Il faut du temps, beaucoup, beaucoup de temps pour retrouver une vie "normale", envisager un avenir dans lequel l'autre ne sera plus, s'autoriser à vivre à nouveau, se faire vraiment plaisir à soi, presque égoïstement (et c'est souvent comme ça que nous perçoivent les autres, d'ailleurs).
Je ne sais pas si on oublie jamais. Peut-être que les personnes en deuil qui se sont remariées, on fondé une famille, s'accrochent moins à leurs souvenirs que ceux qui, veuf/veuves plus tardivement, ont du mal à envisager de retrouver un compagnon de chemin. Dommage qu'il n'y ait pas, sur ce site, des personnes qui ont perdu leur conjoint depuis plus longtemps que moi. J'aimerais vraiment savoir...
Ce matin, mon fils a cassé un objet auquel je tenais particulièrement, parce qu'il racontait une partie de ma vie avec mon mari, lorsque nous étions tous les deux sans les enfants et que nous partagions des choses que moi seule, désormais, garde en mémoire. Ca m'a assise, je n'ai pas rouspété, j'ai été vraiment touchée et je me suis mise à pleurer comme une gamine. Mon fils était décontenancé et je crois, vexé et peiné de ma peine. Il est allé dans sa chambre. Ce n'était qu'un objet à ses yeux sans importance, et je me suis dit : "je ne l'emporterai pas dans ma tombe, c'est pas grave" et puis, j'ai pensé que si, s'il est un objet que je veux emporter dans ma tombe, c'est celui-là, même maintenant qu'il est cassé....
Au bout de 5 années de deuil, bien des choses ne sont pas résolues...
Les enfants et moi allons bien, vraiment bien. L'école, notre vie, nos choix... tout roule, et franchement j'aurais mauvaise grâce à me plaindre. Et pourtant, un rien réactive la peine. Il reste une fragilité, et je trouve même qu'elle est plus présente maintenant que j'ai le temps de penser un peu à moi. Quand je me débattais dans ma douleur et dans le quotidien, j'avais la "tête dans le guidon" et j'avançais sans réfléchir. Maintenant, je me sens plus vulnérable, un peu à fleur de peau, bien que plus forte pour affronter la vie. C'est très bizarre.
Nous faisons tous croire à notre entourage que nous allons bien. Qui pourrait imaginer que 5 ans plus tard, un objet cassé me fasse encore pleurer, hein ?
Pendant au moins 2 ans, chaque soir, j'ai attendu que la porte du garage se ferme, lorsque mon mari rentrait vers 19 heures. Et il y a quelques jours, tout à coup, cette pensée m'est revenue. La porte du garage... alors que nous habitons maintenant dans un appartement... Je l'ai dit en riant aux enfants... Les vieilles habitudes aussi ont la vie dure !!!...
Je vous embrasse. Courage à tous.
M.