Auteur Sujet: Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !  (Lu 19108 fois)

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Hors ligne Nicole595

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #30 le: 06 mai 2019 à 13:48:29 »
Oui le parcours est long. J'ai enlever mon message car j'ai eu peur de blesser.
Merci Malone
Nicole
Je ne serai plus jamais la même. J'ai perdu mon essentiel.

Hors ligne chrisljb

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #31 le: 12 mai 2019 à 19:28:21 »
J'appréhende un peu les semaines qui viennent car elles vont être lourdes d'anniversaires et de souvenirs. Même si je n'accorde pas une importance excessive aux dates, cela va être mon premier anniversaire fêté sans ma femme, suivi de notre anniversaire de mariage (29 ans quand même) et les 12 mois de sa disparition, le tout en très peu de temps.
J'ai toujours autant de mal à vivre sans elle, sa présence et sa compagnie me manquent terriblement.
J'ai beau être bien entouré par mes enfants, ma famille et mes amis, cela ne remplace pas la complicité et l'amour d'une vie de couple. Ma femme était la compagne de ma vie. Nous avions une vie active, chacun travaillant pas mal et se déplaçant régulièrement, mais nous aimions tout simplement être ensemble. J'aimais sa présence, la sentir à côté de moi,  la voir passer devant moi, sa conversation, sa curiosité, son sourire, et son côté toujours partante pour aller se balader ou visiter une expo. Bien sûr, comme tous les couples nous avions nos désaccords et nos moments de tension, mais nous avons eu une belle vie de couple qui a disparu avec elle.
Et cela, même des enfants et des proches aimants ne le remplacent pas. 
C'est un manque au quotidien, je le sens moralement et physiquement, avec une gène permanente comme une angoisse, même quand je vais correctement.
Comme un drogué, il faut apprendre à s'en passer, accepter que cela soit fini, qu'on n'y aura plus droit. Il ne s'agit pas de combler le vide, mais de vivre avec et de s'y habituer.
Cela laisse la vie bien fade et sans saveur, je m'active mais sans trouver de plaisir ni de joie dans ce que je fais.
A chaque fois,  il me manque la perspective de la retrouver et lui parler, de la voir arriver en face de moi, de sentir sa présence.
La solitude n'est plus la même. Nous avons souvent été séparés par des voyages, des absences, j'ai souvent voyagé professionnellement longtemps et seul dans des cadres impersonnels ou je me sentais seul. Mais c'était une solitude temporaire et je savais que je pouvais la rejoindre rapidement.
La solitude d'aujourd'hui est lourde, pesante, tenace, elle est comme un douleur sourde que l'on ressent moins quand on est très occupé mais qui revient dès que l'on est plus au calme et devient même terrible un dimanche soir ou quand on reste éveillé la nuit.
C'est aussi le sentiment d'avoir tout d'un coup laissé sa vie derrière soi.  Ma vie d'avant est partie avec elle, et ne reviendra pas, jamais, je le comprend maintenant et c'est très long et douloureux à accepter,  cela me pèse sur le moral chaque jour qui passe. Même mes enfants que j'adore ne suffisent pas à apporter un continuité.

Depuis quelques jours pourtant, je dors mieux, les médecins ont enfin trouvé semble-t-il une molécule qui me fait de l'effet.
Le fait de me réveiller reposé change ma vie après un an de nuits sans sommeil à me trainer et à ne tenir qu'avec la volonté.
Je me sens physiquement et intellectuellement beaucoup plus dynamique, moins déprimé aussi car le manque de sommeil joue toujours sur mon moral. Mais cela ne change rien au manque et à l'absence qui sont toujours autant là avec l'estomac noué.
Ma femme était malade depuis plus de 15 ans; professionnellement, j'ai traversé comme tout le monde des périodes difficiles où j'ai du faire mes choix en tenant compte de sa situation, et maintenant cela. Je ne plains pas mais cela fait beaucoup d'années à lutter et à tenir et je me sens las de me battre, de devoir toujours faire face, de tenir pour les autres.
J'aspire à un peu de sérénité pour reprendre des forces, retrouver une forme de joie et de légèreté , mais ce n'est pas pour tout de suite, cela risque encore d'être long. Il faut être patient, chercher un nouvel équilibre qui viendra peut être un jour, cultiver des plaisirs à ma portée, ne pas avoir trop d'attentes.
Une petite satisfaction, je peux maintenant penser à elle avec amour et affection sans sombrer dans la déprime. Je ne peux pas dire qu'elle me tient compagnie car c'est plutôt le vide qu'elle laisse que je ressens, mais au moins puis je penser à elle sans broyer ensuite du noir pendant des heures. Probablement une certaine forme de distance qui se crée.
Mais que c'est long, que c'est long !
Bien à vous.


Hors ligne pscar13

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #32 le: 12 mai 2019 à 20:16:08 »
chrisljb,

Je lis tes mots et je les comprends, manque, solitude, même si je sais très bien qu'elle ne reviendra pas, je n'arrive toujours pas à renoncer à ma vie d'avant.
Toutes ces années passées à deux, l'accompagnement dans le combat contre la maladie, quelle qu'elle soit, c'est épuisant, et tout s'arrête, on reste anéanti, pendant des mois.
Mais je lis aussi que tu arrives à avancer, a mieux dormir et retrouver un apaisement, c'est encourageant.
Continue à prendre bien soin de toi.
Le futur devient présent, et, dans l'instant qui suit, passé.
Mon rêve est devenu réalité, mon amoureuse, mon éternel présent.

Hors ligne Boutchou

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #33 le: 12 mai 2019 à 20:45:11 »
Crisljb,
Je partage avec toi  tous ces difficiles moments sur ce chemin de souffrance
J ai écrit il y a 2 jours sur mon fil la detresse d'un quotidien  vide , ou le manque est une douleur constante ...
Un quotidien répétitif depuis des mois rythme par les larmes., les souvenirs , la vie d avant obsédante et enfuie ...
Et comme dit Bébé faisant référence aux film "un jour sans fin ...."un jour sans fin qui recommence chaque matin

 Si tu traverse des moments plus sereins  tu as peut être vers un peu d apaisement
Meme si rien ne peut s oublier ..

Amitiés
Boutchou
« Modifié: 12 mai 2019 à 21:02:17 par Boutchou »

Hors ligne Boutchou

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #34 le: 12 mai 2019 à 21:29:53 »
Pardon d avoir écorché ton pseudo  ,cher Chrisljb
Amitiés
Boutchou

Hors ligne chrisljb

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #35 le: 14 mai 2019 à 00:46:55 »
Pscar13, Boutchou,

Merci pour vos messages de sympathie. Je suis allé voir vos fils, ce que je n avais pas fait jusque là, car on est souvent centre sur sa propre douleur.
On se sent un peu moins seul de lire vos récits et témoignages, un peu rassure aussi de lire des mots tres proches des nôtres et de mesurer que d autres traversent les mêmes tourments et interrogations.
C est une situation a laquelle rien ne nous avait préparés, nous sommes désarmés , perdus, notre existence est bouleversée, nos repères ont vole en éclat, la.tristesse et la nostalgie de notre vie passee nous mangent de l intérieur... comment rester lucide et continuer a regarderdevant soi dans ces conditions ?
Vous lire m'aide a prendre du recul, a me dire que ce désespoir est normal, que je ne réagis pas différemment d un autre.
Ce n est pas une consolation mais c est déjà un point d appui pour ne pas sombrer.
Je prends cela comme un encouragement a garder le cap même si je ne vois pas bien ou je vais. Je pense a mes filles qui ont besoin d un futur heureux, je pense a ma femme qui n aurait certainement pas aime que je baisse les bras et que je sois un poids pour nos filles. Cela ne me fabrique pas un avenir, mais cela me permet de repartir pour une nouvelle journée.
Bien amicalement.
C

Hors ligne chrisljb

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #36 le: 09 juin 2019 à 12:28:35 »
Après tant de messages de tristesse et désespoir, j'espérais pouvoir écrire un jour quelque chose de positif à partager avec les membres de ce forum  qui se sentent écrasés par le chagrin.
J'appréhendais beaucoup ce mois de juin lourd en anniversaires et souvenirs, et je suis en train de le traverser sans trop de casse. Bien sûr, j'ai mes moments d'émotion et d'immense tristesse, mais j'arrive à me reprendre.
Je trouve que je vais un peu mieux, que j'ai progressé. Rien de mirobolant, je n'ai pas retrouvé la joie et la gaieté, cela reste dur avec des montagnes russes, mais je ne suis plus constamment anéanti, terrassé, paralysé par le chagrin et la douleur.
Ma femme me manque toujours autant, les moments qui me la rappellent, ceux que j'aurais tellement aimé partager avec elle, reviennent chaque jour, mais je parviens à y penser sans être submergé par l'émotion. Une certaine distance s'est installée, la douleur est toujours là mais comme partiellement anesthésiée, la blessure n'est plus à vif, elle commence à cicatriser.

Je continue le cours de ma vie, je fais ce que j'ai à faire, j'ai pris quelque décisions pour me réorganiser, déménager, je vois mes enfants,  mes amis, je pars en we, je rattrape l'énorme retard de paperasse accumulé depuis un an, je trie lentement mais régulièrement nos affaires. Tout cela sans joie particulière mais j'arrive à passer de bons moments, essentiellement quand je suis bien entouré par des proches. Je crois que mon entourage attend que je fasse des projets, mais je  ne suis pas encore capable d'envisager l'avenir.  Pour le moment je n'en ai pas, je ne le conçois même pas. Mes projets étaient liés à ma femme ou se faisaient avec elle, et sans elle  je n'arrive pas à me projeter, je vis avec un horizon très court, 3 à 4 mois à peine.

J'ai aussi remarqué que j'étais capable de retrouver de l'énergie pour entreprendre quelques actions. Rien de grandiose, mais là où je me trainais et me forçait, il m'arrive de me surprendre à m'y mettre avec énergie et détermination. Cela , c'est complètement nouveau. Bien sûr, je me réjouis de bien peu mais c'est un changement.

Tout cela ne suffit pas encore à être heureux, loin s'en faut, mais si je repense à l'état dans lequel j'étais en mars dernier, en janvier, je mesure le chemin parcouru. C'est un peu comme la randonnée en montagne, on a l'impression de se trainer, de peiner à chaque pas, qu'on ne va jamais y arriver, et tout d'un coup une vue dégagée permet de mesurer la distance parcourue, et elle n'est pas si ridicule. Tout au moins, dans ces moments, tout est bon à prendre.

Voilà, je sais à quel point la douleur peut paraître insurmontable, j'ai eu le sentiment de descendre de plus en plus bas sans aucune lueur d'espoir. Je ne vais pas encore bien, et ma vie reste un champ de ruines, mais je peux dire qu'il y a un point d'inflexion où l'on commence à aller moins mal. On ne s'en rend pas compte sur le moment;  imperceptiblement, on commence à remonter la pente et quelques mois plus tard on mesure un peu de progrès.

Je ne sais pas ce que le futur me réserve, cet avenir que je n'envisage pas, ma vie n'a pas encore de sens, mais à de brefs moments, je me surprends à avoir envie de me battre et me redresser, pour mes enfants, pour la mémoire de ma femme qui n'aurait pas aimé que je baisse les bras, pour mes amis qui sont si généreux.

Beaucoup d'inconnu encore devant moi, surement des mois et des années de convalescence, et une vie qui ne sera plus jamais comme avant.
Mais je voulais laisser sur ce forum cette petite lueur d'espoir , vous dire de tenir bon même si cela parait ne pas avoir de sens, de prendre soin de vous et vous appuyer sur vos proches.
« Modifié: 10 juin 2019 à 00:22:15 par chrisljb »

Hors ligne chrisljb

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  • Le forum d'entraide durant un deuil
Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #37 le: 25 février 2020 à 13:21:23 »
Bonjour à tous,
Voici 9 mois que je n'étais pas revenu sur ce forum, la dernière fois c'était pour témoigner d'une petit lueur d'espoir.
Et je voudrais confirmer qu'il faut bien garder espoir , que l'on peut retrouver sinon le bonheur du moins un nouvel équilibre.
Si je n'ai rien écrit sur ce forum ces derniers mois, c'est abord parce que je n'en ai pas eu le temps, mais aussi parce que je remonte la pente progressivement et que j'en ai tout simplement moins besoin.
C'est le message que je voulais laisser en guise d'adieu, qu'il ne faut pas baisser les bras, et que l'on peut espérer aller mieux.

Voici 20 mois que ma femme est morte.
Oh, je ne dirai pas que j'ai retrouvé le bonheur, j'en suis encore loin, je ressens chaque jour l'absence de celle qui a été la femme de ma vie. Mais mon existence poursuit son cours, et je me suis maintenant habitué à vivre sans elle. Je conserve au fonds de moi une gène permanente, comme une douleur sourde que l'on sent moins dans la journée quand on est occupé, mais qui se manifeste dès que l'on est seul et moins actif, une douleur qui n'est pas insupportable, mais qui  peut aussi se réveiller à la moindre faiblesse ou au souvenir imprévu qui vous fait revivre soudainement une scène du passé.

Mais je regarde devant moi, j'ai engagé beaucoup de changements dans ma vie, j'essaye d'être présent au mieux pour mes enfants qui sont de jeunes adultes, j'ai une vie sociale assez dense, je me déplace beaucoup pour voir du monde, bref j'essaye de faire ce qu'il faut pour m'en sortir, et je vais mieux c'est incontestable. J'ai déménagé et changé de lieu de vie; avec mes filles, nous avons beaucoup trié et donné les affaires de ma femme, celles qu'elles qu'elles ne mettraient jamais et que nous ne voulions pas conserver juste pour le souvenir. Nous n'avons gardé que ce qui nous paraissait important.

Il me faudra encore du temps pour retrouver du goût à la vie. Je n'ai pas retrouvé le bonheur, je n'ai plus la même capacité à m'émerveiller ou m'enthousiasmer, simplement je vis normalement et j'ai appris à vivre seul.
Il y a quelques jours, ma fille a accouché d'une petite fille, ma première petite fille, et j'en suis évidemment ravie, et très heureux pour elle.
Tout le monde s'est réjoui pour moi et m'a dit "cela va changer ta vie". Bien sûr j'en suis très heureux, mais ce qui a vraiment changé ma vie, cela reste la perte de ma femme. Les expressions, qui partent d'une bonne intention comme "la vie est plus forte que tout", il faut savoir tourner la page et aller de l'avant" m'exaspèrent toujours.

J'ai bien l'intention de profiter encore de la vie, d'être à la hauteur pour  mes enfants et mes petits enfants à venir, de retrouver mes amis proches.
Mais je vais le faire à ma manière, comme je le peux, avec cette blessure qui ne parvient pas cicatriser complètement, mais qui ne m'empêche plus de vivre comme c'était le cas  il y a encore 6 ou 12 mois.
J'essaye de trouver un nouvel équilibre de vie, de parvenir à vivre sans ma femme, et à grappiller de petits bonheurs par ci par là à défaut d'être vraiment heureux. Etre heureux à nouveau, cela me parait encore lointain mais plus totalement exclu, peut-être un jour ...

Hors ligne Cabochon

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #38 le: 25 février 2020 à 19:39:59 »
Bonjour Chrisljb,
Je te remercie pour ton message d'espoir.
Ton histoire est triste, et je suis contente de lire que tu vas mieux, même si je l'ai bien compris cela reste douloureux, c'est normal.
C'est aussi grâce à des témoignages comme le tien ce jour que je tiens le coup, car après 3 mois et demi de deuil de mon mari, j'ai l'impression que c'est impossible de sortir du désespoir, mais en te lisant cela me donne du courage.
Merci encore, et courage à toi pour la suite
Amicalement

Hors ligne Chog

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #39 le: 25 février 2020 à 21:00:57 »
Bonsoir chrisljb,
Effectivement, comme le dit Cabochon, ça fait du bien de lire un message comme le tien et suis heureuse pour toi.
Le jour où je pourrais dire comme toi, que mon mari est m...t, je pense alors que j'aurais franchi un cap. Pour l'instant, j'emploie plutôt les termes suivants : parti, quitté, absent, disparu... Le mot est trop violent à tous niveaux pour moi.
Affectueusement,
Tu n'es plus là où tu étais, mais partout là où je suis.
V. Hugo

Hors ligne chrisljb

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #40 le: 11 avril 2020 à 00:03:43 »
Quand je lis les commentaires à mes messages, venant de personnes dont le deuil est plus récent que mien, je ne peux m'empêcher de revivre cette période terrible des premiers mois, de la 1ère année et au-delà,  et rétrospectivement de ressentir à nouveau le grand mal-être de cette période. Je comprends leur désarroi et leur désespoir.
Personne n'est préparé au deuil d'un très proche, pas plus que nous ne serions préparés à nous retrouver dans la violence , le bruit et la fureur d'un champ de bataille.
Les mois , les trimestres qui suivent le décès d'un conjoint aimé, ou d'un enfant, sont des temps de très grande souffrance, d'une tristesse sans fond, de révolte et de désespoir. On semble plonger sans fin toujours plus bas, tous nos repères et notre mode de vie ont volé en éclat, et on ne sait absolument plus où l'on va. Rien ne nous a préparé à cela, et il est très difficile de se situer, de comprendre l'évolution de notre état psychologique, d'identifier éventuellement des actions ou décisions à prendre.
Que m'arrive-t-il ? Vais-je "normalement " mal ? Est-ce normal de n'avoir de goût à rien ? de se sentir désespéré, sans énergie ni envie ? Est-ce normal de faire des rechutes ?
Autant de questions qui nous assaillent parce que nous sommes dans une situation inédite pour nous, avec une violence des sentiments que nous n'avions jamais connue auparavant.

Ce que je voudrais dire ici, c'est que j'ai trouvé très utile de comprendre le fonctionnement du deuil.  J'ai lu très vite le livre du Dr Fauré, en particulier celui sur le suicide d'un proche, plus ramassé, et puis je suis venu sur ce forum lire les témoignages d'autres endeuillés.
J'ai pu ainsi peu à peu prendre conscience de mon état ,  prendre un peu de recul sur mes émotions, et cela m'a aidé à trouver de la patience, à accepter d'aller mal, voire très, très mal.

Je ne vois pas d'autre voie que celle de la patience et de la résilience, du soutien des personnes avec lesquelles on se sent le plus proche, pour traverser ce long tunnel sinistre et glacial. Chacun doit chercher ce qui pourra lui donner un peu de force pour continuer, et se donner le temps de pouvoir aller mieux un jour. C'est long, c'est douloureux, comme une interminable convalescence.
Y a t-il une guérison complète un jour ?  Je ne sais pas répondre, j'aurais tendance aujourd'hui à dire que probablement pas. Pour la plupart d'entre nous, cela restera une blessure intérieure, une tristesse et une nostalgie dont nous ne parviendrons jamais à nous défaire.

Je ne sais pas si on peut aller bien un jour après un drame pareil, mais on peut aller mieux.  Si l'on  conserve une raison de vivre, des enfants, de bons amis, une passion, une activité collective, si l'on s'en retrouve une, on peut même reprendre le cours de sa vie. Aller bien, je ne sais pas, personnellement je n'y crois pas encore, mais aller mieux oui c'est possible avec le temps. C'est très triste à dire, mais le temps finit effectivement par atténuer les souvenirs anciens et nous en créer de nouveaux. C'est douloureux parce que l'on a l'impression de perdre une deuxième fois celui ou celle qui n'est plus là. Mais c'est nécessaire pour parvenir à aller mieux,

Ce que je veux dire ici, c'est donc qu'il est normal d'aller très mal, de ne pas sentir d'issue, de se sentir totalement perdu, d'avoir l'impression de ne jamais pouvoir s'en sortir, de rechuter constamment. Il faut tenir, accepter la patience, s'accrocher à tout ce qui peut nous aider, ne pas perdre l'espoir, ne pas non plus se laisser aller, parce qu'une amélioration est possible, et que l'on peut reprendre le cours d'une vie.

Récemment, on m'a demandé, et cela venait sûrement d'une bonne intention, si je parvenais à penser à ma femme décédée avec apaisement, ou même si le fait de penser à elle me faisait du bien. J'ai répondu brutalement que non. Je pense bien sûr à elle constamment, mais toujours avec tristesse et nostalgie, et franchement je n'attends pas à une amélioration sur ce plan là.
Mais j'ai repris le cours d'une vie qui n'est certes plus la même , mais je vais incontestablement mieux. Je parviens parfois à passer de bons moments, j'ai mes enfants, je suis bien entouré pa ma famille et mes amis, et j'ai des activités qui m'apportent beaucoup.

Je sais bien que pendant toute la phase la plus critique, on ne perçoit aucune lueur d'espoir, que c'est désespérant, que les témoignages de ceux qui vont mieux paraissent irréels,  inatteignables. C'est pourtant possible d'aller mieux.  J'espère que ceux qui liront ces lignes y verront une raison de se maintenir à flot, de trouver ,en eux et dans leur entourage, la patience et la résistance pour tenir dans la durée, et attendre ce moment où progressivement ils réaliseront qu'ils commencent à aller moins mal.

« Modifié: 13 avril 2020 à 14:17:11 par chrisljb »

Hors ligne Chog

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #41 le: 11 avril 2020 à 11:08:25 »
J'ai lu ton histoire au fil de tes posts. C'est sûr tu as avancé sur le chemin. Je trouve que tu es bien aidé, tes enfants, tes amis fidèles, tes projets... C'est une chance. Il est évident que la place occupée par notre moitié est toujours vide, la vie a changé, notre quotidien, nos repères, nos petits délires à 2. Tout quoi. Et, le temps passe. Et, c'est vrai que le temps emporte un peu plus tous les jours la douleur lancinante avec lui en faisant émerger de jolis souvenirs. Et, parfois, on redégringole, parce que l'on souffre encore, c'est là, en nous. J'arrive à faire bien des choses aujourd'hui que je ne pensais être capable au début de mon deuil. Mais, c'est pas fini, j'ai tant de choses à régler encore. Alors, je prends le temps, n'est-ce pas notre meilleur allié ?
J'ai eu la chance, le privilège de vivre avec mon mari, nous étions amoureux pendant 33 ans.
Je ne sais pas trop que faire après cela. La barre est haute...
En attendant, j'avance, à mon rythme, je me fais plaisir dès que possible, j'essaie de ne pas me mettre trop de contraintes, de toutes les façons, je n'ai plus les mêmes priorités aujourd'hui, je ris fort parfois, je pleure en silence souvent, les amis... ne sont  pas comme je l'aurais espèré, bien moins présents, bien moins attentifs qu'ils ne le laissaient entendre et pourtant certains ont vécu le même drame que moi. J'essaie de me détacher de ce sentiment d'abandon en me créant un autre cercle d'amis, qui n'étaient pas amis de notre couple. J'ai un tas de projets sympas, mais je n'arrive pas à les mettre en forme, et avec ce confinement, c'est pas le meilleur moment.
Cela dit, le confinement, cet isolement de toute la population, me laisse penser que tous vivent quelque part cette même solitude, même si ce n'est que provisoire pour eux.
Moi, c'est dans mes rêves que je suis à nouveau 2.
Et voilà un nouveau jour, le soleil est là, les fleurs si belles, les oiseaux qui chantent, j'entends des voitures circuler, des voisins parler... La vie continue.
Et je continue, allé, je retourne à mes petites occupations, à la vie...
Affectueusement
Tu n'es plus là où tu étais, mais partout là où je suis.
V. Hugo

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #42 le: 11 avril 2020 à 21:26:31 »
Bonjour Chrisljb,
Je te remercie pour tes messages, car je sens bien que tu as sincèrement envie de nous aider via ton témoignage, et oui moi cela m'aide vraiment beaucoup! Je me sens, comme beaucoup ici, tellement mal...
Merci!

Hors ligne chrisljb

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #43 le: 22 juin 2020 à 10:09:33 »
Période difficile avec une concentration de dates et d'évènements qui me font ressentir très fortement l'absence de ma femme.
Notre anniversaire de mariage il y a 3 semaines, cela aurait fait 30 ans et pourtant je nous voyait si jeunes, ma femme, elle, ne changera plus.
Mes enfants qui se sont tous retrouvés chez mois pour un we avec ma 1ère petite fille née depuis le décès de ma femme, pour certains je ne les avais pas vu depuis 3 mois, confinement oblige. WE joyeux et animé, mais j'avais l'absence de ma femme  à l'esprit en permanence, comme une injustice insupportable.
Voir ma fille ainée en jeune et jolie maman avec son bébé, et qui ne peut partager rien de tout cela avec sa maman.
Mon 1er passage depuis plus de 6 mois devant notre ancienne maison, le quartier où nous avions vécu 15 ans, et où ma femme est morte.
Mon retour en juin sur un  lieu de vacances que nous avons beaucoup pratiqué tous les 2 et où je n'étais que peu revenu.
Et puis Les 2  ans du décès de ma femme dans quelques jours...

Je vais mieux , j'ai repris le cours de ma vie du mieux que je peux, mais c'est toujours là  en moi, une vieille douleur prête à se réveiller et vous nouer la gorge.
Mon 3ème été sans elle, le 1er que j'organise vraiment seul. La 1ère année, j'avais été très entouré, l'été dernier nous avions fait un voyage avec mes enfants, cette année il faut s'organiser avec ce foutu Covid qui a tout compliqué.
Je vais incontestablement mieux , j'ai fait des projets, je m'occupe de moi et de mes enfants, je vois mes bons amis (quand ce maudit Covid n'est pas de la partie) , j'arrive à passer de bons moment, mais sans parvenir à retrouver l'insouciance, le plaisir et la joie de vivre que j'observe chez les autres.
Ce mois ci, et ce 1er été seul, sont un nouveau cap à passer , à surmonter pour aller un peu plus loin sur le chemin de l'amélioration.




Hors ligne chrisljb

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Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
« Réponse #44 le: 26 juin 2020 à 13:12:19 »
Bonjour,
Je ne suis pas dans le même état d'esprit, je refuse de baisser les bras et je reste convaincu qu'il faut garder espoir.

J'ai 55 ans, 3 filles qui ont perdu leur maman, dont 2 en couple, et une petite fille, et je vais tout faire pour retrouver une certaine joie de vivre et un peu d'insouciance, en tout cas je veux continuer à y croire. 
Je le dois pour mes filles qui ont besoin d'un père présent, optimiste et qui puisse être un soutien et une source d'énergie.
Et je suis sûr que c'est ce que ma femme aurait attendu de moi.
Le fait d'avoir des enfants rend les choses très claires et peut être plus simples  pour moi: il faut continuer à vivre. Depuis le suicide de ma femme, ma fille ainée s'est mariée, a eu un bebe, la seconde se marie en juillet,  et la 3ème a repris ses études après une interruption d'un an.

Je ne dis pas que c'est simple ni facile, ni que je vais y arriver, mais je ne veux pas accepter une deuxième fois la fatalité après celle de son décès brutal.
Dans les mois qui suivent le décès, on essaye de tenir , de garder le cap, de ne pas sombrer, il faut surtout tenir.
Et puis à un moment, on remonte un peu la pente, et là , en tout cas c'est ma conviction,  il faut s'accrocher au peu d'espoir que l'on peut avoir, essayer de le nourrir et de le faire grandir.