j'ai un peu tout fait...
je savais que ça serait terrible et qu'il fallait que je m'accroche à toutes les manifestations de chaleur humaine pour ne pas sombrer, alors j'ai listé chaque jour la petite attention, le regard bienveillant, la main posée, les mots partagés... tout ce qui pouvait me persuader que cet événement inhumain ne m'avait pas définitivement bannie du monde des humains...
j'ai parlé un peu avec ceux qui supportaient ma détresse absolue..
j'ai écrit chaque jour ma douleur, mes questions, ma litanie de pourquoi
j'ai participé à un groupe d’entraide fermé, de parents endeuillés
puis un groupe ouvert dans une autre association
je me suis octroyé des massages les 2 premières années
j'ai vu une psy spécialiste du deuil durant 2 ans et de mi je crois
j'ai fait des albums photos et pleuré tout ce que je pouvais
j'ai écrit sur un blog
j'ai écrit dans un forum puis ici
j'ai lu tous les livres parlant de deuil de mort de NDE , tous les témoignages
j'ai cherché des nuits entières des sites sur le deuil , la mort, surtout de son enfant et j'ai imprimé des pages et des pages de textes lus et relus, surlignés et soulignés
j'ai des bassines de thé ou de coca quand je n'avais pas faim
j'ai écrit tous les petits souvenirs de ma vie d’avant avec ma fille de peur de les oublier
j'ai organisé une cérémonie chaque année à la date de son accident, en y conviant ceux qui nous aident à survivre, avec des rituels qui aident au delà des mots
j'ai mis des photos pârtout
je suis allée devant sa plaque aussi longtemps et autant de fois que j'en ai eu besoin...
j'ai sollicité mes amies pour m'écouter un peu raconter encore et encore ma peine immense, celles capables de me laisser parler sans me donner de conseils...
j'ai dessiné des zentangles ou autre zendalas
j'ai joué avec mes petits enfants
je leur ai parlé parfois de leur super tata Manue, sans pleurer
j'ai osé l'évoquer ne serait que par une phrase, une photo lors des événements familiaux
j'ai déposé des fleurs chaque 6.. avec son frère, sa soeur, les belle-fille et gendres, les petits.. rituel de partage, sans mots.. mais rituel nécessaire pour nous qui lui avons promis de lui survivre et de prendre soin les uns des autres...
j'ai fait tout ça.. jour après jour... et petit à petit le chagrin est devenu supportable...je l'ai usé en faisant tout ça... et il en reste encore.Mais il ne me broie plus la respiration... ni le coeur...J'ai survécu à cette tragédie et je vais vivre...avec cette peine et ce manque,on peut vivre avec ÇA...meme si il est impossible de lec roire aux débuts... Je crois que c'est ça le deuil.. être capable de vivre avec le chagrin et le manque sans en être absolument radicalement démolie... je suis en bonne voie... c'est possible...terriblement difficile et inhumain mais possible.
Chacun doit trouver ce qui est aidant pour lui, pour elle, écouter ses besoins... de solitude et de partage pour jongler entre les deux.. On a besoin des deux...Il n'y a pas de recette...