Christian,
Mon message se voulait réconfortant.
Petit à petit. On réalise, on prend conscience que la vie est toujours en nous malgré l'absence de l'être cher. Parce qu'on est "configuré pour la survie" (selon les termes du Dr Fauré, lui-même). Et pourtant, la perte est atroce, le décès inconcevable, intolérable. Mais la douleur diminue d'intensité.
Moi-aussi, je ne pouvais pas envisager la vie sans lui. Penser à une relation autre, "uniquement" intérieure, était une horreur inqualifiable. Pour tout te dire, ou presque, j'ai bien cru mourrir de douleur. Et j'ai même voulu mourrir d'avoir perdu JL et, en plus, de n'avoir pas pu tenir ma promesse d'être auprès de lui au moment de son départ ... Douleur + colère : trop insupportable ! Plutôt mourrir ! J'avais trouvé "comment faire", j'avais fait mon plan. Et comme personne n'allait me succéder, je n'avais pas à m'en faire pour ma descendance, ce qui me simplifiait la tâche ... Je me suis fait quelques "bobos" (fracture, entorse, etc.) avec une frature qui s'est transformée en algodystrophie dont je souffre encore ... Bref, même s'il y avait eu un "accicent" au départ, je crois que mon corps exprimait sa douleur et, aussi, que je ne voulais pas en sortir ... J'ai aussi augmenté la consommation de cigarettes ... comme ça j'augmentais les "chances" de tomber malade ...
Je me me suis dit qu'après avoir vécu cet amour avec JL, j'avais eu ma "part de bonheur". J'ai vécu un amour fusionnel. Un amour qui a même fait des envieux ! Je croyais même être la seule à avoir vécu un tel amour et, par conséquent, quoi qu'on me dise, moi, je ne pouvais survivre ! Et je me disais qu'après avoir vécu ce trésor d'amour, à quoi cela servirait-il de vivre encore un jour ?
Et puis ... Je suis sur ce fil. J'en suis la première étonnée. J'ai même du mal à l'accepter ! Alors, comme tu peux le lire, ce n'est pas très clair ni très limpide, ni très "évident" ...
La vie n'est pas facile. 14 mois se sont écoulés après 2 ans de maladie ... Il y a des moments où je "décroche"... Des moments d'angoisse, de doute, d'incertitude ... Surtout que les épreuves ne manquent pas dans le quotidien ...
Ce qu'il faut retenir, c'est que l'amour de ces 22 ans pour moi, de ces 30 ans pour toi, ne disparaîtra jamais. Le lien intérieur qui se noue n'est pas un oubli, bien au contraire. C'est une certitude désormais : je suis sûre de ne jamais l'oublier, de ne jamais l'abandonner.
On ne peut pas juger les réactions de chacun. Chacun fait juste comme il peut. Tout ce dont nous pouvons être sûrs, c'est que nous sommes tous pris dans la même tourmente ; nous vivons tous un cataclysme ... et nous avons besoin d'êre entourés de personnes qui comprennent car, elles, elles ont ce même vécu. C'est ce que nous trouvons sur ce forum.
La traversée du deuil est une épreuve. Elle me fait penser à une traversée en mer, par avis de tempête, parce que j'ai "beaucoup" navigué avec JL. Nous sommes sur une embarcation que nous ne maîtrisons pas (nous-mêmes) dont nous ne connaissons pas tous les instruments de navigation et même les manoeuvres de base ne sont pas "notre fort" (épancher sa peine ...). Du coup, le bateau est malmené mais ... il est insubmersible ! Et en plus, on ne sait pas où l'on va et on n'a ni GPS ni sextant ... on avance à vue ... on essaie juste de sortir la tête de l'eau une fois la grosse vague de douleur, de souffrance passée ... On reprend un peu son souffle ... tout en sachant qu'une prochaine vague s'annonce. ... C'est, je crois, ce que la majorité des membres du forum vit au jour le jour. Heure par heure, pour commencer.
On ne sait même pas ni pourquoi, ni comment "on tient", ni dans quel but ... Mais un moment arrive où la houle est moins forte, où on ne se sent plus "hâché menu" par ces vauges courtes qui te prennent de tous les côtés ...
J'espère que mon messsage t'apportera un peu de réconfort pour traverser cette journée.
Bien affectueusement
Angela