Eh bien petitenenette, si après 2 mois les gens trouvent ça long ! Qu'en sera t'il après 18 mois... Même mes proches ne comprennent plus ma tristesse. Je sens qu'ils pensent que je dois réagir. Comme si l'on pouvait balayer d'un revers de main tant d'années de vie auprès de l'être aimé. Je suis une maman et une mamie. Mais je me souviens que lorsque mon grand-père est mort, il y a bien longtemps de cela, quelqu'un a dit à ma grand-père "vous avez tout perdu...". J'étais bien trop jeune pour comprendre à l'époque, mais je n'ai jamais oublié cette phrase qui prend tout son sens aujourd'hui. J'ai un fils adorable qui se préoccupe beaucoup de moi. Mais nos enfants ont leur vie. Ils ont leur propre famille, leurs enfants qu'ils doivent pousser. Même si leur chagrin reste immense, ils sont poussés par la vie et c'est bien normal. C'est ce que je veux plus que tout pour lui. J'ai d'autres enfants mais moins proches de moi.
Au début de mon deuil, j'étais dans l'action. Il me semblait que je devais faire "des choses". Ne pas me laisser aller surtout. Mon mari était très directif. C'est lui qui in fine prenait toujours les grandes décisions. Je me veux porteuse de sa mémoire et donc il n'aurait pas voulu que je me laisse aller. J'étais entourée aussi. C'est drôle mais avec les mois qui passent, je ne me sens plus tout ce courage. Je suis moins comprise, je l'ai été très vite... Et mi, il me semble que tout s'est passé hier.
Je ne veux pas te décourager petitenenette, mais ces 18 mois je les ai bu jusqu'à la lie. Il ne se passe pas un soir sans que je m'endorme sans larmes. Je lis beaucoup sur la vie après la mort et les expériences de mort imminentes. On peut y croire ou pas, avant j'aurais beaucoup ri si quelqu'un m'avait parlé de ça. Aujourd'hui il est essentiel pour moi de penser que je le retrouverai un jour. Qu'il viendra me chercher, m'accueillir. Cette pensée me fait tenir et aussi mon merveilleux fils et petit fils. Je n'ai jamais été crédule, jamais vu de voyante et tout ça. Jacques a été mon premier grand deuil. Bien sûr j'ai perdu mes parents, mais je n'avais pas beaucoup d'attache avec eux. Mes grands-parents sont morts alors que j'étais jeune. Comment imaginer que mon mari que je voyais si fort, si vert malgré ses 74 ans, si gai, si plein de projets... allait tomber ainsi, en un instant, comme une bulle de savon créant un véritable tsunami dans ma vie...
Jeudi j'étais au restaurant avec des amis, et pendant le temps du repas, une des personnes avec qui nous étions a reçu un appel. Son mari lui annonçait que le mari de sa meilleure amie était mort la nuit, en dormant. Elle était bouleversée évidemment. Elle les avais reçus à diner quelques jours auparavant, et il se trouve que le lendemain, il devait partir en vacances avec son épouse en Tunisie. Arrêt cardiaque, il avait 57 ans !
Une mort subite cardiaque, moi je ne savais même pas que cela touchait les adultes, entendu toujours parler de la mort subite du nourrisson. Maintenant je vois chaque femme de mon âge comme une veuve potentielle. Non seulement mon mari est mort, mais je suis morte, mon couple est mort, notre "nous" est mort ! J'ai du reprendre mon nom de naissance, tout ce que je fais je le fais seule. Et je sais qu'il en va de même pour vous. Je nous plains, que nous est-il donc arrivé pour que nous soyons ici à nous parler... Comme la vie est dure et injuste.