Bonsoir à tous et à toutes.
Je viens régulièrement ici, vous lire et trouver un peu de réconfort.
Ce soir, j'ai décidé de vous parler, de vous raconter mon histoire.
Mon fils Alan , un soir, le 2 août dernier n'est pas rentré à la maison après son travail. Puis les jours suivants non plus.
Je l'ai cherché, partout, j'ai signalé sa disparition , mais au commissariat, ils m'ont dit d'attendre encore 48 heures avant de faire un signalement. J'ai donc posté un avis de recherche sur les réseaux sociaux.
Il a été partagé plus de 20 000 fois, il a même dépassé les frontières. J'ai reçu des messages de soutien de centaine de personnes.
Le 6 août, toujours sans nouvelles, dans la plus grande des inquiétudes, j'ai distribué plus de 1000 affiches de disparition, avec des amis de mon fils. Nous devions nous retrouver le soir, après mon travail, pour longer les quais du port de St Malo,où j'habite. Cela faisait 5 jours, j’envisageais tout, même le pire, tout en me disant que mon fils était quelque part, et qu'il finirait par rentrer.
Ces 5 jours ont été les plus longs de ma vie. J'ai cherché, et cherché partout.
Le samedi 6 août, j'ai pris mon poste à 15h30, et à 16h je recevais un appel du commissariat me demandant de venir au plus vite.
J'ai couru jusqu'à ma voiture, j'ai conduis en pleurs, en priant tous les Dieux et autres quidam de me protéger, de nous protéger du pire. Lorsque j'ai vu les enquêteurs, au bout du couloir, j'ai compris.
Je leur ai demandé d'attendre, un instant, je voulais arrêter le temps.
Le 6 août 2016, à 16h15 j'apprenais que mon fils, Alan, tout juste âgé de 21 ans avait été retrouvé, mort, dans le bassin Vauban, à St Malo.....
Je suis rentrée, seule, chez moi. J'ai attendu ma fille pour lui annoncer la terrible nouvelle. Puis ensuite, come un robot, j'ai appelé tout le monde.
J'habite loin de ma famille, et beaucoup étaient en vacances.
Seule, contre le temps que les réseaux sociaux mettent à annoncer une nouvelle.
Avant même que je sois arrivée chez moi, les pages facebook des journaux locaux, annonçaient déjà que le corps retrouvé dans ce bassin était peut être celui de mon fils.
A ma demande, beaucoup ont retiré leur publication, sauf un journal, qui ne l'a fait que le lendemain. Des personnes de ma famille, à l'étranger et injoignables, l'ont appris comme ça....
Puis ensuite, il y a eu les articles dans la presse. Il y a eu un article calomnieux, dans lequel étaient écris des mensonges.
J'ai été comme anesthésiée pendant les 15 jours qui ont suivis. Les obsèques de mon fils, c'était lunaire. J'étais là et je n'y étais pas.
Puis les cauchemars se sont installés. Tous les soirs depuis maintenant plus de trois mois, je le vois, mourir, m'appeler. Et je me réveille, en pleurs, je ne peux pas le sauver, j'arrive trop tard.
Il n'y a pas eu d'enquête. Le "dossier" a été classé accident tragique.
Plus de trois mois ont passés. Je ne vous raconte pas mes jours, mes nuits, ici, tout le monde les imagine très bien.
Je suis retournée à l'endroit où mon fils a été retrouvé. Et maintenant je sais .
Je sais qu'il n'a pas pu tomber tout seul. Je sais qu'il n'y a aucune sécurité. Je sais combien de bouées de sauvetage il y a et dans quel état elles sont. Je sais qu'elles sont inaccessibles. Je sais le nombre d'échelles, combien sont condamnées.
Mon fils aimait la vie. Il préparait son départ pour l'Irlande où il devait passer 12 mois, travailler, apprendre à parler anglais couramment et revenir continuer ses études. Il travaillais 7 jours sur 7. Oui vous lisez bien. 7 jours sur 7.
Il ne profitais même pas de sa vie, de sa si jeune vie. Il voulait préparer au mieux son départ pour ce pays, dans les meilleures conditions.
Il ne rentrera plus jamais, et chaque jour, je dois me faire violence pour me lever. J'ai bien pensé le rejoindre, j'ai même planifié la vie de ma fille sans moi.
Puis j'ai réalisé ce que j'étais en train d'envisager. Que mon fils aurait voulu la vivre sa vie, alors je n'avais pas le droit de perdre la mienne.
Aujourd'hui je lutte, mais je mène un combat. Une bataille. David contre Goliath.
J'ai mis en ligne une pétition, pour que les quais de St Malo soient enfin sécurisés.
J'ai reçu des témoignages, et je sais maintenant que les quais ne respectent pas la loi sur le balisage de nuit par exemple.
Je distribue la même pétition chez les commerçants de ma vile, et un peu partout en France, où les gens me le demande.
Je ne lâcherais plus rien maintenant.
La presse m'a contactée, enfin. Pour parler de mon combat. La télé aussi.
Le maire, qui reste sourd à mes demandes d'audience, ne pourra pas toujours m'ignorer.
j'ai fais une promesse à mon fils: Tant que je serais en vie, à terre, à genoux, mais en vie, je me battrais pour que cette ville protège tous ceux qui y mettent les pieds. Les malouins comme les touristes.
Je veux que le prénom de mon fils résonne à leurs oreilles.
Je ne m’arrêterais que lorsque le nécessaire sera fait.
J'ai également pris un rendez vous avec une avocate, à Paris. Loin de St Malo. Pour envisager une plainte contre X.
Je ne veux pas d'argent, mais des actions.
Voilà mon histoire.
Le 29 juin 1995, à 20h31, je venais de rencontrer ma petite crevette, mon fils , Alan. Il pesait 1,9 kilos.
Le 6 août 2016, on me l'a repris.
Je l'avais déposé le matin du 1er août aux pieds de la vieille ville. Il m'a embrassé, m'a dit"bonne journée ma petite maman, je t'aime, à ce soir".... Et je ne l'ai jamais revu. Jamais.
J'ai dit au revoir à une boite en bois clair. Je n'ai pas pu sentir sa peau une dernière fois.
Alors aujourd'hui, je lutte, parfois contre moi même, pour lui, pour tous ceux qui ont vécu le même drame au même endroit, et pour tous les autres. Parce que ça recommencera.
Il y a beaucoup de jours où je m'écroule, mais je me relève, pour lui avant tout.
Parce que mon fils aurait dû vivre, je n'ai pas le droit de renoncer.
Le vide s'est fait autour de moi. Les amies;, la famille. Le deuil n'est pourtant pas contagieux.....
Alors, j'écris, à défaut de pouvoir parler, raconter, le raconter.
Mon fils me manque, je l'aime et je voudrais pouvoir encore le voir, l'entendre, le toucher.
Je sais que ça ne sera plus possible, mais je en réalise pas.
Un matin il était dans mes bras, et le soir, il n'y était plus.
Parfois c'est tellement douloureux, cette plaie béante, au ventre, dans mes entrailles.
Mon combat, c'est tout ce qu'il me reste pour tenir debout. Et ma fille.
Voilà ma vie. Ma nouvelle vie, d'après. Celle sans mon fils.
Merci de m'avoir lue. Quand on n'a personne à qui parler, il faut trouver un moyen de dire. Pour ne pas devenir fou.
Merci.