Je suis lasse.
Marre de sourire pour de faux, de manger pour de faux, de faire semblant d'écouter les gens, de ne rien retenir de ce qu'ils me disent.
Marre de ne penser qu'à lui en permanence, de voir ma fille pleurer doucement.
J'ai pourtant pris sur moi ce matin : je suis allée avec elle chez le coiffeur, j'ai fait semblant de m'intéresser au domaine capillaire.
Quand j'ai vu mon reflet dans le maxi miroir du salon de coiffure, j'ai juste pensé "Heureusement qu'il n'est plus là pour voir la vieille veuve triste au regard éteint que je suis devenue."
Je ne lui plairais plus, c'est sûr.
Il ne me reconnaîtrait peut-être même pas. J'ai pris 20 ans en 4 mois.
Au moins, je n'ai pas besoin de me demander ce que je ferais si un homme s'intéressait à moi. Pratique.
J'envie les femmes séduisantes, qui savent se mettre en valeur, qui ne sont ni aigries ni agressives.
Finir sa vie seule à 49 ans, ça promet de chouettes moments de déprime.
Je hais les couples, je les envie tellement.
L'amour, la tendresse, la complicité, le partage, l'amour physique, c'est fini.
Par moments, je me dis qu'il a préféré se tuer que d'accepter une séparation, mais pas par amour romantique.
Plutôt parce qu'il avait besoin de moi. Pas envie, besoin.
Je n'ai même pas mérité qu'il m'aime un peu. S'il ne s'est pas battu pour sauver notre couple, c'est que je ne suis rien.
Je me suis battue seule, lui il ne pensait qu'à lui, à sa souffrance.
M'a-t-il vraiment aimée ?
C'est terrible de se dire ça. S'il m'avait aimée, il serait resté, il aurait essayé de me reconquérir.
Je ne vaux même pas la peine qu'on essaie.
Plus je je sens s'éloigner, plus je pleure sur moi. Je régresse, c'est moche.
Les rides apparues sur mon visage sont toutes aussi moches. Elles sont comme de profondes cicatrices.
Elles me disent "Tu as vécu, laisse la place aux autres maintenant. Assume ta place de vieillarde."
Comment tout peut-il basculer comme ça ?