Bonsoir à tous. Je comprends ton exaspération chère Stana.... des personnes qui, sous prétexte de vouloir m'aider, m'ont abreuvé de bons conseils et on cherché à m'expliquer la vie ces deux dernières années, j'en ai rencontré quelques unes également... Il n'y a pas si longtemps encore, ces remarques me faisaient véritablement exploser... Depuis quelques temps, je réalise à quel point elles sont conséquences, au mieux, de la maladresse... au pire de la bêtise.... et j'essaye de ne plus m'y arrêter. Mais il y a des limites! Et l'insistance de ce monsieur sur ton forum est clairement déplacée! J'espère que désormais, le message est passé!
J'ai pour ma part, également besoin de lâcher un peu de lest ici ce soir... Je me sens globalement moins en colère ces derniers temps. J'arrive à ne plus prendre chaque maladresse en pleine figure... C'est sans doutes également lié au fait que petit à petit, mon cercle affectif s'est redessiné, reprécisé... Et les personnes avec lesquelles je demeure étroitement liées sont des personnes sensibles, à l'écoute... avec lesquelles je parviens à être moi-même. Un cercle restreint... vraiment restreint... mais des amitiés profondes. Et ça me convient bien...
En revanche, depuis peu, je tente de rebondir sur le plan professionnel.... Comme je l'expliquais dans un autre post, j'étais en recherche d'emploi lorsque mon aimé est décédé... Et 10 mois auparavant, je choisissais de quitter l'Alsace pour venir m'installer avec lui dans le Sud... Pendant ces quelques mois, il a fallu que je trouve mes marques et ma recherche d'emploi n'était pas fructueuse.... Cela fera donc bientôt 3 ans que je suis "hors circuit"...
Mes dernières expériences significatives sont: l'obtention de mon diplôme d'éducatrice spécialisée en 2014 et la réalisation dans la foulée d'un service civique dans une association étudiante de sensibilisation à l'environnement... et depuis.... tant de choses. Un tsunami sur le plan émotionnel. Mais pas de place pour toutes ces émotions sur un stupide CV.
Malgré tout... j'ai 27 ans et fait partie d'une génération pour qui la retraite sera sans doute devenue un mot d' "ancien français", avant que j'atteigne l'âge requis... J'ai besoin, petit à petit, de retrouver du boulot. Je n'ai pas vraiment le choix au final... Pour recouvrer un peu d'autonomie... Mais j'ai plusieurs difficultés... Je ne conçois pas de faire n'importe quoi pour commencer... Je ne peux pas faire un boulot qui va à l'encontre de mes valeurs, de mon éthique... Et ça, ça complique pas mal la tâche... Et le fait d'être "travailleur social" ne facilite en rien les choses... Parce que trouver du boulot en tant qu'éducateur... dans n'importe quel service en crise où on me demandera de recevoir des gens à la pelle, à qui je ne pourrai accorder que 5 mn d'attention et à qui il me faudra rabâcher les oreilles sur la nécessité de rentrer dans le rang... alors que moi-même je ne supporte plus ce discours... et bien comment dire... ça me pose question... Ensuite, il y a le fait que clairement, quand on cherche à effectuer une transition en douceur vers le retour à l'emploi.... le boulot d'éducateur n'est PAS la meilleure option à l'heure actuelle.... En témoignent certains amis à moi dont je sais les conditions de travail et le burnout qui guette... Mais je n'ai pas non plus passé ce diplôme par hasard.... alors aller complètement vers autre chose? Et comment? Je ne sais pas...
Mais si j'écris ici, c'est avant tout parce que j'ai besoin de pousser un coup de gueule. Alors je vais y venir. Parce que malgré tout, j'ai trouvé la force de mener des recherches, de postuler à certaines offres... et j'ai même décroché des entretiens... 3 entretiens au final... Et dans un seul de ces entretiens uniquement j'ai eu la sensation d'échanger, véritablement. D'échanger avec un être humain.
Le premier entretien que j'ai passé concernait un poste de travailleur social au sein d'un centre d'accueil de migrants. C'était un pré entretien de 15 mns en réalité... J'y suis allée détendue... Vraiment détendue. Car étrangement, la pression que je me mettais avant sur ce genre de choses s'est estompée... Je n'aime pas cette notion de "relativiser", surtout quand on l'utilise pour me faire la morale... mais malgré tout je suppose que c'est ce que je fais. Je relativise... J'étais détendue donc, et j'avais décidé de ne pas chercher à cacher ce qui m'est arrivé, ce qui est arrivé à Hanaël... sans pour autant amener la discussion sur le sujet. Parce que ça m'appartient. C'est tout. Pourtant, je n'ai rien à cacher. Et jamais, JAMAIS je ne m'empêcherai de parler de mon amour parce que ça risque de mettre les autres mal à l'aise ou qu'ils pourraient me juger ou faire des projections sur moi à cause de ça. Bref...l'entretien commence et s'oriente sur mes compétences, mes idées pour accompagner les personnes... Je pense pouvoir dire que ça se passe bien. Vraiment bien même. Et puis, un peu avant la fin du temps imparti, le type me demande de justifier le trou dans mon CV. Alors je lui parle d'Hanaël. Oui, j'ai la voix qui tremble un peu, mais je ne m'effondre pas pour autant. Je ne m'apitoie pas. Je réponds à sa question, c'est tout. Il élude très rapidement le sujet et me pose à nouveau une question qui n'a rien à voir, sur ce que je ferais en priorité en arrivant sur le poste. Je réponds, tout ce passe bien. Du moins en apparence... Grand sourire, on vous recontactera sans faute et bla et bla.... Je ressors, avec un brin de fierté et de confiance en moi qui commence à poindre... Ça faisait longtemps, alors j'accueille. Je me dis "Tu vois? ça n'était pas si mal. Tu as encore des choses à offrir et les gens sont capables de le voir..." Voila... Les jours passent: pas de nouvelles. Puis une semaine, deux semaines, trois semaines... Alors je choisis de contacter ma conseillère Pôle emploi, car c'est dans leur locaux que s'est déroulé l'entretien. L'association ne voulant pas donner leurs propres coordonnées aux candidats... Et là, je suis sidérée.... J'apprends que le jeune monsieur (qui devait avoir à peu près mon âge) avec qui j'ai passé l'entretien, un "manager du social", a décidé que j'étais trop fragile pour le poste à cause de ce qui m'est arrivé. Point. Merci. Au revoir. Je ne comprends pas... je demande des détails... Et bien il semblerait qu'il m'est sentie fragile pendant l'entretien et pas capable, donc, d'assumer ce poste. Il aurait ajouté: "je suis pas mal spécialiste du deuil, et on ne pourra rien attendre d'elle avant qu'elle ait passé la date des 3 ans"... Voilà... Voilà... Je suis sciée.... Que moi même je me sois posée des questions sur mes capacités à assurer ce job, cela me semble naturel... Que lui se pose ces questions après m'avoir entendu évoquer le décès d'Hanaël... je peux le concevoir... Mais a t'il eu le courage de me regarder dans les yeux et de me poser la question? A t-il seulement envisagé de me laisser une chance avant de me jeter dans la corbeille des ratés, des instables, des canards boiteux? Je ne le crois pas non.... La seule chose qui m'a rassuré, c'est d'apprendre son statut de "manager du social"... Heureusement, c'est sans doute un gestionnaire qui restera à l'abri dans son bureau et qui n'aura pas trop à faire avec les migrants accueillis.... Parce que s'il perçoit tous les accidentés de la vie comme des faibles... je pense qu'il aurait plus de choses à apprendre des migrants que l'inverse...
Voilà... Premier retour d'entretien... J'avoue que j'ai eu un peu de mal, l'espace d'une journée, à accuser le coup... C'est peut être le fait que ce monsieur n'ait même pas pris la peine de me recontacter en personne pour m'annoncer sa décision qui m'a le plus heurté... alors qu'il semblerait que d'autres candidats aient été recontactés. Comme si, en plus de ce qui m'est arrivé, il me fallait désormais endosser cette étiquette de pestiférée...
Mais comme je l'ai déjà dit, je continuerai d'arborer fièrement mes antennes et ma peau verte à pois! Et je ne laisserai pas ce genre d'expérience me démolir, même si clairement, j'aurais aimé m'en passer...