Bonjour Alba 1985,
Je crains que suite à une mort par suicide, la phase d'interrogation reste à jamais ... en suspens ...
Il y a le deuil, et puis le problème du suicide, qui complique puisque, en tant que proches, nous pensons que nous aurions pu aider, et/ou être appelés à le faire, afin d'éviter la fatale issue.
Je suis la tata d'un jeune suicidé, et des années après, les questions sont toujours ouvertes et sans possible conclusion !
La problématique de ce suicide se pose chaque jour pour moi !
Mais j'enverrais chier au diable quiconque oserait me dire de "tourner la page", NORMAL, c'est NOTRE PETIT, et je continue de l'accompagner pour toujours, ma seule catharsis possible dans cette souillure de ma vie. Non pas que je me sente coupable, mais je prends part, parce que cet enfant fait partie de moi point barre.
Chaque vie est unique ... chaque souffrance si intime ... chaque "concours de circonstances" étroitement emmêlé de malchance ...
Il semble qu'un rien aurait pu stopper l'engrenage ... quant à prétendre savoir "quoi" ...
Ce n'est pas facile ...
Et toi, à SEULEMENT trois mois, tu es encore sous le choc.
S'il est vraiment arrivé à ton homme de ne pas dormir plusieurs nuits d'affilée, c' est très dangereux pour le psychisme, c'est ainsi que le cerveau se met à percevoir des sensations irréelles, à halluciner ... les hallucinations sont des "mélanges" incontrôlés ...
Il est très difficile de reconnaître la personne équilibrée et saine que l'on a connue dans l'acte suicidaire, on se dit que si toutes les ressources avaient été présentes à l'esprit, le moment fatidique du suicide ne se serait pas passé.
Mais ça s'est passé, horreur pour nous, oui horreur à "gérer", à rationaliser/contenir, sous peine, en s'identifiant de trop près au suicidé, à finir comme lui ...
Je sais à quel point notre impuissance est inacceptable, et pourtant la vérité cruelle du suicide, nous révèle qu'on ne peut sauver ... que NOUS, hélas, tant il existe une distance entre les êtres même étroitement liés ! Terrible solitude ... terrible crise de confiance ... en soi, en l'autre, en ce de quoi les sentiments sont faits ... crise de confiance tout simplement dans la solidité de nos convictions, de nos options ...
Et puis cette lancinante question: quelle part de l'autre nous était-elle
inconnue, nous connaissions-nous VRAIMENT ? Et donc, quelle était notre valeur pour l'autre ? N'oublions pas que jamais nous ne sommes dans la tête de l'autre, que nous ne savons pas, que nous ne saurons jamais, comment, pourquoi, à un moment tout s'est mélangé en déséquilibre envers son jugement ...
Comme "tout remue", n'est-ce pas, Alba 1985 ...
Et sans aller jusqu'à parler de "folie", ce qui est de toute manière une notion très relative, on ne peut s'empêcher de penser qu'il aurait suffi d'un rien pour que, telle les balances anciennes, notre aimé reste du côté de la vie au lieu de basculer dans l'abandon, dans le vide.
UN RIEN, un rien ... voilà qui est bien amer à considérer ...
Mais qui place le suicide dans l'ensemble des fatalités qui cause la mort ...
Acceptable ou non, personnellement je ne pense pas que le deuil "avance" vers cette question, le deuil avance tout simplement vers une vie dans l'Amour en soi, à sonder, délivrer, partager ...
Je t'ai pondu une tartine !
Sans penser si ça allait t'aider ou non, simplement parce que ton histoire "inexplicable" me touche.
Amicalement et solidairement, Martine.