Sandrine,
c'est le cœur très lourd que je t'écris.
mon compagnon est mort du même cancer le 16 mars 2015, bientôt 3 ans... Il avait 36 ans. le carcinome de la ligne médiane... quelle saloperie cette maladie... je n'aurai jamais cru "rencontrer" quelqu'un qui connaîtrait cette maladie...
nous étions ensemble depuis 10 ans. Nous n'avions pas d'enfant. nous avions des hauts et des bas. nous étions un couple comme tant d'autres. Je sais que nous nous aimions, mais notre relation n'a pas toujours été simple, mais il était mon partenaire de vie, nous regardions les choses de la même manière, il était ma personne préférée au monde, et nous avions grandi ensemble... en prenant de l'age notre relation s'est apaisée, c'était l'homme de ma vie.
Nous vivions à distance depuis trois ans, j'avais eu une super opportunité de boulot. il m'avait poussé à y allait, on se retrouvait le we. Nous avions décidé de nous rejoindre, enfin. 4 mois après notre emménagement, il s'est mis à cracher du sang. le diagnostic est tombé 1 mois plus tard. là, on nous a dit qu'il n'y avait pas d'espoir, mais que des essais cliniques étaient en cours. Nouvel espoir. Une semaine plus tard, le coup de fil que nous attendions sans vraiment y croire, un essai clinique de phase 1 à l'IGR à Paris. On part, il commence le traitement. 3 semaines plus tard, le miracle. Sa tumeur principale a diminué de moitié, les examens sont positifs.
oui, mais voilà, on doit tout stopper car sa tumeur a touché une vertèbre et on doit absolument l'opérer si on ne veut pas qu'il reste paralysé. l'opération est une réussite, il remarche, on reprend le traitement... mais c'est fini... ça ne fonctionne plus...
il rentre donc en phase terminale. Il rentre à la maison, il veut mourir chez lui. Mais les douleurs sont de plus en plus intenses, il ne comprend pas ses douleurs, j'ai encore des images de lui avec ce masque de douleur sur le visage. Mais il tient bon, il veut mourir chez lui, entouré de ses proches. ce ne sera pas possible. Il est hospitalisé un dimanche avec son accord, il me dit, je veux que ça s'arrête Isa, j'en ai marre maintenant, i lest temps. Il est sédaté, dans le coma. il partira dans les bras de sa mère, j'étais partie prendre une douche...
voilà... après ce déjà long chemin, je repense à beaucoup de choses qu'il m'a dites. Il m'a dit, nous sommes en train de vivre une fin de vie Isa. Saches que j'ai été heureux tous les jours de ma vie. C'est dur ce que l'on traverse, mais c'est aussi très beau. Je veux que tu vives... depuis le début, je suis en paix, probablement parce que j'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour l'accompagner de mon mieux, parce que nous étions apaisés, parce que l'on avait touché du doigt un amour que je savais exister entre nous, mais dont je ne soupçonnais pas la force ni la beauté. Parce que cette fin de vie, même si nous aurions dû la vivre dans 40 ans, on a essayé d'en faire un combat, même perdu d'avance, mais un combat où l'on avait quelques moments d'apaisement, où se tenir la main en souriant était la chose la plus belle que nous avions vécu lui et moi...
j'essaie de rester forte de ça. de son optimisme. de son amour d ela vie. je t'avoue que parfois, non, je n'y arrivais plus. j'étais en colère. j'étais désespérée. Puis j'ai rencontré quelqu'un. je sui stombée amoureuse. mais c'était trop tôt. je n'arrivais pas à laisser de la place. maintenant, il y a de la paix qui est arrivée dans ma vie. mon chagrin est là. mais il est moins vif. Mika a pris sa place, toujours au fond de mon coeur mais je me sens prête à laisser une place, différente et nouvelle à quelqu'un...
je t'embrasse, n'hésite pas à m'écrire,
avec mes plus douces pensées,
Isa