Bonsoir à tous
C'est la première fois que j'écris car je ne savais pas comment me "lancer"...
Je n'ai pas lu d'histoires tout à fait semblables à la mienne, mais quelle importance finalement?
Toute la douleur et toutes les peines que j'ai pu lire sur ce forum rejoignent les miennes.
Le papa de mes 2 enfants de 12 et 16 ans a "choisi" de nous quitter le 2 février 2009. Je le revois sortir de la maison, pour "aller chercher du matériel au magasin de bricolage"; j'étais au téléphone avec ma mère; "à plus!" m'a-t'il dit avec son beau sourire.... Nous ne l'avons jamais revu. Les gendarmes l'ont retrouvé le lendemain après-midi; j'ai demandé si je pouvais le voir à la morgue de l'hôpital où son corps avait été transporté; ils m'ont répondu "vous pouvez, mais on vous le déconseille, vous ne le reconnaîtrez pas".
Il s'est tué avec le fusil de chasse de notre voisin (et ami), qui a perdu sa femme d'un cancer 4 jours après.
ça fait plus de 4 ans que notre vie a explosé, oui, explosé, notre vie a été réduite en miettes...en milliards de larmes, en millions de pourquois... Je "savais" que ça finirait par arriver... En 2002, j' étais "arrivée à temps... Cette fois il a "préparé" minutieusement son départ, je m'en suis rendu compte au fil du temps...
Une partie de moi est morte avec lui; je suis amputée d'une part de moi_même; il était mon premier amour, mon mari, le papa de mes enfants; je l'aimais, je l'admirais
4 ans après, la douleur de son absence est toujours là, je pense à lui tous les jours, il est devenu...comme un ami qui veille sur nous trois..
je semble peut-être "détachée" par rapport aux témoignages où on sent la souffrance qui palpite à travers les mots... Je suis maladroite et j'ai du mal à parler de ma souffrance, mais elle est encore si vive... J'ai tant bien que mal "tenu le coup" depuis ces années, mais là, ces derniers temps voilà ce que je ressens : c'est comme si j'avais couru de toutes mes forces pour avancer, tenir, ne pas me laisser avaler par toute cette souffrance, et là, je m'arrête, je me retourne, je réalise le chemin parcouru, et je me sens envahie par un vertige immense, j'ai peur de tomber, je suis fatiguée, épuisée, j'ai envie et besoin de parler de tout cela...
C'est trop lourd, je n'arrive plus à trouver d'autre sens à ma vie que mes enfants...
Et je DOIS me reconstruire, pour eux, pour qu'ils puissent vivre leur vie sans trop se faire de souci pour leur maman...
J'ai encore tant besoin de parler... Au bout de 4 ans, pour l'entourage, on est "sensé" aller mieux.... Mais ça ne marche pas exactement comme ça.. Oui, au fil du temps, la douleur se fait un peu plus douce, disons qu'on vit avec.. Mais on retombe dans le gouffre; on est juste, avec le temps, de mieux en mieux armé pour remonter de ce gouffre...

Je vous remercie de m'avoir lue, et je pense très fort à ceux qui sont sur ce difficile chemin

Bonsoir Bane,
Mille merci de m'avoir lue, merci pour votre réponse!
Je ne suis pas encore allée lire les modules d'accompagnement, mais je n'y manquerai pas.
Vous vivez un degré supplémentaire dans la douleur, que moi aussi j'ai failli connaître..
Ce maudit soir, avant de sortir de la maison, mon mari a demandé à notre fils qui avait alors 9 ans s'il voulait l'accompagner à Brico****
"Non papa, je regarde un dessin animé!"... Il allait l'emmener avec lui.
Mon fils porte une culpabilité énorme... "Si j'étais allé avec lui, rien ne serait arrivé.."
J'ai pensé à toi tout ce jour, et je sais que j'ai du bonheur dans notre malheur.

Pour mon entourage, je suis courageuse, volontaire, tenace, je vais de l'avant, je suis forte.... Mais pour moi, je "suis", c'est tout; je ne suis ni comme ceci, ni comme cela, je "suis"... De toutes façons, a t'on vraiment le choix??
Biologiquement on est en vie, alors...on survit.
Et le corps parle, exprime cette souffrance... Il y a 2 ans, ma fille a failli mourir d'une salmonellose; elle a mis des mois à se rétablir. Il y a 3 ans, je me suis cassé un pied juste en me tordant la cheville. Je souffre aussi énormément du dos depuis l'automne dernier... La seule chose que j'ai trouvée pour me soulager, c'est..le yoga et la méditation. Je débute, mais c'est une vraie bouffée d'oxygène.
Je m'accroche à tout ce qui peut me donner un peu de répit

Je vous adresse mes plus douces pensées, Bane. Douceur, écoute, gentillesse, tendresse, présence... Nous en avons tellement besoin

Bonsoir Marie,
 Je veux d'abord répondre à ta question : OUI, on  trouve des périodes de répit, des moments à durée très variable, où la vie semble plus douce, et reprend de la saveur...ça peut durer quelques minutes, quelques jours, quelques mois... Il n'y a pas de règle.. Les enfants, nos enfants, ils sont nos moteurs!!! Quel âge a ta fille? Regarde la vivre, partager ses moments de joie, ses bonheurs d'enfant, et aussi ses moments de chagrin, tout cela t'aidera. On a mal quand on voit nos enfants malheureux, mais quand on les voit qui mordent à nouveau dans la vie à pleines dents, car c'est ce qui arrive, heureusement, alors là, on a le coeur qui sourit!!!
Dans les moments où je me sens mal, je me dis que j'ai la chance d'avoir mes deux enfants, en bonne santé.. On a tous des histoires uniques, même si on se rejoint dans la souffrance.
Depuis la mort de mon mari, j'ai fait avec mes 2 zamours des choses que je n'aurais jamais faites avant!! Nous sommes allés voir un grand concert (le 1er pour moi) au stade de France, où nous avons pleuré d'émotion...pas de tristesse! Nous sommes partis 1 semaine à Barcelone l'été dernier. C'était dur pour moi, car c'était la 1ere fois que je partais aussi loin.
Mon mari travaillait sans cesse, il ne savais pas s'accorder de loisirs et de plaisirs; avec lui, tout devait avoir une utilité! C'est peut- être un peu ça qui a fait que la vie lui a semblé aussi insupportable...
Les plaisirs, il ne faut pas forcément les chercher loin...c'est aussi dans la vie de tous les jours... Par exemple, mes enfants et moi, nous nous "empilons" régulièrement dans ma chambre, nous amenons matelas et coussins, et on écoute de la musique, on raconte des blagues, n'importe quoi, je les suis avec plaisir dans leurs "délires", et on adore ça tous les trois!!! On s'amuse à faire des repas où tous les aliments ont la même couleur, des repas ou on commence par le dessert, on fait des jolies tables avec des fleurs, on s'asseoit dans le jardin et on écoute des oiseaux qui "discutent"...
 Mais ça n'est pas tous les jours comme ça... Il y a ces moments de vide immense, ou on se demande "ce qu'on fait là" et "ce qu'on va devenir"...
Moi aussi, ces temps-ci, j'ai peur de l'avenir, car  ce mot n'a plus vraiment de sens pour ma propre personne.. Mes enfants ont bien sûr l'avenir devant eux, mais moi....
Mon mari a eu une enfance compliquée; sa mère est entrée en hôpital psychiatrique alors qu'il n'avait pas 2 ans; on ne lui a pas expliqué les choses, c'était tabou dans sa famille; il connaissait à peine sa mère et toute sa famille maternelle. Il était fils unique.
Je suis sûre que tous ces non dits ont bouleversé toute sa vie.
Mon mari était très exigeant avec lui même, mais il l'était aussi avec les autres, avec ses enfants, et avec moi même. Et il l'était de plus en plus au fil des années. Il était même assez dur avec son père, qui est un homme tellement gentil..
Mon mari avait déjà eu des idées suicidaires en 2002, et il n'était pas passé à l'acte, j'étais arrivée "à temps". Depuis, les périodes de mal être et celles où il était "bien" se sont succédées. J'ai fait tout ce que j'ai pu pour l'aider. Quelques mois avant sa mort, dans un creux de la vague, il m'a avoué qu'il "avait l'impression d'être amoureux de B.", une de mes collègues de travail. C'était horrible à entendre, mais je l'aurais laissé partir avec elle, si ça avait pu le rendre heureux... Mais il ne savait pas ce qu'il voulait... Il était comme perdu.
Ce qui m'a fait le plus mal, c'est qu'en partant, dans sa voiture, il a écrit un mot, dont les gendarmes m'ont donné une copie.. "Pardonnez moi, je vis un enfer, je n'en peux plus depuis trop longtemps!!!! Je vous aime tous! BISES A B.....".
Voilà le mot exact qu'il nous a laissé, le nom de cette femme écrit en évidence...

Je suis désolée...ce message, ce soir, est un peu chaos, comme mon esprit ces jours ci... Il y aura des instants meilleurs... Marie, on n'est jamais plus la même personne APRES.... Pourtant, on essaie de "reconstruire" du mieux qu'on peut, mais on ne peut plus être la même personne qu'avant, et ça, on met énormément de temps à l'admettre, je crois. C'est long, trés long, et il faut être patient et trés doux avec soi même.

Cet après midi, j'ai pleuré car je n'arrivais pas à m'y retrouver sur notre nouvel ordi avec windows 8! Ce soir, j'ai découvert qu'un couple de rouge-queue a fait son nid sous le rebord du toit de notre maison, et...il y a des bébés qui piaillent dans le nid.. ça m'a fait "sourire le coeur" (c'est une expression de mon fils)

A bientôt, et je te souhaite une douce nuit Marie