Darling,
Combien de lunes depuis,
Combien de soirs silencieux, et de matins vides.
Combien d'orages et de tempêtes, de chutes et de blessures, de peines et de larmes.
Je ne compte plus, car il n'y a pas de fin, à quoi bon compter.
Le prisonnier compte les jours jusqu'à la délivrance, la liberté.
Comme une fin qui n'existe pas, ma liberté n'existe plus.
Elle est offrande à ta mémoire, à nos souvenirs.
Déposée sous ces roses blanches il y à 2 ans, elle n'en bougera plus.
Pourtant, au début je comptais.
3 mois, 6 mois, 1 an, 18 mois....
Mais cela ne s'est jamais arrêté. Seule la vie à une fin, laissant place à la mort qui elle n'en finit plus.
Je ne veux plus compter la mort, je veux juste compter et recompter sans cesse les jours ou nous étions ensemble, réunis, heureux ou fâchés, tristes ou gaies, endormis ou réveillés, ces jours ou nous étions vivants.
Lourde réalité, car chaque semaine passée n'allège en rien, c'est une semaine de plus avec le vide de ton absence, mais aussi une semaine de moins à vivre sans toi.
Tout ce que j'ai vécu depuis, seule, je l'ai imaginé aussi avec toi.
Une autre double peine, à vivre 2 fois.
J'ai arrêté d'écrire au 3 ans de petit homme.
Je ne pouvais plus, ni écrire, ni lire.
Ne m'en veuillez pas, amis de peine et de deuil, mais la mort est plus rapide, et il m'a fallut fuir, je n'étais plus à la hauteur.
Je ne pouvais plus vous aider, à terre je suis resté.
Il a plus de 4 ans aujourd'hui.
"Le père de Noël" va m'apporter des jouets, me dit il tout serieux .
et dans son bol de céréales, il en compte toujours une pour papa.
Rien n'a bougé ici.
la chambre du fond veille dans la pénombre, mais je n'en ai plus peur.
Tout est comme figé, et pourtant tout à changé.
Je sais que ce que je vis aujourd'hui, je le vis sans toi.
Et pourtant je t'ecris encore, pour le partager.
J'écris à la part de toi qui est en moi, comme un monologue entre nous.
Je t'ecris et te lis, ça me fait du bien et du mal en même temps, encore cette double peine.
Il y a 2 mois, tu es enfin apparu dans un songe.
Enfin.
Il y avait des chaises installées comme pour un spectacle, tout au milieu d'un cimetière.
Entre chaque pierre tombale, un spectateur.
Devant nous une estrade annonçait une représentation.
De la musique au loin, venait d'un orchestre sur le côté.
Les artistes sont montés sur l'estrade, et je t'ai reconnu, là, de dos, j'ai reconnu ta silhouette.
Vous dansiez tous, en harmonie, et tout les spectateurs se sont levés.
C'est pas possible, c'était bien toi, je voyais la stèle avec ce cœur en marbre, et je savais que c'était ta tombe.
Voilà, tu dansais, léger, aérien, dans un corps différent et pourtant c'était bien toi.
Quand je me suis réveillé, j'ai eu du mal à y croire, j'aurais aimé voir ton sourire, mais je n'ai pas vu ton visage.
Tout les danseurs était de dos, et pourtant c'était toi.
C'est toi.
Merci pour ce spectacle, j'en avais besoin.
Là ou tu es, Tu es bien, tu danses pour moi.
Là ou nous sommes, des fêtes se préparent, des invitations se lancent, des vacances à la neige se réservent, des promesses de joies partagées s'échangent.
La vie continue comme disent les autres.
Mais la vie sans toi ne fait que commencer.
Une nouvelle vie, une autre vie.
Maintenant je me demande comment tu aurais fais toi, si c'était moi qui dansait dans tes songes.
Suis je assez forte, assez digne de nos souvenirs ?
J'en suis toujours à vouloir connaître ton avis sur les détails de notre nouvelle existence à p'tit homme et moi.
Qu'aurais tu fais à ma place ?
Aurais tu laissé cette personne s'infiltrer dans les failles de ta peine.
Lui aurais tu laissé ta main dans la sienne quand elle l'aurais prise, et te serais tu laisser à pleurer dans ses bras.
Pourquoi cette rencontre maintenant, si tôt à mes yeux.
Suis je donc si faible malgré toutes les épreuves traversées, toute cette peine ne menait donc à rien ?
Je me voyais triomphalement continuer ma vie seule en amazone auquelle rien n'effraie plus, forte de tout, en tout.
Une belle image de moi, de nous, mais c'etait juste une façade.
Si forte, Et pourtant si faible par le manque de tendresse, d'un regard bienveillant et de bras accueillants.
Ton amour passé inonde toujours ma vie, et pourtant il en manque pour m'y plonger tout entière.
C'est ce manque qui m'affaiblit, et je ne peux l'attendre de toi.
Un manque d'amour, moi qui en déborde.
C'est la dernière chose que je désire.
Etre aimer, et peut être aimer en retour, pour me sentir vivante, encore un petit peu, avant de mourir pour de vrai, comme toi.
À jamais pour nous, Darling.