois, tout va bien...

Elle m'a dit que ça allait me rattraper, que je n'étais pas insensible et que qq part, c'est parce que lui il n'avait montré aucune faille dans la maladie et que donc, inconsciemment, je me suis dit que c'était à moi d'être forte maintenant...
Tout ça est inconscient bien sûr, puisque je préférerais nettement avoir des émotions !!!

Bref, encore un truc étrange du deuil, dans lequel on ne se retrouve pas vraiment... mais qui fait qu'on avance petit pas, par petit pas...

Bon courage à toi...
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: dan43 le 10 décembre 2012 à 22:11:59


  Chère Muriel

  Le deuil passe par différentes phases,c'est mon ressenti au bout de trois mois;après l'anesthésie ,le chaos  intérieur,le désespoir, et ce vide sidéral,quand on réalise tout à coup qu'on ne reverra plus ce qui donnait un sens à notre vie...Ce soir je suis allé faire des courses au magasin du coin.mais je n'arrive pas à penser autrement qu'en terme d'absence "elle aimait çà,j" aurai pris ceci pour elle..." Bon sang ,rien ne me tentait,rien!Tout me parait tellement insignifiant,surtout qu'elle a partagé ma vie pendant 47 ans...et que tout me manque :sa voix, son sourire,son odeur ,ses yeux sa peau...Depuis 2 ans qu'elle était malade,je me suis occupé d'elle comme d'un bébé,et on a eu le temps d'avoir encore quelques moments heureux. maintenant ,comme toi ,je sens l'absence,et tout a perdu intéret... les autres ,à part des amis, en petit nombre ,je les regarde comme des aliens,  Mais, si j'ai bien compris, en lisant l'expérience de nos compagnes et compagnons d'infortune,il y aura des "avancées" vers des jours plus doux.. Tu es dans l'oeil du cyclone,mais tiens le coup!

  je ne vais pas te souhaiter de te remettre à souffrir, mais de trouver un peu de paix...

   je me permets de t'embrasser,

  Daniel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 10 décembre 2012 à 22:39:52
"c'est comme si mon deuil était fini, comme si j'avais fait une croix sur tout ce qui a existé, comme si ça n'avait jamais existé... alors que je devrais être triste, me dire qu'il n'est pas là quand je m'endors, etc."... Elle m'a dit que j'étais encore un peu dans la phase de choc. Chouette, au bout de 4 mois, tout va bien...[/b

Chère Corail,
Merci de cette nouvelle "réconfortante", si je puis dire. Cela fait 2 mois et demi, les 2 mois et demi les plus longs et les plus difficiles de ma vie ... et je serais encore dans la phase de choc ? Mon Dieu, mais je vais en avoir pour des années de ce deuil ! Je n'y arriverai jamais, c'est trop dur.

et puis je n'ai pas envie d'y passer des années : l'homme que j'aimais s'est suicidé au bout de six mois de notre histoire d'amour, il a tué sa femme et il est parti avec, alors que la veille nous faisions encore tous les deux des projets de vie commune.

Alors je n'ai pas envie de passer le reste de ma vie en deuil, je veux vivre ! C'est lui qui est parti, lui qui m'a abandonnée avec mon chagrin, la colère, la culpabilité et mon amour immense dont je ne sais ^plus quoi faire.

Comme le dit Daniel "tout a perdu intérêt...les autres, je les regarde comme des aliens".

Je suis alien de partout en fait. Alien aux yeux des autres qui ne comprennent pas ce que je ressens. Alien au regard de mon histoire d'amour qui s'est si vite et si mal et si absurdement terminée. Alien aux yeux de l'homme qui m'aimait et qui m'a pourtant  "éjectée" de sa vie en choisissant de mourir avec sa femme.

Alien à mes propres yeux. Car je ne me reconnais ni dans cette colère qui me guette ce soir, ni dans cet immense chagrin, ni surtout dans cette absence d'émotions.

Cette anesthésie, alors c'est que je recule ? je reviens à la phase de choc ? mon organisme s'est endormi en attendant la prochaine vague de douleur ? Comme le dit Corail : "chouette, tout va bien" !!

Bon je vais avaler un somnifère et essayer de dormir cette nuit.
Merci encore de tous vos soutiens, mes compagnons d'infortune. J'espère un jour que moi aussi je pourrai réconforter, mais pour l'instant je crois que c'est impossible !

Une nuit paisible à tous ceux qui peuvent, je souhaite,

Muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: cathy le 11 décembre 2012 à 10:59:33
Bonjour Muriel,

Je crois que cette absence d'émotions qui te fait si peur est normale, ton organisme se protège, le choc a été rude. Il va falloir du temps pour peu à peu assimiler ce qui s'est passé.
Oui, cette phase où l'on se sent anesthésié existe, mais j'ai fini par penser qu'elle était salutaire, même si on se sent désorienté.

 Notre esprit dispense les émotions au compte goutte, ouvrir "en grand" la vanne de la souffrance  si tôt après la perte de l'être aimé serait bien trop violent. Essaie d'accepter cet état, il n'est que temporaire, et non!  tu ne perds pas la raison ! Bien au contraire, les barrières se sont mises en place pour la protéger.

Dans ce que tu écris, je perçois beaucoup de colère et de la rancune aussi.
Ces sentiments sont normaux, il va falloir que tu apprennes à les gérer petit à petit, un jour après l'autre et ensuite alors ton chagrin pourra prendre sa place.
Bien sûr, il y aura encore des moments de révolte, de colère, mais peut être pourrais tu consulter un psy que t'aiderait à exprimer tout ça ?


Ce n'est là que l'expression de ma propre expérience, et dans ce domaine, chacun est différent et je ne prétends détenir aucune clé, ma vie quotidienne, hélas en est la preuve.

 Accepte cette anesthésie Muriel, elle est "bonne" pour toi.

Je t'embrasse
Cathy

Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: chrisam le 11 décembre 2012 à 23:40:26
Pour ma part, toute la journée, j'ai un noeud au ventre, une certaine oppression sur l'estomac, le foie

Ça va passer ?
Parfois, je pense que si pouvait déclencher cette p..... de maladie de cancer qui m' a enlevé AM, je pourrai la rejoindre

Voila 8 semaines, et suis toujours dans le creux de la vague, je ne remonte qu'un tout petit peu mais sans jamais émerger
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Corail le 12 décembre 2012 à 14:29:07
Oh Chrisam !
Je te trouve hyper dur...
Citer
Parfois, je pense que si pouvait déclencher cette p..... de maladie de cancer qui m' a enlevé AM, je pourrai la rejoindre
Vouloir la rejoindre je peux le concevoir mais vivre le cancer, c'est vraiment dur ! Vivre la chose qui t'a enlevée ta femme, faire vivre ça à tes proches (la maladie), es-tu sûr ?
En ce qui me concerne, mon mari est également mort d'un cancer, j'ai vu la progression de cette saloperie et sincèrement, je ne le souhaite à personne et surtout pas à moi même car je me dis que pour l'entourage, c'est revivre une 2ème fois la même chose et pour toi, c'est de la souffrance...
Quitte à choisir, je choisirai qq chose d'autre pour partir ;)
Je ne remets pas en cause la finalité qu'est de mourir car ça, on peut en avoir envie, c'est bien normal quand on se retrouve seul sans aucun point de repère, avec l'absence... mais un cancer... ça NON !!!
Voilà, je tenais juste à te faire partager mon point de vue !
Courage à toi, un pas après l'autre... (même si l'envie n'est pas vraiment là)
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: alsy le 12 décembre 2012 à 15:37:24


Trop affreux de vivre les douleurs du cancer...
de voir souffrir les gens ainsi.... :'(
non faut pas souhaiter...cette s....... e de maladie...
j'ai encore les images dans la tête... :-\
quand il me disait "je n'en peux plus" ...chaque jour"
pourtant il se battait...
NON Chrisam...t'as pas le droit de souhaiter cela... :o
suis d'accord avec Corail...
trop souffrir....
ne souffre t-on pas déjà assez ???
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: chrisam le 12 décembre 2012 à 18:51:15
Je vous comprends, mais j'ai envie de la rejoindre, elle me manque tellement
Au risque de me répéter, depuis 30 ans nous étions ensemble 24h/24
Celui ou celle que le conjoint part à 7h le matin et rentre à 18h, il a du chagrin, je ne dis pas le contraire, mais nous, c'était 24h/24, c'est le cas de le dire : il me manque ma moitié. C'est le vide, le néant.
Encore une fois, chacun souffre.

Le deuil dépend du degré d'attachement à la personne disparue, de la nature de la relation avant le décès, du degré de dépendance par rapport à cette personne et aussi du temps de l'accompagnement pendant sa maladie. Nous ne faisions qu' UN

Encore une fois, tout le monde souffre d'un décès, et je ne veux surtout pas dire que le mien est plus important que les autres.
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Corail le 12 décembre 2012 à 19:12:02
Chrisam,

Je pense que les personnes qui lisent ce forum savent que tu étais avec ta femme depuis 30 ans, 24h sur 24 ensemble.
ça fait un moment que j'avais envie d'écrire ici ou d'ouvrir un post pour le faire et pour dire que malheureusement, le nombre de d'années ne fait en rien la souffrance, ni même le fait que tu aies été 24h/24 avec elle.
Tu sais, on aura chacun notre vision des choses sur la souffrance des autres. On va estimer que la notre est plus importante que celle des autres, selon notre histoire, notre vécu.

Je sais bien comment tu dois souffrir, tout simplement parce que j'ai connu moi aussi LE grand amour. Le mien a balayé en un regard tout ce que j'avais pu vivre précédemment, il a remis en cause tout ce que je croyais être vérité avant.
Quand je le serrais dans mes bras, j'en avais des frissons. Je peux te dire que j'ai été heureuse comme jamais et que pour moi aussi, c'est le gouffre, le néant, le vide, l'absence d'envie, etc.
Et pourtant... Je ne l'ai connu qu'un peu plus de 2 ans et demi, nous nous sommes mariés, avons eu un bébé. L'amour fou. Et pourtant, pas 24h/24 ni 30 ans.
Et pourtant, la même souffrance que toi. Oui, la même !

A mon niveau, je pense juste à TOUT ce que je ne vivrais JAMAIS avec lui, lui qui était ma vie. Je pense à cet amour fou, trop court, je pense au 2ème enfant que nous voulions et que nous n'aurons jamais. Je pense à ma fille qui n'aura jamais connu son papa (6 semaines !), je pense à ses enfants qui n'auront pas de grand-père, je pense au fait que si je dois vivre encore 40 ans, ça sera 40 ans sans lui physiquement...
Donc je te le dis, tu peux te répéter si tu le souhaites mais moi je te dirai juste que ce ne sont pas tes 30 ans ni les 24h/24 qui font ta souffrance, c'est juste le fait que tu l'aimais, qu'elle était tout pour toi et que ça, tu ne l'as plus. Tout comme nous...

Tu finis -il est vrai- en disant que tu ne veux pas dire que ton deuil est plus important que les autres... mais pour moi, sache juste que quand je te lis, j'ai pourtant l'impression que c'est ce que ça veut dire, d'ailleurs, plus haut, tu parles de ceux qui ne se voient pas la journée et tu mets en parallèle ton cas.....
Il te manque ta moitié, il me manque ma moitié, il nous manque, à tous, notre moitié.

La dernière chose que j'ai trouvé et que mon mari a écrit à l'hôpital sans que je le sache : " (....)tu es ma demi-âme" : ça résume assez bien ce que nous étions l'un pour l'autre...

Virginie
Titre: Re : Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: alberte le 12 décembre 2012 à 19:36:55
Bonsoir

Le deuil dépend du degré d'attachement à la personne disparue, de la nature de la relation avant le décès, du degré de dépendance par rapport à cette personne et aussi du temps de l'accompagnement pendant sa maladie. Nous ne faisions qu' UN
Demain fera 14 mois que mon Amour est parti il avait 73 ans, nous travaillions ensemble 24/24 avant de prendre notre retraite.
C'est terrible, ce vide, ce manque, depuis quelques jours je ne pleure plus  que deux ou trois fois dans la journée, mais je suis épuisée,
la solitude est dure à porter nous n'avions pas d'enfant il était mon Bébé.
cordialement
Alberte

Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: chrisam le 12 décembre 2012 à 19:47:53
Viriginie,
Tu as sans doute ou plutôt certainement raison, je disjoncte pour le moment, je ne sais plus où j'en suis, je crois qu'il y en a beaucoup qui écrivent leur désespoir et qui se répètent
Tu me remets peut-être les pieds sur terre, et je comprends que ça peut être lassant, je ne vais plus écrire, de toute façon, je ne sais pas écrire, et au moins je ne vous ennuierai plus avec mon chagrin.
Merci pour votre soutien à tous
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Corail le 12 décembre 2012 à 20:52:29
Chrisam,

Ce n'est pas du tout ce que j'ai voulu te faire comprendre. Heureusement que ce forum est là pour que l'on crie notre désespoir, notre mal-être... et heureusement que d'autres peuvent être là pour nous soutenir, tenter de nous aider.
Je voulais juste, à travers mes mots, te dire simplement que la douleur est là et peu importe le nombre d'années, malheureusement... Je souffre également, comme tu as pu le comprendre.

En aucun cas je veux que tu arrêtes de dire ta souffrance, tant je sais qu'il faut la partager pour tenter de l'apaiser.

Je t'embrasse, notre soutien, le mien, est toujours là.
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: chrisam le 13 décembre 2012 à 19:04:38
Je viens juste te répondre Yohann puis je n'écris plus

Mon chagrin vient à tout moment et tout le temps, sans penser à aucun souvenir, simplement elle n'est plus là.
Ce matin, j'attendais au guichet de la banque et on s'occupait de moi, le chagrin a monté sans penser à quoi que ce soit, il est venu tellement fort, que j'ai dû m'asseoir, je n'étais pas bien.
Si je pensais aux souvenirs, ce serait encore pire
Lundi, j'ai rencontré une ancienne cliente, quand elle m'a vu, elle ne savait qu'AM était décédée, je lui dis "Bonjour" et elle m'a dit : "Vous êtes malade"

Voila, je ne vous ennuie pas plus longtemps
Au revoir et que demain soit au moins un peu meilleur qu'aujourd'hui
Courage
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Antonia Sophia le 13 décembre 2012 à 19:30:25
Bonjour à tous,
Me revoilà après quelques jours d'accalmie. J'ai continué à venir sur le forum. Mais je n'ai rien écrit. Pas la force, pas le courage. Je crois que j'entame une nouvelle phase de mon deuil : je suis exsangue, lessivée. Je ne ressens plus rien. Ni la souffrance, ni le manque, ni le désespoir, ni la colère : rien !
Le vide absolu dans mon coeur.
J'ai parfois une velléité d'entreprendre un truc, du rangement, et puis je m'arrête, fatiguée avant d'avoir commencé.
Avec les autres, je n'ai rien à dire. Même parler d'Emmanuel ne m'intéresse plus. J'en ai marre de ressasser la même histoire affreusement courte et triste de nos six petits mois de bonheur. mais je n'ai absolument rien d'autre à dire.

L'une d'entre vous a écrit qu'elle avait un cerveau de poule. j'ai le sentiment d'avoir un un cerveau d'huître. Je reste assise là, vide et bête, et sans conversation ni mémoire ni concentration... Et je suis prof, alors devant les élèves ....

Est-ce que vous croyez que je commence une vraie dépression ? ou bien est-ce normal ?

Je commence à m'inquiéter, ma confiance en moi en prend un nouveau coup, je me sens si bête !!!!!

Merci

Muriel

Sincèrement merci pour votre post car je culpabilisais comme une folle à me dire que j'étais une moins que rien, un déchet de l'humanité, que  je ne versais pas toutes les larmes de l'univers sur son décès et que je n'étais pas désespérée ou malade de douleur à m'arracher les yeux mais que je restais juste là, à penser à rien. A ressentir rien. A n'être que du non sentiment et du non ressenti.

Je n'arrive plus à éprouver d'émotions ou d'envies. Plus rien ne m'enthousiasme ou ne me met en rage. On dirait que je dors. Que je ne suis plus moi. Que je suis loin. Dans du coton. Dans des morceaux de nuages. Par moments, lorsque je veux parler, les mots s'entrechoquent entre eux comme si mes lèvres n'obéissaient plus à mon cerveau et cela fait bien rire les gens. Je me fais l'effet d'une crétine car je n'arrive plus à réfléchir ou à faire de comptes. Même assise, je suis totalement épuisée.

Tous les posts que je lis dans ce fil décrivent exactement mon état. Moi, qui me méprisais de me croire une parfaite dégénérée, je suis heureuse de vous avoir trouvé car je vois que c'est un déroulement, somme toute assez fréquent, suite à un énorme choc affectif.

Encore merci à vous tous qui avez osé dire tout haut ce que je pensais être seule à éprouver et dont je ressentais une vraie honte; étonnée que j'étais d'avoir perdu mon âme soeur et de ne pas réagir en veuve éplorée inconsolable.

On dirait que mon cerveau n'a plus de connections en fait. Intellectuellement, je savais qu'il était dans un cercueil mais lorsque je regardais, je ne voyais que cela. Son extérieur. Un objet parfait de symétrie auquel rien ne me rattachait. Comme si mon cerveau n'assemblait pas ces deux informations. Et, en même temps, je me disais: c'est lui qui est là, tu devrais être en train de pleurer. Mais cela ne connectait pas. Je l'imaginais toujours vivant d'avant. Et une boite devant moi. J'en ai conclu que le choc m'avait rendue complètement folle. Puisque sachant qu'il était dedans, je n'arrivais pas à concevoir l'idée ni à me représenter l'image.

Une sensation de décalage assez horrible.


Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 14 décembre 2012 à 21:47:55
Bonsoir, Sophia

Moi aussi je suis rassurée en vous lisant. ce n'est pas facile d'avouer que non seulement je suis diminuée intellectuellement, mais en plus que je ne ressens rien à l'égard de celui que j'aimais plus que tout, oui ma demi-âme à moi aussi, mon nord et mon sud, mon ancre et mon gouvernail. Sauf que là : plus RIEN.

Moi aussi je me sens loin, si loin de lui qui est mort, qui m'abandonnée. Loin des autres aussi, dont les conversations m'insupportent.
Je me suis forcée à aller au cinéma la semaine dernière, je n'ai même pas apprécié le film tant le simple fait d'y aller m'avait épuisée.

Par contre je reviens de la piscine. Je n'ai pas nagé, pas la force, je me suis juste plongée dans les bains bouillonnants pour essayer de décontracter mon dos qu'on dirait roué de coups. et à la piscine, en maillot de bain, je sentais que les larmes n'étaient pas loin. Mais elles ne viennent pas, je ne veux pas qu'elles viennent, j'en ai marre de pleurer cet homme qui m'a laissée.

Il voulait que je m'engage, il voulait que je passe tous mes loisirs avec lui. J'ai eu du mal au début, je suis une vieille divorcée indépendante. Il exigeait beaucoup. Il voulait être sûr que je l'attendrais, que je  l'aimerais des années et des années encore, qu'on pourrait partager une maison, vivre ensemble. On avait même parlé bébé parce qu'il n'a pas d'enfants et si j'avais eu 5 ans de moins, j'aurais été heureuse de porter son enfant et de fonder une vraie famille, avec un vrai papa.

Une semaine avant son suicide, je lui ai dit que oui, j'étais sûre de mon choix, de mon envie de partager un avenir avec lui.

Et le mardi, bang ! il balance sa femme agonisante, saute après elle et finalement jette aussi notre amour, nos projets, notre avenir, ma confiance en lui et en un bonheur possible

alors j'en ai marre de le pleurer, de ne penser qu'à lui. Depuis deux mois et demi, il prend encore plus de place mort que vivant.

Chrisam,
J'espère que tu n'es pas loin. nous avons tous l'impression que notre deuil est le plus terrible. Mais ce soir, je t'envie un peu, si j'ose dire. Tu as vécu longtemps avec ton Amour, la femme de ta vie. Pour moi, ce fut si court, j'ai si peu de souvenirs, presque pas de photos pour m'en nourrir. J'ai la chance énorme d'avoir été acceptée par sa maman, moi la compagne illégitime.

Sa pauvre maman était si contente qu'il ait enfin rencontré quelqu'un, qu'il reprenne une vie normale d'homme. mais notre amour fut une courte parenthèse dans un long chemin de galère

j'étais heureuse en couple pour la première fois depuis mes 18 ans (j'en ai 45 !), et ce bonheur est fini, écrabouillé en bas de 9 étages et j'ai l'impression d'avoir vécu un rêve, un rêve agréable mais un rêve, pas la réalité

et merde, je vais pleurer !

Muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: lilas52 le 14 décembre 2012 à 23:16:07
Laisse couler tes larmes Muriel.
Bon courage LYDIA
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 16 décembre 2012 à 16:35:33
Bonjour ,

Je viens de faire mon premier cauchemar. J'étais au collège, je cherchais Emmanuel partout, au CDI, dans les autres salles, dans le couloir. J'allais partout en pleurant et en disant « Où est Emmanuel ? Vous avez pas vu Emmanuel ? 
 et dans mon rêve les autres savaient qu'il était mort mais moi je ne le savais pas, mais personne ne me répondait. Les larmes ruisselaient et j'étais en retard en cours mais personne ne me demandait comment j'allais, personne ne me consolait …

Hier chez mon psy, il voulait que j'exprime ma colère et j'y arrivais pas. Alors j'ai tapé sur un coussin, puis j'ai commencé à l'éventrer. J'ai sorti toute la bourre et j'ai mis le tissu de la doublure en pièces avec mes ongles. A mes pieds, il y avait un gros tas informe de tissu déchiquté.
 comme ça que je me sens : informe, sans contenu ni contenant.
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 17 décembre 2012 à 18:57:49
Bonsoir à tous, mes compagnons de deuil

Ce soir c'est colère, COLERE !!!

je lis sur un autre fil des paroles d'amour, qui demandent et appellent la "paix sur nos âmes" à nous, les solitaires, les endeuillés, les invisibles

je n'ai pas voulu noircir ce joli fil, mais j'ai envie de crier : Oui, on pleure sur nos chers disparus, on parle de leur souffrance, de leur maladie, de leur vie arrachée

Mais  c'est nous que j'ai envie de plaindre ce soir, c'est nous qui avons besoin de réconfort, de tendresse et de douces pensées

Je pleure depuis presque 3 mois le triste sort de mon pauvre amour suicidé, mais j'en ai marre de le pleurer, lui

c'est sur moi que je veux pleurer, parce que je me sens seule

et abandonnée

et trahie --même involontairement, je sais bien qu'il n'a pas fait exprès de me laisser, mais c'est un dommage collatéral de sa mort--

et j'en ai assez d'être un simple dommage collatéral

je suis en miettes

j'ai tout à rebâtir : mon estime de moi, ma force physique, ma capacité à rire, mes facultés intellectuelles, ma foi en l'avenir, mes projets d'avenir pour les prochaines années, mon cercle d'amis, jusqu'à ma foi en l'au-delà

tout est dévasté et je ne sais par où commencer et je n'ai AUCUNE energie pour commencer à rassembler les morceaux épars de mon existence

tout ça pour ça : un grand amour, mais qui n'a duré que 5 mois et demi, même pas une vie à deux : les prémisses d'un bonheur possible, de simples promesses, des projets ...

et tou est littéralement passé par la fenêtre de ce p... de 9ème étage

9 étages ! le chiffre me donne le vertige...j'ai l'impression d'être le personnage oublié d'un très mauvais téléfilm

des trucs comme ça, on ne les voit qu'à la télé, eh bien il a fallu que ça m'arrive à MOI

et c'est pas juste, c'est pas juste

alors je veux pleurer pour moi, égoîstement, et mettre des bougies pour moi, pour la paix de mon âme qui erre depuis presque 3 mois

et je veux que nous pleurions sur nous, les abandonnés, les esseulés, parce que nos chers disparus ont toutes nos pensées et nous il ne nous reste rien

Soyez en paix, mes amis, ce soir je pleure pour vous aussi

muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Corail le 17 décembre 2012 à 19:43:37
Bonsoir Muriel,

Bizarrement, à ta lecture, je me dis que j'aimerais en être au même point que toi. Pourquoi ? Parce qu'effectivement, tu as raison, nous sommes à plaindre, c'est à nous de nous reconstruire, à nous de vivre avec toute cette histoire finale en tête, à nous d'assumer le fait que nous sommes encore là, à nous de vivre, tout simplement. Sauf que notre vie ne sera plus jamais la même, nous avons connu l'atrocité de la vie et maintenant, il faut l'apprivoiser.
Si je dis que j'aimerais en être au même point que toi, c'est parce que pour l'instant, je sais à quel point tout ça est dur mais voilà, je n'en suis toujours pas à me plaindre, à prendre conscience de tout ça, un peu comme les autres personnes de ce post qui sont anesthésiées dans leurs sentiments.
Je pleure très souvent en regardant ma fille, en pensant à ce que lui ne vivra plus. Je suis restée presque 4 mois en ne pleurant jamais pour moi.
Je pleure à présent un peu pour moi, pour ce que je ne connaitrais plus, pour ces moments partagés qui n'existeront plus. Mais ça reste rare.
Mais tu as raison, eux, ils ne sont plus là pour endurer les choses. Nous, si.
C'est à nous de continuer notre chemin avec cette énorme bombe qu'on s'est prise dessus.
J'aimerais être triste pour moi, prendre conscience des choses... mais il semblerait que pour moi, ça va mettre un peu de temps...

Je pense que nous sommes tous en miettes, comme tu le dis. Je pense cependant que vivre avec un suicide n'a rien de comparable avec ceux qui ont perdu leur amour par maladie ou accident. Je me suis toujours dit que ça devait être très compliqué à encaisser (excuse moi d'être directe, je vois que tu l'es donc je me permets...).
Est-ce que tu vois un psy qui pourra un peu t'expliquer les choses ou à qui tu pourras dire tout ce que tu ressens ? Dans mon cas, c'est une vraie bouffée d'oxygène, même si le lendemain, je suis plus mal qu'avant (prise de conscience des choses, petit à petit...).

Je ne sais comment finir ce message car je me reconnais tellement dans ce que je sais 'intellectuellement' mais que je n'arrive pas à exprimer 'émotionnellement'.....

Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: kika le 17 décembre 2012 à 20:12:40


Mirèle,


Combien tu as raison, jusqu'au Pierre s'est battu, m'a attendu pour mourir.

Et pourtant, je ressens la même chose que toi, comme s'il m'avait abandonné. Je me surprend à lui en vouloir. Lui en vouloir de l'avoir tant aimé et que lui m'ai aimé follement....complètement cinglée

Y a t-il quelque chose après la mort ?
Si oui, il est bien, il ne souffre plus
Si non, est bien au moins il ne souffre plus

Mais moi, je suis là, pluvérisée, avec 2 malheureux neurones qui essayent d'éclairer ma boite cranienne, qui génèrent des idées folles..
Et je pleure, je pleure. De plus en plus sur moi
Moi qui ne voudrai plus être là, mais il faudra tenir pour mon fils
Des fois je voudrai lacher la rampe, alors je vais dans la rubrique suicide, et non, non décidemment je ne ferai pas ça à mon fils

Coincée dans une vie qui ne m'interresse pas, qui me donne la nausée, qui me donne le vertige à l'idée de toutes ces années qu'il faudra vivre sans Pierre

Et je ne peux même pas compter sur mes forces, ma raison qui m'ont désertées

Avant, j'étais volontaire, courageuse mais là bernique...rien

J'aimerai tant m'endormir, ne plus me réveiller. Et pourtant il faudra continuer...

Si au moins ce disque dans ma tête "Pierre, Pierre" pouvait cesser de tourner. Que je puisse un peu me reposer


Je pleure avec toi pour nous les survivants

Malika
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: *Ephémère* le 17 décembre 2012 à 21:17:24
*
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: *Ephémère* le 18 décembre 2012 à 08:44:38
*
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 19 décembre 2012 à 17:51:42
Tu es mon amour. Tu es mon reflet, mon double, mon âme-soeur. Mon guide, mon maître. Tu es mon rocher, mon huître et mon enclume. Ma tête pensante. Tu es le prince qui me chevauche et le cavalier qui repart la nuit. Tu es mon bras gauche et le très droit. Le visiteur de minuit et celui du matin. Tu es l'arbre et la feuille, la source, l'eau vive et la semence. Tu es la graine et le rameau. Tu es ma flamme, ma bougie et le feu qui me consume.Tu es le rôdeur, le voleur, mon mendiant de l'amour. Tu es le rire, tu es la chaleur, ma force et ma douleur.
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 19 décembre 2012 à 18:19:59
Oui Yohann,
Mais une fois de plus, les belles déclarations ne le font pas revenir ... Je ne crois plus qu'il m'entende.

je ne crois pas non plus qu'il soit toujours là, il m'aurait envoyé un signe, pour me rassurer, me réconforter

c'est trop dur, c'est trop long la vie sans lui
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Tinou le 20 décembre 2012 à 08:58:15
Muriel, rien ne le fera revenir, mais je suis certaine que là où il est, il entend....
Martine
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 20 décembre 2012 à 14:49:17
Comme j'ai écrit sur différents fils, je rassemble mes posts sur le fil que j'ai créé. J'ai envie de donner de la cohérence à mon histoire, elle en a si peu. Donc ce texte, vous l'avez déjà lu dans "Racontons notre histoire.

RECIT DU 25/09/2012



Il y a bientôt trois mois, mon amour était déclaré mort au bas de son immeuble.

d'abord, vous devez savoir qu'il était marié à une femme malade de sclérose en plaque depuis 12 ans. Il s'en occupait seul à leur domicile,il refusait toue aide médicale et toute idée d'hospitalisation. Quand je l'ai rencontré, il y a un an, sa femme était déjà grabataire et invalide depuis plusieurs années. Depuis quelques mois, elle ne parlait plus, ne voyait plus. Il ne savait même pas si elle le reconnaissait, si elle était encore consciente de sa présence à lui. Il croyait sa vie finie. Lorsqu'il rentrait chez lui, il affrontait la maladie, le désespoir, la solitude la plus atroce face à cette femme qu'il avait aimée et qui n'était même plus l'ombre de son amour.

Puis nous nous sommes rencontrés. Je savais qu'il ne l'abandonnerait jamais. On faisait des projets quand même. Nous savions qu'il se passerait des mois, des années, avant que nous puissions vivre ensemble. J'acceptais cette réalité, parce qu'elle faisait partie de mon Emmanuel et de la relation que nous avions.

J'écrirai plus tard notre amour, je raconterai l'homme merveilleux qu'il était. Mais ce soir, il y a deux mois exactement qu'il est mort, le 25 septembre et j'ai besoin de raconter sa mort atroce, horrible, absurde et par certains côtés tellement incompréhensible.

Le soir où il est mort ...

Tout a commencé à 19 heures 40 …

Je l'avais quitté vers 18 heures 30 devant le collège, Nous venions de co-animer notre premier cours ensemble et nous félicitions de notre succès. Nous avons traîné comme d'habitude avant de rentrer dans nos chez-nous respectifs.
 Projets pour le cours de la semaine suivante. Une dernière cigarette dans les rayons du soleil couchant, devant son scooter et au pied de ma voiture. Le lendemain nous devions manger ensemble à midi, et je lui ai demandé ce qu'il voulait manger. Il m'a répondu que même une boite de raviolis lui ferait plaisir, en ma compagnie. Il riait. Il a dit qu'il amenait les croissants du petit-déjeuner.
Il a eu l'air absent tout d'un coup, et il est parti très vite. Je savais qu'il angoissait de retrouver sa femme, qui poussait des râles inarticulés depuis trois jours.

J'ai fait un saut au supermarché, pour acheter un plat préparé pour le lendemain, et pour ce soir-là, j'ai pris un poulet rôti.

En arrivant à la maison, j'ai mis le poulet à réchauffer et j'ai dit aux enfants qu'on mangeait dans un quart d'heure. En attendant, j'ai voulu appeler ma maman. Il était 19 heures quarante, je m'en souviens parce que j'ai vérifié l'heure avant de téléphoner.

J'ai dû faire un faux numéro, parce qu'au lieu de ma mère, j'entends la voix d'Emmanuel . Surprise, je dis bêtement :
-- Emmanuel ? Ça va ?

Et il me répond d'une drôle de voix, une voix assourdie, que non. Je sens tout de suite qu'il y a quelque chose d'anormal. Il refuse de m'en dire plus. Je lui demande si je le dérange et il confirme.
Je lui propose alors de le rappeler dans un quart d'heure, le temps de manger vite fait et de passer un peu de temps avec mes enfants. Il me dit :
-- Dans un quart d'heure, je risque de ne pas répondre.
-- Alors je t'appelle dans une demi-heure.
-- Je ne répondrai pas non plus.
-- Bon, alors téléphone-moi quand tu en auras envie, s'il te plaît, je suis inquiète.
-- Je ne te téléphonerai pas ce soir, mais j'allais t'écrire, pour t'expliquer.

Je comprends alors qu'il veut rompre, mettre un terme à notre relation. Il en avait déjà parlé, plusieurs fois, mais comme d'une éventualité. Ce soir, je comprends que c'est sérieux et j'ai la voix qui tremble, mes larmes montent :
– OK, mais tu peux essayer de m'expliquer là, au téléphone, me laisse pas comme ça ...
Puis, après un silence, il dit :
-- Bon alors,tu veux bien laisser tes enfants manger tous seuls ? Je ne vais pas te prendre longtemps, j'en ai pour 5 minutes. Si tu ne me parles pas maintenant, tu ne me parleras jamais.

J'accepte, évidemment, persuadée que mon amour va rompre, que c'est notre dernière conversation. J'essaie d'être calme, de respirer, de ne pas le stresser davantage qu'il ne le semble déjà. Il prend une grande inspiration :
-- D'abord, Muriel, il faut que tu saches que je t'aime plus que tout au monde !
Je ris à travers mes larmes et déclare avec fougue :
-- Oh oui ! Ça, je le sais ! C'est la seule chose dont je sois vraiment certaine ! Je t'aime tant moi aussi.
Un silence, et puis :
-- Tu sais, je t'ai menti, un peu … Pour Teresa, je ne t'ai pas tout dit... c'est beaucoup plus grave que tout ce que je t'ai dit. Teresa, c'est fichu. Pour Teresa, c'est fini …

Je comprends alors que sa femme est morte Je pleure de plus belle.

Je lui propose de venir, pour l'aider, lui tenir compagnie, pleurer avec lui. Il refuse. J'insiste. J'entends alors des bruits étranges. Comme un cri, mais un cri inarticulé, horrible, comme un animal blessé. Il sent que j'ai entendu, que j'écoute et il dit :
-- Tu sais, je n'en peux plus de l'entendre … c'est tout le temps, c'est trop dur …

Je réalise alors que sa femme n'est pas morte, qu'elle est là,  à côté, et qu'elle pousse ces cris affreux qui semblent monter de très loin dans son corps. Nous nous taisons tous les deux pour écouter les cris de Teresa. Il reprend :
-- Pour elle, c'est trop tard, c'est fichu …

Je comprends que Térésa est mourante. Je me propose d'appeler les secours. Il refuse catégoriquement. J'insiste : il se fâche. Je suggère d'appeler pour lui son père, qui habite à côté, ou de faire appel à son ami N., le seul à être déjà entré dans l'appartement. Il s'entête dans son refus, répétant que c'est trop tard, que c'est fichu.

Et dans un éclair, je ne sais pas comment puisqu'il ne me dit rien clairement, je réalise qu'il va euthanasier sa femme, mettre fin à ses 12 années de souffrance. Je suis glacée d'horreur mais ma décision est prise en un clin d'oeil. Je respire un bon coup :

-- Emmanuel, tu ne peux pas faire ça tout seul. Je viens, je veux être avec toi …
--  Je ne veux pas que tu viennes. Je t'interdis de venir, tu m'entends ? C'est trop horrible, trop horrible...

Cela  doit bien faire maintenant 45  minutes que nous sommes au téléphone, moi suppliant, réduite à deviner l'impensable, lui parlant à demi-mots, fuyant, évasif …

J'entends toujours les cris de Teresa. J'entends aussi de drôles de bruit que je n'identifie pas, comme du vent, ou de l'eau. J'imagine qu'il a mis Teresa dans un bain chaud, qu'il lui a ouvert les poignets, qu'elle se vide.

Et lui il répète que c'est trop horrible, trop horrible.

Je parviens à me ressaisir et j'essaie de le raisonner.

-- Tu ne peux pas rester tout seul, laisse-moi venir !
-- je te l'interdis, tu entends. Ce sera encore plus horrible.
-- Ecoute, Emmanuel, tu ne peux pas faire ça. Tu vas foutre ta vie en l'air, et la mienne avec. Tu vas te retrouver en tôle...
-- J' ai tout prévu. Ils ne me prendront pas.

Je propose pour la énième fois d'appeler les secours, ils vont l'aider, ils vont t'aider, laisse-moi t'aider, Emmanuel...
– Non, je ne veux pas que tu viennes. Tu seras trop malheureuse, ce sera trop horrible.

Et puis, tout d'un coup, l'évidence. Je me couvre de sueur de la tête aux pieds. Je suis glacée jusqu'aux os : il va tuer sa femme et se tuer avec !
Fébrilement, je garde Emmanuel au téléphone en continuant à lui dire que je viens, que je l'aime, et je griffonne un message pour mon fils qui est à côté : Appelle le samu, envoie les secours à son adresse, il veut se suicider.

Pendant un temps qui me semble infini, mon fils a le Samu en ligne. Ils comprennent mal la situation, mon fils s'embrouille, finit par se faire entendre. Je continue à retenir Emmanuel :
-- Je t'aime, je ne veux pas vivre sans toi. Je veux me réveiller avec toi tous les matins, je veux te serrer dans mes bras tous les jours de ma vie. Tu m'entends, Emmanuel, je t'aime et ta place est à mes côtés.

Enfin, mon fils revient et crie triomphalement : « Ils arrivent ! »

Emmanuel a entendu :
-- Oh! Tu as appelé les secours. Ma chérie, je ne t'en veux pas.
-- Oui , Emmanuel. Ils arrivent, j'arrive ! Tiens-bon, mon chéri ! On arrive, accroche-toi !
-- Non, ne viens pas ! C'est trop horrible. Ma chérie, tu seras encore plus malheureuse.

Mes enfants m'entourent :
– Emmanuel ! Ne fais pas ça ! On t'aime ! Ta place est avec nous, ne fais pas ça !

Puis il crie dans le téléphone :
-- Ma chérie, ma chérie, ma chérie ! Je t'aime, je t'aime, je t'aime ! Je pars, je pars, je pars...

Soudain, le silence, juste des bip-bip-bip. La communication est coupée. Horrifiée, je lâche le fixe, attrape le portable et mon manteau. Je fonce dans la voiture en criant aux enfants que j'y vais.
En fait, je ne suis pas encore paniquée. Je suis persuadée qu'il a pris des médicaments, chez eux, il y en a tant ! Le temps que les secours arrivent, ils vont le prendre en charge, lui faire un lavage d'estomac, ils vont sauver mon amour ...

Il doit être un tout petit peu plus que 21 heures.

En conduisant, je rappelle le Samu, pour être sûre qu'ils arrivent, je leur dis de se dépêcher, ils me demandent si j'ai le code pour accéder à l'entrée de l'immeuble, je leur dis que non, mais dépêchez-vous …

je rappelle Emmanuel. Contre toute attente, il décroche...Toujours ces drôles de bruits en fond :
-- J'arrive, Emmanuel. Tiens bon. Accroche-toi, je t'aime et j'arrive avec les secours.
-- Ma chérie, c'est trop tard ! Ma chérie, ma chérie, ma chérie ! Je t'aime, je t'aime tant. Je t'aime ! Je pars, je pars, je pars.

Puis une voix déjà lointaine :
Je suis parti, je suis parti, je suis parti...

La communication est de nouveau interrompue.
Cette fois, je fonce. Dans mon affolement, je me trompe de chemin, perds de précieuses minutes à faire un détour. Quand j'arrive au bout de la rue N., je vois et entends les ambulances au loin. Je les suis.Devant l'entrée de la résidence, un gendarme m'intercepte. J'explique qui je suis . Il me dit d'attendre. Je trouve la force d'appeler ma fille pour lui dire de prévenir le père d'Emmanuel. Le policier revient et me fait signe de le suivre. Il me dit :
-- Quand on est arrivés, ils n'avaient pas encore sauté...

Je m'arrête net. Sauté ? Il a dit « sauté », alors ce ne sont pas des médicaments, Oh non !

-- Pour la dame, c'est trop tard, mais le monsieur, ils sont en train de s'occuper de lui.

En bas de l'immeuble, les gyrophares, les ambulances. Je vois la fenêtre grande ouverte, tout là-haut, au 9ème étage, c'est haut, c'est si haut. Et en bas, j'aperçois les jambes et le torse de mon Emmanuel, étendu sur la pelouse. On me fait monter dans une ambulance. Je ris et je dis : « C'est pas moi, la victime ! Occupez-vous de lui ! ». De loin, je vois qu'on lui fait un massage cardiaque. Cela dure longtemps. Puis un homme monte dans l'ambulance. Il se présente comme le médecin. Et il me dit que «  Le monsieur est parti. »

Il était 21 heures 26 le 25 sept 2012. Il est à présent 21 heures 55 et nous sommes, nous les vivants, le 25 novembre 2012. mon amour est parti.

Je m'excuse de la longueur et de la dureté de mon récit. Merci à ceux qui m'ont lue. Pardon, j'espère ne pas ajouter à votre peine, mon histoire est tellement, tellement absurde. Par moments, je n'y crois toujours pas. Tant d'amour, pour elle, pour moi et un tel désespoir !
J'espère comprendre un jour ...

Je n'avais jamais raconté cela, sauf à la police.

Je vous souhaite, à tous, une belle nuit, et qu'elle nous soit douce et apaisante autant que cela est possible,

Muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 20 décembre 2012 à 14:51:18
Ecrit le 3 décembre à une autre rubrique :


Bonjour,
J'ai voulu aujourd'hui vous livrer un beau souvenir, qui m'est remonté précisément grâce à ce forum. J'ai commencé grâce à vous à écrire les moments heureux. Je n'hésite plus à les convoquer, ils me sont si doux, ils me font du bien.

une semaine avant sa mort, nous sommes allés lui acheter des chemises et des bottines.
Il voulait jeter les vieux habits de la solitude et du malheur, les sweats détendus et les pantalons trop grands depuis qu'il avait minci et qui lui donnaient l'air d'un grand-père dans son jardin. Il tenait absolument à ce que je vienne avec lui pour lui donner mon avis, et de toute façon, nous avions si peu de temps à passer ensemble que nous nous consacrions l'un à l'autre tous nos moments de loisirs... Nous ne sommes jamais allés au restaurant ni au cinéma, mais dans dans les boutiques, oui ! Emmanuel adorait le shopping ! Moi beaucoup moins...

Donc en ce lundi de mi-septembre, je terminais à 15 heures et lui à midi. Il m'attendait pour la séance boutiques. Comme j'étais crevée et qu'il faisait beau, on a pris le temps de boire un thé, allongés sur la pelouse sous le grand bouleau qui domine mon jardin. On est restés longtemps à regarder le vent jouer dans les feuilles ensolleillées, à goûter la chaleur sur notre peau. Je me souviens, il avait la tête posée sur mes genoux et mes doigts jouaient avec sa barbe naissante. On s'est dit : "Il faut en profiter, c'est sûrement un des derniers beaux jours de l'été..."
Vers 16 heures, direction les boutiques. Ah ! les chemises ! Nous sommes tombés sur un magasin qui proposait des chemises "easy iron" et cintrées ! Juste ce qu'il cherchait en vain ---et moi derrière lui -- depuis plusieurs semaines ... Il a palpé, tâté, soupesé. Il a déballé, , comparé les teintes, les nuances. Il voulait les acheter toutes : une bleue, une rouge, une violette, une mauve, une autre d'un violet plus clair ... Il est entré dans la cabine avec au moins dix modèles ! Derrière le rideau il s'est déshabillé, et moi je n'arrêtais pas de le taquiner. Je passais sans arrêt la tête en lui demandant comment ça allait, et il poussait à chaque fois des petits cris de vierge effarouchée. C'était très drôle. et puis je passais le bras pour toucher sa taille, son ventre derrière le rideau et il criait de plus belle et je riais plus fort.
Il est reparti avec une chemise d'un rouge à la fois gai et profond et a demandé à la vendeuse de lui mettre la violette, la mauve et l'autre violette de côté. Il voulait d'abord tester le côté easy iron" avant de toutes les acheter ...

Après sa mort, une de mes obsessions était de retrouver cette chemise rouge qu'il avait mise dès le lendemain et qui lui donnait un air rayonnant. A son appartement, j'ai plié et rangé soigneusement tout son linge. Plier pour la première fois les vêtements de l'homme que j'aimais, c'était un peu l'épouser, accepter le fait que j'étais désormais sa femme, même s'il était mort. Ses habits sentaient encore son odeur ... J'ai récupéré quelques vêtements qui me rappelaient nos jours heureux. Il y a encore, au fond de mon armoire, un tee-shirt à manches longues qu'il adorait, élimé, déchiré et tout doux, que je n'ai pas porté et qui garde son odeur. Je n'ose pas le mettre, parfois je le déplie, je le sens et je pleure ...
Mais la belle chemise rouge, je ne l'ai pas retrouvée. Je me suis demandé s'il l'avait enfilée pour sauter, en souvenir de ce bel après-midi de shopping, et dans ce cas, les pompiers l'ont déchirée lorsqu'ils ont tenté de le réanimer.
Mais ce mardi terrible-là, il portait un tee-shirt rose vif, que nous avions aussi choisi ensemble, cet été. Personne au collège n'oubliera ce tee-shirt. D'abord parce qu'il ne mettait jamais de tee-shirt en cours, il préférait les chemises, souvenir de collège anglais et puis il trouvait que c'était important d'être bien habillé quand on enseigne en ZEP, pas pour la discipline, mais pour donner un modèle positif aux élèves. Donc, ce tee-shirt rose, tout le monde l'a remarqué. Tous les collègues l'ont taquiné et moi j'étais si fière d'aimer cet homme, de l'aimer en secret, de le voir si heureux et épanoui, et je m'étais dit que le moment approchait peut-être de dévoiler notre secret à nos collègues. Emmanuel était prêt à le faire depuis le mois de juin. Moi je voulais attendre encore un peu, je voulais être sûre de mon engagement à ses côtés, et le samedi des chemises, je me suis aperçue que j'étais sûre. Heureusement, je le lui ai dit ...

Le tee-shirt rose, nous ne l'avons pas retrouvé non plus.

Dans la semaine qui a suivi l'achat des chemises, il a dit à sa maman au téléphone combien il était heureux, parce que c'était la première fois qu'une femme s'occupait de lui, de sa garde-robe.

Je suis si contente d'avoir retrouvé ce joli souvenir.
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: pinky29 le 20 décembre 2012 à 19:16:44
Chère Muriel,
je peux enfin lire ton histoire et découvrir les circonstances...
C'est poignant. Y a pas de mot...j'en ai mal à l'estomac pour toi...
je ne sais pas si tu as pu lire ce que je t'avais répondu dans un post (peut-être est-ce celui-ci ?) ou je te parlais des idées suicidaires. je reste persuadée qu'il t'aimait profondément. Ne remets jamais cela en doute. je te le dis car j'ai moi-même éprouvé ce sentiment : aimer profondément mon chéri et pourtant vouloir mourir coûte que coûte...Pour sortir d'une souffrance inommable.
je t'embrasse de toutes mes forces.
Christine
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 20 décembre 2012 à 20:30:00
Chère Christine,
Je suis contente que tu aies lu mon histoire ! oui j'ai lu ton message sur les idées suicidaires. Je n'ai pas répondu parce que c'est dur, j'écris moins en ce moment, même si je viens sur le forum au moins une fois tous les jours, et j'y lis ton histoire, si poignante, si bien racontée mais

je suis si fatiguée, je ne ressens à nouveau plus grand chose, à part cette fatigue, de l'ennui, profondément devant cette vie qui ne m'intéresse plus, quelques larmes une ou deux fois par jour mais c'est tout

juste envie de me coucher dans ses bras et dormir

la vie est si longue, si lente

je suis égoïste, toi aussi tu as mal, tu attends nos messages
après tout ce que tu as traversé !
j'avoue ne pas comprendre qu'on puisse aimer et vouloir mourir, mais tu dis que cela peut arriver, comme cela doit être dur ! quel paradoxe horrible, on doit se sentir écartelé
toi aussi tu as besoin que la vie te sourie enfin !

c'est effarant combien ce que tu dis de ton homme peut s'appliquer au mien aussi, une communauté de parcours, de souffrance, de dévouement
et chez toi comme chez moi, ce besoin d'écrire, de mettre en forme l'informe et l'innommable

je t'embrasse fort

Muriel
Titre: Re : Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: pinky29 le 20 décembre 2012 à 23:29:37
je suis si fatiguée, je ne ressens à nouveau plus grand chose, à part cette fatigue, de l'ennui, profondément devant cette vie qui ne m'intéresse plus, quelques larmes une ou deux fois par jour mais c'est tout

juste envie de me coucher dans ses bras et dormir

la vie est si longue, si lente

je suis égoïste,

je t'embrasse fort

Muriel
Chère Muriel, ne te penses pas égoïste du tout, please !!
Je ne peux pas t'exprimer ce que j'ai ressenti en lisant votre histoire. peut-être devrais-tu (un jour... plus tard... Bien plus tard) en écrire un livre ? Pour exorciser ? C''est terrible ce que tu as vécu, DUR à n'en pas trouver les mots !!!
Ne t'inquiètes pas si tu ne peux pas écrire à chaque fois que je t'écris. je comprends. je voulais juste être sûre que tu avais lu ce message afin que ça t'apporte peut-être une toute petite réponse à tes interrogations. je ne peux pas t'expliquer ce paradoxe (aimer/mourir) et effectivement, c'était pour moi un 'écartèlement'. j'avais préparé une lettre à mon ami pour qu'il ne se sente pas coupable si je passais à l'acte, la lettre était prête dans mon armoire, bien en évidence pour que qun la trouve si je partais. Mon testament était fait en sa faveur...Je peux juste te confirmer que malgré l'Amour vrai/profond, la CERTITUDE qu'il était l'HOMME de ma vie d'un côté (après pourtant 22 ans d'un précédent mariage et mon ex-conjoint est décédé il y a un an, à 45 ans), j'avais une autre personne en moi qui voulait mourir parce que cette partie de moi ressentait une souffrance INSOUTENABLE, INDESCRIPTIBLE. mon ressenti de souffrance était : 'je suis un brûlé au 3ème degré qu'on laisse sans soin et sur lequel on tappe encore avec une batte de base ball...' 2 personnes en moi. L'une aimait et voulait vivre (20%) et l'autre (80%) voulait mourir. Il a fallu que je 'guérisse'. Je te raconte pas le combat intérieur ! J'en devenais dingue !
Emmanuel est 'sorti' d'une chose qui lui était insoutenable, d'une chose qui sur cet instant précis a pris toute la place, aveuglant toute autre perception, réflexion. je le pense vraiment. je voudrais pouvoir t'expliquer, trouver les mots qui pourraient un peu adoucir ton vécu. mais il n'y en pas. je le sais.
N'hésites pas à me contacter quand tu le souhaites et en attendant, je vais respecter ta fatigue, ton absence de mots. Peut-être vais je aussi bientôt traverser cette vague là...
Christine
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 21 décembre 2012 à 21:54:48
Christine,
Merci pour tes mots. et voilà, je repleure !

emmanuel avait aussi préparé sa fin. En 2005, il avait laissé un message sur un forum. Ce message, dans lequel je n'existe pas, forcément puisque nous ne nous connaissions pas, précisait ses volontés pour sa fin. L'incinération, les cendres répandues en irlande, au lieu de leur voyage de noces. Son voeu d'être brûlé avec une mèche de cheveux de sa femme contre le coeur.

Certes je n'existais pas. Mais ces dernières volontés me font mal car je n'y justement je n'y figure pas.

Il avait un blog aussi, dans lequel, si on lit entre les lignes, on devine l'insoutenable, l'indescriptible enfermement dont tu parles aussi. Je me reproche évidemment de ne pas l'avoir compris. ce blog, où il racontait la lente agonie de sa femme, m'était trop difficile à lire.

J'ai réalisé trop tard qu'avant de me connaître, sa vie c'était ça, tous les soirs : des forums, des blogs. Discuter en virtuel avec des inconnus, des bouteilles à la mer. Je fais pareil maintenant dans ma nuit, notre nuit.

J'ai du mal à discuter avec les gens que j'aime bien. j'ai peur d'éclater en sanglots à la moindre parole gentille. alors je verrouille. du coup, je suis encore moins sociable qu'avant.

En septembre, c'était mon anniversaire. Emmanuel était tout fou à l'idée de m'offrir mon cadeau. Il sautait sur place, anxieux comme un enfant qui a peur que son présent ne plaise pas. J'avais à peine déballé qu'il se demandait déjà ce qu'il allait m'offrir à Noël, dans trois jours. Il voulait m'offrir un bijou pour mon anniversaire et comme on ne trouvait rien de bien, pour le rassurer, je lui ai dit que le bijou, c'était peut être encore trop tôt. Maintenant, je ne l'aurai jamais ...

J'arrête de me plaindre, tout le monde ici a son lot de désespoir et le mien n'est pas plus important que celui des autres. Si je me sens très égoïste, je reconnais que je le suis, repliée sur ma peine depuis presque 3 mois.

Je te souhaite le meilleur, je vous souhaite à tous le meilleur, mais c'est quoi, le meilleur, pur nous ?

Muriel
Titre: Re : Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: pinky29 le 21 décembre 2012 à 22:57:28
Christine,
Merci pour tes mots. et voilà, je repleure !

J'ai réalisé trop tard qu'avant de me connaître, sa vie c'était ça, tous les soirs : des forums, des blogs. Discuter en virtuel avec des inconnus, des bouteilles à la mer. Je fais pareil maintenant dans ma nuit, notre nuit.

J'ai du mal à discuter avec les gens que j'aime bien. j'ai peur d'éclater en sanglots à la moindre parole gentille. alors je verrouille. du coup, je suis encore moins sociable qu'avant.

Muriel
Re coucou Muriel,
je ne veux pas te faire pleurer, sauf si cela te libère. Je ne sais pas ce qui est le mieux pour toi.
En tout cas, si tu as des questions par rapport à ce qu'a pu ressentir Emmanuel dans ce moment ou il a pris cette décision de passer à l'acte, on peut tenter d'en parler. Je ne sais pas si j'ai des réponses mais je devine les questions qui doivent te hanter. Tu dois penser qu'il ne t'aimait pas assez pour 's'en aller' etc. C'est pour cela que j'ai insisté hier sur le fait que cela n'a rien à voir. Dans ce cadre, il s'agit vraiment d'avoir 2 personnes en soi, et il y en a malheureusement 1 qui un moment prend le dessus.
D'après ce que tu décris dans le texte que j'ai lu hier, il me semble évident qu'Emmanuel aurait du bénéficier d'une aide psychologique car il a tout assumé tout seul, refusant une aide médicale pour son épouse qui lui aurait allégé la tâche. Qui l'aurait aussi 'aidé' dans la décision finale d'abréger les souffrances de son épouse...Peut-être, s'il avait accepté cette aide, aurait-il eu l'impression de l'abandonner ? Et tout cela a commencé évidemment à un moment ou tu n'étais pas encore dans sa vie. Il a fait face à une maladie affreuse/cruelle et il a cru qu'il y arriverait tout seul. Il a surestimé ses forces et a fait face à des choses beaucoup trop dures pour un seul homme et puis, une fois qu'il a été dans le bain, il ne s'est même plus aperçu qu'il dépassait ses propres limites. Il était si imprégné de tout ça qu'il n'avait plus de recul. Pour lui, c'était son quotidien et il n'a même plus envisagé qu'il existait d'autres possiblités. Il tenait le coup et fonctionnait donc il n'a plus perçu sa limite. Il a mis des choses en place avant que tu éclaires sa vie, la machine était lancée, et il n'a pas eu le temps de t'intégrer. Ce n'est pas qu'il n'a pas voulu, c'est qu'il a manqué de temps et de recul. 2 personnes en lui. Et aussi de la dépression, je pense. Vu le niveau de stress émotionnel qu'il a subi durant de longues années, ça me paraît logique. Et la dépression, est une déficience d'une glande du cerveau qui ne fixe plus la sérotonine, d'ou le besoin en médocs anti dépresseurs que les hommes hésitent à accepter...Il ne s'agit en rien d'une faiblesse mais bien d'une maladie. et une maladie dévastatrice...
Ton histoire m'émeut profondément. Je ne trouve rien d'absurde dans ce que tu décris; c'est un traumatisme terrible et j'ignore si tu es soutenue par un ou une thérapeute ?
N'aies pas peur de craquer devant les gens que tu aimes : ils sauront te comprendre et te prendre dans leurs bras. Ca fait du bien, tu sais, meme si cela n'enlève pas ta peine. La crise va durer 20 à 30 minutes mais elle t'allègera. J'en ai eu une ce soir (enfin !!!). je suis chez ma cousine à Bruxelles et elle m'a simplement prise dans ses bras. L'empathie ça fait du bien.
derrière ton PC, tu vas peut-être ressentir notre soutien mais personne ne pourra te prendre ensuite dans ses bras si tu pleures derrière ton écran.
Je continuerai à te lire,
Bien à toi,
christine
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 23 décembre 2012 à 23:31:07
Bonsoir à tous, mes amis,

Aujourd'hui et hier, j'ai eu la chance de rencontrer deux amis à qui j'ai pu parler et avec qui j'ai pu pleurer tranquillement, sans me poser de questions. Comme cela fait du bien ! Il n' y a que ces deux amis à qui j'ai réussi à parler vraiment en trois mois. Quel soulagement d'être portée un peu !

Demain matin, je pars une semaine chez mes parents avec mes enfants. je vais sans doute y passer aussi le 31, tant cette année j'ai peur de me retrouver seule pour le réveillon.

ce soir, en faisant mes bagages, j'ai l'impression qu'en partant d'ici, de cette maison où nous nous sommes aimés, je vais trahir mon amour. j'aurais besoin d'emmener des "doudous" de lui.
En même temps, à la Toussaint, lorsque j'étais loin d'ici, chez mes parents, je respirais mieux dans une maison où il n'avait jamais été , où il n'avait jamais dormi. L'air y était plus léger.

Mardi à cette heure-ci, cela fera trois mois, une heure et 25 minutes. Trois mois ! une éternité

Notre histoire a duré à peine 6 mois : cela fait trois mois que je continue seule notre histoire, dont j'ai doublé la durée seule ...

Un jour viendra, très vite, où j'aurais été seule plus longtemps qu'avec toi, mon amour.

C'est vertigineux

Depuis deux jours, j'oscille de la colère au chagrin. Mes amis, qui m'aiment, m'ont permis d'oser exprimer ma colère. Et la colère sortie, je retourne au chagrin.

Je n'ai heureusement pas eu le temps de vivre un Noël avec Emmanuel. donc contrairement à vous, je n'ai pas de souvenirs de cette période, juste les regrets quand j'imagine son sourire devant les cadeaux que je lui aurais offerts. Je n'ai pas eu le temps de lui faire de cadeaux, ou alors deux bricoles, qu'il a refusé d'emmener chez lui, de peur que sa femme les vois, disait -il. Je sais maintenant que c'est faux : il ne les a pas emmenés parce qu'il voulait cloisonner, séparer ses deux vies. Il ne voulait pas que dans sa prison au 9ème étage, des objets lui rappellent combien il était heureux ici, chez moi.
Par contre, il semait plein de trucs chez moi. Heureusement, comme cela j'ai des objets qui me parlent un peu de lui. Par contre, cruauté des temps modernes, je n'ai rien d'écrit de sa main. Il m'a envoyé des centaines de sms, mais des lettres, des cartes, rien. J'ai été obligée de piquer au boulot un papier sur lequel il avait gribouillé son nom, pour avoir quelque chose.

Je me rends compte à quel point je manque aussi de gens qui peuvent me parler de lui. J'aurais besoin d'entendre combien il m'aimait, combien il était heureux, besoin d'entendre des anecdotes idiotes sur lui, sa jeunesse, son enfance.

Mais les gens qui le connaissaient... sa mère est à Vannes. Dès le début, elle a dit "C'est son choix, il faut le respecter" et elle n'aime pas que je pleure parce qu'elle refuse de pleurer.

Son père, qui est ici, l'a renié. il a renié son fils parce qu'il s'est suicidé et a suicidé son épouse. Il était adorable avec moi avant, je l'avais rencontré deux fois. Mais il a fait répandre dans la famille le bruit que je poussais son fils à abandonner sa femme. Il a même dit à tout le monde que je n'étais pas aux funérailles !!!

Sa soeur adorée est rentrée à la Réunion au bout de 3 semaines, elle a été hospitalisée dans une maison de repos là bas, mais je n'ai plus de nouvelles depuis plusieurs semaines. Son meilleur ami a coupé les ponts il y a deux mois. il essaie de se protéger, de prendre de la distance.

alors personne ne me nourrit d'histoires d'Emmanuel
je n'ai pas de souvenirs de vacances, de week-ends à la mer.
on n'est jamais allés au restaurant ni au concert ni au cinéma
on a trois pique-niques, cinq nuits. on a des litres de thé bus dans mon jardin.on a des pensées et des cyclamens plantés ensemble deux jours avant sa mort --et qui fleurissent encore.
on a pleins d'objets vieux et inutiles glanés dans les brics à bracs et à Emmaüs, je ne sais pas qu'en faire ni comment je vais pouvoir retourner à Emmaüs
on a trois semaines passées à l'hopital en aout au chevet de ma fille
on a le souvenir d'un mariage, en juillet, la seule soirée de liberté qu'il s'est octroyée en 12 années de mariage, et encore, il pleurait en laissant sa femme à son père pour la nuit...

alors si peu de souvenirs, les mots s'épuisent, le lien se distend lentement mais sûrement
je n'arriverai pas à le maintenir très longtemps

le grand vide me guette

peut être ce vide m'aidera-t-il, paradoxalement, en me poussant de l'avant ?

tant de douleur, d'égarement, pour une histoire si courte, si violente et si brutalement achevée

Je me connecterai chaque jour sur le forum pour continuer à vous lire, christine, kika, yohann et les autres

Je vais marcher dans la campagne en essayant de respirer fort

je vous embrasse tous, avec une pensée particulière pour ceux d'entre vous qui seront vraiment seuls demain,

Muriel


Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: pinky29 le 24 décembre 2012 à 16:35:16
Bonjour Muriel,
me voilà encore pour te dire que 'je comprends'. Ca fait du bien de pouvoir parler de lui, d'entendre dire par les autres comment ils voyaient votre histoire, raconter des petites anecdotes sur lui ou votre histoire...Pour que tout cela revive en nous.
Tout a passé comme un éclair, à peine le temps d'emmagasiner qqch. On voudrait tout retenir...
je comprends tellement ce que tu ressens, le besoin que tu as...
J'espère que tu pourras 't'évader' un peu là ou tu seras pour cette fin d'année.
Plein de pensées de soutien (et je suis contente que tu aies pu te laisser aller auprès de ces amis, qui semblent avoir eu la 'bonne attitude'. On a besoin de gens comme ça.
Christine
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 31 décembre 2012 à 17:48:01
Voici ce que j'ai écrit fin octobre et qui correspond encore assez bien à ce que je ressens en ce 31 décembre :


Ce matin, j'ai refait notre première promenade sur les bords de l'Huisne. Je me suis retrouvée dans l'allée, sous les grands peupliers, à l'heure exacte où, la semaine dernière, tant de gens en pleurs se rassemblaient à l'entrée du cimetière ...

Après la pluie diluvienne d'hier, le ciel était vif, dégagé. Le vent, dans les hautes branches, bruissait de chants venus d'ailleurs. Hier, de ton neuvième étage, j'ai vu l'eau s'abattre du ciel. Un rideau dense d'un jaune opaque qui tombait sur la ville. Toute cette eau sur la Terre et le ciel qui pleure.
Mais ce matin, les grands arbres m'ont raconté des histoires venues de hautes terres et d'un temps où nous savions écouter le vent.

Tu as marché à mes côtés, mon chéri.

Arrivée à la passerelle, comme je me demandais si j'aurais la force de poursuivre jusqu'à la presqu'île, j'ai vu que le pont était noyé.
Tu aurais adoré ! Des cataractes d'eau bouillonnante, le vacarme des embruns... La première fois que nous sommes venus là, l'Huisne était à sec et tu t'étais amusé à traverser sur les pierres. A la presqu'île par contre, l'eau nous avait cueillis dans toute sa puissance. Coupés du monde par cette barrière sonore, longtemps nous avions écouté le chant de l'eau, blottis l'un contre l'autre, silencieux...
Alors, cette passerelle noyée, j'ai pensé que c'était le juste cours des choses.
La rivière à sec qui devient un torrent rugissant : ta force de vie retenue tant d'années, ta source tarie et asséchée qui rejaillit de l'ancien volcan. Cette soif de vivre, cette avidité dont tu m'as abreuvée tout l'été.

Mais l'eau était trop forte. Contenue depuis trop longtemps, elle a rompu les digues, les tiennes et les miennes. Puissante et belle, elle court maintenant à la mer. Ce n'est pas la fin : l'eau coule, elle va ailleurs comme tu continues ton chemin, Emmanuel, grondeur, libéré, rugissant et avide de grands vents.


en 2012, j'ai connu l'amour et la mort. J'ai côtoyé l'au-delà et des pensées qui m'étaient lointaines, sur l'immortalité de l'âme, la présence de nos amours disparus. je me sens un peu bête de dire cela, mais je ne regrette rien,ni l'amour, ni la mort.

Muriel




Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 03 janvier 2013 à 10:36:56
3 janvier 2013
Je continue à aller plutôt bien. Pardon, mon chéri. J'ai acheté du tissu fleuri pour faire de nouveaux coussins sur le canapé, j'ai commencé à tricoter une écharpe à torsades très compliquées. Je m'attaque au ménage malgré ma grande fatigue physique.
Mais j'ai envie de choses neuves, de choses jolies.
Je veux déjà quitter, moi aussi, les vieux habits de l'hiver.

Ne pas aller trop vite. Savourer ce que je peux savourer.

Muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 15 janvier 2013 à 20:45:00
Bonsoir,
me revoilà, me revoilà en creux de vague, comme dirait yohann

et meeeeerde

je me sens à nouveau moche et inutile et vide et épuisée et en colère et ma vie m'ennuie et mes collègues me font mal et il fait gris et il fait froid
et il viendra quand le printemps, pour me réchauffer ?
et que sera le printemps sans mon amour ?

je suis de nouveau négative, je vais aller faire un ptit tour à la poubelle voir si je pourrais pas y jeter moi et mes pensées négatives

je n'ai plus l'envie ni la force d'écrire, même à vous, même ici

tant de douleur, sur toutes les pages, tant de douleur me navre

Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 16 janvier 2013 à 20:33:08
 Christine, Yohann, Angela, Fathio, Martine,

Merci de vos messages de soutien, je pleure, parce que je suis émue et touchée de votre gentillesse

ne vous inquiétez pas

je suis très très fatiguée, épuisée physiquement

pas très gaie mais pas au désespoir non plus, c'est plutôt le vide, je me traîne, mais j'ai déjà eu ça, alors  je ne m'inquiète pas trop

je vous embrasse
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 16 janvier 2013 à 22:58:26
ben en fait, ça va pas fort ...

j'ai écrit le nom d'emmanuel sur un autre fil, et les larmes coulent

je ne comprends plus ce soir ce qui m'est arrivé

cette histoire d'amour fulgurante, si courte

la soirée horrible du 25 septembre

et depuis ma vie en mode survie

la violence de son suicide me revient ce soir en pleine figure

bon j'ai eu presque 3 semaines de répit, tous ici ne peuvent pas en dire autant

mais merde ! c'est quoi le sens de cette rencontre, de cet amour ?

on s'est aimés 6 mois à peine et voilà dejà presque 4 mois que j'essaie de survivre à sa mort

c'est con, mais qu'est-ce que c'est con !

ma pauvre grande histoire d'amour n'a aucun sens et a ôté tout sens à ma vie

je me remets même à douter de l'amour que mon amour me portait

peut-être quand j'arriverai là-haut, vieille et ridée, mais pleine d'espoir et frétillante à l'idée de la revoir, peut-être Saint Pierre me dira :
 "Ah emmanuel, mais non, Madame, il ne veut pas vous voir, il est parti avec sa femme, vous savez, et ils sont très heureux ensemble depuis des années. Alors non, il ne vous recevra pas"

peut-être il s'est servi de moi, il a pompé toute mon énergie, tout mon amour, et puis il m'a plantée là et je suis vide, aigrie, amère et ahurie

je vais me coucher

muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 17 janvier 2013 à 21:05:38
bonsoir à tous

je lis depuis une heure les différents messages, je me disais "non, pas ce soir, trop fatiguée, pas la force d'écrire"

et puis me voilà

je me supporte pas ce soir, même écrire une phrase, avec la syntaxe et tout, cela m'est difficile

j'ai envie de taper n'importe quoi sur mon clavier, des mots de rancoeur, de colère , ah! la revoilà la colère, ma vieille copine depuis 3 mois

le plus drôle est qu'Emmanuel s'extasiait de ma "tolérance" et me reprochait souvent mon incapacité non seulment à me mettre encolère, mais aussi à éprouver de la colère

bon ben il doit être content maintenant

j'ai vraiment l'impression qu'il est parti. Je veux dire, depuis qu'on est passés en 2013 sans nos aimés, je me sens vraiment abandonnée dans cette année qu'il n'a pas vue, qu'il ne verra pas, où il ne me verra pas évoluer

il m'a lâchée toute seule dans le grand bain (en fait il a jeté deux femmes, une en vrai par la fenêtre, et moi symboliquement) et je lui en veux, je lui en veux
cet homme, il a déboulé dans ma vie, il a demandé de l'amour, l'a exigé parfois, m'a demandé un engagement, a chamboulé mes habitudes de vieille divorcée endurcie, a séduit mes enfants,
et pof ! il nous as laissés brutalement dans un désert d'incompréhension et de souffrance

je lui en veux
je lui en veux de m'avoir demandé si je voulais vivre avec lui un jour
je lui en veux d'avoir demandé en septembre ce que je voudrais pour noël en décembre
je lui en veux d'être parti avec sa femme qu'il disait ne plus aimer depuis des années (de la pitié, de la tendresse, oui, mais plus de désir, plus d'amour)
je lui en veux d'avoir fait de notre lieu de travail commun un désert où plus personne n'ose me parler et où plus personne n'évoque son nom
je lui en veux de l'hiver dans lequel il m'a plongée
du lit éternellemnt glacé
des sms qu'il a laissés sur mon portable, que je n'ose ni relire ni effacer, alors je les garde mmais ils sont lourds à porter
de sa soeur qui a fait une crise psychotique
de son appartement vide et froid abandonné (j'ai pris le train aujourd'hui et la gare n'est pas loin de son immeuble qui se dresse, 10 étages menaçants et à jamais hantés)
je lui en veux de son apparente insouciance parce qu'elle cachait une vraie détresse que personne ne voyait

je lui en veux de m'avoir fait croire que j'étais belle, forte et drôle
s'il me voyait maintenant, avec mes yeux cernés et mes 5 kilos perdus, je rase les murs, les jambes coupées la moitié du temps
je lui en veux parce que je commence l'année sans lui et peut être que c'est à moi que j'en veux de continuer à vivre malgré tout

je m'en veux d'avoir commencé l'année "en haut de vague" avec des envies de vivre et des bouts de projets, j'ai honte d'avoir fait ça, eu des envies et des projets alors que tous vous pleurez et que lui il est mort

muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: pinky29 le 17 janvier 2013 à 22:31:55
je m'en veux d'avoir commencé l'année "en haut de vague" avec des envies de vivre et des bouts de projets, j'ai honte d'avoir fait ça, eu des envies et des projets alors que tous vous pleurez et que lui il est mort

Muriel, ça me semble intéressant ça : comme si tu replongeais dans la vague creuse actuelle parce que tu te culpabilises d'avoir eu un petit haut ? Peut etre parfois a t on peur que, si on ne pleure plus, on ne les aime plus, ou on ne les a pas assez aimés, ou 1000 autres culpabilités ??
On croit que parce qu'on vit, on ne les aime plus ou qu'on les a oubliés...mais cela semble faux d'après les 'anciens'.
Mais a-t-on le choix ?? Nous, on est encore dans la vie, notre heure n'est pas venue et il faut en faire qqch de cette vie.
Oui, dans nos replongées, il doit y avoir de la culpabilité de ne plus (ou moins) pleurer...
Bisou,
chris
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Corail le 17 janvier 2013 à 22:51:47
Muriel,

J'allais indiquer la même phrase que Chris comme point de réflexion.

Autant je te comprends dans tout le reste, dans ton mal être, dans tes idées sur lui, etc.
Autant sur cette phrase, c'est + compliqué.

Le plus dur, dans notre état est de ne pas se poser trop de questions sur nos états antérieurs...
Ils ont été tels qu'ils ont été parce qu'on était nous tout simplement et que la vie nous portait.

On peut regarder en arrière pour voir le chemin parcouru quand il y a une amélioration.
Mais on peut aussi regarder en arrière quand on va très mal, pour voir que l'état de mieux être existe puisqu'on l'a vécu. Nous n'étions pas drogués, nous étions nous-même et oui, nous avons vécu de meilleurs moments. Des moments où on voulait aller de l'avant.

A présent, oui, on peut être bien bas. Mais il faut se retourner, revoir la lumière que l'on avait aperçue et se dire qu'elle reviendra. Quand, on ne sait pas... mais assurément elle reviendra.

Ne t'en veux pas d'avoir été toi-même. Ne t'en veux pas d'avoir eu des envies alors que d'autres pleuraient : on passe tous par des phases de "bas" et de "moins bas" et on ne peut avoir ces phases en symbiose !
Et tant mieux si certains vont mieux pendant que d'autres vont moins bien : ça nous permet de toujours voir la lumière que l'on aspire à retrouver.

Je ne me relis pas, pas le courage... mais comme d'habitude, tout s'entremêle quand j'écris....

Tendres pensées pour toi.

Virginie
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 22 janvier 2013 à 15:30:36
Bonjour à tous

je traverse à nouveau un gros creux, un gros trou.
ce matin je n'ai pas pu me lever pour aller au travail
j'ai dormi jusqu'à 11 heures, puis redormi de 13 à 15 heures

le monde me semble moins noir depuis que j'ai dormi, mais ce midi j'avais l'impression que plus rien de bon ni de beau ne m'attendait nulle part
ma maison est répugnante, petite, moche et pauvre et prendre le balai me semble insurmontable
j'ai des courbatures partout et me déplace comme si j'avais 80 ans

je ne pleure même pas, jsute épuisée...
écrire aussi c'et compliqué en ce moment

je ne me sens à ma place nulle part et surtout pas dans mon collège
il y a encore 3 mois, j'avais mon homme, que je voyais tous les jours au boulot, j'étais arrivée dans cet établissement en septembre 2011 et voyais tout en rose : j'allais y rester longtemps, devenir un bon prof, une personne de référence, on allait s'installer ensemble un jour
depuis je suis en mode survie professionnel et plus personne ne me parle
j'ai l'impression de ne plus rien avoir à faire ici, dans ce département d'adoption (je suis savoyarde) où je n'ai aucune famille et où je connais peu de monde finalement parce que j'ai fait une grosse dépression il y a 10 ans et depuis je change sans arrêt d'établissement sans avoir le temps de me faire des amis

j'ai le sentiment de n'appartenir à aucun groupe, aucune famille, je flotte vaguement dans l'existence
à 46 ans, il serait peut être temps que je trouve ma voie...

muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: clara le 22 janvier 2013 à 18:22:31
chère Muriel
la moindre des choses demande un effort surhumain, ça passera mais ça demande beaucoup de temps ... moi aussi je vois ma maison étroite, moche et sale ... on est vermoulu aussi de partout ... je pense que lorsqu'on dors, on doit tellement se contracter qu'on se réveille en mille morceaux...
Enseigner dans ces conditions me parait ... plus que difficile et en même temps, ça peut booster ... ça dépends quelle classe tu as ...
Ta voie, tu la trouveras certainement un jour dans une direction peut -être insoupçonnée ..
en attendant ...
trouve un peu de ressource dans le sommeil et prends soin de toi autant que tu en es capable .
je t'embrasse
Claire
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 22 janvier 2013 à 18:52:01
Merci clara,
tes encouragements me font du bien j'ai tant besoin de douceur
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: clara le 22 janvier 2013 à 20:20:30
tant qu'on pourra t'en apporter, on le fera ...
dors,dors bien
 :-*
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: zabou le 22 janvier 2013 à 20:35:26
Muriel,

j'ai le sentiment de n'appartenir à aucun groupe, aucune famille, je flotte vaguement dans l'existence
à 46 ans, il serait peut être temps que je trouve ma voie...

Maintenant, malheureusement tu appartient à un groupe le notre.
Je sais, la vie aurait quand meme pu mieux faire! aucun de nous n'a choisi!!! voilà la réalité et nous serons là pour toi.
Essai de ne pas te dévaloriser, la voie tu l'avais trouvée, on te la prise.
je t'embrasse fort.
zabou
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: pinky29 le 22 janvier 2013 à 22:33:15
Bonsoir Muriel,
c'est (malheureusement) peut etre ce drame qui va te faire trouver ta voie...
des réponses vont poindre quadn tout aura été profondément retourné en toi, dans tous les sens...et alors, enfin, au bout du chemin, une lumière apparaitra, une direction....
je veux croire à cela, meme si c'est parfois TELLEMENT difficile, incroyable, meme pas du domaine de l'imaginable...
on en est encore à ce stade à la 'survie'...ne mettons pas la charrue avant les boeufs...Tout est récent, choquant, tellement irréel...
on est là, petite Muriel, on se tient tous les mains.
Je t'embrasse tout fort ! :-*
chris
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: flowers le 23 janvier 2013 à 07:57:21
j'ai le sentiment de n'appartenir à aucun groupe, aucune famille, je flotte vaguement dans l'existence
à 46 ans, il serait peut être temps que je trouve ma voie...

Moi aussi je ressens cela depuis que mon chéri n’est plus là ! Nous sommes sur terre
entourés de personnes mais dans un autre monde. Plus d’appartenance, l’équilibre que nous avions à deux a disparu. Nous sommes détruits au fond de nous et il faut trouver la force pour pouvoir se reconstruire et de retrouver cet équilibre malgré qu’il nous manque un membre !

Nous allons tous y arriver un jour ou l’autre ! enfin j’espère

Florence


Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 23 janvier 2013 à 16:33:09
Le vide, le vide, le vide
tout est gris, plat,
pour contrecarrer ce néant, je vous copie un texte que j'avais publié sur un blog  en octobre, quand mes souvenirs d'Emmanuel étaient tout frais, quand je le sentais encore là, presque présent
aujourd'hui, presque 4 mois, tout cela me semble irréel
comme un reve qui hélas ne m'aide pas à vivre
et je n'arrive plus à écrire
ressuciter ce vieux texte, c'est aussi trouver une justification à ma peine, pouvoir me souvenir que oui cet homme m'aimait

Muriel

i]C'est un samedi soir sans mes enfants. Notre dernier sans eux, l'avant-dernier tout court. Le 16 septembre.Il a fait un temps radieux et chaud toute la journée, une de ces journée de fin d'été qui retient la lumière, et on sait que c'est une des dernières, alors on en goûte chaque instant avant de plonger dans l'automne.. Tu étais déjà resté tard, trop tard, pour le thé. Tu revenais vers 21 heures. Alors je t'ai bâti une cabane.

Il allait faire frais et je voulais que nous restions dehors. Sur les côtés du balcon, j'ai tendu la couverture verte, la rose, le plaid brun que nous avions choisi ensemble. Au sol, j'ai mis toutes les couettes propres de la maison. Des bougies . Les coussins bleus et dorés du vieux canapé. Par-dessus, la couette neuve de mon lit. Avec ma jupe violette.
Lorsque tu es revenu, tout était prêt ! Tu as écarquillé les yeux comme devant un immense cadeau à Noël. Tu étais pressé d'essayer les coussins, j'ai même pensé que tu allais sauter dessus. En fait, tu as plongé dedans.
On s'est blottis comme des gamins, sous la couette bien au chaud. Cocotte s'est glissée discrètement sur nos pieds mais elle ne nous gênait pas. Les bougies se reflétaient dans la porte vitrée, multipliant le reflet des petites flammes dansantes. On a fumé. On a regardé les étoiles et je t'ai réexpliqué la constellation du Cygne mais tu ne voyais pas les ailes, ni la tête. On a parlé tout bas, de tout, de rien, surtout de rien. On s'est tus. Tes yeux se fermaient tout seuls. De temps en temps l'un de nous chuchotait : "Qu'est-ce-ce qu'on est bien!".

Tu es resté tard. Tu disais : "Tu es extraordinaire, tu es une magicienne", et tu retardais le moment de partir. Tu es resté trop tard. Vers minuit, tu as renfilé tes gros godillots. J'avais mal, à chaque fois, de te voir lacer tes chaussures. D'ailleurs, la semaine suivante, tu as acheté des bottines à fermeture éclair.

Une dernière clope, puis nous nous sommes quittés précipitamment, presque sans parler.Tes yeux brillaient trop fort et moi aussi j'avais les larmes aux yeux mais je ne voulais pas te le montrer. Tu espérais revenir, si Teresa dormait. Elle était très réveillée alors tu n'es pas revenu. J'ai refusé que tu m'aides à ranger : une bonne magicienne ne divulgue pas ses secrets. ! En rentrant, tu m'as envoyé un sms : " Même pas froid. Sans doute étais-je encore revêtu du doux manteau de bien-être que tu m'as permis de porter ce soir. Bonne nuit."[/i]
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 23 janvier 2013 à 22:38:30
bonsoir à vous tous mes chers amis, yohann, malika, christine, marie et tous les autres tous les autres

je me sens un peu moins mal, au moment de me coucher

j'ai décidé d'y aller demain, de faire face à mes deux heures de cours du matin, et si ça ne va pas, j'irai pleurer chez le médecin

je voudrais vous remercier de votre écoute, de votre solidarité

dans mon entourage personne ne me porte ni ne m'aide à "contenir" ma douleur

mais oui, j'appartiens à cette communauté, les endeuillés et je suis fière de vous et de nous

il y a ici une écoute, une entraide que je ne trouve pas dans le monde extérieur

je commence à trouver du réconfort à réconforter un peu, parfois, c'est bon de se sentir un peu utile, un maillon d'une chaîne, non, pas d'une chaîne, d'une ronde de mains qui se tiennent et quand l'un tombe, on se penche pour l'aider à se relever

alors merci merci à tous d'exister et d'être ceux que vous êtes

nous nous sentons amoindris, diminués, vides
mais quelle générosité aussi ! quelle réflexion sur l'humain et ses limites !

alors on continue ainsi parce que nous sommes formidables et un jour on verra une petite lueur dans ce gris et ce noir qui nous étouffent

je vous embrasse

muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: pinky29 le 24 janvier 2013 à 01:39:08
A cette heure il fait nuit, Chère Muriel, mais je reviens vers toi pour te dire que OUI CET HOMME T'A AIMEE, et tu LUI AS FAIT DU BIEN dans son calvaire. OUI, TU AS ETE SA MAGICIENNE, tu  lui as tout donné, tout l'Amour que tu avais en toi. Et il t'en est reconnaissant...J'en suis sure. Tu as permis qu'un morceau de sa vie soit une embellie...Et il le méritait bien !
DOuces pensées à toi, sincèrement,
Christine (Pinky car il ya 2 Christine à présent)
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 25 janvier 2013 à 19:04:48
bonsoir

suis clouée au lit avec laryngite et extinction de voix totale
ai dormi toute la journée
du coup je n'ai même pas pensé qu'aujourd'hui cela fait 4 mois !

merci mon corps !

muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 25 janvier 2013 à 23:28:36
aujourd'hui, jour des 4 mois, , je n'ai pas pleuré ni crié : et pour cause, je suis clouée au lit, littéralement clouée, par une laryngite et totalement aphone depuis hier soir
c'est étrange, non ?
la maladie fait que je suis obligée de m'occuper de moi et non de lui, de penser à moi et non à lui, à sa pauvre mort
mais en même temps, je suis "muette"

dans mes rêves causés par la fièvre, il y en a eu un très bizarre que je voulais vous soumettre

 j'ai rêvé que j'étais paralysée (comme la femme d'Emmanuel), dans un autre rêve  je faisais une crise cardiaque.
et il y en a eu un autre où, couchée et malade,  je voyais venir un individu qui représentait le mal : pour ma survie et celle de mes enfants, je devais me lever, lui tordre le cou (littéralement) et lui arracher la tête
j'ai décapité un premier méchant
un autre a surgi, je l'ai trucidé aussi,
mon père est arrivé, je l'ai serré contre moi,
 puis un troisième méchant, que j'ai éliminé
et là dans mon rêve, je me suis dit : "si le prochain est emmanuel, je vais devoir lui arracher la tête à lui aussi, pour ma survie" et j'angoissais parce que je ne veux évidemment pas tuer emmanuel, mais c'était pour survivre, dans le rêve je n'avais pas le choix
heureusement il n'est pas venu et le rêve s'est arrêté là

je vous souhaite beaucoup de douceur pur la nuit froide
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: pinky29 le 25 janvier 2013 à 23:54:04
Ce reve doit avoir une réelle valeur symbolique ? Peut etre interessant à analyser ?
Dans ton reve, tu te bats en tout cas. Et tu gagnes ! Ca t'épuise mais tu gagnes ! Il te demande encore et encore de l'énergie pour affronter les démons, mais...tu t'en sors !
 :-*
bizzz
christine
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 26 janvier 2013 à 00:05:12
Oui yohann,
tu as raison : nous sommes formidables !!!

nous pouvons nous décerner des fleurs puisque plus personne ne nous en offre !

oui, nous sommes formidables et courageux (à notre corps défendant parfois) et solides (hum) et solidaires et compatissants et drôles parfois

tu entends, christine, si tu es toujours là ? tu es formidaaaable !

ouh là, je crois que la fièvre me refait délirer, mais j'essaierai de me souvenir de mon humour actuel la prochaine fois que je boirai la tasse (je pourrai venir relire ce post)

il est minuit une. emmanuel est mort depuis 4 mois, deux heures et 35 minutes et je suis toujours VIVANTE !
à la fois je crie de joie (mais je peux pas, aphone) et je me demande un peu si je dois m'en réjouir
mais je ne me réjouis pas de lui avoir survécu, oh non, je suis juste, là, maintenant, contente d'être encore ici et je vous embrasse fort

muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 26 janvier 2013 à 00:08:37
Merci Samy

Mais tu sais, j'ai un peu réfléchi et je me demande si ce rêve ne me dit pas de tordre le cou à emmanuel, quelle horreur !

me débarrasser de lui en moi pour avancer ?

c'est trop horrible

j'y re réfléchirai demain

je t'embrasse et te remercie de ton soutien, je sais qu'il est sincère

muriel
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: cathy le 26 janvier 2013 à 09:32:20
Bonjour Murielle,

Le fait qu'Emmanuel ne soit pas venu pour que tu lui tordes le cou te prouve bien que tu ne peux te "débarrasser" de lui. Non seulement, ce n'est pas souhaitable, mais quand bien même, tu ne le pourrais pas. Il fait partie de toi ; votre amour, c'est toi qui le portes et quoi que tu fasses il survivra en toi.

En aucun cas, le fait de t'en débarrasser te permettra d'avancer, c'est tout le contraire ! Il faut intégrer sa présence, son amour au plus profond de toi, et le faire "émerger" dans les moments difficiles. C'est très douloureux, inhumain parfois, mais petit à petit, la fusion se fait.

Soigne toi bien, prends soin de toi, ton corps est fatigué.

Je t'embrasse Murielle

CAthy
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 29 janvier 2013 à 23:05:58
Chers tous,

finalement je viens ici comme tous les soirs j'écrivais autrefois dans mon journal...miracle de l'internet, ou perversité de la technologie ?
je vous confie ce qu'avant je gardais pour moi...peut être qu'en ce moment "j'ai le droit"...de pleurnicher...de me plaindre...

Aujourd'hui, journée de m....J'ai repris le boulot avec ma tension trop basse. Tout a été de travers. Les élèves, je ne suis pas arrivée à les cadrer. Je les ai trouvés bêtes et agressifs, cela m'arrive jamais ! Les guéguerres entre collègues qui se battent pour avoir des heures sup : in sup por ta bles. Tout m'a horripilée et j'ai dû paraître aigrie, amère, dure, sans vie, éteinte. Les tensions sur le forum me dépassent totalement.
La fatigue a éteint la confiance que je ressentais hier.

Vraiment, je ne crois plus ce soir que quoi que ce soit de beau et de bon m'attende quelque part
Les journées ne sont qu'un amer combat contre des moulins à vent

Je ne suis pas triste, je suis juste épuisée et je ne trouve pas l'énergie de me relever.
Beaucoup parmi vous ressentent une douleur intolérable, moi je traîne juste mon asthénie dans un monde vide et gris. Le soir, les autres quittent le boulot et repartent vers leur conjoint, leur famille, leur apéro entre potes...
J'ai l'impression de n'avoir rien et de n'être rien.
Je ne sais où je trouverai la force de me relever. Le quotidien use déjà toute mon énergie.

Je ne veux pas arrêter de travailler, je deviendrais folle ici toute seule, mais que vais-je donc faire de cette vie ?
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Buzz le 29 janvier 2013 à 23:10:29
Bonsoir Mirele,
l'épreuve que tu subis t'a montré la vraie valeur des choses...c'est pour ça que tu ne supportes pas ce que tu supportais avant...
Oui les collègues rentrent et retrouvent un conjoint, mais d'autres n'en retrouvent pas...
Tu es toi et c'est déjà beaucoup...Tu avances puisque tu as travaillé...chaque pas est un pas de géant pour qui connaît le deuil...
Bisous
Pascal
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 29 janvier 2013 à 23:26:34
Pascal

c'est gentil de me dire cela mais je ne me sens pas géante du tout ! toute petite au contraire et fragile dans un monde que je ne comprends plus et qui fonctionne sans moi !

Mais je vais garder ta phrase pour aller dormir, cela me réconforte un peu. Merci

La petite géante
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Buzz le 29 janvier 2013 à 23:30:04
ce qui compte, c'est la taille de notre amour...
Je t'embrasse et te souhaite de doux rêves de "géante"...
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 15 février 2013 à 17:38:22
Bonjour à tous,

Je viens vous exposer une contrariété administrative. Hier j'ai reçu dans mon casier ma notation administrative pour les 6 mois écoulés depuis la rentrée scolaire.
Or pour la première fois de ma vie, mes appréciations sont basses : "assez bien en ponctualité assiduité"; "assez bien en autorité rayonnement" et idem pour "efficacité activité".
j'avoue que je me sens peinée de ces notes.
certes je ne suis pas un modèle de ponctualité (j'arrive généralement juste à la sonnerie et il m'arrive au moins une fois par semaine d'être carrément en retard) mais j'ai été absente 3 semaines en septembre puis 2 jours en décembre, deux en janvier et encore deux cette semaine, à chaque fois sur avis médical.
Je n'ai aucun problème majeur  d'autorité et je reçois sans arrêt des élèves, qui lisent beaucoup et qui m'aiment bien. Il est vrai que mes cours sont parfois très moyens, mais généralement cela se passe bien.
il est vrai aussi  que je n'ai monté aucun projet spécifique, la gestion du quotidien me demande tant d'efforts !
Le médecin du travail a d'ailleurs préconisé un allègement d'emploi du temps qui ne vient pas...

Je trouve cela injuste. Il faudrait que je trouve le courage d'aller voir mon supérieur et lui dire : "imaginez qu'un collègue de cet établissement, quelqu'un avec qui vous travaillez quotidiennement se suicide, ce serait déjà dur. Mais en plus, imaginez que ce soit la personne que vous aimez. Et imaginez en plus qu'elle se soit suicidée avec vous au téléphone. Comment iriez-vous travailler ? dans quel état d'esprit ?"
je vais essayer d'aller le voir lundi, mais je vais pleurer, il ne va pas aimer et va se montrer froid ou désagréable et je vais passer pour celle qui pleurniche et se plaint sans arrêt!!! j'en ai marre !

Muriel

Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: aeris le 15 février 2013 à 20:27:07
TOn problème, je l'ai vécu !
Et oui, étant prof, je comprends ce que tu veux dire.
A la mort de mon mari en aout 2011, j'ai repris le travail 1 semaine puis j'ai enchaîné les arrêts maladie jusqu'à l'acceptation de mon congés longue maladie par le comité médical.
La principale ne m'a pas augmenté ma note administrative (comme fait tous les ans) alors que j'étais sensé reprendre après les vacances. Seulement, en off, je lui ai confié mon besoin de demander un congés longue maladie et de finir l'année ainsi... Elle s'en ait servi contre moi pour ne pas m'augmenter !! Double peine, couteau dans le dos, je lui ai dit ce que j'avais ressenti, comme une trahison... Rien n'y a fait. Comme si on avait choisi cette situation...
Même en congés parental, ne travaillant pas de l'année par choix, mon chef de l'époque m'avait augmenté ....

Bref, je te conseille vivement d'aller voir le médecon scolaire et de demander la mise en congés longue maladie. Tu pourras alors vivre ton deuil en sérénité. Peut-être que le travail te fait du bien aussi, il n'y a pas qu'une seule façon de faire pour aller mieux.

En tout cas, l'adminstration s'en fout, les papiers, le boulot, tout est difficile.

Pour finir, après mon année en congés longue maladie, j'ai repris à mi-temps thérapeutique depuis septembre. Avec plaisir mais plus ça serait trop avec mes 2 enfants en bas âges.

Douces pensées.
Aurélie.
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Flordunet le 16 février 2013 à 12:05:06
 moisBonjour Muriel

Dire que j'ai cru être la seule à me mettre en arrêt longue maladie après de décès de mon mari ( prof EPS et moi aussi ) si j'avais connu le site à l'époque je ne me serais pas cru anormale, faible !
mon médecin marié à une prof d' anglais me le disait tout le temps : Florence sois douce avec toi même ...
tu as ce poignard planté dans le coeur et personne ne le voit.
Tu as le coeur qui saigne en permanence ...
Peu importe ce que les autres disent ou pensent, tu es épuisée ( d'ailleurs au bout de 9 mois j'ai déclenché une hypothyroïdie glande de l'énergie par excellence m'a appris mon médecin ).
Oui Muriel pense à toi si tu perds pied devant les élèves c est que tu as 95% de ton cerveau occupé par ton deuil !
et tu fonctionnes par automatisme.
Tu dépenses un énergie folle à rester en vie alors gérer des élèves ...!
En tout cas moi c était au dessus de mes forces.

Aurélie te donne un bon conseil : prendre soin de toi à tous niveaux : le moins de contraintes possibles.
Tu n'as pas choisi que ton compagnon se suicide donc maintenant tu dois prendre le temps de te reposer et panser tes blessures profondes.
Connais tu l' EMDR cette méthode dormidable qui soigne les chocs et les stress post traumatiques ?
david servan screiber en parle très bien sur you tube ou daily motion.
mes enfants et moi nous sommes soignés ainsi ... cela tient de l'incroyable les résultats obtenus.

le temps du deuil est long ...
Nul ne sait quand le jour où on retrouve un regard souriant sur la vie et l'avenir mais crois moi tu y arriveras même si ton mari s est suicidé...
Connais tu Espérance et Vie ? C est une association chrétienne qui organise chaque année un we pour les jeunes veufs et veuves.
Il ne faut pas être nécessairement croyant mais en tout cas ne pas être " anti "chrétien.
Lors de ce WE il y a des conférences sur le deuil, des carrefours, des ateliers, des témoignages.
la diversité des thèmes abordés est inoui.
le deuil brutal, le deuil par suicide, le deuil sans enfant, et le corps dans tout çà ? vivre après ? les enfants orphelins, le quotidien avec des ado , les hommes et les femmes face au deuil : différences- ressemblances etc etc etc
Nul n'est obligé de participer au temps de prière ou la messe. pas de " pointage ", rien ...

Oui avec ma participation à ce 1er WE à Lyon à l'époque, je dis depuis :
il y a eu un avant et un après ...
J'ai arrêté de survivre et je me suis mise à revivre ...

Courage Muriel

Bien à toi

Florence
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Flordunet le 16 février 2013 à 12:10:08
PS tu trouveras tous les renseignements pour prendre contact avec cette assocaition sur leur site web à espérance et vie tout simplement.

enfin la responsable nationale ( si cela peut t'aider à la contacter s'appelle sylvie simon et elle aussi son mari s'est suicidé ...)

Sois douce avec toi même...

Florence
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 16 février 2013 à 18:07:58
florence, Aurélie,

Merci de vos réponses, j'y trouve du réconfort et un peu de force. Effectivement, je n'ai pas choisi le suicide de l'homme que j'aimais. Je me sens si faible et démunie, si fragile, j'ai perdu de la confiance en moi : d'abord la fatigue, comme tu le dis florence, je dépense tant d'énergie à rester en vie alors même que la vie ne me fait plus envie, c'est dur de se donner des coups de pieds aux fesses sans arrêt, tout est devenu effort.
Et puis, narcissiquement,je dois admettre que je suis fragilisée : qui suis-je donc finalement puisque cet homme qui disait m'aimer m'a abandonnée, puisque toute la force de mon immense amour pour lui n'a pas suffi à le retenir du côté de la vie ?

Je ne crois pas que le congé longue durée soit la bonne solution pour moi. Je viens de passer deux jours à la maison et quand je ne travaille pas, je me retrouve dans une solitude absolue, c'est atroce cette maison silencieuse !

Le médecin du travail préconise un allègement d'emploi du temps, je ferais 20 heures au lieu de 30 (je suis documentaliste). Sauf que je l'ai vu le 17 janvier et mon principal attend un avis officiel(qui tarde) pour recruter quelqu'un. Depuis le 17 janvier, j'y vais tous les jours en me disant "allez, c'est bientôt fini, on va bientôt prendre mon deuil en compte, je vais pouvoir souffler".........

Florence, ton message me touche vraiment au coeur : être douce avec soi-même...j'avoue que je ne sais pas bien comment, et tou m'est une contrainte ! Tu crois que je dois vraiment éviter ces contraintes ? Mais comment ? Et puis il ne faut pas abuser ! Mes vieux principes judeo chrétiens resurgissent....."Il faut souffrir"

En tout cas, je vais de ce pas visiter le site Espérance et Vie

Merci encore à vous deux, je me sens un peu moins nulle et mal

Muriel
Titre: Re : Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Yohann le 17 février 2013 à 11:31:39
Muriel,

En lisant une nouvelle fois cette approche, je m'interrogeais...
Parce que souvent, cette approche que tu as varie en fonction des émotions, des ressentis, de tant de choses dont certaines sont des hypothèses.

"Cet homme qui disait m'aimer m'a abandonnée"

Nul ne peut refaire l'histoire, son histoire, leur histoire.
Il a fait ce qu'en son âme et conscience il pensait devoir faire pour elle.

Et mon interrogation venait de là, en la disant autrement.

De tout temps, l'Homme a préféré la mort au déshonneur, non pas pour lui-même mais pour ceux qu'il aime !
Pour que ce déshonneur ne rejaillisse pas sur eux, pour les protéger.
Car la mort efface alors ce déshonneur, le transformant en honneur du courage.

Pour ceux qu'il aime dont toi, pour que tu n'aies pas à assumer le déshonneur de sa vie, pour toi, il a choisi sa mort.

Un jour, je t'ai dit : "Dans l'étau, entre le marteau et l'enclume", en lui, avait-il encore le choix de faire, peut-être que non, ... alors il a fait celui de te protéger pour ta vie !

Ce peut être une autre vision.


 :-*

Yohann

Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: jola le 17 février 2013 à 16:34:39
My god je suis contente de lire vos souffrances parce que moi après 13 mois de décès subit de mon conjoint je suis dans le grouffre
Comme je suis prof aussi mais au Québec, cette semaine mes élèves m'em ont fait voir de toutes les couleurs mais c'Est la souffrnace qui me rend morose et triste
J'étais bien partie mais j'ai l'impression d'avoir fait un énorme recul oufffffffffffffffff
Merci
Je reviens sur le site car besoin de partager
Jola, Tara :'(
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: didouama le 18 février 2013 à 22:10:35
La perte de celui qu'on aime, c'est une tempête, un fracas, un coup de poignard. Et nous on entend partout qu'il faut être fort! Mais comment l'être alors qu'on a encore ce poignard et qu'il nous fait saigner et nous épuise, on est même pas en train de cicatriser qu'il faut déjà guérir ou le paraître. Maintenant l'entourage pour certains ne veulent pas voir la mort en face et les victimes collatérales et d'autres ont peur qu'on ne se relève pas et nous encourage des fois maladroitement. Ensuite il y a le monde du travail, qui peut être cruel. Moi je me suis donnée un seul conseil: prendre soin de moi comme si c'était mon amour qui me soignait. J'ai acheté des huiles et je me masse, je prends des bains et j ouvre une bouteille qu'on aimait, je fais des soins, je médite, je me mets sous la couette avec une bouillote, j'accepte tous les cadeaux, je regarde ce que je veux à la télé , je dis merde si j'ai envie, je délègue, je me soigne comme il le voudrait ou comme je le ferai pour lui. Je prie pour la paix de son âme et j'essaye de voir ce que je ressent. Cela n'empêche pas que je suis épuisée, terrifiée, et en mille morceaux mais pour cela je me centre sur mon corps en me disant que le jour ou mon esprit réacceptera d'y séjourner pleinement il le retrouvera à peu prés en bon état. Plein d'amour, on ne sait que trop que c'est l'essentiel sur cette terre, l'antithèse de la mort....
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 19 février 2013 à 19:29:19
merveilleuses résolutions, Didouama

merci du fond du coeur pour ton message
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 24 février 2013 à 16:26:09
COMMENT VIVRE LE VIDE INTERSIDERAL DES WEED ENDS ?

j'ai à la fois un peu envie de faire des choses, et pas envie de bouger.

de toute façon, je ne sais plus quoi faire de mon temps libre

rien n'a de goût

je n'ose pas solliciter les rares amis que j'ai, c'est toujours moi qui demande

c'est vide, un dimanche qui ressemble à un dimanche, quoi
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: *Ephémère* le 24 février 2013 à 16:45:16


*

Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: *Ephémère* le 25 février 2013 à 08:35:41


*
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 26 février 2013 à 00:15:39
Ouf !
J'ai passé le cap des 5 mois ce soir à 21 heures 26. Re-ouf. Voilà 5 mois, j'attendais aux urgences parce qu'on m'avait fait monter dans l'ambulance toute seule, sans Emmanuel, et je criais : "Mais c'est pas moi, c'est lui la victime ! c'est lui qu'il faut soigner !!!"
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 12 mars 2013 à 23:55:26
Ce soir est un mardi
et dans la neige immaculée
sur le balcon où nous nous tenions
enlacés
j'ai tracé les lettres du nom
d'Emmanuel
dans la neige légère
ces lettres rendent la nuit moins
noire
moins froide
rendent la nuit
moins nuit
dans la neige plus claire
je veille
et son nom
me protège

va en paix mon amour
Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: *Ephémère* le 13 mars 2013 à 07:46:53


Chère Muriel,

Il est bien agréable d'avoir un petit signe de toi.

A bientôt ?

Que la peine reste discrète pour chacun de nous aujourd'hui...


Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: Yohann le 13 mars 2013 à 11:52:42

Muriel,

d'Emmanuel
[...]
je veille
et son nom
me protège

va en paix mon amour.



Sois en paix aussi, Muriel, avec toi, avec lui et la vie !
Veiller et se protéger dans son souvenir.
Oui, c'est vraiment ça ! ;)


 :-*

Yohann

Titre: Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
Posté par: mirele le 13 mars 2013 à 19:16:21
Marie, merci de ta main tendue, je la prends et serre la tienne très fort parce que je sais que tu en as besoin aussi

Ephémère, merci, tu es là, tu es toujours là pour tous et toi aussi tu veilles

Yohann, je sais que tu me souris et attends mon sourire au travers des larmes

Que mon affection et mon amitié puisse vous soutenir un peu aussi