FORUM "LES MOTS DU DEUIL"

Comprendre et vivre son deuil => Vivre le deuil de son conjoint => Discussion démarrée par: chrisljb le 05 février 2019 à 22:36:07

Titre: Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 05 février 2019 à 22:36:07
Ma femme s'est suicidée l'année dernière dans une crime d'angoisse aussi brutale que soudaine, nous laissant nos 3 filles et moi sidérés et sonnés sur le bord du chemin. Nous nous étions connus à 20 ans et elle était tout simplement la femme de ma vie et ma joie de vivre depuis 30 ans.

Je pense avoir passé le pire, ces premiers moi pendant lesquels on est anéanti, pendant lesquels on continue a vivre sa vie comme en roue libre, parce qu'il le faut, parce que les enfants sont là et ont la vie devant eux, parce que de toute façon on ne sait pas quoi faire d'autre, ces mois vides de sens durant lesquels on est en permanence au bord de la rupture et de l'effondrement complet, ces mois où la culpabilité vous ronge sans cesse et encore.
Voici maintenant quelques mois que je pense être sorti du trou noir. Je mène une vie en apparence  relativement normale, avec assez d'énergie pour travailler, remplir mes week-end et voir du monde régulièrement. Je me sens moins mal tout simplement parce que j'ai retrouvé un peu de nerf pour me forcer à bouger et faire quelques projets.

Mais intérieurement c'est le vide, la tristesse et une nostalgie devastatrice de cette vie heureuse qui est maintenant derrière moi. C'est un état dépressif chronique, une morosité permanente, une absence d'envie et d'enthousiasme dont il est impossible de se débarrasser bien que l'on en soit conscient. Dans le meilleur livre que j'ai lu sur le sujet, celui du Dr Fauré, il parle de syndrome ou symptôme dépressif sans que ce s'en soit réellement une, et c'est exactement cela.
Cet état est accentué par ce sentiment de grande solitude du au  fait que la vie a repris son cours pour les autres, que le décès est maintenant derrière eux, alors que pour vous il est encore là présent à tout moment et tous les jours mais que vous ne pouvez plus en parler aussi souvent et librement, que l'on ne vous demande plus comment cela va.

La difficulté de cette phase est sa durée, cela dure et dure, on a l'impression de ne pas en sortir et que cela ne va jamais s'arrêter. C'est ce que racontent tant d'entre vous sur ce forum. C'est moins violent que les premiers temps, mais que c'est long  ces mois qui s'enchainent sans fin ! Et puis ces rechutes régulières qui vous tombent dessus à l'improviste pour un souvenir qui soudain revient, ou pour la simple conscience de ce qui s'est passé. Et les nuits courtes , ou plutôt si longues à ne pas dormir.
On voudrait pouvoir se secouer et faire tomber toute cette tristesse et cette nostalgie, retrouver le goût de la vie,  mais cela ne fonctionne pas comme cela. Je ne sais pas si c'est affaire de tempérament, si certains s'en sortent mieux, peut être mais alors qu'attendent-ils pour nous dire leur secret ?

Je ne sais pas combien de temps cela va durer, et je sais encore moins dire si je vais tenir la distance. Alors je prends les jours l'un après l'autre en réfléchissant le moins possible. Ce qui marche encore le mieux pour moi est d'aller vers les autres, de s'intéresser à  eux, de voir du monde. Ce n'est pas brillant mais le temps s'écoule.

Bon je suis désolé, je sens que je n'aurai pas contribué à remonter le moral de ce forum ce soir, mais le fait est que je suis toujours là, et que j'ai encore surmonté ma dernière crise de déprime.  Et puis d'avoir vidé mon sac ici ce soir, je me sens un tout petit mieux.
Il faut tenir...
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Catherine Th le 06 février 2019 à 00:31:45
Sois le bienvenu et n'hésite surtout pas "à vider ton sac" si ça te fait du bien, même un petit peu.

Ton deuil n'est pas vieux et malgré toute ta tristesse, ta douleur, ton sentiment de vide, tu dis "Voici maintenant quelques mois que je pense être sorti du trou noir. Je mène une vie en apparence  relativement normale, avec assez d'énergie pour travailler, remplir mes week-end et voir du monde régulièrement. Je me sens moins mal tout simplement parce que j'ai retrouvé un peu de nerf pour me forcer à bouger et faire quelques projets." " Alors je prends les jours l'un après l'autre en réfléchissant le moins possible. Ce qui marche encore le mieux pour moi est d'aller vers les autres, de s'intéresser à  eux, de voir du monde. : c'est déjà beaucoup d'arriver à faire tout cela ....

Pensée amicale pour toi, pour tes filles,
Une douce pensée pour ta femme

Catherine


Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: mike67 le 06 février 2019 à 11:16:23
Voici maintenant quelques mois que je pense être sorti du trou noir. Je mène une vie en apparence  relativement normale, avec assez d'énergie pour travailler, remplir mes week-end et voir du monde régulièrement. Je me sens moins mal tout simplement parce que j'ai retrouvé un peu de nerf pour me forcer à bouger et faire quelques projets.

Mais intérieurement c'est le vide, la tristesse et une nostalgie devastatrice de cette vie heureuse qui est maintenant derrière moi.
Cet état est accentué par ce sentiment de grande solitude du au  fait que la vie a repris son cours pour les autres, que le décès est maintenant derrière eux, alors que pour vous il est encore là présent à tout moment et tous les jours mais que vous ne pouvez plus en parler aussi souvent et librement, que l'on ne vous demande plus comment cela va.

La difficulté de cette phase est sa durée, cela dure et dure, on a l'impression de ne pas en sortir et que cela ne va jamais s'arrêter.

Je ne sais pas combien de temps cela va durer, et je sais encore moins dire si je vais tenir la distance. Alors je prends les jours l'un après l'autre en réfléchissant le moins possible. Ce qui marche encore le mieux pour moi est d'aller vers les autres, de s'intéresser à  eux, de voir du monde. Ce n'est pas brillant mais le temps s'écoule.



Bonjour à toi,
Je me permets de te citer car mon état d'esprit du moment correspond exactement à ce que tu décris.
... on se sent moins seul.
La vie reprend, les mécanismes de vie reprennent, même pour nous, mais il y a cette chape de plomb, cette grisaille intérieur, cette blessure qui nous laisse nostalgique et si démuni face au vide, avec notre impuissance.

Je trouve très positif ce que tu écris : aller vers les autres, s'intéresser aux autres est un très bon début pour rebondir.

Un grand courage à toi et beaucoup de solidarité.

Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 11 février 2019 à 00:12:53
Pendant tous ces mois qui s ecoulent inevitablement, parce que l on ne peut arreter le cours du temps, on comprend peu a peu que le deuil est un processus de distanciation a l egard de la personne que l on a perdue.
Cela se fait tres lentement, mais pas a pas, jour apres jour, on apprend a vivre sans elle, a detendre les liens qui faisaient notre vie commune. Au quotidien, on ne voit rien, on a meme souvent l impression de rechuter, aujourd'hui encore j ai ete assailli par un souvenir tres emouvant de notre vis passe, et j en i ete bouleverse. Mais a 2 ou 3 mois de distance, on mesure qu il s est passe quelque chose, que l on n'est pas tout a fait dans le meme etat d esprit.
Et dans le meme temps, c est tres douloureux ce sentiment de s eloigner de l etre cher que l on a perdu. C est comme l abandonner alors que deja on n a pas su la retenir...
Tout est si long, si penible, si complique !
Il est trop tard pour souhaiter que la vie soit plus simple, il faut essayer d avancer.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 10 mars 2019 à 00:37:35
Après tout ces mois, j'ai beau lutter et essayer d'aller de l'avant, je suis régulièrement rattrapé par des crises d'abattement , un sentiment de vertige comme si le sol se dérobait sous mes pieds, le décès de ma femme me parait irréel, je sens bien que je ne l'ai pas encore accepté.
Aujourd'hui, j'ai fait du tri et des rangements de nos affaires, c'est toute notre vie passée et notre bonheur qui défile.
Faire le deuil son conjoint, c'est aussi faire le deuil de sa vie et c'est incroyablement douloureux. Même si j'ai mes filles , leur jeunesse et leurs projets, à 53 ans j'ai le sentiment de ne plus avoir d'avenir. Pourtant j'ai toujours vécu en regardant devant moi, avec des envies et des projets; simplement là, je n'ai plus de goût ni de plaisir à ce que j'entreprends, plus de but.
Bon c'est un samedi solitaire et cela n'aide pas, il faut laisser passer le creux de la vague.

Mais ces alternances de moments corrects et de (très) bas sont très difficiles à vivre et usant psychiquement et physiquement. Au bout de tant de mois, je ne dors toujours que très peu et définitivement pas assez, ce qui ajoute à ma morosité générale.
J'aurais envie d'un peu de répit, d'un temps d'insouciance et de légèreté, j'aimerais pouvoir rire franchement et sans au fonds de moi cette tristesse qui m'éloigne de l'instant que je vis.

J'ai beau être quelqu'un de volontaire, je ne pense pas que l'on puisse lutter contre cet état de déprime . On ne peut pas décider que l'on va passer un bon moment, ce n'est pas une question de volonté, c'est comme les éléments que l'on ne maîtrise pas. On ne peut que faire avec,  laisser passer et attendre une accalmie. 
Ces dernières semaines, je me sens épuisé, j'ai l'impression de ne pas avancer , aucune lueur au bout de cet interminable tunnel. J'essaye de ne pas m'en vouloir d'être aussi abattu, mais j'ai du mal, je culpabilise et crains d'être un poids pour mon entourage, surtout mes filles que je veux pas charger davantage qu'elle ne le sont par le décès brutal de leur maman.

Tout cela est bien compliqué, il est difficile de rester lucide, de ne pas se laisser submerger par les émotions. Garder du recul sur l'état dans lequel on se trouve, savoir relativiser, me parait pourtant le seul moyen de tenir.

Aujourd'hui n'était décidément pas une bonne journée, ce n'était pas la première et ce ne sera surement pas la dernière, mais elle est bientôt terminée, je vais essayer de dormir un peu,
Mes pensées vont à ceux qui vont plus mal que moi,
Bien à vous,
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: résilience et silence le 10 mars 2019 à 08:13:12
Oui, difficile est ce chemin et c'est pas ici que le contraire va être dit. Mais à vous lire, savoir que tenir ce fil, aussi douloureux soit-il, conduit à un moment de soulagement où  la paix reprend racine en nous me permet au moins de saluer  votre courage et de soutenir  votre partage.
Plein de pensées et comme dit Féderico, chaleureusement, solidairement, respectueusement.
Pascal.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: qiguan le 10 mars 2019 à 08:52:34
Je t'avais conseillé de fouiller dans le fil table des matières
Pour y trouver des liens d'anciens à lire
Car lire ce que d'autres ont pu faire donne un soutien
Tu peux lire les écrits de Jean Luc par exemple
http://forumdeuil.comemo.org/profile/?area=showposts;u=116832

Dont l'histoire a des similitudes

Tu fais de ton mieux, tu es lucide tu te sens usé par les vagues du deuil c'est tout à fait normal.
Tu trouves des points d'appuis dans vos filles et les souvenirs c'est un bon chemin

Oui le chemin est très long
Bien affectueusement
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: mike67 le 10 mars 2019 à 09:02:00
Je ne peux rien ajouter...
Simplement te dire que je t'ai lu et que je te comprends.
Ne pas s'en vouloir pour ses états d'âme...c'est malheureusement normal.
Dans ces moments, comme l'écrivait bmylove, se laisser aller, ne pas se retenir jusqu'à trouver un îlot pour se reposer et être mieux.
La quête vers un nouveau sens à donner à sa vie.. c'est le plus compliqué. Pour cela, attendre qu'un certain bien être, une sérénité, une acceptation s'installe.
Plein de jolies choses pour toi.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Nicole59 le 10 mars 2019 à 09:15:32
Bonjour,

A vous lire tous et toutes, je me dis que quelque soit la façon dont est parti notre moitié, le sentiment de vide, le chagrin, l'absence, la perdition, nous ressentons toutes et tous les mêmes choses.
Dans 9 jours cela fera 10 mois que nous avons été séparés par la mort, et j'en suis toujours au même point. Je ne l'accepte pas et je suis toujours envahie par le chagrin et le vide qu'il a été obligé de laisser derrière lui. Tu arrives à aller vers les autres, moi non. D'ailleurs la promenade de mon chien se fait le soir quand je suis certaine de ne rencontrer personne.
Comme tu dis, en perdant notre amour, nous perdons notre vie, je ne dis pas deuil car ce mot n'a pas de sens pour moi. Je n'attends plus rien de cette nouvelle vie sans lui, elle est vide de sens, peut-être dû à mon âge (66), mais je n'attends que le moment de le retrouver.
Tu sais relever la tête et la sortir hors de l'eau, à mon sens tu a une grande force. Je te souhaite le meilleur pour toi.
Nicole
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 23 mars 2019 à 12:03:04
Je voulais quand même dire que ce forum est l'un soutiens les plus utiles que j'ai pu trouver dans ces moments si sombres.
D'abord parce qu'à vous lire, on retrouve exactement ce que l'on vit et que l'on se sent déjà plus normal et moins seul.
Il est même étonnant à quel point tous nous traversons les mêmes états d'âme, les mêmes rechutes et les mêmes difficultés.
Cette communauté rompt un peu le sentiment d'isolement que l'on ressent même lorsque l'on est bien entouré. Tout simplement parce qu'il est très difficile pour quelqu'un qui n'est pas passé par là de s'imaginer à quel point notre vie en est bouleversée , chaque jour à chaque instant.
Moi-même, j'ai connu des décès autour de moi, mais jamais aussi proche que de perdre son conjoint , , un enfant, son amour, et je me rend compte à quel point j'étais loin de pouvoir me rendre compte de ce que cela représentait.
Alors je voulais juste remercier ce forum d'exister pour me faire me sentir un peu moins seul quelques instants par ci par là.
Merci également à ceux qui prennent la peine de rédiger un message de réconfort.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: malome le 23 mars 2019 à 13:04:59
chrisljb

 désoler je viens seulement de voir ton fil

quelque soit la séparation de l'être aimé ,nous nous retrouvons amputé d'une partie de nous même , tu dis avoir lu le livre du Dr Fauré , il ne dit pas que ça ira mieux un an après non , déjà chaque personne est différente , ce n'est pas une question comme tu le dis si bien toi même de volonté , nous avons ici toutes et tous un parcours différent mais une douleur équivalente , celle qui reste coincée au fond de nous
c est trés douloureux ce sentiment de s éloigner de l' être cher que l on a perdu. C est comme l abandonner alors que deja on n a pas su la retenir... non tu ne t'éloignes  pas tu lui fais une place autrement dans ton coeur , non tu ne l'abandonnes pas , tu ne l'oublieras jamais , 30 ans de vie commune sont un trésor , tu as encore trop mal pour t'en rendre compte  et tes filles sont bien la continuité de votre amour , malgré ta douleur et ton chagrin tu as un courage immense  de faire face jour après jour , n'oublie pas un homme a le droit de pleurer , lâcher les vannes cela soulage un instant

 Amitié et douceur à toi et tes filles , n'oublie pas non qu'elle n'est pas bien loin de vous
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 25 mars 2019 à 00:02:58
D'ordinaire, je ne suis pas très sensible aux dates et aux anniversaires, mais demain sera un lundi 25 comme ce matin où ma femme s'est suicidée et je suis toujours sidéré par cet enchainement qui a mené à sa disparition.
Voici maintenant des mois et des mois que je vis sans sa présence et sa chaleur, et j'ai toujours autant de mal à envisager l' avenir. Comment se projeter tant une vie si différente de celle que j'ai connue toutes ces années ?
Pourtant, je ne peux m'empêcher de penser que j'ai eu beaucoup de chance de la rencontrer, d'avoir été amoureux  pendant plus de 30 ans et de partager avec elle une vie si belle, et ce malgré les moments  tourmentés que nous ont infligés sa bipolarité. Je mesure ce qu'elle a apporté à mon existence. J'en ai chaud au coeur rien que d'y penser, mais cela m'envahit aussi d'une nostalgie terrible.
Je m'efforce de continuer notre chemin avec mes 3 charmantes filles mais je me sens vide du sens qu'elle donnait à ma vie. J'existe, mais je n'ai pas de goût ni d'envie, ce mot qui prend maintenant un sens si particulier pour moi.
Je l'ai déjà dit, j'ai passé la creux de la vaque. Malgré les rechutes incessantes, je pense être sorti du trou noir du choc et du désespoir,  C'est maintenant une tristesse sourde , une "grisaille" permanente comme disait l'un d'entre vous.
C'est surtout un avenir qui parait vide et sans véritable joie.
C'est long et usant, il faut une énergie terrible pour surmonter les vagues de déprime.
Ce we, j'avais beaucoup de monde à la maison, le temps est passé vite et j'ai même passé des bons moments, cela m'a permis de ne pas trop sentir arriver ce lundi 25. Demain sera une journée difficile, il faudra faire avec.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Nicole59 le 25 mars 2019 à 07:44:05
Je suis de tout cœur avec toi.

Nicole
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Boutchou le 25 mars 2019 à 07:59:29
Bonjour Chrisljb

J ai lu  vos messages  et comprends tout ce que vous exprimez .
Ce  forum nous aide à  comprendre et partager nos douleurs et  à  en mesurer l immensité .
Meme  si on ne peut répondre à tous chaque jour !!on se lit et on sait ...
Il y a tellement de souffrance exprimée..les mots parfois sont superflus et  nous n'en avons plus tellement ils ont été utilisés

amities
Boutchou
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: qiguan le 25 mars 2019 à 11:44:59
la grisaille que tu évoques s'éclaircira grâce à tes trois soleils (vos filles)
tu vas apprendre à découvrir que des envies par des chemins divers vont pouvoir revenir exister en toi, moi c'est passé par mes petits soleils ... mon vieux chien et par l'aide aux autres, puis par ma sensibilité à la nature, l'art et la culture ...
avant de découvrir que des envies venant de moi, minuscules pouvaient renaître ...
cela a pris des années mais qu'importe c'est là, fragile, cela ne masque pas, pour moi le manque mais c'est là
Citer
je me sens vide du sens qu'elle donnait à ma vie
oui c'est ça le manque qui perdure ... comprendre qu'autre chose pourra peut être exister et qu'elle manquera toujours elle ...
C'est lié au fusionnel Roland Barthe en parle bien par rapport à une mère
https://bibliobs.nouvelobs.com/documents/20090129.BIB1168/roland-barthes-le-mal-de-mere.html
pour le conjoint c'est encore plus intime particulier ..

les dates anniversaire marquent longtemps puis cela s'estompe

bien affectueusement
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 01 avril 2019 à 19:04:15
J ai lu dans Le Monde cet interview que j ai trouvé tres intéressant autour d un livre sur le thème de la rupture,
 Pas le deuil en particulier,  toutes formes de ruptures, mais j ai trouve beaucoup de réflexions qui m ont parle.
 https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/03/30/claire-marin-l-epreuve-de-la-rupture-peut-nous-disloquer-jusqu-a-la-folie_5443447_3232.html?xtmc=ruptures&xtcr=1

En particulier, ce passage sur la rupture amoureuse car au fond, c est un peu ce que l on vit dans un deuil de son conjoint:
."Dans la rupture amoureuse, ce n’est pas seulement un être aimé que l’on perd, c’est aussi la personne qu’il voyait en nous et que son amour valorisait. Mais c’est également tout un monde, des lieux, des repères, un langage propre au couple, des amitiés, des familles, et tout un passé, une histoire commune qui disparaissent avec lui. Ce monde est englouti par la séparation amoureuse. On a l’impression d’avoir tout perdu, un peu comme un naufragé. Et de n’être plus personne, au milieu de nulle part. C’est une expérience de désorientation existentielle. Alors on se laisse mourir de chagrin ou on essaie de reprendre autrement le cours de la vie. C’est une mise à l’épreuve intime, qui détruit mais qui sollicite aussi des résistances inattendues, nouvelles. On se surprend, on découvre des ressources inespérées dans ce retour à soi involontaire."
Je vous laisse lire. J'espere un jour arriver a la note positive de la fin de ce passage. Pour l instant, je n y suis pas.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 08 avril 2019 à 00:22:14
Ce we, nous nous sommes retrouvés pour l'anniversaire de ma plus jeune fille qui aura 22 ans mardi.
Mes 3 filles étaient présentes,  la maison a été pleine tout le temps et nous avons fait de belles ballades tous ensemble, dans un climat affectueux et même joyeux.
Mais ma fille est restée très sensible tout le temps, c'est son premier anniversaire sans sa maman.
Toute l'année dernière, ma fille était à l'étranger, elle est rentrée 3 semaines avant le décès de sa maman et ne l'a pas beaucoup vue pendant ces quelques temps.
Ce matin, elle m'a demandé de l'aider à placer une toute petite photo de ma femme dans un pendentif qu'on lui avait offert.
J'ai un peu de mal car c'etait très délicat d'insérer la photo. Quand j'au eu fini, j'ai été frappé à quel point la photo que ma fille avait choisie était bonne, c'était tellement elle,  son expression avec un grand sourire et ses cheveux roux dans le vent.
J'ai cru la voir en face de moi, telle que je l'ai toujours vue, et là j'ai eu l'impression d'avoir la poitrine qui explosait sous l'émotion. Tout m'est revenu d'un coup et son absence en ce we ou nous étions tous réunis m'a paru irréelle, impossible, insoutenable. Je me suis écroulé.
Je suis sorti m'isoler un bon moment avant de pouvoir reprendre mes esprits et revenir au milieu des autres.
Seule ma fille a compris ce qui s'était passé.
C'est comme cela; après tous ces mois à lutter pour reprendre le cours de sa vie, la carapace que l'on s'est créée est bien fine et fragile, et la douleur est toujours là présente, prête à mordre encore plus fort  à la moindre faille.
L'après midi est passée mais je crains ces vagues d'émotion et leur effet sur la nuit qui suit et sur les suivantes.

Ma fille est restée fragile toute cette journée. Nous nous entendons bien et nous nous soutenons l'un l'autre. J'aimerais pouvoir faire davantage pour l'aider mais je suis à la limite de mes capacités, je suis comme un sportif qui n'a plus de réserves.
Je sais que me voir craquer ainsi l'a beaucoup affectée, mais je n'ai pas pu faire autrement.
Au moins, je pense que le réconfort, l'affection et de la solidarité que nous nous témoignons mes filles et mois dans ces moments pénibles sont une chance et une force.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: qiguan le 08 avril 2019 à 13:54:35
Citer
Au moins, je pense que le réconfort, l'affection et de la solidarité que nous nous témoignons mes filles et mois dans ces moments pénibles sont une chance et une force.
oui c'est exactement cela
cette force va vous accompagner
bien affectueusement
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 01 mai 2019 à 23:59:48
Voici un peu d un mois que je ne suis pas venu sur ce forum.
Je voulais de ten ir, essayer de mener ma vie sans m'epancher.
Ces derniers temps, j ai eu quelques bons moments; je me dis que je vais mieux, que je remonte lentement la pente.

C est surement en partie vrai, mais ce que je ressens reste une immense solitude. Du fait de son absence que je ressens chaque jour, aussi d un decalage avec mon entourage familial et amical.
C est la tristesse et une solitude terrible.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: malome le 02 mai 2019 à 16:33:29
chrisljb

tu sais bien qu'ici c'est une seconde maison , tu y reviens quand les coups de blues reviennent , oui on se croit plus fort , on remonte la pente , et soudain une faiblesse et on glisse , alors il faut remonter , ha cette fois c'est plus difficile, le manque , la solitude nous assaillent et pourtant il faut encore et encore avancer ,  le décalage  avec les autres est réel et insoutenable , pour eux c'est bon il est temps de tourner la page , non et non c'est pas comme cela , notre ressenti est tout autre , blesser à vie une plaie béante qui se refermera jamais tout à fait , même si parfois de bons moments passent et qu'il faut saisir à corps perdu , peu importe le temps que ça dure , c'est une sorte de pose qui permet de souffler.
Amitiés et douceur à toi ,tes filles et ton aimée
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 03 mai 2019 à 14:29:58
Merci,
C'est juste que ces temps-ci je me sens à la limite de mes forces. Voilà près d'un an que je dors très peu et mal malgré toutes mes tentatives pour stabiliser mon sommeil, que je cesse de penser à elle et que j'ai en permanence l'estomac comme noué. Je sens la fatigue s'accumuler et une si grande lassitude. Tous ces mois d'efforts, de tension pour se maintenir à flot, être actif, voir du monde, continuer à faire tourner ma petite entreprise alors que j'ai si peu d'énergie et de concentration...l'impression de devoir toujours lutter contre un vent contraire.
Et puis cette solitude terrible et le manque, cette absence et ce vide permanent, à tout moment.
Bon, mon cas n'a rien d'original, je vois bien sur ce forum que nous traversons tous la même tourmente; quelque part, cela réconforte, je me dis que je vais "normalement mal". Et puis j'ai la chance d'être très bien entouré même si je me sens souvent en décalage avec certains de mes proches qui ne ne peuvent pas se .
Je trouve difficile aussi de sentir ma femme s'éloigner progressivement de ma vie. Son souvenir se fait un peu moins précis, plus lointain. Penser à elle me fait mal, mais la sentir s'éloigner encore plus.
Ces derniers jours, pour la première fois, j'ai eu la tentation d'arrêter de lutter, de me mettre en pause complète, mais pour faire quoi ?  Pour se retrouver dans une situation encore plus compliquée ?
En fait, nous n'avons pas le choix, j'ai 3 filles qui ont déjà assez souffert, il est hors de question que leur père soit un poids ou un souci pour elles. J'ai aussi une petite entreprise qui continuer à tourner, avec une dizaine de salariés qui en dépendent et c'est aussi mon moyen de gagner ma vie.

Il faut essayer de ne pas baisser les bras,  se ménager , reprendre quelques forces et retrouver un peu d'énergie pour continuer à aller de l'avant, attendre un meilleur moment.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: yvgpqpg4 le 03 mai 2019 à 15:59:56
Bonjour je me retrouve beaucoup dans tous ces mots que tu viens d'utiliser: la fatigue, la lutte permanente, la lassitude, ne penser qu'à ça, besoin de faire tourner ma petite entreprise, grosse fatigue,  tentative d'un sommeil à peu près correct,. Moi aussi c'est tout cela qui ne cesse de rythmer mon quotidien. Je ne sais même pas comment on fait pour avancer en fait. J'ai toujours cette image d'être au volant de ma voiture et d'appuyer sur l'accélérateur mais le frein à main est serré et je persiste à vouloir accélérer .  Voilà comment je ressens la chose. Je ne sais pas te dire quoi faire, moi je fais une pause mais je ne suis pas sûre que ce soit la solution car je tourne en boucle...
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: yvgpqpg4 le 03 mai 2019 à 16:03:30
Je ne suis pas abonnée au monde j'aurais bien aimé le lire
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: yvgpqpg4 le 03 mai 2019 à 16:17:03
Également le ventre noué, je n'ai jamais retrouvé un appétit féroce c'est toujours manger car il faut manger. Je rêve de retrouver l'appétit, le vrai. Ça fait combien de mois qu'elle est partie ? Moi aussi j'ai lutté une bonne année puis en fait ça a été plus difficile juste après. Je pense que le corps lâche au bout d'un moment. Tu peux t'autorise à pleurer et à craquer devant tes filles, cela leur ouvrira le droit à pleurer aussi. Et vraiment j'ai compris que plus on lâche plus on pleure etc et mieux on se trouve ensuite.  Moi je ne pleure plus trop, je n'ai plus trop de crise de sanglots, mais je me suis beaucoup permise, je m'en fiche de l'opinion des autres je peux pleurer n'importe où n'importe quand, les autres sont mal à l'aise tant pis pour eux je n'ai pas de honte à avoir.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: BEBE le 03 mai 2019 à 18:20:56

Cher Chrisljb,

A plus de 16 mois de deuil je ressens aussi cette immense lassitude qui ne me quitte plus et pourtant je dors plutôt bien mais  dès le réveil je me sens fatiguée. Me préparer le matin me prend beaucoup plus de temps qu’avant. Je me traine, je manque de jus, de réactivité. Penser à tout ce qu’il va falloir accomplir dans la journée m’épuise avant même de l’avoir démarrée. Tout est difficile à accomplir même les choses les plus simples et me demande des trésors d’efforts et de volonté. Je suis devenue experte en procrastination, mais à force je suis en train de me faire déborder par tout ce qui a été soigneusement remis à plus tard… je ne sais plus par quel bout commencer… ni à la maison… ni au travail… ce qui vient renforcer mon état de découragement et de déprime.   
Au boulot j’ai l’impression de ne plus savoir faire… manque de concentration, difficulté à prendre des décisions, mémoire qui semble saturée… et la pensée qui semble toujours embrumée, engourdi, court-circuitée… tout est lourd, lent, pesant… et je m’énerve après moi-même d’être dans cet état-là.
Comme pour toi l’envie d’arrêter cette épuisante nage à contre-courant m’a effleuré l’esprit mais je me dis que si je fais ça, si je lâche l’affaire… alors c’est foutu. Donc je continue coûte que coûte  ce combat de forcenée en me disant que ça va bien finir par s’arranger et je m’oblige à relativiser en me disant que ma performance au travail n’a finalement pas été moins bonne que les années précédentes puisque mon chef ne s’est pas plaint de moi, la maison n’a pas pris feu ni ne s’est effondrée, le chat est toujours en vie… et moi aussi… alors tout ça est laborieux et vraiment loin d’être parfait, mais l’ensemble au final tient à peu près debout.
Il n’y a que quand je vais à la danse que je trouve un peu de peps et de légèreté  alors j’essaie d’y aller le plus souvent possible.
Te lire aujourd’hui m’a fait du bien, cela m’a un peu rassuré de voir que je ne suis pas la seule à toujours manquer autant d’énergie même plusieurs mois après le décès alors merci pour le partage de ce vécu.

Affectueusement,
BEBE   
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 05 mai 2019 à 22:22:04
Bonjour,

Merci pour vos messages et encouragements, je suis très touché par vos témoignages si proches de ce que je ressens et en

Ce forum est vraiment un drôle d’ « endroit ». Nous ne nous connaissons pas, personne de ne s’est jamais rencontré, et pourtant on y partage des sentiments à la fois très intimes et douloureux que l’on peine parfois à exprimer notre entourage le plus proche.
Le fait de retrouver dans les messages des uns et des autres des expressions et des états d'esprit si proches de ce que l’on ressent, crée un sentiment particulier de communauté et de compréhension. Je suis frappé par la similitudes de nos parcours et perceptions des phases du deuil. Du coup, nous avons le sentiment de nous comprendre mieux entre nous que ne peuvent le faire nos proches qui ne ressentent pas la même chose.

J'espère un jour pouvoir témoigner que je vais mieux pour apporter de l'espoir à ceux sont au creux de la vague.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: qiguan le 05 mai 2019 à 23:12:21
Citer
Nous ne nous connaissons pas, personne de ne s’est jamais rencontré,

Si des personnes se sont rencontrées
...
Récemment j'en ai rencontrée une
Et j'ai communiqué avec 5 "anciennes" personnes d'ici
Voir ce lien (archivé dans table des matières)
http://forumdeuil.comemo.org/vivre-le-deuil-de-son-conjoint/les-rencontres-entre-endeuille%28e%29s/
Ces rencontres sont extrêmement précieuses
J'invite toujours les nouveaux à le faire ...
Bien affectueusement
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: yvgpqpg4 le 06 mai 2019 à 10:30:02
Chris, tu verras tu te surprendras à aider les autres bien avant de t'aider toi-même ! J'ai l'impression que l'on parvient plus facilement à avoir les bons mots pour aider les autres que pour soi. Je pense que c'est une façon inconsciente de se parler à soi même et d'admettre certaines choses que l'on sait au fond de nous mais que nous avons dû mal à accepter (comme le fait que le temps fasse son œuvre, que malgré nous le deuil fait son chemin, que l'on a peur de l'oublier etc etc).
Titre: Re : Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: qiguan le 06 mai 2019 à 12:14:58
Chris, tu verras tu te surprendras à aider les autres bien avant de t'aider toi-même ! J'ai l'impression que l'on parvient plus facilement à avoir les bons mots pour aider les autres que pour soi. Je pense que c'est une façon inconsciente de se parler à soi même et d'admettre certaines choses que l'on sait au fond de nous mais que nous avons dû mal à accepter (comme le fait que le temps fasse son œuvre, que malgré nous le deuil fait son chemin, que l'on a peur de l'oublier etc etc).
C'est exactement ça
Et quand on communique par téléphone
Et où en se rencontrant c'est ainsi que l'on se soutient plus facilement
Affectueusement
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: malome le 06 mai 2019 à 13:42:47
Que le temps fasse son oeuvre , non ce n'est pas oublier, mais rien ,non rien ne peut faire oublier la  vie que nous avons eu avec   notre cher(e) disparu(e) , non je dirais juste aplanir le chemin de notre vie que cela soit  moins difficile à  avancer , adoucir notre chagrin , être plus calme malgré un souvenir qui peut remonter et nous émouvoir , nous n'en sommes pas encore là , le parcours est si long mais après tout nous avons le temps , prenez soin de vous
Amitiés à vous
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Nicole595 le 06 mai 2019 à 13:48:29
Oui le parcours est long. J'ai enlever mon message car j'ai eu peur de blesser.
Merci Malone
Nicole
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 12 mai 2019 à 19:28:21
J'appréhende un peu les semaines qui viennent car elles vont être lourdes d'anniversaires et de souvenirs. Même si je n'accorde pas une importance excessive aux dates, cela va être mon premier anniversaire fêté sans ma femme, suivi de notre anniversaire de mariage (29 ans quand même) et les 12 mois de sa disparition, le tout en très peu de temps.
J'ai toujours autant de mal à vivre sans elle, sa présence et sa compagnie me manquent terriblement.
J'ai beau être bien entouré par mes enfants, ma famille et mes amis, cela ne remplace pas la complicité et l'amour d'une vie de couple. Ma femme était la compagne de ma vie. Nous avions une vie active, chacun travaillant pas mal et se déplaçant régulièrement, mais nous aimions tout simplement être ensemble. J'aimais sa présence, la sentir à côté de moi,  la voir passer devant moi, sa conversation, sa curiosité, son sourire, et son côté toujours partante pour aller se balader ou visiter une expo. Bien sûr, comme tous les couples nous avions nos désaccords et nos moments de tension, mais nous avons eu une belle vie de couple qui a disparu avec elle.
Et cela, même des enfants et des proches aimants ne le remplacent pas. 
C'est un manque au quotidien, je le sens moralement et physiquement, avec une gène permanente comme une angoisse, même quand je vais correctement.
Comme un drogué, il faut apprendre à s'en passer, accepter que cela soit fini, qu'on n'y aura plus droit. Il ne s'agit pas de combler le vide, mais de vivre avec et de s'y habituer.
Cela laisse la vie bien fade et sans saveur, je m'active mais sans trouver de plaisir ni de joie dans ce que je fais.
A chaque fois,  il me manque la perspective de la retrouver et lui parler, de la voir arriver en face de moi, de sentir sa présence.
La solitude n'est plus la même. Nous avons souvent été séparés par des voyages, des absences, j'ai souvent voyagé professionnellement longtemps et seul dans des cadres impersonnels ou je me sentais seul. Mais c'était une solitude temporaire et je savais que je pouvais la rejoindre rapidement.
La solitude d'aujourd'hui est lourde, pesante, tenace, elle est comme un douleur sourde que l'on ressent moins quand on est très occupé mais qui revient dès que l'on est plus au calme et devient même terrible un dimanche soir ou quand on reste éveillé la nuit.
C'est aussi le sentiment d'avoir tout d'un coup laissé sa vie derrière soi.  Ma vie d'avant est partie avec elle, et ne reviendra pas, jamais, je le comprend maintenant et c'est très long et douloureux à accepter,  cela me pèse sur le moral chaque jour qui passe. Même mes enfants que j'adore ne suffisent pas à apporter un continuité.

Depuis quelques jours pourtant, je dors mieux, les médecins ont enfin trouvé semble-t-il une molécule qui me fait de l'effet.
Le fait de me réveiller reposé change ma vie après un an de nuits sans sommeil à me trainer et à ne tenir qu'avec la volonté.
Je me sens physiquement et intellectuellement beaucoup plus dynamique, moins déprimé aussi car le manque de sommeil joue toujours sur mon moral. Mais cela ne change rien au manque et à l'absence qui sont toujours autant là avec l'estomac noué.
Ma femme était malade depuis plus de 15 ans; professionnellement, j'ai traversé comme tout le monde des périodes difficiles où j'ai du faire mes choix en tenant compte de sa situation, et maintenant cela. Je ne plains pas mais cela fait beaucoup d'années à lutter et à tenir et je me sens las de me battre, de devoir toujours faire face, de tenir pour les autres.
J'aspire à un peu de sérénité pour reprendre des forces, retrouver une forme de joie et de légèreté , mais ce n'est pas pour tout de suite, cela risque encore d'être long. Il faut être patient, chercher un nouvel équilibre qui viendra peut être un jour, cultiver des plaisirs à ma portée, ne pas avoir trop d'attentes.
Une petite satisfaction, je peux maintenant penser à elle avec amour et affection sans sombrer dans la déprime. Je ne peux pas dire qu'elle me tient compagnie car c'est plutôt le vide qu'elle laisse que je ressens, mais au moins puis je penser à elle sans broyer ensuite du noir pendant des heures. Probablement une certaine forme de distance qui se crée.
Mais que c'est long, que c'est long !
Bien à vous.

Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: pscar13 le 12 mai 2019 à 20:16:08
chrisljb,

Je lis tes mots et je les comprends, manque, solitude, même si je sais très bien qu'elle ne reviendra pas, je n'arrive toujours pas à renoncer à ma vie d'avant.
Toutes ces années passées à deux, l'accompagnement dans le combat contre la maladie, quelle qu'elle soit, c'est épuisant, et tout s'arrête, on reste anéanti, pendant des mois.
Mais je lis aussi que tu arrives à avancer, a mieux dormir et retrouver un apaisement, c'est encourageant.
Continue à prendre bien soin de toi.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Boutchou le 12 mai 2019 à 20:45:11
Crisljb,
Je partage avec toi  tous ces difficiles moments sur ce chemin de souffrance
J ai écrit il y a 2 jours sur mon fil la detresse d'un quotidien  vide , ou le manque est une douleur constante ...
Un quotidien répétitif depuis des mois rythme par les larmes., les souvenirs , la vie d avant obsédante et enfuie ...
Et comme dit Bébé faisant référence aux film "un jour sans fin ...."un jour sans fin qui recommence chaque matin

 Si tu traverse des moments plus sereins  tu as peut être vers un peu d apaisement
Meme si rien ne peut s oublier ..

Amitiés
Boutchou
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Boutchou le 12 mai 2019 à 21:29:53
Pardon d avoir écorché ton pseudo  ,cher Chrisljb
Amitiés
Boutchou
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 14 mai 2019 à 00:46:55
Pscar13, Boutchou,

Merci pour vos messages de sympathie. Je suis allé voir vos fils, ce que je n avais pas fait jusque là, car on est souvent centre sur sa propre douleur.
On se sent un peu moins seul de lire vos récits et témoignages, un peu rassure aussi de lire des mots tres proches des nôtres et de mesurer que d autres traversent les mêmes tourments et interrogations.
C est une situation a laquelle rien ne nous avait préparés, nous sommes désarmés , perdus, notre existence est bouleversée, nos repères ont vole en éclat, la.tristesse et la nostalgie de notre vie passee nous mangent de l intérieur... comment rester lucide et continuer a regarderdevant soi dans ces conditions ?
Vous lire m'aide a prendre du recul, a me dire que ce désespoir est normal, que je ne réagis pas différemment d un autre.
Ce n est pas une consolation mais c est déjà un point d appui pour ne pas sombrer.
Je prends cela comme un encouragement a garder le cap même si je ne vois pas bien ou je vais. Je pense a mes filles qui ont besoin d un futur heureux, je pense a ma femme qui n aurait certainement pas aime que je baisse les bras et que je sois un poids pour nos filles. Cela ne me fabrique pas un avenir, mais cela me permet de repartir pour une nouvelle journée.
Bien amicalement.
C
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 09 juin 2019 à 12:28:35
Après tant de messages de tristesse et désespoir, j'espérais pouvoir écrire un jour quelque chose de positif à partager avec les membres de ce forum  qui se sentent écrasés par le chagrin.
J'appréhendais beaucoup ce mois de juin lourd en anniversaires et souvenirs, et je suis en train de le traverser sans trop de casse. Bien sûr, j'ai mes moments d'émotion et d'immense tristesse, mais j'arrive à me reprendre.
Je trouve que je vais un peu mieux, que j'ai progressé. Rien de mirobolant, je n'ai pas retrouvé la joie et la gaieté, cela reste dur avec des montagnes russes, mais je ne suis plus constamment anéanti, terrassé, paralysé par le chagrin et la douleur.
Ma femme me manque toujours autant, les moments qui me la rappellent, ceux que j'aurais tellement aimé partager avec elle, reviennent chaque jour, mais je parviens à y penser sans être submergé par l'émotion. Une certaine distance s'est installée, la douleur est toujours là mais comme partiellement anesthésiée, la blessure n'est plus à vif, elle commence à cicatriser.

Je continue le cours de ma vie, je fais ce que j'ai à faire, j'ai pris quelque décisions pour me réorganiser, déménager, je vois mes enfants,  mes amis, je pars en we, je rattrape l'énorme retard de paperasse accumulé depuis un an, je trie lentement mais régulièrement nos affaires. Tout cela sans joie particulière mais j'arrive à passer de bons moments, essentiellement quand je suis bien entouré par des proches. Je crois que mon entourage attend que je fasse des projets, mais je  ne suis pas encore capable d'envisager l'avenir.  Pour le moment je n'en ai pas, je ne le conçois même pas. Mes projets étaient liés à ma femme ou se faisaient avec elle, et sans elle  je n'arrive pas à me projeter, je vis avec un horizon très court, 3 à 4 mois à peine.

J'ai aussi remarqué que j'étais capable de retrouver de l'énergie pour entreprendre quelques actions. Rien de grandiose, mais là où je me trainais et me forçait, il m'arrive de me surprendre à m'y mettre avec énergie et détermination. Cela , c'est complètement nouveau. Bien sûr, je me réjouis de bien peu mais c'est un changement.

Tout cela ne suffit pas encore à être heureux, loin s'en faut, mais si je repense à l'état dans lequel j'étais en mars dernier, en janvier, je mesure le chemin parcouru. C'est un peu comme la randonnée en montagne, on a l'impression de se trainer, de peiner à chaque pas, qu'on ne va jamais y arriver, et tout d'un coup une vue dégagée permet de mesurer la distance parcourue, et elle n'est pas si ridicule. Tout au moins, dans ces moments, tout est bon à prendre.

Voilà, je sais à quel point la douleur peut paraître insurmontable, j'ai eu le sentiment de descendre de plus en plus bas sans aucune lueur d'espoir. Je ne vais pas encore bien, et ma vie reste un champ de ruines, mais je peux dire qu'il y a un point d'inflexion où l'on commence à aller moins mal. On ne s'en rend pas compte sur le moment;  imperceptiblement, on commence à remonter la pente et quelques mois plus tard on mesure un peu de progrès.

Je ne sais pas ce que le futur me réserve, cet avenir que je n'envisage pas, ma vie n'a pas encore de sens, mais à de brefs moments, je me surprends à avoir envie de me battre et me redresser, pour mes enfants, pour la mémoire de ma femme qui n'aurait pas aimé que je baisse les bras, pour mes amis qui sont si généreux.

Beaucoup d'inconnu encore devant moi, surement des mois et des années de convalescence, et une vie qui ne sera plus jamais comme avant.
Mais je voulais laisser sur ce forum cette petite lueur d'espoir , vous dire de tenir bon même si cela parait ne pas avoir de sens, de prendre soin de vous et vous appuyer sur vos proches.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 25 février 2020 à 13:21:23
Bonjour à tous,
Voici 9 mois que je n'étais pas revenu sur ce forum, la dernière fois c'était pour témoigner d'une petit lueur d'espoir.
Et je voudrais confirmer qu'il faut bien garder espoir , que l'on peut retrouver sinon le bonheur du moins un nouvel équilibre.
Si je n'ai rien écrit sur ce forum ces derniers mois, c'est abord parce que je n'en ai pas eu le temps, mais aussi parce que je remonte la pente progressivement et que j'en ai tout simplement moins besoin.
C'est le message que je voulais laisser en guise d'adieu, qu'il ne faut pas baisser les bras, et que l'on peut espérer aller mieux.

Voici 20 mois que ma femme est morte.
Oh, je ne dirai pas que j'ai retrouvé le bonheur, j'en suis encore loin, je ressens chaque jour l'absence de celle qui a été la femme de ma vie. Mais mon existence poursuit son cours, et je me suis maintenant habitué à vivre sans elle. Je conserve au fonds de moi une gène permanente, comme une douleur sourde que l'on sent moins dans la journée quand on est occupé, mais qui se manifeste dès que l'on est seul et moins actif, une douleur qui n'est pas insupportable, mais qui  peut aussi se réveiller à la moindre faiblesse ou au souvenir imprévu qui vous fait revivre soudainement une scène du passé.

Mais je regarde devant moi, j'ai engagé beaucoup de changements dans ma vie, j'essaye d'être présent au mieux pour mes enfants qui sont de jeunes adultes, j'ai une vie sociale assez dense, je me déplace beaucoup pour voir du monde, bref j'essaye de faire ce qu'il faut pour m'en sortir, et je vais mieux c'est incontestable. J'ai déménagé et changé de lieu de vie; avec mes filles, nous avons beaucoup trié et donné les affaires de ma femme, celles qu'elles qu'elles ne mettraient jamais et que nous ne voulions pas conserver juste pour le souvenir. Nous n'avons gardé que ce qui nous paraissait important.

Il me faudra encore du temps pour retrouver du goût à la vie. Je n'ai pas retrouvé le bonheur, je n'ai plus la même capacité à m'émerveiller ou m'enthousiasmer, simplement je vis normalement et j'ai appris à vivre seul.
Il y a quelques jours, ma fille a accouché d'une petite fille, ma première petite fille, et j'en suis évidemment ravie, et très heureux pour elle.
Tout le monde s'est réjoui pour moi et m'a dit "cela va changer ta vie". Bien sûr j'en suis très heureux, mais ce qui a vraiment changé ma vie, cela reste la perte de ma femme. Les expressions, qui partent d'une bonne intention comme "la vie est plus forte que tout", il faut savoir tourner la page et aller de l'avant" m'exaspèrent toujours.

J'ai bien l'intention de profiter encore de la vie, d'être à la hauteur pour  mes enfants et mes petits enfants à venir, de retrouver mes amis proches.
Mais je vais le faire à ma manière, comme je le peux, avec cette blessure qui ne parvient pas cicatriser complètement, mais qui ne m'empêche plus de vivre comme c'était le cas  il y a encore 6 ou 12 mois.
J'essaye de trouver un nouvel équilibre de vie, de parvenir à vivre sans ma femme, et à grappiller de petits bonheurs par ci par là à défaut d'être vraiment heureux. Etre heureux à nouveau, cela me parait encore lointain mais plus totalement exclu, peut-être un jour ...
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Cabochon le 25 février 2020 à 19:39:59
Bonjour Chrisljb,
Je te remercie pour ton message d'espoir.
Ton histoire est triste, et je suis contente de lire que tu vas mieux, même si je l'ai bien compris cela reste douloureux, c'est normal.
C'est aussi grâce à des témoignages comme le tien ce jour que je tiens le coup, car après 3 mois et demi de deuil de mon mari, j'ai l'impression que c'est impossible de sortir du désespoir, mais en te lisant cela me donne du courage.
Merci encore, et courage à toi pour la suite
Amicalement
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Chog le 25 février 2020 à 21:00:57
Bonsoir chrisljb,
Effectivement, comme le dit Cabochon, ça fait du bien de lire un message comme le tien et suis heureuse pour toi.
Le jour où je pourrais dire comme toi, que mon mari est m...t, je pense alors que j'aurais franchi un cap. Pour l'instant, j'emploie plutôt les termes suivants : parti, quitté, absent, disparu... Le mot est trop violent à tous niveaux pour moi.
Affectueusement,
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 11 avril 2020 à 00:03:43
Quand je lis les commentaires à mes messages, venant de personnes dont le deuil est plus récent que mien, je ne peux m'empêcher de revivre cette période terrible des premiers mois, de la 1ère année et au-delà,  et rétrospectivement de ressentir à nouveau le grand mal-être de cette période. Je comprends leur désarroi et leur désespoir.
Personne n'est préparé au deuil d'un très proche, pas plus que nous ne serions préparés à nous retrouver dans la violence , le bruit et la fureur d'un champ de bataille.
Les mois , les trimestres qui suivent le décès d'un conjoint aimé, ou d'un enfant, sont des temps de très grande souffrance, d'une tristesse sans fond, de révolte et de désespoir. On semble plonger sans fin toujours plus bas, tous nos repères et notre mode de vie ont volé en éclat, et on ne sait absolument plus où l'on va. Rien ne nous a préparé à cela, et il est très difficile de se situer, de comprendre l'évolution de notre état psychologique, d'identifier éventuellement des actions ou décisions à prendre.
Que m'arrive-t-il ? Vais-je "normalement " mal ? Est-ce normal de n'avoir de goût à rien ? de se sentir désespéré, sans énergie ni envie ? Est-ce normal de faire des rechutes ?
Autant de questions qui nous assaillent parce que nous sommes dans une situation inédite pour nous, avec une violence des sentiments que nous n'avions jamais connue auparavant.

Ce que je voudrais dire ici, c'est que j'ai trouvé très utile de comprendre le fonctionnement du deuil.  J'ai lu très vite le livre du Dr Fauré, en particulier celui sur le suicide d'un proche, plus ramassé, et puis je suis venu sur ce forum lire les témoignages d'autres endeuillés.
J'ai pu ainsi peu à peu prendre conscience de mon état ,  prendre un peu de recul sur mes émotions, et cela m'a aidé à trouver de la patience, à accepter d'aller mal, voire très, très mal.

Je ne vois pas d'autre voie que celle de la patience et de la résilience, du soutien des personnes avec lesquelles on se sent le plus proche, pour traverser ce long tunnel sinistre et glacial. Chacun doit chercher ce qui pourra lui donner un peu de force pour continuer, et se donner le temps de pouvoir aller mieux un jour. C'est long, c'est douloureux, comme une interminable convalescence.
Y a t-il une guérison complète un jour ?  Je ne sais pas répondre, j'aurais tendance aujourd'hui à dire que probablement pas. Pour la plupart d'entre nous, cela restera une blessure intérieure, une tristesse et une nostalgie dont nous ne parviendrons jamais à nous défaire.

Je ne sais pas si on peut aller bien un jour après un drame pareil, mais on peut aller mieux.  Si l'on  conserve une raison de vivre, des enfants, de bons amis, une passion, une activité collective, si l'on s'en retrouve une, on peut même reprendre le cours de sa vie. Aller bien, je ne sais pas, personnellement je n'y crois pas encore, mais aller mieux oui c'est possible avec le temps. C'est très triste à dire, mais le temps finit effectivement par atténuer les souvenirs anciens et nous en créer de nouveaux. C'est douloureux parce que l'on a l'impression de perdre une deuxième fois celui ou celle qui n'est plus là. Mais c'est nécessaire pour parvenir à aller mieux,

Ce que je veux dire ici, c'est donc qu'il est normal d'aller très mal, de ne pas sentir d'issue, de se sentir totalement perdu, d'avoir l'impression de ne jamais pouvoir s'en sortir, de rechuter constamment. Il faut tenir, accepter la patience, s'accrocher à tout ce qui peut nous aider, ne pas perdre l'espoir, ne pas non plus se laisser aller, parce qu'une amélioration est possible, et que l'on peut reprendre le cours d'une vie.

Récemment, on m'a demandé, et cela venait sûrement d'une bonne intention, si je parvenais à penser à ma femme décédée avec apaisement, ou même si le fait de penser à elle me faisait du bien. J'ai répondu brutalement que non. Je pense bien sûr à elle constamment, mais toujours avec tristesse et nostalgie, et franchement je n'attends pas à une amélioration sur ce plan là.
Mais j'ai repris le cours d'une vie qui n'est certes plus la même , mais je vais incontestablement mieux. Je parviens parfois à passer de bons moments, j'ai mes enfants, je suis bien entouré pa ma famille et mes amis, et j'ai des activités qui m'apportent beaucoup.

Je sais bien que pendant toute la phase la plus critique, on ne perçoit aucune lueur d'espoir, que c'est désespérant, que les témoignages de ceux qui vont mieux paraissent irréels,  inatteignables. C'est pourtant possible d'aller mieux.  J'espère que ceux qui liront ces lignes y verront une raison de se maintenir à flot, de trouver ,en eux et dans leur entourage, la patience et la résistance pour tenir dans la durée, et attendre ce moment où progressivement ils réaliseront qu'ils commencent à aller moins mal.

Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Chog le 11 avril 2020 à 11:08:25
J'ai lu ton histoire au fil de tes posts. C'est sûr tu as avancé sur le chemin. Je trouve que tu es bien aidé, tes enfants, tes amis fidèles, tes projets... C'est une chance. Il est évident que la place occupée par notre moitié est toujours vide, la vie a changé, notre quotidien, nos repères, nos petits délires à 2. Tout quoi. Et, le temps passe. Et, c'est vrai que le temps emporte un peu plus tous les jours la douleur lancinante avec lui en faisant émerger de jolis souvenirs. Et, parfois, on redégringole, parce que l'on souffre encore, c'est là, en nous. J'arrive à faire bien des choses aujourd'hui que je ne pensais être capable au début de mon deuil. Mais, c'est pas fini, j'ai tant de choses à régler encore. Alors, je prends le temps, n'est-ce pas notre meilleur allié ?
J'ai eu la chance, le privilège de vivre avec mon mari, nous étions amoureux pendant 33 ans.
Je ne sais pas trop que faire après cela. La barre est haute...
En attendant, j'avance, à mon rythme, je me fais plaisir dès que possible, j'essaie de ne pas me mettre trop de contraintes, de toutes les façons, je n'ai plus les mêmes priorités aujourd'hui, je ris fort parfois, je pleure en silence souvent, les amis... ne sont  pas comme je l'aurais espèré, bien moins présents, bien moins attentifs qu'ils ne le laissaient entendre et pourtant certains ont vécu le même drame que moi. J'essaie de me détacher de ce sentiment d'abandon en me créant un autre cercle d'amis, qui n'étaient pas amis de notre couple. J'ai un tas de projets sympas, mais je n'arrive pas à les mettre en forme, et avec ce confinement, c'est pas le meilleur moment.
Cela dit, le confinement, cet isolement de toute la population, me laisse penser que tous vivent quelque part cette même solitude, même si ce n'est que provisoire pour eux.
Moi, c'est dans mes rêves que je suis à nouveau 2.
Et voilà un nouveau jour, le soleil est là, les fleurs si belles, les oiseaux qui chantent, j'entends des voitures circuler, des voisins parler... La vie continue.
Et je continue, allé, je retourne à mes petites occupations, à la vie...
Affectueusement
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Cabochon le 11 avril 2020 à 21:26:31
Bonjour Chrisljb,
Je te remercie pour tes messages, car je sens bien que tu as sincèrement envie de nous aider via ton témoignage, et oui moi cela m'aide vraiment beaucoup! Je me sens, comme beaucoup ici, tellement mal...
Merci!
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 22 juin 2020 à 10:09:33
Période difficile avec une concentration de dates et d'évènements qui me font ressentir très fortement l'absence de ma femme.
Notre anniversaire de mariage il y a 3 semaines, cela aurait fait 30 ans et pourtant je nous voyait si jeunes, ma femme, elle, ne changera plus.
Mes enfants qui se sont tous retrouvés chez mois pour un we avec ma 1ère petite fille née depuis le décès de ma femme, pour certains je ne les avais pas vu depuis 3 mois, confinement oblige. WE joyeux et animé, mais j'avais l'absence de ma femme  à l'esprit en permanence, comme une injustice insupportable.
Voir ma fille ainée en jeune et jolie maman avec son bébé, et qui ne peut partager rien de tout cela avec sa maman.
Mon 1er passage depuis plus de 6 mois devant notre ancienne maison, le quartier où nous avions vécu 15 ans, et où ma femme est morte.
Mon retour en juin sur un  lieu de vacances que nous avons beaucoup pratiqué tous les 2 et où je n'étais que peu revenu.
Et puis Les 2  ans du décès de ma femme dans quelques jours...

Je vais mieux , j'ai repris le cours de ma vie du mieux que je peux, mais c'est toujours là  en moi, une vieille douleur prête à se réveiller et vous nouer la gorge.
Mon 3ème été sans elle, le 1er que j'organise vraiment seul. La 1ère année, j'avais été très entouré, l'été dernier nous avions fait un voyage avec mes enfants, cette année il faut s'organiser avec ce foutu Covid qui a tout compliqué.
Je vais incontestablement mieux , j'ai fait des projets, je m'occupe de moi et de mes enfants, je vois mes bons amis (quand ce maudit Covid n'est pas de la partie) , j'arrive à passer de bons moment, mais sans parvenir à retrouver l'insouciance, le plaisir et la joie de vivre que j'observe chez les autres.
Ce mois ci, et ce 1er été seul, sont un nouveau cap à passer , à surmonter pour aller un peu plus loin sur le chemin de l'amélioration.



Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 26 juin 2020 à 13:12:19
Bonjour,
Je ne suis pas dans le même état d'esprit, je refuse de baisser les bras et je reste convaincu qu'il faut garder espoir.

J'ai 55 ans, 3 filles qui ont perdu leur maman, dont 2 en couple, et une petite fille, et je vais tout faire pour retrouver une certaine joie de vivre et un peu d'insouciance, en tout cas je veux continuer à y croire. 
Je le dois pour mes filles qui ont besoin d'un père présent, optimiste et qui puisse être un soutien et une source d'énergie.
Et je suis sûr que c'est ce que ma femme aurait attendu de moi.
Le fait d'avoir des enfants rend les choses très claires et peut être plus simples  pour moi: il faut continuer à vivre. Depuis le suicide de ma femme, ma fille ainée s'est mariée, a eu un bebe, la seconde se marie en juillet,  et la 3ème a repris ses études après une interruption d'un an.

Je ne dis pas que c'est simple ni facile, ni que je vais y arriver, mais je ne veux pas accepter une deuxième fois la fatalité après celle de son décès brutal.
Dans les mois qui suivent le décès, on essaye de tenir , de garder le cap, de ne pas sombrer, il faut surtout tenir.
Et puis à un moment, on remonte un peu la pente, et là , en tout cas c'est ma conviction,  il faut s'accrocher au peu d'espoir que l'on peut avoir, essayer de le nourrir et de le faire grandir.
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: chrisljb le 24 juin 2021 à 23:24:42
Bonsoir à tous,
Je ne suis pas revenu sur ce forum depuis une éternité, j'en avais probablement moins besoin.
Demain cela fera 3 ans que j'ai perdu ma femme; cela parait toujours irréel et tellement injuste.
Malgré toute la peine et la tristesse, le temps fait progressivement son effet, la douleur est toujours là mais moins vive.
On est tristement obligé de constater que la vie continue: mes deux filles se sont mariées, l'une a eu un bébé, l'autre est enceinte, et la plus jeune a réussi à reprendre le cours de sa vie bouleversé par la perte de sa maman et le Covid, si compliqué pour les jeunes.
J'ai déménagé, essayé d'être le plus présent possible pour mes 3 filles, appris mon nouveau rôle de jeune grand père, beaucoup travaillé pour sauver ma petite entreprise de la tourmente du Covid, cultivé l'amitié de mes  bons amis, et pris soin de mes proches.
La crise du Covid est vraiment mal tombée et m'a bien plombé par l'isolement et les difficultés de boulot que cela m'a imposé , je n'avais pas besoin de cela, comme vous tous surement.
Je suis très triste de sentir ma femme s'éloigner doucement dans le passé , je pense évidemment à elle tous les jours mais de nouveaux souvenirs s'accumulent dont elle n'a pas été directement partie. Sa petite fille ne la connaitra jamais,  elle n'a pas été là pour les mariages de ses filles, elle ne verra pas ce nouvel appartement où je me suis installé pour fuir notre ancienne maison, et elle ne sera pas là cet été pour la naissance de sa deuxième petite fille.
L'essentiel est que notre famille n'a pas sombré, et que nos filles avancent bien dans la vie.
J'ai retrouvé un certain rythme de vie, très solitaire, beaucoup moins animé et joyeux qu'auparavant, mais je vis.
Ce n'est pas l'euphorie, quelque ressort en moi s'est brisé qui n'empêche de retrouver une vraie joie de vivre , même aux moments joyeux de notre vie de famille. Ce n'est plus non plus le désespoir qui m'a si longtemps accablé
Il y a quelques mois , j'ai retrouvé une amie d'enfance, elle aussi marquée par de graves difficultés personnelles et cela nous a rapproché. J'ai retrouvé l'immense plaisir de partager une complicité avec une femme charmante.
Nous vivons très loin l'un de l'autre, nous avons chacun notre vie dans nos pays respectifs et nous ne vivrons jamais ensemble , mais nous profitons de bons moments ensemble et nous pouvons partager ce que chacun de nous a vécu.
J'ai eu beaucoup de mal à faire entrer dans ma vie une autre femme, c'est encore difficile ,et je ne suis pas très à l'aise pour mes enfants. Mais j'ai la chance d'avoir rencontré quelqu'un de très compréhensif et respectueux. C'est une chance que je ne pouvais pas laisser passer.

On ne sort probablement jamais indemne d'un tel drame , mais on peut continuer sa vie et retrouver , à défaut du bonheur et de la joie de vivre, des satisfactions d'être ici sur terre. De toute façon, avec 3 enfants et deux petits enfants , je n'ai pas le choix. Pourtant comme beaucoup, je me suis demandé à quoi bon continuer, et j'ai même réfléchi sérieusement à comment abréger une existence qui ne m'apportait que peine et tristesse. Mais il est hors de question d'ajouter du drame au drame. Et je sais que ma femme aurait attendu de moi que je garde le cap et soit un père présent et un vrai soutien pour mes enfants.
Elle s'est suicidée dans un délire de trouble bipolaire, mais ce n'était pas du tout son tempérament, et elle s'est toujours battu contre sa maladie.

Alors oui je m'efforce de remonter la pente et de retrouver un certain équilibre, et je crois que c'est possible.
Je n'ai pas d'attentes trop élevées, je ne demande pas de retrouver le grand amour et la vie de famille heureuse que j'ai connus, je n'espère pas retrouver la légèreté et cette confiance absolue en l'avenir que j'avais auparavant.
Mais on peut encore vivre de son mieux et grappiller en bonne compagnie de sympathiques petits bonheurs par ci par là.
Que ce message d'espoir puisse encourager ceux d'entre vous sont encore dans ce  creux de la vague  dont je sors peu à peu.
Je vous souhaite à tous le meilleur.

Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Thérèse le 25 juin 2021 à 08:05:18
OH merci pour ce témoignage qui nous donne de l'espoir oui de trouver un apaisement et d'avancer, même si c'est différemment, dans nos vies.
Profite bien de ce que la vie t'offre encore.

Thérèse
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: qiguan le 25 juin 2021 à 14:02:05
Chris merci pour ce beau partage
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Meije05 le 25 juin 2021 à 23:28:27
Bonsoir,

merci effectivement pour ce retour d'expérience. Comme tu le dis : on ne ressort pas indemne d'un tel drame et même si on vit quelques instants de petits bonheurs ....quelque chose est à jamais cassé en nous.

Derrière les sourires, les moments de rires il y a aussi une profonde tristesse car la personne que nous aimions nous manquera toujours à chaque étape de notre vie jusqu'au bout de notre propre route....

Douces pensées à tous et toutes
Titre: Re : Qu'il est long le chemin après le suicide de son conjoint !
Posté par: Alice le 29 juin 2021 à 17:12:50
Nos amoureux, amoureuses voulaient, durant leur existence, nous rendre heureuses et heureux !
On ne souhaiterai pas que si nous disparaissions, ceux qui restent soient tristes et malheureux.. On ne peut même pas l'imaginer ! On voudrait qu'ils continuent, qu'ils soient heureux et qu'ils profitent d'être vivants !

C'est évident que c'est ce qu'il faut qu'on fasse ! Ce n'est pas si simple, mais c'est évident !

Si ça avait été l'inverse, je sais qu'il aurait été dévasté, tout comme moi. Mais il aurait eu du soutien, il avait beaucoup de force et il se serait battu pour notre fille! Ses amis et les miens auraient été présents comme ils l'ont été pour moi. Il se serait peut-être rapproché de ma meilleure amie, comme ça m'est arrivée avec son meilleur ami !
Est-ce que je lui en aurait voulu? Absolument pas !! Bien au contraire! Je n'aurai pas voulu le faire souffrir et j'aurai voulu son bonheur et celui de notre fille!!! Il aurait eu le droit de faire tout ce qui est bon pour lui !
Sortir, rire, faire la fête, fréquenter.. Voilà ce que j'aurai voulu pour lui !
Alors même si je ressasse, le manque et la tristesse sont très présents, je sais qu'il voudrait que je profite de la vie, et que j'arrête de penser à ce qu'il s'est passé !
Quand je vais sur sa tombe, je l'entends me dire "t'as rien de mieux à faire?" et je lui sourit en lui disant "tu as raison, je vais me promener.."

Voilà ce à quoi je me raccroche aujourd'hui...

Force et courage