Auteur Sujet: Jeune papa veuf  (Lu 7928 fois)

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Fathio

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Jeune papa veuf
« le: 10 décembre 2012 à 21:55:37 »
Bonsoir,
J'ai 38 ans, je vis en région parisienne. Ma femme est morte subitement, il y a bientot 5 mois, le 18 juillet 2012.
On s'est connu à 17 ans. Elle était tout pour moi, mon amie, mon amante, ma confidente, ma femme. On s'est construit ensemble, sans un accroc pendant plus de 21 ans. Elle est devenue aussi la mère de mes 2 filles, bientot 9 et 4 ans. Ce triste jour, je me suis senti comme amputé, comme physiquement amputé d'une partie de mon corps.
Elle était mon rayon de soleil, toujours gaie, et compréhensive pour tous. Moi qui suis plutôt ours, elle adorait être entourée, toujours à l'écoute de ses amis. L'ensemble de notre vie sociale, c'est à elle que je la dois.
Après l'horreur de la nouvelle, l'extrême douleur de l'annonce à nos filles, et l'organisation des obsèques, a suivi une période intense. Nous avions loué pour les vacances une grande maison à la mer, avec ma belle sœur, son mari et son fils, et ma belle mère. C'est ma femme qui avait choisi cette maison avec vue sur mer. Pour les enfants, nous avons décidé d'y aller quand même.  Cette période m'a permis de beaucoup discuter avec mes filles, qui vont plutôt bien, et surtout arrivent à parler librement de la mort de leur maman. Ce sont elles qui m'ont fait, et me font tenir. Les enfants sont forts, avec des ressources étonnantes.
C'est aussi la période, vous le savez, très chargée administrativement, avec tous les dossiers à remplir, mais aussi gérer pour mon boulot, préparer la rentrée des filles, trouver une nounou dans l'urgence...
Avec du recul, cette période, d'environ 3 mois, a été stressante, fatigante, épuisante, mais moralement "supportable" car on n'a pas le temps de cogiter.
Mais depuis toussaint, c'est devenu beaucoup plus dur. La période toussaint-fêtes de fin d'année est particulièrement dure : la météo maussade, les jours plus courts, la joie, plus ou moins forcée tout autour, sont autant de circonstances aggravantes de la solitude. La charge routinière quotidienne devient lourde. Mes filles sont tout pour moi, je les aime du plus profond du cœur, et pourtant je sens que j'ai besoin d'air.
Ma famille, celle de ma femme, mes amis ont été très présents, le sont toujours bien sur, mais la vie reprend, surtout pour les amis, et c'est normal.
Je me sens très seul. Cette situation est émotionnellement très complexe. Un mélange de colère, douleur, tristesse, abattement, mais aussi espoirs devant le sourire de mes filles, liberté devant cette situation nouvelle, soudaine, brutale de célibat. Je dois avouer, avec un fond de culpabilité, que je me surprends à être troublé par certaines amies, forcément proches, car souvent dans l'écoute et la confidence. Je n'ai pas franchi le pas. Je me sais fragile, ce besoin de tendresse et d'amour, peut me faire mal interpréter certaines attitudes, certains gestes des femmes, et pourtant je m'interroge, avec déjà l'envie de plaire, certainement pour combler un grand vide. L'humain n'est pas fait pour être seul, il a besoin de tendresse, d'être serré dans des bras chaleureux et compréhensifs, du soutien permanent et quotidien de quelqu'un.
J'aimerai toujours ma femme, et il sera difficile, voire impossible à une autre d'avoir autant d'importance pour moi. Pourtant, je pense parfois déjà à d'autres.
Et ça me torture...
Désolé pour ce premier message très (trop?) long. Merci de m'avoir lu.
Douce nuit, si possible...
« Modifié: 10 décembre 2012 à 22:03:15 par Fathio »

chrisam

  • Invité
Re : Jeune papa veuf
« Réponse #1 le: 10 décembre 2012 à 22:11:50 »
Bonjour Fathio,
Tu ne dois pas être désolé d'être long, tu avais envie de raconter, quoi de plus normal.
Tous ces sentiments, sont naturels, " normaux "   et bravo pour ta franchise de tes troubles vis à vis des femmes.

Devrait-il y avoir un délai à respecter ?
D'après ce que j'ai pu lire sur différents messages ici, mais cela dépend de chacun je suppose, une rencontre trop précoce, aussi anodine soit-elle, pourrait laisser un arrière goût, un sentiment de culpabilité qui te reviendrait comme un boomerang.

Mais, j'ai déjà lu beaucoup de messages, très peu parlent de cette question, peut-être que personne ne veut avouer qu'il a eu des rencontres pendant son deuil, supposition tout à fait gratuite.

Courage à toi mais aussi à tes enfants et rester bienveillant pour eux.




Corail

  • Invité
Re : Jeune papa veuf
« Réponse #2 le: 10 décembre 2012 à 22:13:07 »
Bonsoir Fathio,

Je suis touchée par ton histoire. Je me trouve toujours démunie pour trouver les mots, parce qu'il est difficile d'en trouver en de pareilles circonstances.

Je te comprends tout à fait dans tes ressentis, je passe par là également. Mon mari est décédé il y a 4 mois, à l'age de 37 ans et j'en ai 33. Notre fille a 5,5 mois.

Ce que tu indiques sur ta femme, je pourrais l'écrire sur mon mari.

Comme tu le dis si bien, les démarches administratives sont épuisantes (je suis toujours dedans...), la vie autour de nous continue, on sait ce que l'autre représentait pour nous et ce qu'il demeurera pour nous et pourtant, nous pouvons également penser à d'autres personnes...

Je me suis surprise à vivre ce genre de sentiments également, je pense que c'est peut-être parce que nous sommes jeunes et que nous ne pouvons concevoir de rester seul jusqu'à la fin de notre vie. Bien évidemment, ta femme, mon mari, resteront à jamais dans nos cœurs et comme tu le dis si bien,
Citer
il sera difficile, voire impossible à une autre d'avoir autant d'importance pour moi
.

Pour ma part, je prendrai les choses telles qu'elles arrivent. De toutes façons, je sais qu'il y a un gouffre entre ce que je peux penser par moment et la réalité. Parce qu'en réalité, bien évidemment, moi, je ne suis pas prête.

Je te souhaite en tt cas beaucoup de courage et comme tu le dis, nos enfants sont plein de ressources et heureusement qu'ils sont là pour nous faire aller de l'avant...

Douce nuit également à toi.


ROUBOU35

  • Invité
Re : Jeune papa veuf
« Réponse #3 le: 10 décembre 2012 à 22:41:54 »
Bonsoir
Tout ce que tu exprimes sur ces premiers mois de deuil correspond à ce que nous avons vécu pour la plupart , gérer les papiers et peut-être aussi être un peu dans le déni. Il est vrai aussi que les amis reprennent leur vie ensuite et que la solitude se fait plus pesante; parfois même, nous vivons dans une solitude intime alors que nous sommes entourés, mais nous sentons comme décalés.
En ce qui concerne l'attirance envers les femmes, cela semble normal et humain, tu es jeune. Certaines personnes sur le forum ont parlé de ce besoin, certaines en ont été déçues et blessées mais d'autres ont découvert un autre amour relativement vite, sans pour autant renier ou oublier leur conjoint; ce qui peut être délicat, ce sont des relations avec des amies proches, que tu risques peut-être de perdre ensuite comme amies (?) si tu as simplement une attirance et un besoin physique. Sinon , à mon avis , il n'y a pas de raison de te sentir coupable et tes filles seront aussi épanouies si elles sentent leur papa plus heureux.  Chaque situation est différente et le hasard de la vie fait parfois bien les choses; tu sembles très posé et réfléchi et donc sauras ce qui est bon pour toi et tes filles sans trop de précipitation ni tabou non plus. Et si tu peux te réserver des espaces de liberté pour respirer, cela t'aidera à y voir plus clair et pourquoi pas rencontrer de nouvelles personnes.
Bon courage
Dominique

Fathio

  • Invité
Re : Jeune papa veuf
« Réponse #4 le: 10 décembre 2012 à 23:21:24 »
Merci pour vos réponses.
Chrisam, Dominique, bien sur que la raison, ou une certaine morale judéo-chrétienne, qui a marqué mon éducation, même si je ne crois plus en grand chose, m'incite à la prudence. Le risque de la déception est grand, dans notre état plus que fragile, une déception peut être insurmontable. Le boomerang dont parle Chrisam.
Dominique, le besoin physique que je ressens n'est pas forcément sexuel, c'est plutôt un besoin de chaleur, de tendresse. Mais tu soulignes le risque de perdre une amie, si je cherchais à aller plus loin : c'est exactement ce qui m'inquiète le plus. Ces femmes, avec qui je me confie beaucoup plus facilement qu'avec mes amis hommes, je n'ai pas envie de les perdre comme amies... C'est très troublant. Je me pose beaucoup de questions.
Au final, je suivrais certainement mon instinct, comme dit Corail "prendre les choses telles qu'elles arrivent".
Dans notre situation, c'est l'instinct qui prend le dessus, un instinct animal, l'instinct de survie.
Pour l'instant, mon instinct ne m'a pas trompé. Dès l'annonce de la mort de ma femme, j'ai pensé à mes filles : comment leur annoncer, quoi faire pour les accompagner. Je me suis renseigné, lu des articles, des extraits de livres, imaginé des scénarios... Et finalement, devant elles, j'ai suivi cet instinct. Dans les jours, les semaines, les mois qui ont suivi, toujours cet instinct. Être là pour elles, assurer seul le quotidien, mais aussi les câlins, tout en gardant certaines règles de conduite et d'éducation, c'est l'instinct du loup qui parle : reste en vie, protége tes petits, et apprend leur a se défendre, malgré ce malheur qui les frappe..., Et quand je vois qu'elles ne vont pas si mal que ça, je me dit que j'ai bien fait.
Je me suis beaucoup occupé de mes filles, certainement pas assez de moi. Je suis lucide, je sais que c'est pour ça que je me pose toutes ces questions égoïstes. Mais je sais aussi que mes filles iront mal, si je suis trop mal. Pour elles, je dois penser à moi.
Mon analyse, après si peu de temps, c'est qu'un deuil pousse à être lucide sur soi même, à beaucoup réfléchir sur ses sentiments, ses émotions. Se mettre à nu, même si parfois on voit des trucs qui nous plaise pas... Mais parfois, il faut ouvrir une plaie pour la soigner...
Essayez de dormir...