Bonjour Muriel,
Effectivement la situation n'était pas tout à fait la même pour nous 2. Peut être que le fait que vous étiez séparé entre en compte dans la colère que tu ressens? Après chaque histoire est différente. Pour ma part, je l'aime (oui, c'est trop dur de le dire au passé) plus que tout. J'aurais pu accepter tellement de choses de lui. Je crois que même s'il m'avait trompé (ce qui n'est pas arrivé), je n'aurai pas pu le quitter. Il était tout pour moi. Il m'a apporté du bonheur, beaucoup d'amour, de beaux enfants et m'a donné confiance en moi.
La colère fait aussi partie des sentiments que je ressens, mais elle est tournée vers ses parents. Pour moi, ils sont au moins en partie responsable de son mal être. Et plus je cherche, plus j'apprends des choses, plus je me souviens de certaines annecdotes dont Julien m'avait parlé qui confortent mon ressenti. Des choses qui auraient pu être évitées ou du moins qui auraient dû être vues depuis si longtemps. Et aujourd'hui, les filles, le bébé à venir et moi, on paye tout ça. Tout notre bonheur est parti en un rien de temps et ça c'est dur à encaisser.
Je t'avoue qu'avant aussi j'avais le sentiment que c'était un acte égoïste. Mais ça c'était avant que ça me tombe dessus, avant que Julien fasse ce geste. Bien-sûr il n'était pas parfait et avait des défauts mais en aucun cas il n'était égoïste. Au contraire, il pensait trop aux autres, il se souciait avec excès de leurs problèmes, et ça ne l'a sûrement pas aidé. Il prenait tout trop à cœur. Je le savais mais ne pensais à aucun moment que ça le faisait autant souffrir. Et puis je suis persuadée qu'il ne voulait pas mourir, qu'il ne voulait pas nous quitter. C'est sa souffrance qu'il ne pouvait plus supporter et ce matin là du 6 novembre, une pulsion à fait que la souffrance a pris le dessus. Une pulsion lourde de conséquences pour tout l'entourage, mais aussi pour lui qui va rater tellement de choses auprès de ses enfants, qui ne verra pas son bébé. Ça ça me fait très mal, pour mes enfants mais aussi pour lui.
Je suis aussi dégoûtée de me dire que certaines personnes en parle pendant des années sans jamais passer à l'acte, que d'autres font des tentatives mais dans le but de "se rater" et qu'enfin, d'autres finissent par y parvenir mais après des années de dépression alors que dans mon cas, il en a juste parlé quelques heures avant, comme quoi il y avait pensé mais qu'il ne voulait pas "ne plus nous voir" et pourtant ça a été radical ! Pourquoi lui il ne s'est pas râté ?
En tout cas si mon "récit" peut aider quelqu'un d'autre que moi, tant mieux. A la base, il me permet de "sortir" les émotions hors de moi, mais je me rends compte aussi que c'est important de lire les autres qui passe où sont passés par les mêmes phases. Chacun évolue à son rythme mais beaucoup de points communs et surtout on se comprend !
Je pense que tu as raison de ne pas te cacher pour pleurer devant tes enfants. J'essaie quand même de limiter mes larmes devant les filles, mais je me dis que c'était important qu'elles comprennent que l'on peut et que l'on a le droit d'être triste et quelque soit l'âge.
Patricia, que te dire à part te souhaiter un peu de répit dans cette douleur qui lance à chaque battement de cœur; en tout cas, c'est ce que je ressentais le premier mois. Et depuis c'est un peu différent car mon émotionnel ne réalise pas où ne veux pas réaliser. Il continue de me laisser espérer qu'il va revenir ce qui fait que la douleur me lance moins. Elle est toujours bien présente mais comme j'ai l'impression que ça n'est pas possible, elle est différente. L'hypnose m'avait aussi fait du bien; ça m'a permis de me libérer en partie physiquement, de mieux respirer et de diminuer petit à petit cette boule au dessus du ventre. Maintenant, j'ai plutôt des "crises" d'angoisse. Je fais de l'hypotension depuis le début de ma grossesse et autant dire que celà n'a rien arrangé. Mercredi soir par exemple, je venais pourtant de me coucher mais avait beaucoup pleuré juste avant et là j'ai senti venir la chute de tension. Ce qui m'a encore plus angoissée. Et puis je me suis dit respire, tout va bien se passer, lève tes jambes... Et heureusement la crise est passée. Maintenant j'avoue que j'ai peur pour moi, peur qu'il m'arrive quelque chose, peur de laisser mes enfants orphelins.
Et oui, comme tu le dis, l'amour n'est pas suffisant pour les sauver. L'amour que l'on croyait plus fort que tout, ne fait pas le poids. C'est une vrai remise en question pour moi. Qu'est ce que je vaut aujourd'hui ? Est ce que je méritais ce bonheur ? Et qui suis-je maintenant ? Une maman, ça c'est sûr. Je sais que je ne serai plus jamais la même et ça m'embête car je nous aimais comme nous étions.
A vous les filles, et à tous les autres qui liront, je vous souhaite un peu d'amour auprès de vos proches, auprès de gens en qui vous pouvez avoir confiance et qui vous soutiennent pour ce Noël qui sera malgré tout très douloureux. Enfin, pour moi ce sera le premier sans lui, et le premier d'une longue série...