Auteur Sujet: LILI563  (Lu 4270 fois)

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Hors ligne Marina Saboya

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LILI563
« le: 07 juin 2012 à 17:10:25 »
"LILI563 ce jour, 7 juin 2012

Je crois que je suis venue sur ce site dès le premier mois du deuil. Je suis infirmière et les différentes étapes d'Elisabeth Kubbler Ross je les connais. Cela m'a aidé de savoir où je me situais dans les différentes étapes. Cela fait 2 ans, le 18 juin et j'ai juste cette impression que je n'ai pas vécu pendant ces 2 ans. Je me suis refusée d'aller consulter un psy car pour moi la clé se trouve en nous. J'ai du boire 3 verres de champagne pour vous écrire et vous ouvrir mon coeur. Nous les infirmières, nous avons l'habitude de construire une carapace pour se préserver des émotions. Tout le monde me connait forte et pourtant dès le premier mois du décès je me suis inscrite sur un site de rencontre car la solitude me pesait. J'ai fait souffrir certains mecs parce que je ne parviens pas à oublier, je les ai comparé souvent à l'homme de ma vie. Evidemment cela se soldait par un échec après 6 mois.

Je ne sais pas si je m'en sortirai de cette situation mais une chose est sûre, la vie a un goût amer. J'ai 38 ans sans enfant, j'ai essayé de refaire ma vie avec des hommes qui avaient des enfants mais cela ne fonctionne pas. Mon horloge bio tourne et je m'aperçois que je fais du sur place. Je m'enferme dans mon travail. J'ai pourtant essayé des sites de groupe pour sortir sans arrière pensée mais en vain. J'en ai assez de me battre et ce jour je viens de me rendre à un enterrement d'une petite fille de 2 ans, je crois que c'est la goutte qui fait déborder le vase. Je sais que je passe du coq à l'âne mais voilà c'est mon ressenti du jour. Je ne parviens pas à envisager quelque chose de positive. J'ai lu qu'une personne a perdu son conjoint pour un abcès dentaire, moi c'est pour une pneumonie dont le médecin n'a pas voulu hospitalisé et 2 jours plus tard il est mort. Je crois que les décès inopinés sont toujours difficile à supporter. Nous étions un couple reconstitué et je n'ai pas su garder le contact ni avec sa fille, ni avec sa mère qui n'a pas hésité à me mettre à la porte de chez nous parce que nous n'avions rien fait pour légaliser notre union. Je me suis retrouvée seule et je suis toujours aussi seule. J'ai repris des soins à domicile pour me sauver et je crois que cela fonctionne un temps.  Voilà et je suis là, j'ai bien des amis nombreux , j'ai bien de la famille mais montrer cette faiblesse intérieure je ne peux pas et puis cela plombe l'ambiance. Je sais que c'est difficile car le couple d'amis avec qui nous sortions souvent, ne m'invite plus. Bref tous mes repères s'envolent et ma solitude me pèse de plus en plus. Même après 2 ans et plus ça va et pire c'est je trouve."



Bonjour Lili,

Ai-je bien lu, tu as perdu ton compagnon il y a 2 ans, tu es venu sur le forum le premier mois et c’est ton premier message ?

Et bien, n’est ce pas là le reflet parfait de ta situation d’aujourd’hui ?
Lire les messages des autres, et ne pas intervenir, ne pas te raconter aussi, te livrer.
Tu as du boire 3 verres de champagne pour enfin te lâcher un peu, anonymement, face à des étrangers.
Oui, ton métier – un magnifique métier – t’a appris à te protéger, mais là, ce n’est plus de la protection, c’est de l’isolement. Et il n’y a rien de pire que l’isolement quand on vient de perdre une partie de soi.

Je pense que tu as lu le libre de Ch.Fauré et/ou vu les vidéos, et dans nos échanges multiples les uns avec les autres, tu auras vu que partager sa douleur la calme un peu, l’apaise. Pourquoi ce silence ? Il était temps Lili que tu ouvres ton cœur. La clé est peut-être en toi, mais voilà des mois que tu la cherches sans aide aucune et que tu te détruis.  En tant qu’infirmière tu dois être confrontée à la peur, la douleur, le chagrin, et tu sais bien qu’un simple geste, un sourire ou un mot peut adoucir tout cela. Tu continus à donner aux autres mais caches ta propre douleur pour ne rien avoir à demander.
Pardonnes moi, mais tu vas dans le mur direct.

Ces étapes décrites par E.Kubbler Ross ou Ch.Fauré sont les étapes de la majorité mais pas forcément de tous. On les franchies avec plus ou moins de facilité, elles peuvent durer chez certains, plus longtemps, et on peut en sauter aussi et la vivre plus tard.

Non, Lili, la clé n’est pas seulement en toi, elle est dans ton entourage, ta famille en premier lieu que tu DOIS mettre au courant de ta souffrance refoulée et démultipliée. Comment peuvent t’ils te tendre la main, alors que tu ne leur montre pas ton immense besoin de communiquer.
Tes amis aussi, car en quelques lignes tu nous livres un portrait étrange et un peu en vrac, de toi : d’une grande conscience professionnelle, et d’une grande fragilité, portant un masque de froideur et en même temps de bonne vivante, absolument terrorisée par la solitude et faisant le vide autour de toi…
Je vois derrière tout cela une personne pleine de contradictions, mais qui enfin ose demander qu’on l’aide.

Ce forum a une importance énorme pour beaucoup d’entre nous. Nous y jetons nos pensées au fil des jours, nos questions, nos angoisses, personne ne porte de jugement sur personne, et tous ces échanges nous permettent d’avancer, car le vécu des uns peut aider les autres.

Tu as ta place parmi nous Lili, j’ouvre ce fil pour que tu puisses te raconter à nouveau, car le fil « lectures » n’est pas forcément celui où tu auras des réponses. Racontes ton histoire, et pas besoin de champagne. Allèges ta souffrance. En deux ans tu as surement passé des étapes mais maintenant il faut te reconstruire. La vie n’a pas le même gout pour tout le monde, mais la solidarité, la générosité et l’écoute peuvent la rendre moins amère.

A te lire Lili.


Marina








« Modifié: 04 décembre 2014 à 20:42:31 par Webmaster »
PiMa

Mieux vaut souffrir d'avoir aimé que de souffrir de n'avoir jamais aimé.

Caroline3

  • Invité
Re : LILI563
« Réponse #1 le: 07 juin 2012 à 18:17:48 »
Bonjour Lili

Je suis aussi très touchée par ton mot. Ça m'a aussi pris deux ans avant d'admettre que je ne pouvais pas m'en sortir toute seule et que oui, j'ai besoin des autres.

Mon mari est décédé du cancer du poumon: il a trop fumé... et trop bu... et tout, il a vécu à 10 000% et ce qu'il a vécu, et bien, c'est son choix de vie. Et d'en haut, je sais qu'il rigole: il a adoré sa vie.

Moi non plus, je ne vis plus depuis longtemps. Je me suis mise en arrêt de travail le mois passé (ou ça fait deux mois?) pour arrêter de courir et me regarder aller. Pour prendre les bonnes décisions. Pour vivre cette dépression latente. Pour m'effondrer. Parce que j'ai le devoir de le faire, sinon, je vivoterai ainsi des années et des années, à pleurer sur ce qui aurait pu être réaliser.

J'espère et je crois que c'est la meilleure décision de ma vie: prendre le temps de regarder pousser le gazon, le tondre et le regarder de nouveau pousser. Afin que dans mon corps, je puisse voir grandir une fleur, douce, aimante, bonne. Pour moi et pour ceux qui m'entourent.

Et arrêter aussi mes pensées amères.

Je t'embrasse et te souhaite d'écouter les vidéos offertes par le forum, elles révèlent ce que nous vivons. Comme à l'époque du développement des photos argentiques: par la lumière.

Et deux ans, c'est pas beaucoup, dans une vie.

Bon courage, Lili :)

Caroline
« Modifié: 07 juin 2012 à 19:09:42 par Caroline3 »

Princesse

  • Invité
Re : LILI563
« Réponse #2 le: 07 juin 2012 à 23:08:36 »
Comme toi Lili ça fait bientot 2 ans que j'ai perdu mon conjoint,  d'une rupture d'anévrisme. Il est parti se ballader en montagne et n'est jamais revenu. Comme toi, j'ai 37 ans et pas d'enfant. Famille recomposée, pas de lien de mariage ni même de Pacs officialisant notre union. Je continue cependant à voir ma belle fille. De voir ma belle-mère et c'est très précieux pour moi.

Comme toi je me suis accrochée à mon boulot comme un radeau en pleine tempête. Depuis le départ je viens sur ce site et lis les émotions des uns et des autres et les difficultées. Et je ne parle pas, mon mode de survie c'est d'être forte. Et de plus en plus je sens bien que ça ne peut pas continuer.
En revanche je vois un psy de façon très régulière et c'est un grand soutien. Il sait m'écouter, m'accueillir et me montrer les dusfonctionnements dans mon mode de communication.
J'en viens (de chez mon psy) et c'était le sujet encore ce soir. La guérison doit être intérieure c'est sure et c'est en partageant ce qu'on vit, qu'on vit vraiment.

C'est difficile surtout quand on a pas l'habitude  ... et c'est riche quand on y arrive ! .
Alors ce soir je m'ouvre aussi â vous Lilli, Pima, Yohann, Caroline, Sucy, Pascale, et tous...parce que c'est certain que sans vous je ne serai pas là où j'en suis. Vous m'avez accompagné depuis longtemps dans mon deuil et je vous en remercie. Puissent mes nouveaux échanges apportés aussi bien à d'autres qu'à moi.


Que le chemin est long et difficile
Que la vie est injuste
Et... Que certaines personnes sont bonnes même dans des moments tragiques

Douce nuit.
Sylvie

elo73

  • Invité
Re : LILI563
« Réponse #3 le: 07 juin 2012 à 23:51:12 »
Bonsoir à tous,

Moi j'ai 33 ans, pas d'enfant, pas marié et plus de belle-famille, juste les grands parents de Johan qui restent présents, ces amis, mes amis, nos amis et ma famille. Je me confie sur ce site depuis quelques mois, cela fait un peu moins de 5 mois que Johan est parti. J'ai parfois l'impression d'avoir mis mon coeur dans une boite pour que la douleur ne l'atteigne pas et puis parfois je craque, je m accorde de pleurer en dehors du regard des autres, de laisser place pendant 5 minutes à ma peine et puis je me ressaisi. J'ai aussi rencontré deux personnes de ce site avec qui je peux parler mais au fond je sais qu'il va me falloir aller voir le psy, je n'y échapperai pas.

Dans ma tête j'ai parfois l'impression que depuis 5 mois je vis une vie qui n'est pas la mienne comme si quelqu un m'avait emprunté mon corp, je vais me reveiller revenir dans ma maison et mon amour qui m'attend et qui me dirais "t'en a mis du temps", j'ai pas bu je vous jure :)

Voilà je réalise sans réaliser, je sais que le jour où je vais vraiment assimiler son départ, je vais partir dans le fin fond d'une solitude profonde et j'ai peur de perdre pied, de ne pas pouvoir supporter cette réalité, de ne plus être le petit soldat qui trouve des solutions à tout, qui est assez forte pour supporter les événements, aider les autres, faire son travail, mener sa vie... Bref supporter, tout supporter... vivre sans saveur, sans but, sans lui


Elodie

Caroline3

  • Invité
Re : LILI563
« Réponse #4 le: 08 juin 2012 à 04:45:04 »
Bonsoir Élodie et Sylvie,

C'est une étape nécessaire, cette force qui nous oblige à montrer qu'on est "semble" fort? Peut-être... en tout cas, c'est puissant, ça m'a aussi pris deux ans avant d'accepter de lâcher prise.

---

Sylvie, je suis aussi touchée par ton mot: plusieurs mois à lire, à suivre les histoires de tous...  et finalement, suite au post de Marina qui "quote" Lila, te voilà avec nous. Je t'accueille les bras ouverts, avec ta force, avec ta douleur, avec tout ce que tu es devenue depuis le départ de ton amoureux. Nous avons plusieurs points communs, mais le principal, c'est que nous espérons aller mieux, bien sûr.

Il faut que ça vienne de l'intérieur, que tu dis. C'est vrai, c'est ça aussi que j'espère. Je crois que c'est en lâchant prise, en laissant aller nos pleurs, quand ça se pointe, nonobstant le regard des autres, que nous y parviendrons.

Heureusement, on est pas toujours une "pure douleur", mais ça vient, ça va... nous t'écouterons avec encore plus d'attention, sachant que tu nous connais depuis si longtemps.

Amicalement, Caroline xx

Chris-ka

  • Invité
Re : LILI563
« Réponse #5 le: 08 juin 2012 à 09:16:23 »
Sylvie,

Tout comme Caroline, je t'accueille aujourd'hui parmi nous même si tu nous connais déjà à travers nos écrits ...

Alors raconte nous ..........

Amicalement,
Karine