Auteur Sujet: épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée  (Lu 26660 fois)

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Tinou

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #30 le: 20 décembre 2012 à 08:58:15 »
Muriel, rien ne le fera revenir, mais je suis certaine que là où il est, il entend....
Martine

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #31 le: 20 décembre 2012 à 14:49:17 »
Comme j'ai écrit sur différents fils, je rassemble mes posts sur le fil que j'ai créé. J'ai envie de donner de la cohérence à mon histoire, elle en a si peu. Donc ce texte, vous l'avez déjà lu dans "Racontons notre histoire.

RECIT DU 25/09/2012



Il y a bientôt trois mois, mon amour était déclaré mort au bas de son immeuble.

d'abord, vous devez savoir qu'il était marié à une femme malade de sclérose en plaque depuis 12 ans. Il s'en occupait seul à leur domicile,il refusait toue aide médicale et toute idée d'hospitalisation. Quand je l'ai rencontré, il y a un an, sa femme était déjà grabataire et invalide depuis plusieurs années. Depuis quelques mois, elle ne parlait plus, ne voyait plus. Il ne savait même pas si elle le reconnaissait, si elle était encore consciente de sa présence à lui. Il croyait sa vie finie. Lorsqu'il rentrait chez lui, il affrontait la maladie, le désespoir, la solitude la plus atroce face à cette femme qu'il avait aimée et qui n'était même plus l'ombre de son amour.

Puis nous nous sommes rencontrés. Je savais qu'il ne l'abandonnerait jamais. On faisait des projets quand même. Nous savions qu'il se passerait des mois, des années, avant que nous puissions vivre ensemble. J'acceptais cette réalité, parce qu'elle faisait partie de mon Emmanuel et de la relation que nous avions.

J'écrirai plus tard notre amour, je raconterai l'homme merveilleux qu'il était. Mais ce soir, il y a deux mois exactement qu'il est mort, le 25 septembre et j'ai besoin de raconter sa mort atroce, horrible, absurde et par certains côtés tellement incompréhensible.

Le soir où il est mort ...

Tout a commencé à 19 heures 40 …

Je l'avais quitté vers 18 heures 30 devant le collège, Nous venions de co-animer notre premier cours ensemble et nous félicitions de notre succès. Nous avons traîné comme d'habitude avant de rentrer dans nos chez-nous respectifs.
 Projets pour le cours de la semaine suivante. Une dernière cigarette dans les rayons du soleil couchant, devant son scooter et au pied de ma voiture. Le lendemain nous devions manger ensemble à midi, et je lui ai demandé ce qu'il voulait manger. Il m'a répondu que même une boite de raviolis lui ferait plaisir, en ma compagnie. Il riait. Il a dit qu'il amenait les croissants du petit-déjeuner.
Il a eu l'air absent tout d'un coup, et il est parti très vite. Je savais qu'il angoissait de retrouver sa femme, qui poussait des râles inarticulés depuis trois jours.

J'ai fait un saut au supermarché, pour acheter un plat préparé pour le lendemain, et pour ce soir-là, j'ai pris un poulet rôti.

En arrivant à la maison, j'ai mis le poulet à réchauffer et j'ai dit aux enfants qu'on mangeait dans un quart d'heure. En attendant, j'ai voulu appeler ma maman. Il était 19 heures quarante, je m'en souviens parce que j'ai vérifié l'heure avant de téléphoner.

J'ai dû faire un faux numéro, parce qu'au lieu de ma mère, j'entends la voix d'Emmanuel . Surprise, je dis bêtement :
-- Emmanuel ? Ça va ?

Et il me répond d'une drôle de voix, une voix assourdie, que non. Je sens tout de suite qu'il y a quelque chose d'anormal. Il refuse de m'en dire plus. Je lui demande si je le dérange et il confirme.
Je lui propose alors de le rappeler dans un quart d'heure, le temps de manger vite fait et de passer un peu de temps avec mes enfants. Il me dit :
-- Dans un quart d'heure, je risque de ne pas répondre.
-- Alors je t'appelle dans une demi-heure.
-- Je ne répondrai pas non plus.
-- Bon, alors téléphone-moi quand tu en auras envie, s'il te plaît, je suis inquiète.
-- Je ne te téléphonerai pas ce soir, mais j'allais t'écrire, pour t'expliquer.

Je comprends alors qu'il veut rompre, mettre un terme à notre relation. Il en avait déjà parlé, plusieurs fois, mais comme d'une éventualité. Ce soir, je comprends que c'est sérieux et j'ai la voix qui tremble, mes larmes montent :
– OK, mais tu peux essayer de m'expliquer là, au téléphone, me laisse pas comme ça ...
Puis, après un silence, il dit :
-- Bon alors,tu veux bien laisser tes enfants manger tous seuls ? Je ne vais pas te prendre longtemps, j'en ai pour 5 minutes. Si tu ne me parles pas maintenant, tu ne me parleras jamais.

J'accepte, évidemment, persuadée que mon amour va rompre, que c'est notre dernière conversation. J'essaie d'être calme, de respirer, de ne pas le stresser davantage qu'il ne le semble déjà. Il prend une grande inspiration :
-- D'abord, Muriel, il faut que tu saches que je t'aime plus que tout au monde !
Je ris à travers mes larmes et déclare avec fougue :
-- Oh oui ! Ça, je le sais ! C'est la seule chose dont je sois vraiment certaine ! Je t'aime tant moi aussi.
Un silence, et puis :
-- Tu sais, je t'ai menti, un peu … Pour Teresa, je ne t'ai pas tout dit... c'est beaucoup plus grave que tout ce que je t'ai dit. Teresa, c'est fichu. Pour Teresa, c'est fini …

Je comprends alors que sa femme est morte Je pleure de plus belle.

Je lui propose de venir, pour l'aider, lui tenir compagnie, pleurer avec lui. Il refuse. J'insiste. J'entends alors des bruits étranges. Comme un cri, mais un cri inarticulé, horrible, comme un animal blessé. Il sent que j'ai entendu, que j'écoute et il dit :
-- Tu sais, je n'en peux plus de l'entendre … c'est tout le temps, c'est trop dur …

Je réalise alors que sa femme n'est pas morte, qu'elle est là,  à côté, et qu'elle pousse ces cris affreux qui semblent monter de très loin dans son corps. Nous nous taisons tous les deux pour écouter les cris de Teresa. Il reprend :
-- Pour elle, c'est trop tard, c'est fichu …

Je comprends que Térésa est mourante. Je me propose d'appeler les secours. Il refuse catégoriquement. J'insiste : il se fâche. Je suggère d'appeler pour lui son père, qui habite à côté, ou de faire appel à son ami N., le seul à être déjà entré dans l'appartement. Il s'entête dans son refus, répétant que c'est trop tard, que c'est fichu.

Et dans un éclair, je ne sais pas comment puisqu'il ne me dit rien clairement, je réalise qu'il va euthanasier sa femme, mettre fin à ses 12 années de souffrance. Je suis glacée d'horreur mais ma décision est prise en un clin d'oeil. Je respire un bon coup :

-- Emmanuel, tu ne peux pas faire ça tout seul. Je viens, je veux être avec toi …
--  Je ne veux pas que tu viennes. Je t'interdis de venir, tu m'entends ? C'est trop horrible, trop horrible...

Cela  doit bien faire maintenant 45  minutes que nous sommes au téléphone, moi suppliant, réduite à deviner l'impensable, lui parlant à demi-mots, fuyant, évasif …

J'entends toujours les cris de Teresa. J'entends aussi de drôles de bruit que je n'identifie pas, comme du vent, ou de l'eau. J'imagine qu'il a mis Teresa dans un bain chaud, qu'il lui a ouvert les poignets, qu'elle se vide.

Et lui il répète que c'est trop horrible, trop horrible.

Je parviens à me ressaisir et j'essaie de le raisonner.

-- Tu ne peux pas rester tout seul, laisse-moi venir !
-- je te l'interdis, tu entends. Ce sera encore plus horrible.
-- Ecoute, Emmanuel, tu ne peux pas faire ça. Tu vas foutre ta vie en l'air, et la mienne avec. Tu vas te retrouver en tôle...
-- J' ai tout prévu. Ils ne me prendront pas.

Je propose pour la énième fois d'appeler les secours, ils vont l'aider, ils vont t'aider, laisse-moi t'aider, Emmanuel...
– Non, je ne veux pas que tu viennes. Tu seras trop malheureuse, ce sera trop horrible.

Et puis, tout d'un coup, l'évidence. Je me couvre de sueur de la tête aux pieds. Je suis glacée jusqu'aux os : il va tuer sa femme et se tuer avec !
Fébrilement, je garde Emmanuel au téléphone en continuant à lui dire que je viens, que je l'aime, et je griffonne un message pour mon fils qui est à côté : Appelle le samu, envoie les secours à son adresse, il veut se suicider.

Pendant un temps qui me semble infini, mon fils a le Samu en ligne. Ils comprennent mal la situation, mon fils s'embrouille, finit par se faire entendre. Je continue à retenir Emmanuel :
-- Je t'aime, je ne veux pas vivre sans toi. Je veux me réveiller avec toi tous les matins, je veux te serrer dans mes bras tous les jours de ma vie. Tu m'entends, Emmanuel, je t'aime et ta place est à mes côtés.

Enfin, mon fils revient et crie triomphalement : « Ils arrivent ! »

Emmanuel a entendu :
-- Oh! Tu as appelé les secours. Ma chérie, je ne t'en veux pas.
-- Oui , Emmanuel. Ils arrivent, j'arrive ! Tiens-bon, mon chéri ! On arrive, accroche-toi !
-- Non, ne viens pas ! C'est trop horrible. Ma chérie, tu seras encore plus malheureuse.

Mes enfants m'entourent :
– Emmanuel ! Ne fais pas ça ! On t'aime ! Ta place est avec nous, ne fais pas ça !

Puis il crie dans le téléphone :
-- Ma chérie, ma chérie, ma chérie ! Je t'aime, je t'aime, je t'aime ! Je pars, je pars, je pars...

Soudain, le silence, juste des bip-bip-bip. La communication est coupée. Horrifiée, je lâche le fixe, attrape le portable et mon manteau. Je fonce dans la voiture en criant aux enfants que j'y vais.
En fait, je ne suis pas encore paniquée. Je suis persuadée qu'il a pris des médicaments, chez eux, il y en a tant ! Le temps que les secours arrivent, ils vont le prendre en charge, lui faire un lavage d'estomac, ils vont sauver mon amour ...

Il doit être un tout petit peu plus que 21 heures.

En conduisant, je rappelle le Samu, pour être sûre qu'ils arrivent, je leur dis de se dépêcher, ils me demandent si j'ai le code pour accéder à l'entrée de l'immeuble, je leur dis que non, mais dépêchez-vous …

je rappelle Emmanuel. Contre toute attente, il décroche...Toujours ces drôles de bruits en fond :
-- J'arrive, Emmanuel. Tiens bon. Accroche-toi, je t'aime et j'arrive avec les secours.
-- Ma chérie, c'est trop tard ! Ma chérie, ma chérie, ma chérie ! Je t'aime, je t'aime tant. Je t'aime ! Je pars, je pars, je pars.

Puis une voix déjà lointaine :
Je suis parti, je suis parti, je suis parti...

La communication est de nouveau interrompue.
Cette fois, je fonce. Dans mon affolement, je me trompe de chemin, perds de précieuses minutes à faire un détour. Quand j'arrive au bout de la rue N., je vois et entends les ambulances au loin. Je les suis.Devant l'entrée de la résidence, un gendarme m'intercepte. J'explique qui je suis . Il me dit d'attendre. Je trouve la force d'appeler ma fille pour lui dire de prévenir le père d'Emmanuel. Le policier revient et me fait signe de le suivre. Il me dit :
-- Quand on est arrivés, ils n'avaient pas encore sauté...

Je m'arrête net. Sauté ? Il a dit « sauté », alors ce ne sont pas des médicaments, Oh non !

-- Pour la dame, c'est trop tard, mais le monsieur, ils sont en train de s'occuper de lui.

En bas de l'immeuble, les gyrophares, les ambulances. Je vois la fenêtre grande ouverte, tout là-haut, au 9ème étage, c'est haut, c'est si haut. Et en bas, j'aperçois les jambes et le torse de mon Emmanuel, étendu sur la pelouse. On me fait monter dans une ambulance. Je ris et je dis : « C'est pas moi, la victime ! Occupez-vous de lui ! ». De loin, je vois qu'on lui fait un massage cardiaque. Cela dure longtemps. Puis un homme monte dans l'ambulance. Il se présente comme le médecin. Et il me dit que «  Le monsieur est parti. »

Il était 21 heures 26 le 25 sept 2012. Il est à présent 21 heures 55 et nous sommes, nous les vivants, le 25 novembre 2012. mon amour est parti.

Je m'excuse de la longueur et de la dureté de mon récit. Merci à ceux qui m'ont lue. Pardon, j'espère ne pas ajouter à votre peine, mon histoire est tellement, tellement absurde. Par moments, je n'y crois toujours pas. Tant d'amour, pour elle, pour moi et un tel désespoir !
J'espère comprendre un jour ...

Je n'avais jamais raconté cela, sauf à la police.

Je vous souhaite, à tous, une belle nuit, et qu'elle nous soit douce et apaisante autant que cela est possible,

Muriel

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #32 le: 20 décembre 2012 à 14:51:18 »
Ecrit le 3 décembre à une autre rubrique :


Bonjour,
J'ai voulu aujourd'hui vous livrer un beau souvenir, qui m'est remonté précisément grâce à ce forum. J'ai commencé grâce à vous à écrire les moments heureux. Je n'hésite plus à les convoquer, ils me sont si doux, ils me font du bien.

une semaine avant sa mort, nous sommes allés lui acheter des chemises et des bottines.
Il voulait jeter les vieux habits de la solitude et du malheur, les sweats détendus et les pantalons trop grands depuis qu'il avait minci et qui lui donnaient l'air d'un grand-père dans son jardin. Il tenait absolument à ce que je vienne avec lui pour lui donner mon avis, et de toute façon, nous avions si peu de temps à passer ensemble que nous nous consacrions l'un à l'autre tous nos moments de loisirs... Nous ne sommes jamais allés au restaurant ni au cinéma, mais dans dans les boutiques, oui ! Emmanuel adorait le shopping ! Moi beaucoup moins...

Donc en ce lundi de mi-septembre, je terminais à 15 heures et lui à midi. Il m'attendait pour la séance boutiques. Comme j'étais crevée et qu'il faisait beau, on a pris le temps de boire un thé, allongés sur la pelouse sous le grand bouleau qui domine mon jardin. On est restés longtemps à regarder le vent jouer dans les feuilles ensolleillées, à goûter la chaleur sur notre peau. Je me souviens, il avait la tête posée sur mes genoux et mes doigts jouaient avec sa barbe naissante. On s'est dit : "Il faut en profiter, c'est sûrement un des derniers beaux jours de l'été..."
Vers 16 heures, direction les boutiques. Ah ! les chemises ! Nous sommes tombés sur un magasin qui proposait des chemises "easy iron" et cintrées ! Juste ce qu'il cherchait en vain ---et moi derrière lui -- depuis plusieurs semaines ... Il a palpé, tâté, soupesé. Il a déballé, , comparé les teintes, les nuances. Il voulait les acheter toutes : une bleue, une rouge, une violette, une mauve, une autre d'un violet plus clair ... Il est entré dans la cabine avec au moins dix modèles ! Derrière le rideau il s'est déshabillé, et moi je n'arrêtais pas de le taquiner. Je passais sans arrêt la tête en lui demandant comment ça allait, et il poussait à chaque fois des petits cris de vierge effarouchée. C'était très drôle. et puis je passais le bras pour toucher sa taille, son ventre derrière le rideau et il criait de plus belle et je riais plus fort.
Il est reparti avec une chemise d'un rouge à la fois gai et profond et a demandé à la vendeuse de lui mettre la violette, la mauve et l'autre violette de côté. Il voulait d'abord tester le côté easy iron" avant de toutes les acheter ...

Après sa mort, une de mes obsessions était de retrouver cette chemise rouge qu'il avait mise dès le lendemain et qui lui donnait un air rayonnant. A son appartement, j'ai plié et rangé soigneusement tout son linge. Plier pour la première fois les vêtements de l'homme que j'aimais, c'était un peu l'épouser, accepter le fait que j'étais désormais sa femme, même s'il était mort. Ses habits sentaient encore son odeur ... J'ai récupéré quelques vêtements qui me rappelaient nos jours heureux. Il y a encore, au fond de mon armoire, un tee-shirt à manches longues qu'il adorait, élimé, déchiré et tout doux, que je n'ai pas porté et qui garde son odeur. Je n'ose pas le mettre, parfois je le déplie, je le sens et je pleure ...
Mais la belle chemise rouge, je ne l'ai pas retrouvée. Je me suis demandé s'il l'avait enfilée pour sauter, en souvenir de ce bel après-midi de shopping, et dans ce cas, les pompiers l'ont déchirée lorsqu'ils ont tenté de le réanimer.
Mais ce mardi terrible-là, il portait un tee-shirt rose vif, que nous avions aussi choisi ensemble, cet été. Personne au collège n'oubliera ce tee-shirt. D'abord parce qu'il ne mettait jamais de tee-shirt en cours, il préférait les chemises, souvenir de collège anglais et puis il trouvait que c'était important d'être bien habillé quand on enseigne en ZEP, pas pour la discipline, mais pour donner un modèle positif aux élèves. Donc, ce tee-shirt rose, tout le monde l'a remarqué. Tous les collègues l'ont taquiné et moi j'étais si fière d'aimer cet homme, de l'aimer en secret, de le voir si heureux et épanoui, et je m'étais dit que le moment approchait peut-être de dévoiler notre secret à nos collègues. Emmanuel était prêt à le faire depuis le mois de juin. Moi je voulais attendre encore un peu, je voulais être sûre de mon engagement à ses côtés, et le samedi des chemises, je me suis aperçue que j'étais sûre. Heureusement, je le lui ai dit ...

Le tee-shirt rose, nous ne l'avons pas retrouvé non plus.

Dans la semaine qui a suivi l'achat des chemises, il a dit à sa maman au téléphone combien il était heureux, parce que c'était la première fois qu'une femme s'occupait de lui, de sa garde-robe.

Je suis si contente d'avoir retrouvé ce joli souvenir.

pinky29

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #33 le: 20 décembre 2012 à 19:16:44 »
Chère Muriel,
je peux enfin lire ton histoire et découvrir les circonstances...
C'est poignant. Y a pas de mot...j'en ai mal à l'estomac pour toi...
je ne sais pas si tu as pu lire ce que je t'avais répondu dans un post (peut-être est-ce celui-ci ?) ou je te parlais des idées suicidaires. je reste persuadée qu'il t'aimait profondément. Ne remets jamais cela en doute. je te le dis car j'ai moi-même éprouvé ce sentiment : aimer profondément mon chéri et pourtant vouloir mourir coûte que coûte...Pour sortir d'une souffrance inommable.
je t'embrasse de toutes mes forces.
Christine

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #34 le: 20 décembre 2012 à 20:30:00 »
Chère Christine,
Je suis contente que tu aies lu mon histoire ! oui j'ai lu ton message sur les idées suicidaires. Je n'ai pas répondu parce que c'est dur, j'écris moins en ce moment, même si je viens sur le forum au moins une fois tous les jours, et j'y lis ton histoire, si poignante, si bien racontée mais

je suis si fatiguée, je ne ressens à nouveau plus grand chose, à part cette fatigue, de l'ennui, profondément devant cette vie qui ne m'intéresse plus, quelques larmes une ou deux fois par jour mais c'est tout

juste envie de me coucher dans ses bras et dormir

la vie est si longue, si lente

je suis égoïste, toi aussi tu as mal, tu attends nos messages
après tout ce que tu as traversé !
j'avoue ne pas comprendre qu'on puisse aimer et vouloir mourir, mais tu dis que cela peut arriver, comme cela doit être dur ! quel paradoxe horrible, on doit se sentir écartelé
toi aussi tu as besoin que la vie te sourie enfin !

c'est effarant combien ce que tu dis de ton homme peut s'appliquer au mien aussi, une communauté de parcours, de souffrance, de dévouement
et chez toi comme chez moi, ce besoin d'écrire, de mettre en forme l'informe et l'innommable

je t'embrasse fort

Muriel

pinky29

  • Invité
Re : Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #35 le: 20 décembre 2012 à 23:29:37 »
je suis si fatiguée, je ne ressens à nouveau plus grand chose, à part cette fatigue, de l'ennui, profondément devant cette vie qui ne m'intéresse plus, quelques larmes une ou deux fois par jour mais c'est tout

juste envie de me coucher dans ses bras et dormir

la vie est si longue, si lente

je suis égoïste,

je t'embrasse fort

Muriel
Chère Muriel, ne te penses pas égoïste du tout, please !!
Je ne peux pas t'exprimer ce que j'ai ressenti en lisant votre histoire. peut-être devrais-tu (un jour... plus tard... Bien plus tard) en écrire un livre ? Pour exorciser ? C''est terrible ce que tu as vécu, DUR à n'en pas trouver les mots !!!
Ne t'inquiètes pas si tu ne peux pas écrire à chaque fois que je t'écris. je comprends. je voulais juste être sûre que tu avais lu ce message afin que ça t'apporte peut-être une toute petite réponse à tes interrogations. je ne peux pas t'expliquer ce paradoxe (aimer/mourir) et effectivement, c'était pour moi un 'écartèlement'. j'avais préparé une lettre à mon ami pour qu'il ne se sente pas coupable si je passais à l'acte, la lettre était prête dans mon armoire, bien en évidence pour que qun la trouve si je partais. Mon testament était fait en sa faveur...Je peux juste te confirmer que malgré l'Amour vrai/profond, la CERTITUDE qu'il était l'HOMME de ma vie d'un côté (après pourtant 22 ans d'un précédent mariage et mon ex-conjoint est décédé il y a un an, à 45 ans), j'avais une autre personne en moi qui voulait mourir parce que cette partie de moi ressentait une souffrance INSOUTENABLE, INDESCRIPTIBLE. mon ressenti de souffrance était : 'je suis un brûlé au 3ème degré qu'on laisse sans soin et sur lequel on tappe encore avec une batte de base ball...' 2 personnes en moi. L'une aimait et voulait vivre (20%) et l'autre (80%) voulait mourir. Il a fallu que je 'guérisse'. Je te raconte pas le combat intérieur ! J'en devenais dingue !
Emmanuel est 'sorti' d'une chose qui lui était insoutenable, d'une chose qui sur cet instant précis a pris toute la place, aveuglant toute autre perception, réflexion. je le pense vraiment. je voudrais pouvoir t'expliquer, trouver les mots qui pourraient un peu adoucir ton vécu. mais il n'y en pas. je le sais.
N'hésites pas à me contacter quand tu le souhaites et en attendant, je vais respecter ta fatigue, ton absence de mots. Peut-être vais je aussi bientôt traverser cette vague là...
Christine

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #36 le: 21 décembre 2012 à 21:54:48 »
Christine,
Merci pour tes mots. et voilà, je repleure !

emmanuel avait aussi préparé sa fin. En 2005, il avait laissé un message sur un forum. Ce message, dans lequel je n'existe pas, forcément puisque nous ne nous connaissions pas, précisait ses volontés pour sa fin. L'incinération, les cendres répandues en irlande, au lieu de leur voyage de noces. Son voeu d'être brûlé avec une mèche de cheveux de sa femme contre le coeur.

Certes je n'existais pas. Mais ces dernières volontés me font mal car je n'y justement je n'y figure pas.

Il avait un blog aussi, dans lequel, si on lit entre les lignes, on devine l'insoutenable, l'indescriptible enfermement dont tu parles aussi. Je me reproche évidemment de ne pas l'avoir compris. ce blog, où il racontait la lente agonie de sa femme, m'était trop difficile à lire.

J'ai réalisé trop tard qu'avant de me connaître, sa vie c'était ça, tous les soirs : des forums, des blogs. Discuter en virtuel avec des inconnus, des bouteilles à la mer. Je fais pareil maintenant dans ma nuit, notre nuit.

J'ai du mal à discuter avec les gens que j'aime bien. j'ai peur d'éclater en sanglots à la moindre parole gentille. alors je verrouille. du coup, je suis encore moins sociable qu'avant.

En septembre, c'était mon anniversaire. Emmanuel était tout fou à l'idée de m'offrir mon cadeau. Il sautait sur place, anxieux comme un enfant qui a peur que son présent ne plaise pas. J'avais à peine déballé qu'il se demandait déjà ce qu'il allait m'offrir à Noël, dans trois jours. Il voulait m'offrir un bijou pour mon anniversaire et comme on ne trouvait rien de bien, pour le rassurer, je lui ai dit que le bijou, c'était peut être encore trop tôt. Maintenant, je ne l'aurai jamais ...

J'arrête de me plaindre, tout le monde ici a son lot de désespoir et le mien n'est pas plus important que celui des autres. Si je me sens très égoïste, je reconnais que je le suis, repliée sur ma peine depuis presque 3 mois.

Je te souhaite le meilleur, je vous souhaite à tous le meilleur, mais c'est quoi, le meilleur, pur nous ?

Muriel

pinky29

  • Invité
Re : Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #37 le: 21 décembre 2012 à 22:57:28 »
Christine,
Merci pour tes mots. et voilà, je repleure !

J'ai réalisé trop tard qu'avant de me connaître, sa vie c'était ça, tous les soirs : des forums, des blogs. Discuter en virtuel avec des inconnus, des bouteilles à la mer. Je fais pareil maintenant dans ma nuit, notre nuit.

J'ai du mal à discuter avec les gens que j'aime bien. j'ai peur d'éclater en sanglots à la moindre parole gentille. alors je verrouille. du coup, je suis encore moins sociable qu'avant.

Muriel
Re coucou Muriel,
je ne veux pas te faire pleurer, sauf si cela te libère. Je ne sais pas ce qui est le mieux pour toi.
En tout cas, si tu as des questions par rapport à ce qu'a pu ressentir Emmanuel dans ce moment ou il a pris cette décision de passer à l'acte, on peut tenter d'en parler. Je ne sais pas si j'ai des réponses mais je devine les questions qui doivent te hanter. Tu dois penser qu'il ne t'aimait pas assez pour 's'en aller' etc. C'est pour cela que j'ai insisté hier sur le fait que cela n'a rien à voir. Dans ce cadre, il s'agit vraiment d'avoir 2 personnes en soi, et il y en a malheureusement 1 qui un moment prend le dessus.
D'après ce que tu décris dans le texte que j'ai lu hier, il me semble évident qu'Emmanuel aurait du bénéficier d'une aide psychologique car il a tout assumé tout seul, refusant une aide médicale pour son épouse qui lui aurait allégé la tâche. Qui l'aurait aussi 'aidé' dans la décision finale d'abréger les souffrances de son épouse...Peut-être, s'il avait accepté cette aide, aurait-il eu l'impression de l'abandonner ? Et tout cela a commencé évidemment à un moment ou tu n'étais pas encore dans sa vie. Il a fait face à une maladie affreuse/cruelle et il a cru qu'il y arriverait tout seul. Il a surestimé ses forces et a fait face à des choses beaucoup trop dures pour un seul homme et puis, une fois qu'il a été dans le bain, il ne s'est même plus aperçu qu'il dépassait ses propres limites. Il était si imprégné de tout ça qu'il n'avait plus de recul. Pour lui, c'était son quotidien et il n'a même plus envisagé qu'il existait d'autres possiblités. Il tenait le coup et fonctionnait donc il n'a plus perçu sa limite. Il a mis des choses en place avant que tu éclaires sa vie, la machine était lancée, et il n'a pas eu le temps de t'intégrer. Ce n'est pas qu'il n'a pas voulu, c'est qu'il a manqué de temps et de recul. 2 personnes en lui. Et aussi de la dépression, je pense. Vu le niveau de stress émotionnel qu'il a subi durant de longues années, ça me paraît logique. Et la dépression, est une déficience d'une glande du cerveau qui ne fixe plus la sérotonine, d'ou le besoin en médocs anti dépresseurs que les hommes hésitent à accepter...Il ne s'agit en rien d'une faiblesse mais bien d'une maladie. et une maladie dévastatrice...
Ton histoire m'émeut profondément. Je ne trouve rien d'absurde dans ce que tu décris; c'est un traumatisme terrible et j'ignore si tu es soutenue par un ou une thérapeute ?
N'aies pas peur de craquer devant les gens que tu aimes : ils sauront te comprendre et te prendre dans leurs bras. Ca fait du bien, tu sais, meme si cela n'enlève pas ta peine. La crise va durer 20 à 30 minutes mais elle t'allègera. J'en ai eu une ce soir (enfin !!!). je suis chez ma cousine à Bruxelles et elle m'a simplement prise dans ses bras. L'empathie ça fait du bien.
derrière ton PC, tu vas peut-être ressentir notre soutien mais personne ne pourra te prendre ensuite dans ses bras si tu pleures derrière ton écran.
Je continuerai à te lire,
Bien à toi,
christine

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #38 le: 23 décembre 2012 à 23:31:07 »
Bonsoir à tous, mes amis,

Aujourd'hui et hier, j'ai eu la chance de rencontrer deux amis à qui j'ai pu parler et avec qui j'ai pu pleurer tranquillement, sans me poser de questions. Comme cela fait du bien ! Il n' y a que ces deux amis à qui j'ai réussi à parler vraiment en trois mois. Quel soulagement d'être portée un peu !

Demain matin, je pars une semaine chez mes parents avec mes enfants. je vais sans doute y passer aussi le 31, tant cette année j'ai peur de me retrouver seule pour le réveillon.

ce soir, en faisant mes bagages, j'ai l'impression qu'en partant d'ici, de cette maison où nous nous sommes aimés, je vais trahir mon amour. j'aurais besoin d'emmener des "doudous" de lui.
En même temps, à la Toussaint, lorsque j'étais loin d'ici, chez mes parents, je respirais mieux dans une maison où il n'avait jamais été , où il n'avait jamais dormi. L'air y était plus léger.

Mardi à cette heure-ci, cela fera trois mois, une heure et 25 minutes. Trois mois ! une éternité

Notre histoire a duré à peine 6 mois : cela fait trois mois que je continue seule notre histoire, dont j'ai doublé la durée seule ...

Un jour viendra, très vite, où j'aurais été seule plus longtemps qu'avec toi, mon amour.

C'est vertigineux

Depuis deux jours, j'oscille de la colère au chagrin. Mes amis, qui m'aiment, m'ont permis d'oser exprimer ma colère. Et la colère sortie, je retourne au chagrin.

Je n'ai heureusement pas eu le temps de vivre un Noël avec Emmanuel. donc contrairement à vous, je n'ai pas de souvenirs de cette période, juste les regrets quand j'imagine son sourire devant les cadeaux que je lui aurais offerts. Je n'ai pas eu le temps de lui faire de cadeaux, ou alors deux bricoles, qu'il a refusé d'emmener chez lui, de peur que sa femme les vois, disait -il. Je sais maintenant que c'est faux : il ne les a pas emmenés parce qu'il voulait cloisonner, séparer ses deux vies. Il ne voulait pas que dans sa prison au 9ème étage, des objets lui rappellent combien il était heureux ici, chez moi.
Par contre, il semait plein de trucs chez moi. Heureusement, comme cela j'ai des objets qui me parlent un peu de lui. Par contre, cruauté des temps modernes, je n'ai rien d'écrit de sa main. Il m'a envoyé des centaines de sms, mais des lettres, des cartes, rien. J'ai été obligée de piquer au boulot un papier sur lequel il avait gribouillé son nom, pour avoir quelque chose.

Je me rends compte à quel point je manque aussi de gens qui peuvent me parler de lui. J'aurais besoin d'entendre combien il m'aimait, combien il était heureux, besoin d'entendre des anecdotes idiotes sur lui, sa jeunesse, son enfance.

Mais les gens qui le connaissaient... sa mère est à Vannes. Dès le début, elle a dit "C'est son choix, il faut le respecter" et elle n'aime pas que je pleure parce qu'elle refuse de pleurer.

Son père, qui est ici, l'a renié. il a renié son fils parce qu'il s'est suicidé et a suicidé son épouse. Il était adorable avec moi avant, je l'avais rencontré deux fois. Mais il a fait répandre dans la famille le bruit que je poussais son fils à abandonner sa femme. Il a même dit à tout le monde que je n'étais pas aux funérailles !!!

Sa soeur adorée est rentrée à la Réunion au bout de 3 semaines, elle a été hospitalisée dans une maison de repos là bas, mais je n'ai plus de nouvelles depuis plusieurs semaines. Son meilleur ami a coupé les ponts il y a deux mois. il essaie de se protéger, de prendre de la distance.

alors personne ne me nourrit d'histoires d'Emmanuel
je n'ai pas de souvenirs de vacances, de week-ends à la mer.
on n'est jamais allés au restaurant ni au concert ni au cinéma
on a trois pique-niques, cinq nuits. on a des litres de thé bus dans mon jardin.on a des pensées et des cyclamens plantés ensemble deux jours avant sa mort --et qui fleurissent encore.
on a pleins d'objets vieux et inutiles glanés dans les brics à bracs et à Emmaüs, je ne sais pas qu'en faire ni comment je vais pouvoir retourner à Emmaüs
on a trois semaines passées à l'hopital en aout au chevet de ma fille
on a le souvenir d'un mariage, en juillet, la seule soirée de liberté qu'il s'est octroyée en 12 années de mariage, et encore, il pleurait en laissant sa femme à son père pour la nuit...

alors si peu de souvenirs, les mots s'épuisent, le lien se distend lentement mais sûrement
je n'arriverai pas à le maintenir très longtemps

le grand vide me guette

peut être ce vide m'aidera-t-il, paradoxalement, en me poussant de l'avant ?

tant de douleur, d'égarement, pour une histoire si courte, si violente et si brutalement achevée

Je me connecterai chaque jour sur le forum pour continuer à vous lire, christine, kika, yohann et les autres

Je vais marcher dans la campagne en essayant de respirer fort

je vous embrasse tous, avec une pensée particulière pour ceux d'entre vous qui seront vraiment seuls demain,

Muriel



pinky29

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #39 le: 24 décembre 2012 à 16:35:16 »
Bonjour Muriel,
me voilà encore pour te dire que 'je comprends'. Ca fait du bien de pouvoir parler de lui, d'entendre dire par les autres comment ils voyaient votre histoire, raconter des petites anecdotes sur lui ou votre histoire...Pour que tout cela revive en nous.
Tout a passé comme un éclair, à peine le temps d'emmagasiner qqch. On voudrait tout retenir...
je comprends tellement ce que tu ressens, le besoin que tu as...
J'espère que tu pourras 't'évader' un peu là ou tu seras pour cette fin d'année.
Plein de pensées de soutien (et je suis contente que tu aies pu te laisser aller auprès de ces amis, qui semblent avoir eu la 'bonne attitude'. On a besoin de gens comme ça.
Christine

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #40 le: 31 décembre 2012 à 17:48:01 »
Voici ce que j'ai écrit fin octobre et qui correspond encore assez bien à ce que je ressens en ce 31 décembre :


Ce matin, j'ai refait notre première promenade sur les bords de l'Huisne. Je me suis retrouvée dans l'allée, sous les grands peupliers, à l'heure exacte où, la semaine dernière, tant de gens en pleurs se rassemblaient à l'entrée du cimetière ...

Après la pluie diluvienne d'hier, le ciel était vif, dégagé. Le vent, dans les hautes branches, bruissait de chants venus d'ailleurs. Hier, de ton neuvième étage, j'ai vu l'eau s'abattre du ciel. Un rideau dense d'un jaune opaque qui tombait sur la ville. Toute cette eau sur la Terre et le ciel qui pleure.
Mais ce matin, les grands arbres m'ont raconté des histoires venues de hautes terres et d'un temps où nous savions écouter le vent.

Tu as marché à mes côtés, mon chéri.

Arrivée à la passerelle, comme je me demandais si j'aurais la force de poursuivre jusqu'à la presqu'île, j'ai vu que le pont était noyé.
Tu aurais adoré ! Des cataractes d'eau bouillonnante, le vacarme des embruns... La première fois que nous sommes venus là, l'Huisne était à sec et tu t'étais amusé à traverser sur les pierres. A la presqu'île par contre, l'eau nous avait cueillis dans toute sa puissance. Coupés du monde par cette barrière sonore, longtemps nous avions écouté le chant de l'eau, blottis l'un contre l'autre, silencieux...
Alors, cette passerelle noyée, j'ai pensé que c'était le juste cours des choses.
La rivière à sec qui devient un torrent rugissant : ta force de vie retenue tant d'années, ta source tarie et asséchée qui rejaillit de l'ancien volcan. Cette soif de vivre, cette avidité dont tu m'as abreuvée tout l'été.

Mais l'eau était trop forte. Contenue depuis trop longtemps, elle a rompu les digues, les tiennes et les miennes. Puissante et belle, elle court maintenant à la mer. Ce n'est pas la fin : l'eau coule, elle va ailleurs comme tu continues ton chemin, Emmanuel, grondeur, libéré, rugissant et avide de grands vents.


en 2012, j'ai connu l'amour et la mort. J'ai côtoyé l'au-delà et des pensées qui m'étaient lointaines, sur l'immortalité de l'âme, la présence de nos amours disparus. je me sens un peu bête de dire cela, mais je ne regrette rien,ni l'amour, ni la mort.

Muriel





mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #41 le: 03 janvier 2013 à 10:36:56 »
3 janvier 2013
Je continue à aller plutôt bien. Pardon, mon chéri. J'ai acheté du tissu fleuri pour faire de nouveaux coussins sur le canapé, j'ai commencé à tricoter une écharpe à torsades très compliquées. Je m'attaque au ménage malgré ma grande fatigue physique.
Mais j'ai envie de choses neuves, de choses jolies.
Je veux déjà quitter, moi aussi, les vieux habits de l'hiver.

Ne pas aller trop vite. Savourer ce que je peux savourer.

Muriel

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #42 le: 15 janvier 2013 à 20:45:00 »
Bonsoir,
me revoilà, me revoilà en creux de vague, comme dirait yohann

et meeeeerde

je me sens à nouveau moche et inutile et vide et épuisée et en colère et ma vie m'ennuie et mes collègues me font mal et il fait gris et il fait froid
et il viendra quand le printemps, pour me réchauffer ?
et que sera le printemps sans mon amour ?

je suis de nouveau négative, je vais aller faire un ptit tour à la poubelle voir si je pourrais pas y jeter moi et mes pensées négatives

je n'ai plus l'envie ni la force d'écrire, même à vous, même ici

tant de douleur, sur toutes les pages, tant de douleur me navre


mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #43 le: 16 janvier 2013 à 20:33:08 »
 Christine, Yohann, Angela, Fathio, Martine,

Merci de vos messages de soutien, je pleure, parce que je suis émue et touchée de votre gentillesse

ne vous inquiétez pas

je suis très très fatiguée, épuisée physiquement

pas très gaie mais pas au désespoir non plus, c'est plutôt le vide, je me traîne, mais j'ai déjà eu ça, alors  je ne m'inquiète pas trop

je vous embrasse

mirele

  • Invité
Re : épuisée, je me traîne sans émotions, anesthésiée
« Réponse #44 le: 16 janvier 2013 à 22:58:26 »
ben en fait, ça va pas fort ...

j'ai écrit le nom d'emmanuel sur un autre fil, et les larmes coulent

je ne comprends plus ce soir ce qui m'est arrivé

cette histoire d'amour fulgurante, si courte

la soirée horrible du 25 septembre

et depuis ma vie en mode survie

la violence de son suicide me revient ce soir en pleine figure

bon j'ai eu presque 3 semaines de répit, tous ici ne peuvent pas en dire autant

mais merde ! c'est quoi le sens de cette rencontre, de cet amour ?

on s'est aimés 6 mois à peine et voilà dejà presque 4 mois que j'essaie de survivre à sa mort

c'est con, mais qu'est-ce que c'est con !

ma pauvre grande histoire d'amour n'a aucun sens et a ôté tout sens à ma vie

je me remets même à douter de l'amour que mon amour me portait

peut-être quand j'arriverai là-haut, vieille et ridée, mais pleine d'espoir et frétillante à l'idée de la revoir, peut-être Saint Pierre me dira :
 "Ah emmanuel, mais non, Madame, il ne veut pas vous voir, il est parti avec sa femme, vous savez, et ils sont très heureux ensemble depuis des années. Alors non, il ne vous recevra pas"

peut-être il s'est servi de moi, il a pompé toute mon énergie, tout mon amour, et puis il m'a plantée là et je suis vide, aigrie, amère et ahurie

je vais me coucher

muriel