- Mais , enfin ! Je dois reprendre le travail lundi , moi!
Odile dressée sur ses ergots , faisait face au chef d'escale.........
- Madame , je suis désolé , il n'y a plus de places !
- çà fait six mois que nos billets sont retenus !
Aéroport de Nairoibi _ Kénya _ fin aout 72
A cette époque , on ne pouvait pas réserver son siège , et par hasard ( enfin , pas tout à fait : on était resté une heure au magasin free tax ! ) nous étions les derniers à embarquer .
Si bien , qu'on se retrouvait à six passagers , avec nos bagages déjà bien rangés à bord du 647 , au fond de la soute du jet d'Air France !Et seulement habillés de nos tenues de safari , d'ou nous arrivions directement !
Nos quatre autres compagnons d'infortune laissaient courageusement Odile aux avant postes ! Moi meme , je me tenais à distance respectueuse de la zone de conflit , ayant le souvenir qu'en Grèce , je l'avais vue se saisir du baton d'un homme qui frappait un pauvre ane , et lui mettre une volée bien sentie ! Donc , prudence ......
Au final , nous avons migrés vers l'Hotel Intercontinental , aux frais d'Air France!
......Odile réclama "des sous , j'ai rien à me mettre , moi , avec votre bazard , là ! " ce qu'elle obtint auprès du chef d'escale , apparemment très fatigué .....
Elle fonça , vers le magasin de l'hotel , à peine arrivée , et revint peu après avec trois t-shirts .....
- Hé ! vous sauvez pas , vous ! avec quoi je me lave , moi ? ma trousse de toilette est dans ma valise !!!!
Fasciné , je voyais la pomme d'Adam du fonctionnaire monter et descendre ............
-Je vais vous apporter une trousse des premières , ne bougez pas !
- y a intéret !
Le soir , nous franchimes la porte du restaurant , sous le regardi nterloqué des anglais en costumes sombres et des ladies en robes longues , l'orchestre jouant un " tea for two " , très british !
Je portais une chemise à poches de l'US Army , idéale pour la brousse , et un jean de toile , Odile , très chic avec son t-shirt bien moulant et qui s'était débarrassée de son soutien gorge " çà me tient chaud , ce machin là ! " , et nos quatre autres compagnons , vetus comme un commando de la Légion , on avait fière allure ..........j'entendis l'un de nous murmurer : Vive la France !............de plus , un des quatre , portait une paire de rangers dont la semelle venait de rendre l'ame , et celà le faisait bien rigoler ! Une équipée sauvage , genre "douze salopards "!
Le maitre d'hotel , roulant des yeux affolés , nous désigna une table , la dernière encore libre , juste devant l'orchestre , à la vue de tous !
Odile lança l'ambiance :
- On ne prend pas le menu ! on veut la carte !
- Oui ! et celle des vins aussi !
Vers la fin du diner , trois garçons tournaient autour de notre table , abondamment garnie ! les "roulantes " se succédaient : carrés de boeuf , gambas géants , crepes suzettes flambaient allègrement ! Odile se pencha vers moi :
- T'as vu çà , les anglais : ils doivent se dire " çà , c'est la vraie richesse ! et si simples !
Je demandais un vieil armagnac , pour finir , et cette fois le maitre d'hotel arborait un sourire jusqu'aux oreilles !
On apporta la note , que je signais d'un air dégagé .....
Le lendemain , nous allames en délégation , au bureau d'Air France , ou le chef d'escale nous reçut , en levant les bras en l'air :
- Pas de places avant cinq jours !!!!
Odile demanda un certificat , à remettre à son directeur , ce qui l'a fit rire aux éclats devant le rédigé :
" Madame L... a été débarqué entre Nairobi et Paris ....."
- Vous fournissez le parachute ?
Je négociais avec le pauvre représentant de notre compagnie nationale , un mini safari , " surtout pour les deux étudiants qui arrivaient de la Réunion , ils garderont un bon souvenir , comme çà ....." et le lendemain , un mini bus nous promena dans le Parc de Nairobi , ou nous vimes des lions , des hippos , antilopes , zèbres , crocos , girafes .....
La semaine passa , et on s'aperçut que signer , sans payer , procurait un plaisir intense , proche de l'extase ! Tout à une fin , et nous dumes quitter nos chambres , alors qu'on allait passer au champagne sous peu !
Nos bagages ( bien maigres ! ils étaient depuis longtemps à Paris.......) disposés dans le combi Volswagen , nous démarrames , direction l'aéroport .......
C'est à cet instant que le concierge de l'hotel , sortit en courant tenant à bout de bras une note longue comme le bras et criant : - the bill ! the bill !
éclats de rire dans le minibus , tandis qu'on voyait en nous éloignant , arriver le gars d'Air France , qui se saisissait de la note , et la parcourait , les yeux fixes !
Odile posa sa tete sur mon épaule :
- L'année prochaine , on revient ?
On est revenu quatre autres fois !
Mais , comme a dit Kipling : " Ceci est une autre histoire " .