A LA LUNE
Oublier cet homme à la saveur du bonheur,
Effacer son visage, son sentier, son odeur,
Ne plus quitter la porte et s’y coller tout contre,
Le dos au mur, collée, planquée dans un trou d’ombre.
Sous ta loi, je me noie dans un lit d’amertume.
A tâtons, derrière un rideau, mes mains te cherchent.
Au bout des doigts, j’enfile des mitaines de brume
Pour dessiner ta toile en troublantes arabesques.
En mon âme, en mon cœur, nous sommes au rendez-vous
Des amants désunis sur des îles perdues.
Je ne sais où tu campes ni dans quel bois tu joues.
Ta chair a pris racine en un vert pale écru.
Loin dans mes souvenirs, tu sais que j’y ai cru.
Pourquoi t’être caché au milieu des zombies ?
De là-bas, ne me dis pas que tu ne peux plus
Accomplir des miracles, faire renaître la vie.
Ne plus souffrir, ne plus haïr, savoir aimer
Au creux des reins, comme des braises abandonnées
Sur lesquelles à temps perdu, le vent vient souffler.
Se souvenir de ne pas pouvoir t’oublier.
Jacqueline Rex