FORUM "LES MOTS DU DEUIL"
Comprendre et vivre son deuil => Vivre Le Deuil => Discussion démarrée par: Yohann le 28 novembre 2011 à 16:35:23
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Bonjour,
Après une sombre, très sombre, fin de semaine, je réapparais, un peu anéanti par les évènements que même les échanges sur ce Forum ne pouvaient soulager.
Et ma question : Quel deuil ?
Pourquoi cette segmentation de différents deuils ?
Ça veut dire quoi, cette absurdité d'un deuil segmenté, ignorant alors que la douleur de l'un est par définition aussi la douleur des autres nous sont proches ?
Mon épouse est décédée le 23 septembre : Décès d'un conjoint !
Mon épouse est décédée : et mes 2 filles dont l'une de 28 ans, c'est quoi ? Deuil de leur maman !
Mon épouse est décédée : et ses frères et soeurs, c'est quoi ? Deuil d'un frère et soeur !
Et pourtant, celle que j'aime a disparu.
Est-ce une raison pour oublier que d'autres que j'aime souffrent aussi ?
La douleur n'est pas segmentée, elle est unique, fondue dans une somme de douleurs et c'est cette somme qui nous envahit.
Mes enfants ont perdu leur maman, moi celle que j'aime.
Dois-je donc rester insensible à la douleur de mes filles ?
Et mes filles insensibles à la douleur de leur père ?
Et ses frères et soeurs indifférents à la douleur des autres puisqu'ils ont la leur ?
Non !
Quand je lis parfois : "Il n'y a que ceux qui sont concernés par la perte de ... qui peuvent comprendre", savent-ils au moins ce qu'est la douleur, ... vue au-delà de leur simple nombril, "Centre du Monde" ?
La douleur de ceux qui, pour les mêmes raisons, aimaient en commun celle qui a disparu ?
Elle est unique, cette douleur, partagée, amplifiée, simplement parce que la nôtre est aussi celle de ceux qu'on aime.
Alors, certains peuvent-ils affirmer :"J'AI perdu MON, les autres ne peuvent pas comprendre !"
Nombrilisme, quand tu nous tiens !
Yohann
(révolté !)
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Yohann,
Je me permets de te répondre, car je pense que le deuil est très différent selon le lien qui nous unit à la personne décédée;
J'ai perdu mon papa à l'âge de 8 ans, accident de voiture, c'est violent, et surtout très violent de voir sa mère désemparée et tous les adultes autour dans le chagrin.. puis j'ai perdu 6 ans après mon grand père adoré, ça m'a révolté, j'avais alors 14 ans... J'ai grandi en ayant cotoyé la mort , jeune, je suis devenue infirmière à domicile et j'ai accompagné beaucoup de personnes dans leurs derniers jours, de tous âges...
Il y a 3 ans déjà, j'ai perdu mon fils de 31 ans qui s'est suicidé, et là c'est innomable, cruel, insupportable, il avait le même âge que mon père, mais là c'était mon fils et ça n'a plus rien à voir; là aussi c'est une mort violente, mais celle de mon enfant; La mort de Samuel a plongé dans la tristesse, mon mari, mes 2 autres enfants,les autres membres de nos familles, ses cousins, ses copains... mais moi, quand je réunis ma famille il manque toujours quelqu'un à la table, je ne verrai jamais ses enfants, je ne le verrai pas vieillir, il ne sera pas là quand je vieiliirai, et ça, c'est insupportable et pourtant il faut vivre avec ce manque, au quotidien...
Tout ça pour dire Yohann, que toutes ces personnes sont en deuil du même Samuel, mais selon le lien, le deuil est différent; je ne cherche pas à comparer les souffrances car elle est réelle pour chacun des endeuillés, réelle et à la mesure de l'amour porté à celui qui est mort et dont l'absence est cruelle au quotidien!
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Bonjour,
Comment peux-tu, Yohann, dire une telle chose : "Quand je lis parfois : "Il n'y a que ceux qui sont concernés par la perte de ... qui peuvent comprendre", savent-ils au moins ce qu'est la douleur, ... vue au-delà de leur simple nombril, "Centre du Monde" ?"
Terrible phrase et ô combien choquante !...
Est-ce du nombrillisme que de sentir l'indifférence quotidienne autour de soi ?
Non, la perte d'un être cher et le deuil qui s'ensuit est unique et si nous pouvons partager une douleur, les souffrances ne sont pas pour autant comparables. Et je rejoins Mariej lorsqu'elle dit que la souffrance est réelle pour chacun des endeuillés mais à la mesure de l'amour porté à celui qui est mort. C'est une évidence. Il était leur frère, leur neveu, leur cousin, certes, mais moi il était MON mari, une part essentielle de moi-même, et son départ me laisse amputée à jamais.
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Bonjour Christine et tout les autres. Celà fait un bout de temps que je n'interviens plus sur le site. Vous m'avez tous
énormément aidés ! 13 mois et 10 jours que mon Amour est partit ! et je me retrouve dans ce que tu écris Christine, je
ne fais pas du "nombrilisme" mais tous les jours il faut vivre avec ce manque, cette absence horrible qui me brule la
poitrine, cette envie de dire stop ! je ne veux plus, je ne peux plus vivre sans mon mari !!!! il y a nos filles et nos petits enfants
et je sais que leur papa et papy leur manque ! ne pas pleurer quand notre petite fille de 3 ans et demi me demande
"il revient quand papy ? quand il sera guérit ?" ne pas pleurer et lui expliquer que papy ne reviendra pas mais qu'il est dans
son coeur et nos coeurs pour toujours et qu'il la protège ! ne pas se projeter dans l'avenir car je ne peux pas encore
accepter de vivre encore des années sans mon mari ! non, ce n'est pas du nombrilisme, c'est ma vie, notre vie de couple,
notre vie de famille qui a volée en éclats ! c'est ma douleur, notre douleur et j'en ai assez de faire semblant que tout va
bien. Bien sur, il y a des moments de répit ou la douleur est moins vive mais elle est là et elle sera toujours là ! J'aime mon
mari et je l'aimerais toujours. Je sais qu'il n'est pas loin mais il me manque, mon dieu qu'il me manque ! Je vous
embrasse tous et toutes.
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Bonjour,
Tout à fait d'accord avec ChistineM. Moi, j'ai perdu "ma maman" et on a en "qu'une". C'est terrible, épuisant de toujours pleurer, elle me manque énormément. J'ai beaucoup de mal : et je me retrouve l'enfant qui a perdu sa maman.
Chaque deuil est unique, incomparable, et tout dépend de l'amour que l'on portait à cette personne et les relations que l'on avait avec elle.
J'avais de très fortes relations avec ma petite mère : c'est celle qui m'a mis au monde, élevée, en partie seule, m'a aidé dans les coups durs de la vie. J'ai l'impression que la petite flamme de la vie qui était en moi s'est éteinte avec sa perte, mamam a emporté une petite partie de moi. J'ai deux filles, l'un d'elle, l'ainée était toujours avec maman, partait en vacances, passait des weeks ends avec elle. Et cette dernière est très affectée par la perte de sa mamy. Ma seconde fille, l'a moins connu, nous vivions en Afrique, donc maman l'a voyait moins, des relations tout à fait différentes. Donc, leurs souffrances ne sont pas les memes et c'est normal.
Je ne fais pas du nombrilisme quand je dis : j'ai perdu ma maman et seuls (seules) qui ont perdu leur meère peuvent comprendre et c'est vrai.
Sais-tu qu'est de perdre sa maman ? En tout cas, on n'a pas le droit de juger comme tu le fais, et ce n'est pas la première fois, les personnes qui viennent sur ce site, tous et toutes pleurent la perte d'un etre cher.
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Johann, je ne vois pas que MA douleur et j'essaye d'apporter ma modeste contribution à ceux qui souffrent, comme toutes et tous, je crois ici.
Seulement, en ce qui concerne mon cas personnel, il ressort de ce que je constate hélas, jour après jour, qu'à part quelques exceptions que je peux compter sur les doigts d'une seule main (et encore pas tous les doigts), la propre famille de mon mari, et même ceux qui se disaient nos amis, ont tourné la page. Alors, oui, je peux dire que ceux qui ne vivent pas quotidiennement cette douleur ne la comprennent pas et, pire, qu'ils la fuient.
Certes, il est rare qu'un décès ne fasse qu'un malheureux mais, je le répète, la durée et l'ampleur de la peine est totalement différente selon l'amour qu'on portait à la personne disparue et ça, que tu le veuilles ou non, en faire le triste constat n'est pas du nombrillisme.
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Je crois, en fait, que vous dites exactement la même chose!
Bizatous
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Comment peux-tu me dire maintenant que je suis en RIEN concernée par cette situation ? Là, excuse-moi, mais ça devient aberrant !...
Veux-tu dire que c'est parce que je n'ai pas d'enfants ?... Mais j'ai une famille ! Certes, celle de mon mari mais je l'ai toujours considérée comme la mienne. Alors quand tu parles du chacun pour soi à l'intérieur d'une même famille, oui je me sens concernée.
Quant au Forum, il n'a jamais été question de s'opposer sur le "type de deuil". Cela ne s'est d'ailleurs jamais produit.
Je ne te comprends plus, Yohann, mais alors là plus du tout.
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Bonsoir Christine,
Tu avais réagi avec force dans la file que j'avais démarré sur les médicaments, à cause d'une maladresse d'expression de ma part. Je te prie de ne pas considérer mon intervention ici comme une intrusion, mais je pense que Yohann n'est nullement en contradiction avec tes sentiments. Il me semble qu'il évoque le fait que nous ne pouvons considérer de hiérarchie dans les douleurs que ressentent les différentes personnes proches de celui ou celle qui disparait, elles sont (les douleurs) simplement de nature différente. Si nous agissons en dépositaire de l'exclusivité d'une souffrance, dont nous prétendons seuls détenir es arcanes, cela ne peut que conduire à l'indifférence, au rejet des autres et à une position de repli.
La souffrance, au même titre que d'autres émotions se partage... et heureusement, finalement.
Je te souhaite beaucoup de sérénité,
Je t'embrasse,
caroline
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Rien du tout, tu restes, on a besoin de toi.
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En plus, tu es parfaitement clair puisque...j'ai compris!!
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Bonsoir Caroline,
Je suis tout à fait d'accord avec toi : une souffrance, ça se partage. C'est d'ailleurs ce que nous essayons de faire les uns avec les autres, ici.
Mais pourquoi taxer de nombrillisme ceux qui disent et à juste titre qu'il faut vivre certaines souffrances pour les comprendre ? Ces personnes-là ont leurs raisons que Yohann ignore. Il ne connait pas la situation familiale de chacun et malheureusement dans certaines familles, l'oubli de celui ou de celle qui est parti est bien vite arrivé... Pourquoi ? Parce qu'ils n'ont jamais vécu ce que nous traversons, parce qu'une nouvelle fois la douleur n'est pas identique selon l'amour que l'on porte au disparu.
Maladresse de sa part ? Certainement. Mais ce qui me heurte et me choque profondément, c'est qu'il ose me dire que je ne suis en rien concernée dans le fil qu'il a lancé sur la peine des membres d'une même famille.
Je te le demande simplement : comment aurais-tu réagi ?...
En plus, cela me peine énormément venant de Yohann que je connais.
Bises à toi, Caroline.
Christine
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Non, non, Christine, il n'y avait rien du tout contre quoi que ce soit venant de toi, je t'assure!
Et je crois que c'est parce que Yohann souffre beaucoup qu'il analyse sa douleur et nous fait partager son ressenti...Christine, ce que tu dis est juste, mais je te promets que Yohann rejoins tes sentiments...
Je t'embrasse fort.
caro
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C'est la loi des séries chez toi, j'espère que tu ne t'es pas fait trop mal...
Cool et fait doucement avec toi, ca va aller..
Bizzz à toi...
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Bonjour Yohann,
Je ne crois pas que le Forum soit le lieu pour poursuivre le débat.. Alors OK je n'ai rien compris, OK j'ai "tiré à boulets rouges par mes propos sur un homme qui souffre". Mea culpa.
Cela te peine énormément. Moi aussi. Et je pense que, ni l'un, ni l'autre, nous n'avons besoin actuellement d'ajouter à nos souffrances.
Je sais que tu as traversé de très lourds moments en fin de semaine et, si tu connaissais Christine, tu saurais qu'elle a pensé à toi...
Moi, en ce moment, je pense chaque jour : il y a un an, il était encore là... et je ne savais pas qu'il nous restait si peu de jours à vivre ensemble, à profiter l'un de l'autre, à nous aimer...
Je croyais avoir touché le fond début novembre, à croire que non.
J'espère que tu ne t'es pas trop esquinté avec ta chute de vélo ?...
Christine
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C'est bien ce que je disais, le sport c'est pas bon pour la santé!
LOL
(il faut bien rire un peu... même si en ce moment je serre les dents...)
Bizatous
Caro
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J'ai lu et relu les différentes interventions et j'ai l'image d'une grande famille constituée de nous tous et toutes
et qui se retrouve réunie autour d'une table à discuter, échanger, essayer de faire comprendre son point de vue
et son ressenti. Comme la grande famille que nous sommes, nous avons chacun et chacune nos caractères, nos
vécus, notre approche de la vie et surtout notre "façon" d'aimer la personne qui est partie, nos croyances. Nous sommes
tous différents mais nous avons une chose en commun, la douleur, cette immense douleur que provoque le manque
de la personne aimée ! c'est cette douleur qui nous réunit sur ce site et qui nous fait chercher et trouver de l'aide ici,
de l'aide que nous n'avons pas trouvé ailleurs car pour "les autres" le temps passe alors qu'il s'est arreté pour nous !
je vous embrasse toutes et tous
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Et bin dis donc, le temps est électrique aujourd'hui!
Parfois, il faut exploser pour faire baisser la tension, mais il ne faut pas "tirer sur les ambulances".
Nous sommes tous à cran et nous avons besoin les uns des autres.
Nos chagrins sont les mêmes... et si différents.
La fin (provisoire, je le souhaite) de notre histoire est la même : la perte de notre raison de vivre. C'est intolérable.
Et la douleur peut nous rendre incohérent, intolérant, silencieux, je m'en foutiste ou exigeant, batailleur ou amorphe... ou plus encore. En tout cas, je sens bien que je suis comme cela maintenant, à plusieurs facettes, selon les jours, selon les heures d'un même journée.
Vous aussi?
Il nous en faut du courage, à tous, pour continuer.
En tout cas, moi, je n'aime pas vous voir vous chamailler.
Et bin alors! J'ai besoin de vous, MOI !
;)
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Bon, OK pour le banquet...les gourmandises j'adorais ça...et maintenant?
Mais comptez pas sur moi pour le vélo...je ne sais même pas si je sais encore l'utiliser!...
Je confirme, moi aussi j'ai besoin de vous.
Je suis là aussi pour vous.
Bizatous
CAro
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Bonjour
je suis une "nouvelle" et je viens de lire rapidement vos échanges qui me paraissent un peu tristes en ce sens qu'il y a bagarre entre celui qui pense ceci, l'autre qui n'est pas d'accord... moi j'ai perdu mon mari à 52 ans d'un cancer du poumon fulgurant : 1ers symptômes atypiques et inexplicables (surrénales) sans avoir jamais fumé ...mi avril 2011, et décès le 27 juin, après d'autres symptômes apparemment pas reliés entre eux, ce qui m'a vite inquiétée. La chimio était prévue pour commencer le lundi, il est mort dans la nuit avant. En 3 mois, projets anéantis, 3 "grands" enfants de 24, 22 et 16 et l'impression d'avoir été balayés, qu'on nous l'a littéralement arraché. Moi, dès le début, j'ai parlé avec mes enfants, de ce que je craignais, j'ai mis des calmants homéopathiques à dispo, je me suis aussi autorisée à craquer devant eux, je le fais toujours parfois, sans honte. Mais j'essaie d'être le pilier au centre de ma petite famille (conjoints de mes 2 grands y compris, qui ont du mal aussi), je me dis que je ne sais pas pour combien de temps je suis là, je lis beaucoup, sur la vie, la mort, l'accompagnement en fin de vie. Je me dis qu'il ne m'appartenait pas, que son parcours devait s'achever et que peut être on se retrouvera, peut-être pas, mais rien ne peut nous retirer ce que nous avons partagé. Et je me dis que si je suis là, c'est que j'ai qq chose à faire sur cette terre, que je ne dois pas gâcher ce que lui n'a plus, même si par moment, lorsque la réalité me rattrape (images de lui sur son lit de mort, la cérémonie...) j'ai l'impression de m'enfoncer dans des sables mouvants.
Tout cela pour dire que je ne fais pas de différence ni de comparaison entre les deuils, j'ai perdu mon père j'avais 33 ans et j'ai mis 2 ans à m'en remettre et j'ai eu un grand sentiment d'insécurité alors. Aujourd'hui, nous mettons en commun notre souffrance avec mes enfants, leurs conjoints, ma famille, chacun apporte ce qu'il ressent et on se prend en charge à tour de rôle. Et à côté, il y a des rires, qui virent qq fois aux larmes, mais c'est toujours ça de pris.
Par contre, du côté de ma belle famille, avec qui ça n'a pas toujours été facile (belle mère très possessive, frère distant, soeur écrasée par sa mère), je n'ai pas de soutien ou si peu
L'avenir ? je n'y pense pas, on s'est tellement fait de soucis (financiers entre autres) et pour quoi ? J'essaie de trouver en chaque jour qq chose d'heureux, ma maman que j'appelle souvent, mes enfants, mon tout nouveau chien, refaire du cheval, mon petit job et basta ...A oui, si la santé, cadeau entre tous !