Hanaël... Je crois que, d'une certaine façon, je suis morte pleins de fois depuis que tu es parti... Alors je ne sais plus trop qui te parle maintenant... Flou total, absence de repères... Peu importe.
Tu me manques mon chéri... J'ai tellement de choses à te dire. Encore, et encore, et encore.
J'essaye de lutter pour recommencer à croire que j'ai encore le droit d'être ici, d'être en vie... 17 mois après ton départ...
Autour de moi, on me demande si j'ai des projets... des projets...
J'ai trahi notre projet une semaine avant que tu meures, en te disant que j'avais besoin de repartir un peu en Alsace, pour prendre du recul. Et je ne peux m'empêcher de penser que je ne saurai jamais à quel point j'ai participé à briser ton cœur.
J'avais besoin d'espace... Notre histoire a fait l'effet d'un raz de marée dans ma vie, et oui, j'ai eu peur (peur, peur, peur... qui me suit comme mon ombre).
Et bien de l'espace maintenant, je n'ai plus que ça.... De l'espace pour des projets inexistants...
J'imaginais m'éloigner un peu, pour reprendre pied. Après ce déménagement soudain, cette année passée auprès de toi, loin de tous mes repères... M'éloigner pour te revenir ensuite, plus apte à diriger ma vie, à poser mes limites pour ne pas me laisser avaler par "nous"... Je pourrais te dire que je suis désolée... Je le suis tellement parfois. Mais je voudrais ne pas l'être. Car il serait lâche de prétendre que je n'ai pas voulu m'éloigner de toi.
Je voudrais détruire cette culpabilité que tu ne peux plus ni apaiser, ni partager. Si je suis désolée, c'est à cause de ce jeu de miroir incessant qu'il y a eu entre nos peurs, encore elles. Ma peur de l'engagement et ta peur de l'abandon... Ce qui me désole, c'est que ce jeu de miroir ait pu te blesser au point de briser ton cœur. Littéralement. Ce qui me désole c'est l'idée que ta peur de me voir partir ait pu t'empêcher de voir à quel point je t'aime... Ce qui me désole, c'est de n'avoir pas su te rassurer...
Je ne suis pas amère, car je t'ai déjà pardonné des millions de fois, tout ce qui dans notre histoire m'a fait souffrir. Pour la souffrance que j'endure aujourd'hui, je te pardonne des milliards de fois. Ce n'est même pas une question de pardon... Je n'ai rien à te pardonner. Je ne t'en ai jamais voulu et ne t'en voudrai jamais de quoi que ce soit... Je t'aime tellement. Et je te vois Hanaël. C'est dans "Danse avec les Loups", non? Tu te rappelles? "Je te vois". Je te connais. Je connaissais tes failles, tes peurs, tes faiblesses... J'aurais simplement aimé mieux réussir à gérer les miennes pour te ménager, te protéger, prendre mieux soin de toi...
C'est moi qu'il faut que je parvienne à pardonner.
Objectivement, tout ça n'a pas de sens. C'est cette foutue cardiomyopathie qui t'a emporté... C'est juste que... ça ressemble tellement à un cauchemar... à un cercle infernal: j'ai peur de m'engager parce que je ne me sens pas à la hauteur, peur de te blesser... je ralentis car je sens bien que de ton côté, tu surinvestis notre couple à fond, avec cette peur de l'abandon en toile de fond... j'ai le réflexe de faire un pas en arrière et là, tu es blessé, mortellement... Comment ne pas être effleurée par l'idée que c'est moi qui t'ai blessé?! Comment accepter que je n'aurai pas de deuxième chance? Qu'il n'y a pas de retour en arrière possible?
Ma seule consolation c'est d'être restée près de toi, jusqu'au bout. De croire que tu as perçu tout ce que tu es et sera toujours pour moi dans ces derniers jours passés ensemble. Je me raccroche à ça... A ces instants magiques, volés au temps...
Aujourd'hui, quand on me parle de projets, de reconstruction... je suis tellement perdue Hanaël. Tous ces projets sans toi, ils m'apparaissent comme une punition pour les moments de doutes, d'incertitude dans nos projets communs... Comment recommencer à ériger des choses quand la vie m'a d'ores et déjà démontré qu'elle peut tout jeter à terre en quelques secondes? Comment croire encore au droit de faire des erreurs, quand on a le sentiment d'avoir payé aussi durement celles du passé?
J'aimerais qu'au moins, tu puisses être fier de moi. Me montrer moins lâche. Assumer davantage, mes choix, mes responsabilités. Tirer les leçons que tu aimerais me voir tirer de tout ça. Mais je me sens tellement ébranlée... Et je trouve ça, monstrueusement injuste. Ce qui nous arrive...
Je ne reviendrai plus sur cette histoire, cette décision de repartir en Alsace... Je dois apprendre à faire la paix avec ça. Il le faut. Je n'ai pas le choix. J'avais besoin de l'écrire. Mais je n'y reviendrai plus. Je refuse. Je REFUSE de laisser ça enfler, prendre toute la place, voler l'essentiel, le miel de notre histoire...
Je peux te le dire maintenant: je rêve de faire des projets, avec toi. J'en rêve oui. Ça ne sert plus à rien, c'est trop tard, et je m'en fous. J'en rêve, c'est tout. Je rêve des endroits qu'on pourrait visiter ensemble, de l'endroit où on pourrait vivre... Je continue à chercher des solutions à nos querelles, nos déséquilibres... Je continue d'en parler avec toi... Je te dis bonne nuit chaque soir, bonjour chaque matin... Je te dis je t'aime, dans ma tête, à voix basse, à haute voix... Je veux croire que tu m'entends...
Et les projets dans cette vie-ci, et bien, je ne sais pas.... survivre, c'est déjà bien.
Je t'aime Hanaël, mon Pouêt Pouêt, mon chéri, mon ange...