Là, depuis 5 ans, et dans l'immédiat toujours, le deuil est le mien, et la mort est la sienne.
Le deuil est le mien
Et je l'assume, je le vis le supporte, l'intègre.
Je le soigne, je le partage, je l'apprivoise, je le déteste.
Je le contourne, je le berne, je l'oublie , je le retrouve, je l'utilise, je le jette et le reprends.
Il m'accompagne, m'engloutit, me soumet, me transcende, m'anéantit, me soulève, me transporte, m'écrase.
La maladie, sa mort, je ne l'accepte pas. Ni avec elle, ce qu'il a subi, la souffrance, la violence, l'incompréhension, la révolte, la rage , la défaite, l'injustice, l'humiliation.
Je ne pleure toujours pas pour moi, je pleure pour lui.
il a vécu, je l'ai aimé, il a souffert et sa souffrance m'a anéantie. Il est inadmissible, inacceptable de voir souffrir quelqu'un que l'on aime.
Alors deuil accompli ? Oui, sans doute. Je l'accomplis tous les jours. Jours après jour. Jusqu'à la fin des jours.
Sans plus de surprises désormais que ces vagues qui m'assaillent, que je connais et reconnais.
Qui me prouvent, après l'intensité de leur assaut, que je vis, que j'ai aimé et que j'aime toujours.
Rassurée.
Mais sa mort, la mort de cet être si vivant... La souffrance immonde dans sa chair et la désespérance dans son regard.
Hargne, colère, déchirement, fureur, cris et désespoir. Battements de mon coeur et de mes tempes. Souffle court.
En apnée.
Ce ne sont que des mots, une description, un "état des lieux ".
Je suis loin d'atteindre le moindre petit niveau de réflexion.
Je suis loin de pouvoir analyser, comprendre encore moins, même pas chercher.
J'ai toujours l'impression d'avoir traversé une guerre. D'être revenue dans un endroit que je ne reconnais plus.
Cerveau liquéfié, neurones grillés. Ma survie, mon exploration à petits pas de ces terres inconnues ont accaparé, phagocyté toutes mes capacités.
J'ai perdu mon insouciance. J'ai perdu ma joie.
Mais je vis, et là, dans la nature, dans l'amitié, dans les écrits, les rires et les chants, je souris vaillamment et je trouve parfois l'apaisement.
Nora