Salut Sara,
Je viens de m'inscrire sur ce forum que je découvre à l'instant. Mon histoire est un peu différente de la tienne, mais je te l'écris quand même. (Désolée, c'est peut-être un peu long!)
Mon copain s'est suicidé au début du mois d'août. Contrairement au tien, il souffrait de dépression depuis plusieurs années à cause d'un parcours de vie difficile. Cela faisait 4 ans que nous nous connaissions et que nous vivions ensemble ( on s'était rencontré en colocation). J'étais partie de chez mes parents à 18 ans et lui aussi, nous avions énormément partagé de choses durant ces années. De mon côté, je grandissais avec plus de facilité que lui, qui avait de la peine à "sortir de son vécu". Au-delà du fait que nous étions en couple, d'un certain point de vue, il était tout pour moi : un frère, un meilleur ami, un garçon formidable qui faisait partie de moi et que j'aimais énormément, même si sa dépression me fatiguait beaucoup. A tel point que nous avons cessé d'être un couple, même si nous vivions ensemble. Certains jours, on se saluait à peine, il ne partageait jamais ce qu'il ressentait réellement et refusait toutes les formes d'aides auxquelles je pensais. Il avait entamé quatre formations qu'il a interrompues à chaque fois. Il passait tout son temps sur son ordinateur, jouait la nuit et dormait le jour, etc.
Durant ces quatre ans, nous avons aussi partagé des tas de choses heureuses, visites aux musées, ballades, voyages, découvertes, etc. Nous avions adopté deux chats et enfin, bref, j'ai cru pendant longtemps que je passerai un très long moment de ma vie avec lui. Il était mon égal ou presque, et malgré ses fragilités, j'avais vraiment envie de construire mon monde avec lui.
Seulement, sa dépression m'a trop fatiguée alors au début du mois d'août, lors d'une conversation, je lui ai expliqué que je n'arrivais plus à poursuivre dans la relation, que je n'arrivais pas à percevoir des perspectives d'avenir dans ces conditions et que cela me tirait trop vers le bas, j'étais épuisée. Cela faisait plusieurs mois que je savais que je voulais me séparer, mais je savais qu'il était fragile et qu'il serait seul au monde sans moi (il avait coupé les liens avec ses parents et ne voyait personne en dehors de moi car il ne sortait que pour faire les courses, ou ce genre de choses). Je voulais attendre qu'il se lance réellement dans une formation, qu'il ait des amis, qu'il soit entouré. Effectivement, il avait trouvé une formation qui semblait lui convenir et il rencontrait des gens dans le cadre de tournois d'un jeu de société dont j'ai oublié le nom. Il avait aussi repris contact avec son ami d'enfance. J'aurais aimé attendre encore avant de le quitter, mais lorsqu'il m'a demandé "comment on continue maintenant?" je n'ai plus voulu lui mentir.
Cinq jours plus tard, il s'était suicidé. Dans son journal, j'ai lu qu'il pensait déjà au suicide en 2016 (avec des projets concrets et dessins), au moment de notre rencontre. Il a aussi écrit que globalement, durant toutes ces années, il luttait constamment contre le suicide.
Pour moi, tout a été un choc. Sa mort, ses écrits, ses messages de reproches, la prise de conscience de l'ampleur de sa souffrance. Au début, je n'ai pas vraiment pleuré. Je me disais que je n'allais pas si mal, mais aujourd'hui, avec la charge de travail de la rentrée, je me sens oppressée et je remarque à quel point la tristesse que je ressens par rapport à lui, à son geste, à nos moments partagés, et tout le reste, est terriblement profonde. Pour la première fois, j'ai demandé un arrêt maladie cette semaine, et j'ai l'impression que le deuil sera très long, parce que malgré les larmes qui coulent, ma tristesse ne semble pas diminuer.
J'ai l'impression que je n'arrive pas à gérer mes études, mon appartement, ma petite soeur qui vit maintenant avec moi, et mes émotions si intenses et inattendues.