Bonsoir,

Je vous écris parce que la douleur ne me quitte plus. J'ai l'impression d'être incomprise par mes amis qui ont repris leurs vies.
Mon mari est décédé brutalement en juin 2017, noyé à la piscine. Notre fille avait 2 mois.
Depuis je survis pour elle, je me rejouis de la voir grandir, mais le soir, seule, le masque tombe.
Je n'en peux plus de faire semblant. Je ne supporte plus les regards plein de compassion et de pitié des gens que je rencontre. J'ai l'impression de jouer un rôle en permanence et cela m'épuise.
J'ai commencé un nouveau travail et j'en suis ravie, mais je bloque complètement quand un ou une collègue me parle comme si mon mari était là. Personne ne sait que je suis veuve à part la direction, et je n'ose pas l'annoncer de peur de me retrouver face aux regards larmoyants de mes collègues. Comment faites vous ? J'ai l'impression d'agresser les gens quand je dis qu'il est mort quand notre fille avait 2 mois.
Il me manque à ne plus en pouvoir, et ce vide abyssal que je ressens au fond de mes tripes est en train de m'épuiser même si je me bats tous les jours pour montrer à ma fille que la vie est belle, et que nous arrivons à avoir une vie joyeuse et légère comme doit l'être celle d'un enfant! Elle réclame régulièrement son papa et même si je lui dis qu'il est dans notre coeur et qu'elle sait qu'il est décédé, j'improvise, avec ma petite de 20 mois.
J'ai besoin de parler avec des gens qui vivent la meme chose que moi, en espérant que vous me lisiez.

Bonne soirée.

Juliette

Merci.

Douce nuit.

Bonjour,

Malheureusement, le mot «  veuve » fait peur car il renvoie à notre propre mortalité.Les gens sont mal à l’aise. Mes collègues, au bout de presque 10 mois, font comme si rien ne s’était  passé  et c’est tout aussi bien...au travail, la vie me semble normale.
J’ai intégré, en septembre , un groupe de randonneurs, loin de chez moi. Personne au courant, jusqu’au jour: «  et votre mari? Amenez- le ! »... je me suis décomposée...tout le monde m’a fixé et j’ai dû m’éloigner en larmes...là, je l’ai dit. Il y a eu un grand moment de gêne, puis un membre du groupe m’a pris dans ses bras. En quelques minutes, tout le monde l’a su. Maintenant, ils font attention. C’est certainement mieux ainsi.. Au départ, je ne voulais pas le dire, je ne voulais pas faire pitié, mais maintenant, je sais que cela n’est pas une solution.. .

Affectueusement.Bibou

Bonjour Juliette,

Je te comprends tellement.

J'ai perdu mon conjoint il y a maintenant 10 mois et le manque est toujours là. J'ai fini par accepter que ce sera ainsi pendant des années encore et de toute façon ma vie ne sera jamais plus la même. J'étais enceinte de notre petit garçon lorsqu'il est décédé. Et je dois bien avouer que c'est difficile pour moi de continuer seule avec mes 2 enfants. J'essaie de faire comme toi et de transmettre une certaine joie de vivre à mes deux loulous mais au fond de moi, je suis vide.
 Camille n'a que 4 mois mais je me demande tellement comment il va avancer dans la vie sans papa? Mon grand lui n'arrive plus à s'endormir sans moi et me dit qu'il ne se sent pas en sécurité dans la maison.

J'aurai aimé changer de travail comme toi pour ne pas être stigmatisée. Mais pour le moment je ne trouve rien d'autre et puis je me dis que j'ai besoin d'un peu de stabilité. En tout cas, lorsque j'aurai enfin accès à un nouvel emploi neutre,  je ne dirai pas que mon conjoint est décédé. Je ne veux plus être regardée comme ça.

Comme disait hub84, j'utilise bcp l'humour pour parler d'Emilien avec mes collègues ou amies mais j'essaie de ne pas trop leur en parler tt court pour ne pas les embêter. Nous, nous avons vécu un tsunami mais pas eux et ils ne peuvent pas se mettre a notre place.

Je t'envoie tte mon amitié ainsi qu'à ta petite.