Bonjour,
Cela fait 8 mois maintenant que mon mari est décédé. Contrairement à d'autres, et sans que je sache pourquoi moi-même, je réponds favorablement à toutes les propositions et invitations.
J'ai donc accepté celle de ma soeur (elle-même ayant perdu son mari , il y a dix ans ) de partir effectuer un voyage solidaire au Bénin. Nous étions 6.
Je suis revenue hier soir et si cela vous intéresse, je vais ici vous raconter succintement ce voyage de 17 jours et mon état d'esprit pendant ce temps.
L'objectif de ce voyage était d'aller au plus près de la population, de vivre le plus souvent chez l'habitant et d'utiliser les transports en communs, de connaître et vivre dans les conditions des Béninois. Une aide aux villageois chez qui nous avons vécu a été apportée afin de les aider à construire un puits et acheter des vélos pour les enfants scolarisés ( l'école étant à plus de 4 km, certains villages étant même à 9 km de l'école), microcrédits etc .
C'est mon premier voyage en Afrique et j'y ai découvert des gens extrêmement gentils , chaleureux, ouverts malgré les conditions très précaires dans lesquelles ils vivent. Pour eux chaque jour est un défi pour subvenir à leurs besoins et le besoin de leur famille, les projets à court ou moyen terme sont impossibles le plus souvent. De quoi sera fait leur lendemain ?
Dans les transports en commun (dont l'un à 22 dans un minibus contenant 10 places pendant 9 heures!) nous avons pu discuter avec les passagers et faire des rencontres passionnantes, les Béninois que j'ai rencontrés sont curieux et libres dans leur expression. Bien sûr la vie étant très difficile , la "débrouille" est de rigueur...
Je suis partie en me demandant comment j'allais vivre loin d'ici et en quoi cela allait agir sur ma tristesse. J'ai eu un peu l'impression d'abandonner mon mari en partant ; mais finalement je pensais toujours à lui, aurait-il aimé ce voyage, il aurait réagi comme ci ou comme ça face à telle ou telle situation. Je l'imaginais avec nous, râlant lors des interminables discussions sur le prix du taxi ou discutant et questionnant les gens sur leur vie, je le voyais .... il était avec moi.
J'ai pris son appareil photo ( c'était lui qui aimait prendre des photos) et ai du me débrouiller pour en découvrir les fonctions que je ne connaissais pas. Il m'a beaucoup manqué et les conditions étant pour nous quand même assez difficiles, ne pas pouvoir poser la tête sur son épaule pour me reposer un peu, ne pas l'avoir à mes côtés le soir, les deux autres couples étaient très gentils et prêts à nous aider bien sûr mais ne pas entendre ces petites phrases "ça va ? tu veux que je t'aide ?"... la tendresse, et l'image de celles des autres qui nous renvoie à notre solitude, c'est difficile parfois (même si je suis contente de voir des couples heureux)
Des coups de blues, le soir où sous la moustiquaire je pleure en silence pendant des heures, c'est aussi cela.
Pour finir, j'ai vécu une expérience très forte, très enrichissante humainement, j'ai dans la tête le soleil, la chaleur écrasante, la beauté de ces enfants riants pieds nus dans la poussière et ces rencontres avec ces gens ouverts et chaleureux qui, simplement, dans la rue, viennent te poser des questions sur tes origines, te parlent de leur famille, de la tienne, te demandent où est ton mari et te disent paix à son âme.
Et mon mari est venu avec moi dans ce voyage, il était présent tout le temps, je parlais de lui, il était là.
Où qu'on soit, où qu'on aille, notre amour est et sera toujours avec nous. Nous pouvons vivre des expériences, ce n'est pas fuir , oublier, c'est continuer avec les hauts et les bas, prendre la vie avec ce qu'elle a de bon, souffrir de l'absence, ressentir profondément le manque de l'autre et regretter tant que notre amour n'ait pas eu le droit, lui, de profiter de ces moments si riches et de ces rencontres, cela semble si injuste, mais ne pas se les interdire pour autant
Voilà, excusez-moi d'avoir été un peu longue.
Je vous embrasse
Dominique