Ma chère Marie tu en es à l' étape dite de sidération, le choc, le séisme, l' anesthésie de ta vie, la violence du deuil, et ce n' est que le début, oui, faut apprendre à vivre avec le deuil comme on apprend tout le reste dans la vie, tu n' étais pas préparée, personne n' est préparé à affronter le deuil de son conjoint, on sait bien pourtant qu' on va mourir, qu' il va mourir, qu' un de nous deux va survivre à l' autre, seulement voilà, personne ne nous y prépare, alors tu dois apprendre à faire ton travail de deuil comme nous tous ici. Franchir les étapes car c' est pour les autres que l' on vit pas pour soi. Tu as eu l' immense chance de vivre 35 ans avec la personne de ton choix, ici c' est rarissime de voir ces mots, en général les situations sont bien plus catastrophiques, il faut te raisonner, la vie doit s' arrêter un jour, tu dois être forte, je sais c' est facile à dire, mais pour exemple, ça fait 10 mois que je tiens bon, j' ai pourtant connu la même histoire et le cancer fulgurant de mon mari. Je mène une vie presque normale, même si je souffre beaucoup intérieurement, je m' efforce de ne pas le montrer, je fais semblant, je sors, je prépare les fêtes de fin d' année sans joie, en automate, je vais partir une semaine en Normandie moi qui suis du sud, je vais me dépayser, cela me fera encore plus mal de quitter la maison où nous avons vécu tant d' années, tant de souvenirs, eh oui, tiens bon, j' y arrive, tu y arriveras, mal, mais on y arrive, on n' a pas le droit de se plaindre, ainsi va la vie, vaut mieux l' accepter, ça passe mieux et plus vite. Tiens bon, bisous.