bonjour,

Mon conjoint qui est décidé d'un cancer le 28 septembre 2011, m'avait dit la même chose :" je voudrais que tu sois de nouveau heureuse que tu refasses ta vie ", il en avait aussi parler à ses amis. C'était l'amour de ma vie, et j'ai beaucoup beaucoup de mal à accepter sa mort.


Françoise

Bonsoir,


Cela fait un certain temps que je n'ai rien écrit.
Je ne crois pas au terme "refaire sa vie" car "refaire" c'est avant tout défaire ce qui a été donc effacer. Je ne veux rien effacer, je cherche au contraire à tout conserver. On continue sa vie et c'est comme si on avait une autre vie : la vie d'avant et la vie d'après.

Quelques semaines avant son décès, alors qu'il était encore lucide à ce moment-là, mon mari m'a dit qu'il voulait partir rapidement alors qu'il ne parlait jamais de sa mort. Je lui ai demandé pourquoi et il m'a répondu : "Parce que tu peux te "refaire"..." Le voilà encore ce terme. Je pense qu'il voulait dire qu'il savait que je lutterais notamment pour notre fils qui est mineur. Je ne savais pas s'il voulait dire aussi qu'il fallait que je le "remplace". J'ai été, je dois le dire, choquée par ses paroles parce qu'elles voulaient également dire pour moi qu'il pensait que j'allais peut-être l'oublier. Mais finalement, je ne crois pas. Il voulait qu'on est une autre vie en dehors de la maladie, de la chimio et du reste.
Il faut toujours continuer à vivre et c'est cela le plus dur car il n'y a plus de plaisir à cela. Je ne sais pas si vous partagez mon avis mais j'ai tendance à penser que nous avons encore des petits bonheurs mais que ceux-ci s'effacent très rapidement car ils se heurtent avec la réalité de l'absence. Ces bonheurs sont prisonniers du passé comme si notre esprit refusait de les vivre à plein temps. En fait, je ne sais pas trop quoi faire quand je me retrouve chez moi, il faudrait que je sois constamment occupée.

Je souhaite beaucoup de courage à chacun d'entre vous pour lutter à votre façon et trouver des ressources en vous.

Laurence

Bonsoir Yohann,
Oui, j'habite au Mans. Et toi ?

Il est mort il y a 1 mois et demi. La veille de mes 40 ans.
Je l'aime et je me reproche de ne pas lui avoir dis assez...
6 mois d'allers-retours hopital-maison.
6 mois intenses.
Je ne m'imagine pas vivre avec une autre personne.
Je n'imagine pas non plus vivre sans tendresse.
Celle de nos 2 bibous est immense, mais c'est à moi de les protéger.
Je veux qu'ils se sentent sécurisés.
Le jour de sa mort, quand je l'ai annoncée aux enfants, la petite (4 ans) a eu un reflexe de "meute" comme tu le dis Yohann.
Elle m'a dit (dans l'oreille) : "il faut que tu trouves un autre mari".
Une parole d'enfant qui me sera difficile à satisfaire.
Personne ne le remplacera. C'est au dessus de mes forces.
Le cauchemard est tout le temps.
La vie est un fardeau.
Je suis contente de vous lire.
Anne

Bonjour,

C'est bien juste l'Amour ne remplace pas l'Amour.
Avec ce que nous avons vécu et ce que nous avons construit nous devons continuer à aimer, certains d'amitiés, d'autres un autre Amour et d'autres encore par une aide quelconque... Mais nous devons continuer à donner de l'Amour, parce qu'il est en nous, sous différents visages.

Jacques ne voudrait jamais non plus que je reste seule et prostrée que je devienne amer ou vive dans les regrets.
Ils me disaient toujours"vit et jamais de regrets, ni de remords; c'est passé ça ne sert à rien"

une connaissance ayant perdu sa femme c'est remarié  1 an après. Ma belle-mère choquée dit à Jacques: "c'est inadmissible, c'est qu'il ne l'aimait pas."
Jacques furieux lui répond: "mais qu'est-ce qui te permet de juger?, ce n'est pas la même histoire, moi je suis content pour lui, ça se présentais comme ça, il a eu raison"

Donc, le fait de rencontrer et de revivre avec quelqu'un ne dépend que de moi, et je ne dois avoir aucune culpabilité mais voilà faut-il encore que j'en ai envie ou que je le veuille....

Je vous embrasse tous bien fort...

Pascale sa Louve
 

Pour ma part, je ne pense pas qu'on puisse "planifier" le bon moment pour rencontrer à nouveau quelqu'un.

Une amie de ma mère a mis 18 ans à s'autoriser un nouvel amour, ils vivent désormais ensemble et profitent des années qui leur reste.
Une amie à moi a mis 6 mois avant de rencontrer son nouveau mari et ils ont eu un bébé 2 ans plus tard.

Qui peut savoir à quel moment le coeur laisse l'absent s'en aller et s'ouvre à une nouvelle histoire. Qui peut juger du bon moment ? Même nous, veuves et veufs, nous ne pouvons ni juger ni comprendre les motivations de ceux qui font différemment de nous...

Ca ne remplace pas le/la disparu/e. C'est juste la vie qui continue.

L'amour ne se partage pas, il se multiplie...
Ce n'est pas parce que ça ne sera pas pareil qu'avant, que ça n'existera pas !

Je suis certaine que dans un parcours de vie, on peut superposer les couches d'amour et pourquoi pas, aimer plusieurs fois... Je crois que c'est une profonde aspiration des humains que nous sommes. Aimer et partager.
Et le temps fait qu'un jour, à nouveau, cette aspiration reprend ses droits en nous et à nouveau nous regardons vers l'avenir.
Bruno a raison quand il compare l'amour et la construction d'une maison. Ce que nous vivons tous dans le veuvage, nous construit. Certes, la maison aurait dû être différente si nos conjoints avaient vécu. Ca n'empêche pas que les murs peuvent continuer à monter sans eux. Comme dit Pascale, à un moment, il faut en avoir envie et le vouloir...

Et puis ça dépend de l'âge de chacun. On ne voit pas les choses de la même façon à 35 ans et à 50 !...

Moi, je regarde avec le plus grand respect ces gens comme moi, que le veuvage a arrêtés dans leur vol, et qui se risquent à aimer à nouveau, alors que la plaie est loin d'être refermée. Je trouve ça courageux. Pas facile. Je les envie même d'oser. Et je les comprends très très bien. Et je trouve ça positif et encourageant pour tous ceux qui sont dans la souffrance et qui ne veulent pas entendre, qu'un jour, eux aussi pourraient envisager à un nouvel avenir...

Haut les coeurs à tous et toutes. Je vous embrasse.
M.