Bonsoir,
J'ai perdu mes 2 enfants de 5 et 7 ans il y a trois ans de cela. C'est mon mari qui les a tué, autant employer les vrais mots sans métaphore.
Rose-enchantée, Je veux vous témoigner tout mon soutien et vous parler de cette culpabilité qui nous ronge, jour après jour.
Dans mon cas, bien que je n'y sois pour rien, chaque matin qui se lève je me dis que j'aurais pu faire quelque chose pour sauver mes enfants.
Si...si... si... avec tous les "si" que j'ai imaginé, j'aurai pu faire revenir mes enfants !... mais biensûr nous n'imaginons les choses que sous le prisme qui nous convient, celui de la culpabilité, du regret, du remord....
Des amis sincères et francs, ma mère également, m'ont ouvert les yeux sur cette culpabilité qui me rongeait et me fait encore souffrir bien que je la maitrise mieux... et si nous imaginions d'autres "si?" "et si tu avais été là ce soir, m'ont-ils dit, tu serai morte avec eux" "si le feu s'était propagé à tout le quartiers, les 5 voisins aussi seraient décédés".... A mon conjoint qui est veuf, lui aussi gagné par la culpabilité, je lui dit "si ta femme avait pris son malaise en voiture, au lieu de la piscine, elle aurait pu tuer quelqu'un d'autre"...
Pour moi, je vis la perte de mes enfants comme la perte éternelle de l'insouciance... Je pense aussi à votre petit garçon, lui aussi surement plein de culpabilité (à 4 ans, on est en plein dans la "pensée magique" cf marcel ruffo)
Accrochez-vous, laissez fondre la douleur sur vous et acceptez-là. Soyez douce et patiente avec vous. Je prends souvent l'image du roseau, face au chêne, dans la fable de la fontaine : plier sous la douleur, l'accepter, la regarder en face, comme une vague qui nous assaille puis repart doucement, pour mieux revenir.
J'ai eu peur d'oublier mes enfants. J'ai une très mauvaise mémoire du passé, cela a toujours été... j'ai perdu beaucoup de souvenir, j'ai aussi très rapidement perdu le souvenir de leur voix...et je me souviens très peu de mes rêves (en trois ans, je me rappelle de 3 rêves avec mes enfants) / je préfère cela car ces rêves sont de véritables épreuves à endurer pour les jours qui suivent. Par contre, dans ces quelques rêves, j'ai revu leur visage dans leur moindre détail et désormais, je sais, qu'au tréfond de mon cerveau, leur image est gravée à tout jamais , même si leur image remonte peu jusqu'à ma conscience éveillée.
Face au deuil, ce n'est pas tant du courage qu'il faut, mais il faut se forger une philosophie de vie et se la repéter, s'y accrocher...
3 mois, ce sont les balbutiements du deuil, le cerveau ne réalise même pas ce qu'il se passe, il ferme les vannes des sentiments...
Le chemin est long mais mieux vaut regarder une journée après l'autre..; la tristesse que nous vivons est la plus grande des douleurs. Mais elle est NORMALE... oui, notre société de consommation a voulu nous faire croire que la vie était 100% bonheur... faux archi-faux, la tristesse fait partie de la vie... certains sont plus blessés que d'autres... je crois que notre guérison passe aussi par l'acceptation de cette douleur diffuse et incessante, en tout cas les premières années. Accepter de ne plus être comme avant, de changer.
Je fais partie de l'association Jonathan Pierres Vivantes qui est une association nationale de parents endeuillés, bientôt reconnue d'utilité publique. Je t'invite à t'en rapprocher.. moi, j'y suis allée 1 an après le décès de mes enfants. Ce ne sont que des parents et des frères et soeurs dans le deuil, il y a une antenne dans chaque département :
www.anjpv.asso.fr Voilà Rose-Enchantée, j'adresse une bulle d'amour à ta petite fille qui joue là-haut avec mes enfants, avec tous ces autres enfants.
Je m'accroche toujours à l'idée que eux ne souffrent plus, que je n'ai que ma propre douleur à gérer.
SiDieu me prête encore quelques années de vie, je me suis toujours dit que je mourrais le sourire aux lèvres, heureuse de partir retrouver Léo et ALbane...
Je vous 'embrasse avec beaucoup d'affection et d'humanité qui nous relie toutes, nous toutes les mamans endeuillées.
Pour nous, sur ce forum, tu es une maman qui a perdu son enfant, la faute ne rejaillit sur personne.
Bane