Auteur Sujet: la fonction de la culpabilité dans le deuil  (Lu 58155 fois)

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #30 le: 20 août 2015 à 14:52:49 »
Je viens de lire avec une attention toute particulière le pdf sur la culpabilité, lien mis par toi Qiguan. Pour moi je ne parlerai pas seulement de culpabilité mais de punition. J'ose expliquer mon ressenti parce-qu'ici personne ne juge personne. Couple fusionnel nous avons toujours et ce depuis des années (1978) refusé de prendre avec nous ma mère qui a toujours souhaité cela, mais qui ne s'est jamais rendue vraiment compte qu'accepter de la prendre cela aurait été accepter d'avoir un témoin gênant et envahissant de notre bonheur, à domicile. Mon mari aurait été moins réticent que moi en fait mais moi je n'ai jamais vu cette cohabitation éventuelle d'un bon oeil, ma mère m'a répété un nombre incalculable de fois que quand on a des enfants il est normal que ceux-ci prennent soin de leurs parents, c'était comme ça "de son temps". Alors ns avons pris soin d'elle à notre manière c'est-à-dire qu'après qq mois dans un EHPAD en 2014 qu'elle ne supportait pas et du chantage (suicide), ns avons loué un studio pour elle pas loin de chez nous mais où elle avait son indépendance, nous aussi, et elle sa solitude en plus. A deux c'était gérable pas sans mal mais gérable, le tél en pleine nuit pcq elle a fait un cauchemar, pcq elle a cru que quelqu'un frappait à sa porte et j'en passe... de plus  il y a souvent des petites choses à réparer, à arranger... l'un de nous se déplaçait, nous étions contents d'avoir préservé notre intimité et je le suis toujours d'ailleurs mais j'en arrive à penser que je/nous n'avons pas été à la hauteur et que le départ de mon homme, mais ç'aurait aussi bien pu être moi, est un retour du bâton, je ne suis pas bien claire ds mes propos c'est diffiicle d'expliquer ce que je ressens je ne comprends pas... elle est très handicapée, a besoin d'une aide pour tout (s'habiller, se laver...) et moi je ne peux pas faire tout ça surtout en ce moment je le sais. Elle est rentrée ds un autre EHPAD le 10 août. Je ne l'ai revue que le 12 août, pendant plus d'un mois je n'ai pas pu aller la voir... je lui ai aussi téléphoné il y a 2 jours, chacun de nos contacts se solde par un échec pour moi pcq elle me demande toujours la même chose, je finirai par me contenter de payer la m de r et c'est tout. J'ai perdu mon amour, j'en souffre à en crever, et je pense que c'est en quelque sorte une punition qui m'est tombée dessus mais qui aurait pu tomber sur mon homme de la même façon. La douleur me perturbe sans doute... mais c'est pourquoi je pense recourir à un psy
« Modifié: 20 août 2015 à 14:57:02 par ER »
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Hors ligne qiguan

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #31 le: 20 août 2015 à 15:35:35 »
Tu as raison ER de venir écrire ici
de vouloir te faire aider ...
à l'inverse de toi face au chantage (au suicide) de ma mère après le décès de mon père (elle avait 52 ans)

 :-*
« Modifié: 23 août 2015 à 20:55:42 par qiguan »
"il est plus facile de désintégrer un atome qu'un préjugé" A. Einstein
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Hors ligne ER

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #32 le: 20 août 2015 à 16:03:01 »
Qiguan, ma mère avait 56 ans (pas loin de l'âge de la tienne) qd mon père est décédé. C'est difficile de ne pas céder au chantage affectif. Je vais voir ce que donne l'hypnose ericksonienne et aussi l'EMDR, si ça peut aider un peu.
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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #33 le: 20 août 2015 à 23:07:49 »
Vous n'avez pas cédé au chantage affectif et vous vous êtes occupés, ton mari et toi, de ta maman comme il le fallait, sans sacrifier ta vie de couple.
Je pense sincèrement que tu n'as pas à culpabiliser, et encore moins à considérer que tu subis une punition.
Cependant, ta culpabilité existe probablement car tu n'as pas accédé, ou cédé,  aux souhaits de ta maman, mais elle n'a rien à faire dans ton deuil, cela n'a rien à voir.
Tes sentiments se mélangent car tu te sens démunie. Tu cherche une explication à la mort de ton mari, parce que pour toi elle n'a aucun sens, mais ce n'est pas là que tu vas la trouver.
Il se peut aussi que tu en veuilles à ta maman, car elle est encore là alors que ton mari n'est plus. Ce n'était pas le "scénario "que tu avais envisagé, auquel tu t'étais préparé.

Ne te fais pas plus de mal que ce que tu subis déjà, c'est si douloureux de perdre l'homme de sa vie ...

Il va te falloir " décortiquer " tous ces sentiments, mais c'est encore trop tôt.

Je fais des séances d'hypnose ericksonnienne, je trouve que cela donne de bons résultats sur ces idées " tordues " qui trottent dans la tête, et j'en ai plein ...

Je t'embrasse

Hors ligne Stefy

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #34 le: 21 août 2015 à 00:08:17 »
ER, des idées " tordues", moi aussi j' en ai plein........on fait des liens, des sacrés liens qui n' ont parfois pas de sens.... Comme tout cela n' a aucun sens, alors on cherche, et on en trouve..... Enfin ca ! dit on, on a trouvé du sens.... Ben non parfois il n' y a en pas...c' est ce qui est difficile a vivre......
Je t'embrasse

Hors ligne ER

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #35 le: 21 août 2015 à 08:58:32 »
Bonjour,
Des "idées tordues" on ne peut pas appeler ça autrement... Merci Nora, merci Stefy, oui j'en veux à ma mère d'être là, alors que Robert n'y est plus, mais ds ce genre de choses il n'y a aucune logique, je sais bien qu'elle n'y est pour rien mais c'est ainsi, et tout en culpabilisant je me dis que mon homme a toujours été ma priorité et ça m'est doux. La psy m'a dit qu'on pouvait commencer très tôt l'hypnose, donc on va voir? Bises à vs 2.
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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #36 le: 24 août 2015 à 15:50:47 »

Nora à raison ET,  il faut arriver à  démêler  toutes ces émotions,  tous ces sentiments qui te traversent et t'empêchent  d'y voir clair.
La mort de ton mari n'est pas une punition parceque tu as mis un peu de distance entre ta mère  et toi, essaies de ne pas voir ta situation sous cet angle. Pourquoi  serais-tu punie ? Qu'as tu fait de mal ? Rien, tu as préservé ton couplé,  c'est tout.
Je crois comprendre que tu es la seule enfant ? .....c'est d'autant plus difficile lorsqu'on est seul, à  plusieurs on peut se partager la tâche, quoique......y a de l'ambiance dans certaines familles avec les parents vieillissants!

Tu as fait au mieux et personne ne peut te le reprocher,  alors ne te culpabilises pas pour rien.  Je sais, c'est  plus vite ditqu'à  faire.
Essaies de trouver  de l'aide , de prendre soin de toi, de vivre le deuil  et laisses la un peu mijoter dans sa culpabilité. Et y en a marre de se sacrifier pour les autres, ceux qui ne sont même  pas reconnaissants de ce quel'on fait.
Prends un peu de distance et dis lui que tu ne l'abandonnes pas, que tu as besoin de temps pour toi après  ce que tu as vécu.
Elle peut comprendre  si elle le veut.
Tu vois, ma mère  n'arrêtait depuis 3 mois de me demander pourquoi  mon fils s'était suicidé,  et bien j'en ai eu ras le bol, et lui ai donné  le livre de Christophe Fauré,  et miracle, elle m'a dit " Merci  ". Pas sûr  qu'elle ait tout compris, pas sûr que je n'ai pas encore droit à la même  question, mais j'ai  gagné  un peu de paix.

Je te souhaite de trouver l'aide dont tu as besoin pour te protéger  et te défendre aussi.
Sois douce avec toi.


cathymoug

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #37 le: 03 décembre 2015 à 21:04:24 »
bonjour,

Mon fils de 14 s'est suicidé il y a un mois. Je me demande très souvent si je me sens coupable parceque c'est un gros défaut contre lequel je luttais depuis toujours ou est-ce que ce que le pédopsychiatre de mon fils qui a tant mis le doute sur ma responsabilité dans les difficultés de mon fils avait raison ??
J'ai eu droit aux services sociaux à une mesure judiciaire car il y a un an j'ai craqué, pris des cachets (peu mais assez pour être malade) car la gestion de mon fils colérique, diabétique se mettant en danger, menaçant au suicide, les conflits avec son père, avec  mon ex copain (quitté pour cette raison) qui  m'a jugé et condamné pour cet acte stupide mais désespéré).
Je m'en veux de cette faiblesse mais la lutte était incessante. C'est un tel échec et je l'aimais, je 'aimais tant, j'ai l'impression que l'on m'a contesté ce droit cela me consume presque plus que sa disparition et je m'en veux aussi de cela...

Hors ligne souci

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #38 le: 03 décembre 2015 à 23:41:28 »

    Bonsoir Cathymoug,

    Je suis désolée d'apprendre le suicide de ton ado, un de plus hélas, notre Kalahan, fils aîné de mon frère, s'est tué lui aussi à cet âge invraisemblable, le 28 mars 2013, et j'en chie encore crois-moi, quelle HORREUR !

    Personne n'a le droit de juger que les parents sont "coupables", la société DANS SON ENSEMBLE est responsable du mal-être de sa jeunesse.

   Aubin, un bien joli prénom.
   Une âme sensible et donc malmenée par le monde cruel et stupide dans lequel on vit.
   On ne peut hélas pas les protéger de tout.
   Je suis certaine que tu as fait tout ce que tu pouvais pour ton garçon.

   On sait que l'abattement, la fatigue, les troubles du sommeil sont des symptômes de dépression.
   On ne sait PAS ASSEZ que les états de colère "injustifiés" en sont également.
   Et on met souvent ces crises sur le dos "de l'adolescence", ou des conflits familiaux: c'est beaucoup plus compliqué que cela.

    Chère Cathymoug, si un parent aimant est responsable de soi-disant "erreurs d'éducation", aucun châtiment n'égale la perte d'un enfant !
    Et c'est fort malheureusement ton fardeau.
    Il n'y a PAS de parent parfait, pas d'enfant parfait, et les psys parfaits pas davantage.
    Le psychisme reste bien mystérieux ... beaucoup de progrès sont à accomplir dans ce domaine sensible ... mais "le sensible" n'est pas à la mode dans notre civilisation pressée de foncer droit vers sa "croissance" ???

    C'est là sans doute un autre débat, mais il est attesté que notre société pourtant nantie de ressources matérielles, est fortement suicidogène.

    Notre jeunesse a du mal ... depuis le suicide de mon neveu, je tente de remuer Ciel et Terre pour faire passer des messages ... qui ne passent pas.
    Non, c'est "les psys d'un côté, les "malades" de l'autre", et les administrations pour faire barrage : tu parles !!!

    Solidairement et amicalement, Martine.
    PS: tu as inséré ton sujet dans celui d'un autre membre ... Federico l'Héroïque, qui ne t'en voudra pas de squatter sa maison de campagne en son absence !
    Toutefois, si tu en as envie, tu peux demander à notre mexicain d'honneur "Webmester", administrateur aux doigts de fée, de remettre de l'ordre dans le tiroir à couverts ?
   

Hors ligne Stana

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #39 le: 13 janvier 2016 à 21:08:24 »
  La culpabilité-même irrationnelle, même très brève-je l'ai connue plusieurs fois depuis le début de mon deuil, il y a maintenant 7 mois et demi  :'(  j'ai dépassé ce stade, mais il m'arrive encore d'y penser. C'ètait vraiment très dur sur le moment.

  Premièrement, mon ami est tombé dans ses escaliers alors que je venais de le quitter pour aller passer la seule nuit de la semaine où je dormais dans mon logement officiel, 10 minutes après mon départ exactement. Je sais que c'est irrationnel-je ne pouvais pas deviner ce qui allait se passer, et puis il ètait en pleine forme-mais il m'est arrivé, par intermittence, de culpabiliser en sachant qu'il avait fait cette chute mortelle alors que je remontait paisiblement à mon appartement, le cœur léger, et que pendant que je vivais normalement, il est resté ètendu là une heure, son espèrance de vie diminuant probablement de minute en minute. Ne pas avoir été là pour empêcher cette chute, ou même appeler tout de suite les secours après ladite chute, si je n'avais pas pus l'èviter.
  Heureusement c'est vite passé: je sais que ce n'ètait pas ma faute, même si le fait de n'avoir pas été là est très douloureux.

  J'ai culpabilisé aussi d'avoir été dans le déni durant tout le temps où Pierre était dans le coma, de ne pas avoir passé assez de temps auprès de lui, de ne pas lui avoir dit vraiment adieu. Je me dis maintenant que j'aurais dû lui parler plus-puisqu'il pouvait probablement m'entendre.-de ne pas avoir passé plus de temps avec lui, ce temps précieux qui nous restait-même s'il devait déjà être loin...je n'ètais pas allé le voire depuis deux jours quand il s'est éteint, pensant que son état était stable pour un bon bout de temps. De ne pas avoir été auprès de lui à linstant de sa mort, même si je sais que savoir, avec certitude, qu'il allait mourir aurait rendu ces derniers instants que j'ai partagé avec lui insoutenables-et bien plus encore s'il ètait mort sous mes yeux.  Je l'aurais fait si j'avais vraiement sus, mais ça m'aurait probablement détruite.
  Je sais qu'il vaut sûrement mieux,  pour que je puisse continuer à vivre, qu'il n'en ai pas été ainsi, et que d'ailleurs il est partis en paix, que je lui ai dis adieu à ma manière, mais il m'arrive d'y penser encore.

  Il y a aussi le fait que je n'ai pas eu le courage ni la force de voire sa dépouille mortelle dans son cerceuil-j'ai accompagné, touché celui-ci durant l'enterrement, je suppose que c'est le principal, mais parfois, je me demande: "Est-ce-que j'aurais dû faire l'effort de regarder son corps, de le veiller? D'autant plus qu'il est resté au funérarium du 03  au 12 mai." J'ai prèfèré gardé de lui le souvenir bien vivant, y compris celui de la dernière fois où je l'ai vu, assis sur ce banc devant chez lui, quand il m'a fait un petit signe de la main tandis que je m'éloignais et qu'un rayon de soleil a joué dans ses cheveux  :) même l'image de lui alors qu'il ètaitdans le coma: il n'avait pas changé physiquement, il avait l'air de dormir paisiblement. Une amie à moi m'a dit que j'aurais eu la même impression si j'avais vu sa dépouille, grace au travail des employés des pompres funèbres, mais ne plus voire se soulever sa poitrine, le savoir mort aurait été extrêmement traumatisant je crois, et cette vision se serait peut-être toujours superposée à celles de nos plus beaux souvenirs.
  J'ai longuement hésité mais je n'ai pas pus. Me forcer à contempler jusqu'au bout, alors que les mottes de terre tombaient dessus, ce cerceuil fermé était suffisament éprouvant...
  Pourtant une partie de moi continue à culpabiliser un peu par moment, même si j'ai la conviction que le corps n'est pas ce qu'il y a de plus importance. UNe connaissance à moi m'a dit: "Moi j'y serais allé tout de suite!" Comme si je n'avais pas assez cuylpabilisé comme ça  >:(
*Où que tu sois, ne m'oublie pas. Ici, ta voix résonnera encore et toujours. C'est un nouveau monde qui s'ouvre à toi; mais c'est un monde où je ne suis pas...* (Dark Sanctuary)

Hors ligne Noëlle

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #40 le: 13 janvier 2016 à 22:41:14 »
bonsoir Stana,

ça fait un peu plus de trois semaines que j'ai perdu mon amour, pas ma moitié comme le disait quelqu'un, mais mon tout.  Et  chaque jour qui passe je suis plus dévastée que la veille ; et tu vois Stana , les premiers jours j'ai aussi retourné les derniers moments dans ma tête et toute mon interprétation justifiait une culpabilité. Et j'ai compris que ça ne servait à rien, que l'essentiel sont ces moments et cet amour partagés, tant que c'était possible, qu'on ne refait pas le passé et que perdre son amour est déjà terrible, ce n'est pas la peine de se faire encore davantage de mal.

Personne,  je pense qui aime son conjoint vraiment et sincèrement, ne peut accepter qu'il va "partir" pour de bon, même si dans notre tête, une petite voix nous le dit quand même. J'ai accompagné Philippe pendant 4 ans, tout au long de ses traitements, et à plusieurs reprises, il était moins une, j'ai eu des frayeurs terribles, et merci : le bonheur, ce n'était qu'un épisode critique, il sortait de l'hôpital, il fallait du temps, et il,remontait la pente ..... jusqu'au dernier épisode en décembre, où il est rentré de l'hôpital "pour mourir à la maison". Et jusqu'à la fin j'attendais le miracle. Donc rassure toi, je pense que c'est un instant de survie pour nous de ne pas anticiper la mort de l'autre ; ce n'est pas possible tout  simplement ; l'être qu'on aime tellement, sans lequel la vie n'est pas envisageable, ne peut pas disparaitre. Je suis restée avec Philippe, couchée à côté de lui toute la nuit, à lui parler, à le toucher,  à m'endormir par moment contre lui, et c'est quand je me suis absentée de la chambre une vingtaine de minutes et que je suis revenue qu'il est "parti" ; je me suis aussi dit que j'étais stupide de m'être absentée, mais je n'ai pas culpabilisé longtemps, parce que j'ai aussi pensé que ça été plus facile pour lui de "lâcher" pendant que je n'étais pas contre lui à lui dire cent fois que je l'aimais.  La douleur est déjà tellement insupportable, qu'il n'est pas utile de se faire des films en ayant des regrets, de la culpabilité ou en voulant refaire l'histoire ; c'est mon avis.

Je suis allée voir mon homme dans la chambre funéraire et ça m'a fait beaucoup de bien.  Parce qu'effectivement les personnes qui s'occupent de préparer les défunts, font en sorte qu'ils soient "comme avant" en prennent soin de façon que les gens qui viennent leur rendre un dernier hommage ne soient pas confrontés à une image difficile. Et bien moi, Philippe a été tellement bien "préparé" que j'ai tout de suite compris que ce n'était pas lui, ce n'était plus lui qui était là. C'était son corps, ce n'était que quelque chose de matériel et l'homme que j'aimais, que j'aime encore n'était plus là.  Son âme, son esprit, son essence, une autre forme de lui était déjà partie. Et même si aujourd'hui, je voudrais qu'il revienne, qu'il me prenne  la main, qu'il me fasse un bisou dans le cou,  toute la tendresse qu'il me donnait me manque à tel point que quelquefois j'en ai le souffle coupé, réaliser que la vie n'est plus dans ce corps, me permet aussi de l'espérer ailleurs, dans la lumière, débarrassé de ses souffrances, et me guide de temps en temps sur mon chemin spirituel.

Je pense qu'il est important de faire les choses comme on le sent personnellement, pas pour les autres, ou pour ce que les autres penseraient, mais pour soi, par rapport à son ressenti, à notre histoire avec l'être aimé, même et justement si on a envie de faire les choses pour nous protéger, parce qu'on ne se sent pas capable de faire autrement, c'est toujours dans un instinct de survie.
On ne peut pas refaire l'histoire, et je pense que chacun fait de son mieux, dans des circonstances aussi difficiles.

Je t'embrasse,  prends soin de toi

Noëlle






Hors ligne Stana

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #41 le: 15 janvier 2016 à 14:54:37 »
  Merci pour toutes ces paroles Noelle  :) :-*

  Oui je sais, au fond de moi, que sur le moment je ne pouvais pas agir autrement que je l'ai fait aux alentours de son décès. Je me devais de survivre, et pas seulement pour moi mais aussi pour lui, parce-que c'est ce qu'il m'avait demandé de faire le cas échéant.  J'ai pus lui dire adieu à ma manière, l'accompagner sans en avoir l'air, je pense qu'il le savait.
 
  Si c'était à refaire j'entrerais peut-être dans cette pièce au funérarium, mais ce ne serait probablement pas une bonne idée...je garde de lui une image "vivante", que ne trouble pas le fait que je l'ai vu dans le coma.

  Ton témoignage m'a beaucoup touchée: oui, je pense aussi que ton conjoint a préféré partir, "lâcher prise" alors que tu n'ètais pas auprès de lui, il y a de nombreux témoignages qui vont en ce sens  :)
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Fleur78

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #42 le: 26 avril 2016 à 12:30:09 »
Mon père s'est suicidé il y a 11 ans.
J'ai ressenti beaucoup de culpabilité: oui j'aurais voulu pouvoir lui dire je t'aime davantage, j'aurais voulu être davantage présente à ces côtés, moins chiante, moins désagréable et être suffisante pour qu'il ne veuille pas passer à l'acte.
Mon père était trop en souffrance pour réfléchir comme nous, il n'a pas trouver d'autre solution à ses difficultés financières, à son mal-être et quelque part je me suis sentie abandonnée.
Aujourd'hui je vais mieux, j'ai avancé dans mes ressentis, la colère et la culpabilité ne sont plus omniprésentes, mais je ressens de façon naturelle la manque.
La culpabilité m'a emmené moi personnellement dans une spirale d'autodestruction car je ne m'aimais pas, ni dans mon enveloppe corporelle (liée à une autre problématique personnelle) mais non plus ce que j'étais. Je ne valais pas grand chose puisque mon père n'était pas restée pour moi et puis je me punissais d'avoir agi de telle ou telle sorte avec lui pensant que ça avait aggravé son état dépressif. J'ai maltraité mon corps en me scarifiant, et en me mettant régulièrement dans des états seconds car tout était plus supportable, ou pas à des moments donnés. Je m'en suis sortie grâce à une amie, plus âgée et qui travaillait en psy, donc expérimentée, et qui m'a permis de voir les choses autrement et au fur et à mesure je me suis sortie de tout ça. La culpabilité vient souvent de façon naturelle surtout lors d'un suicide mais ne doit pas perdurer car même si quand on y pense on s'en voudra toujours un peu quelque part de quelque chose, mais malheureusement le fait de se punir, de se morfondre, de rester dans la douleur et la peine, vous empêchera d'avancer et de continuer à vivre comme la personne décédée l'aurait souhaité.

Hors ligne cabrau78

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #43 le: 27 avril 2016 à 14:38:57 »
Aéline ma fille s'est suicidée, il y a 4 mois.
Elle n'était pas bien dans sa peau  depuis un harcèlement qu' elle avait subi au collège. En revenant sur Paris, elle avait été suivie par une psy et semblait aller mieux , avait bcp d'amis et réussissait ses études de médecine.
Que de la poudre aux yeux
donc nous culpabilisons car nous n'avons pas su l'aider depuis sa sixième ou elle nous a demandé de l'aide puis après de manière détournée que nous n'avons pas compris? jusqu'en 3ieme (comment peut être aussi C.. pour ne pas avoir vu ça?)
et plus récemment de ne pas avoir su/pu l'aider dans son extrême souffrance que nous avons découverte avec ses amis après son décès
comme en plus un de ses proches amis s'est suicidé suite à sa disparition 3 semaines après nous sommes au fond du gouffre de la culpabilité
je rembobine l'histoire à longueur de journée ou de nuit selon
je n'arrive pas à sortir de cette spirale de j'aurais du faire ceci, j'aurais du comprendre cela ,...
je refais l'histoire à l'envers pour essayer de changer le dénouement mais la fin est la me^me
ma chérie d'amour n'est plus là et ne sera plus jamais là

Fleur78

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Re : la fonction de la culpabilité dans le deuil
« Réponse #44 le: 28 avril 2016 à 14:36:41 »
J'ai beau avoir culpabiliser et ne plus le faire aujourd'hui, je me rends compte en lisant vos témoignages que je n'ai sûrement pas les mots pour vous aider à surmonter cette épreuve, car ce sont des sentiments naturels.
Mais nous ne sommes pas des surhommes (ou femmes) qui peuvent sauver les autres, même si ce sont des personnes proches, ni même la famille. Car paradoxalement plus on est proche de la personne moins on est à même de l'aider, car trop impliquée, pas objectif et donc on ne peut pas voir les choses comme la personne en souffrance les ressent surtout si elle ne communique pas et ne laisse transparaître que peu de choses. On ne peut pas deviner ce qu'elle ressent... Je n'ai jamais parlé de scarification avec ma mère alors que nous sommes hyper proches et de vraies confidentes mais j'avais honte, je ne voulais pas l'inquiéter et elle ne s'en est jamais douté et ne sait pas à quel point j'ai souffert.
Je pense malheureusement de façon très bateau que le temps permet de rendre les sentiments moins compliqués, et moins douloureux. Et je vous le souhaite cabrau78. Je ne suis pas mère moi-même et ne peut donc qu'imaginer votre douleur. Néanmoins, je reste persuadée que vous ne devez pas vous rendre responsable de la mort de l'ami de votre fille qui devait lui aussi avoir sa propre problématique et souffrance qui l'ont mené à un tel acte extrême.
Je comprend tout à fait la spirale dans laquelle vous pouvez être, mais malheureusement vous ne pouvez vous rendre responsable du mal-être d'un proche, fut-ce-t-elle votre fille, car de part votre message, je suis certaine que vous avez été présente, à l'aider dans ses difficultés notamment au collège mais malheureusement il y a des souffrances indicibles et quasi indétectables.
N'hésitez pas à continuer à en parler ici ou ailleurs, c'est comme cela qu'on arrive au fur et à mesure à avancer mais ça prend du temps, car le chagrin est tel qu'on ne peut envisager les choses autrement et on se dit que ça nous poursuivra toute notre vie, mais ce n'est pas si vrai que ça.
Je vous souhaite beaucoup de courage dans votre épreuve,
Fleur