Le chemin du deuil est un chemin long, difficile, éprouvant, exigeant, sans concession possible, sans compromis non plus. Il nous faut l'emprunter alors que nous ne nous y reconnaissons pas, alors que nous refusons de nous y reconnaître, alors que nous ne voulons pas croire que cela nous arrive à nous, alors que nous refusons de croire que l'être essentiel à notre vie nous a été ravi.
Combien de jours, combien de nuits ai-je attendu son retour ? Cette attente cruelle, cette attente impitoyable qui signait ma folie à venir. Cette attente qui me faisait être dans un écartèlement sismique entre mon passé et cet avenir infernal. Cette dichotomie de l'être qui anéantissait toute velléité, toute tentative, toute vie.
Je crois qu'il faut passer par cet anéantissement-là pour trouver une force, une « raison » au ne pas mourir, à lui survivre.
J'ai accepté de revisiter toutes mes certitudes passées, accepter de revisiter mon être au monde, et ce qui constituait ses fondamentaux. Je vais paraître pompeuse mais son Fondamental a été l'Amour avec un grand A, celui qui m'a guidée, celui qui m'a fait tenir debout, celui qui m'a permis de rencontrer mon homme, cette rencontre solaire qui a fait éclore cet amour puissant entre nous.
Voilà mon guide, voilà ma force. La mort aurait-elle raison de cet Amour-là, de cet Amour qui m'a tissée, m'a abreuvée toutes ces années durant ?
Qu'est-ce qui est plus fort ? Cet amour qui siège encore en moi, que je sens indestructible ou ce semblant de vie (je le dis sans mépris aucun) que vivent ceux qui n'ont pas vécu ce séisme qui nous oblige à chercher notre essentiel à la vie. Le deuil est pour moi mon épreuve initiatique, ma renaissance dans un nouvel être au monde où mon homme est et sera parce que par notre amour, par sa mort, il m'y a conduite.
Pierre fait désormais et à jamais partie de ce nouveau moi lavé du superflu, du superficiel, qui se cherche encore, qui chemine et cheminera encore sa vie durant.
Tendrement vôtre.