Oui, moi aussi je parle souvent à mon mari, je lui raconte, je lui demande son avis, parfois même je l'engueule, parfois aussi je lui confie nos enfants... ça dépend des circonstances et de mon humeur.
Pour ce qui est de ta décision de partir, bien entendu, toi seule sait ce que tu peux ou non supporter maintenant.
Quitter Bordeaux, là je te dis "oui". En effet, quand on n'est pas de "là" (j'entends de cette belle région pleine de pseudos "aristocrates" du vin), on n'est pas très important dans la vie des indigènes locaux. J'ai expérimenté... on devient très vite personne, l'intérêt pour toi est superficiel, au même titre que l'amitié...
Si rien ne te retient, un job, un appartement, alors autant que tu partes dans ta Normandie, où tu te sentiras entourée et moins seule.
Evidemment, je pense que si tu avais pu attendre un peu, le temps d'aller sur la tombe de ton mari autant qu'il te le fallait, à mon sens ça t'aurait confortée dans ton choix.... Pour ne pas culpabiliser, justement, de le laisser là.... Mais partir est de toute façon une bonne idée, si on n'a pas d'attache particulière. Resserrer les liens avec la famille, c'est réconfortant et rassurant. Ce n'est pas fuir que de poursuivre sa route au mieux pour soi. Ne te juge pas sévèrement.
Moi j'ai mis 3 ans avant de quitter Bordeaux, le temps d'encaisser, de retrouver mes forces, et de faire de notre quatuor un trio. Et même si la tombe de mon mari est loin de nous maintenant, je ne regrette pas mon choix. Nous lui rendons visite aussi souvent que possible, quand nous montons en Gironde... Je ne supportais plus le téléphone silencieux, l'indifférence de ceux qui savaient mais s'en fichaient, les portes fermées, les jugements, la connerie en somme...
Ici personne, hormis la famille de mon mari, ne me connaît, j'ai tout à construire mais je me sens libérée des regards de fausse compassion, des ragots, personne ne sait notre histoire, je suis juste la dame avec deux enfants.... point final.
Même si quitter les lieux où on a été heureux, est très très difficile, ça peut aussi faire partie de la reconstruction. Enfin, ça vaut pour certains.
Près de chez moi, à Bordeaux, un voisin a perdu son épouse peu de temps après la mort de mon mari. Pour lui, rien n'a changé, il vit dans sa maison, seul et quand on monte dans sa voiture, on entend la voix qui chante de son épouse, enregistrée sur DVD. Il vit là, dans ses souvenirs et la nostalgie de son épouse aimée et irremplaçable. Lui, il ne partira jamais, rien n'a bougé, le piano est à la même place, il s'investit dans la commune...
C'est vraiment selon chacun, selon ses obligations financières, professionnelles ou familiales. Il faut que tu fasses ce qui est le moins difficile pour toi, sans culpabiliser ni t'en vouloir. Où que tu sois, Jean Claude sera avec toi....
Je t'embrasse.
M.