FORUM "LES MOTS DU DEUIL"

Comprendre et vivre son deuil => Vivre le deuil de son conjoint => Discussion démarrée par: piera le 13 décembre 2015 à 19:06:59

Titre: je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 13 décembre 2015 à 19:06:59
Chers compagnons de route, je reviens vers vous après ces mois de silence et de retraite du forum mais non de présence silencieuse à vos côtés dans  vos souffrances et vos interrogations. voilà je vous livre mon cheminement parce que je pense que les échanges nous portent un peu dans notre déroute.
Est-ce que le deuil passe ? Question récurrente.
Que veut dire le deuil passe ?
Cela voudrait-il dire que le deuil passe ? Qu'un jour cette douleur qui taraude, qui sourd en nous, s'arrête un jour ?
Et quand on vous pose cette question de manière affirmative à moins de 6 mois de votre séisme, alors c'est passé ?
Cela voudrait-il dire qu'il y aurait un temps pour le deuil ? Un temps déterminé ? Un temps social défini, communément accordé , consenti? Un temps politiquement correct du deuil ?
Pourquoi cet écran d'incommunicabilité avec les autres ?
Les « autres » parlent du deuil comme on parle souvent de tout, avec des  présupposés, des a priori, des certitudes qui  rendent sourds, étanches au vécu de l'autre. On a lu, entendu des histoires de deuil, on a soi-même vécu des deuils alors on croit savoir de quoi on parle. Mais là, je parle du deuil sismique, du deuil qui fend, du deuil qui tue, du deuil qui fait tabula rasa de notre vie, de notre moi.
Du deuil qui remet TOUT en question et bien je pense aujourd'hui que seuls ceux qui ont vécu ce séisme-là peuvent accéder à  cette compréhension du deuil. Compréhension veut dire prendre avec soi et c'est bien ce que nous faisons, prendre avec nous et parfois par devers nous cette douleur de la mort de l'aimé, cette douleur de notre vie sans lui.
Le deuil moi me traverse, me transperce, me dépouille de toute ma construction avec l'autre, de toute une partition de la vie qui se jouait à deux et qui désormais se joue seul et ainsi détonne. Chaque note se rejoue à moi, désormais dans une mélodie bancale  et discordante. Parfois concentrée dans mes tâches, impliquée dans une activité, la mélodie me traverse dans toute son harmonie, sa puissance et sa beauté me donnant ainsi l'illusion, un instant, de ma vie antérieure et tout à coup une note discordante s'impose, électrique pour me tirer de ce mirage et me donner en pâture au marasme de ma vie sans l'autre.

Mais comment prendre avec soi cette douleur quand précisément le deuil est un état dont vous êtes tout à la fois sujet et objet  livré en pâture à cet absurde désormais tangible, nouveau compagnon de vos jours ? Quand précisément ce deuil vous dépossède de votre moi construit, savamment, avec cet autre qui désormais n'est plus là pour l'harmoniser, le valoriser, le faire advenir et lui donner sa raison d'être. C'est un compagnon exigeant qui ne manque pas de se rappeler à vous dans chaque geste apparemment anodin de votre quotidien. Du réveil au coucher, il vous harcèle, vous perce à jour dans vos efforts, dans vos vaines tentatives pour essayer de faire avec. Il vous réfléchit votre image vacillante, chancelante de pantin désarticulé qui se meut alors que le moteur intérieur est mort dans cette mort-là.
La mort de Pierre a rendu toutes mes certitudes mouvantes et inopérantes. Toutes ces certitudes qui reposaient sur une vie faite de sens dans tous les sens du terme. Il était un de mes points d'ancrage, mon attache la plus tendre et la plus solide avec la vie. Je vivais au travers de son regard. Oui, son regard m'insufflait ma raison d'être au monde. Ses bras me protégeaient de l'absurde. Son corps était mon refuge et sa pensée une douce évasion.
Les amarres sont larguées et je tangue tel un bateau ivre sans gouvernail aucun et dont le pilote automatique ignore le cap. Je suis essorée par cette tempête intérieure qui ne ménage aucun effort pour me faire sombrer. Elle me laisse pantoise, exsangue sur des rivages dont je ne reconnais plus ni le paysage ni les règles et les codes. Ils ont volé en éclat et chaque éclat me blesse immanquablement, irrémédiablement chaque jour, un peu plus. Je suis vulnérablement nue, offerte en pâture à l'absurde de ma vie. Je suis écartelée entre des souvenirs qui se bousculent, souvenirs doux d'une vie amoureuse délicieuse faite de tendresse et de sensualité, souvenirs ravageurs aujourd'hui devant l'absence de ces échanges et la force de ce désir qui n'est pas mort à sa mort. Dialogue, discussion qui se poursuivent dans le silence et dont l'écho me rapporte l'absence et le vide.
Le deuil c'est ça aussi, savoir accueillir cette détresse-là qui vous neutralise telle une tempête intérieure mais aussi ces accalmies où la vie reprend son cours dans cette nouvelle partition d'une  vie désormais seul mais où l'écho de l'autre trouve écho en nous parce que sa mort n'a pas tari cet amour qui n'est pas mort à sa mort et qui peut encore se vivre dans un dialogue silencieux et dans une écoute et une réception attentives. Je suis désormais seul réceptacle de cet amour vivant encore après sa mort et je sens  que sa présence se fait jour dans des nuances insoupçonnées et qui m'apportent un peu de baume en constatant que je peux tricoter l'absence à la présence par la force du lien qui demeure, au-delà de la mort biologique.
Et dans ces moments de retrouvailles avec la vie, je sens que la présence de mon homme m'habite toujours un peu plus chaque jour, subtilement, profondément comme s'il trouvait en moi une terre d'asile où peut résider encore notre amour.
Mon homme est mort et je le porte, triste et magnifique trophée de notre amour, dans un amour encore à devenir.
Voilà, je suis une femme en deuil, tout « simplement », et je n'accepte aucun autre qualificatif à mon état parce que précisément le deuil est loin d'être simple et se caractérise justement par cette altération de notre « être » au monde et de notre moi propre. Aussi, j'aimerai tout simplement qu'on entende et qu'on reconnaisse cet état qui ne se laisse  réduire à aucun autre qualificatif ou analogie facile dans l'illusion  ou de le comprendre ou de le circonscrire.
Je vous embrasse tous tendrement.


 

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 13 décembre 2015 à 20:23:22
Je suis en deuil , en deuil d'enfant tout simplement ...autre deuil donc..mais une grande part de ce que tu écris me parle férocement de ce deuil...
"là, je parle du deuil sismique, du deuil qui fend, du deuil qui tue, du deuil qui fait tabula rasa de notre vie, de notre moi. "
I l y a tant de points semblables dans ces deuils d'un essentiel à nos vies...qu'il soit fils ou époux...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: fleurdecoton le 13 décembre 2015 à 20:34:43
@pierra

Avouer cette vérité " suis en deuil" ... "Un deuil sismique"......."Un deuil qui fend" ..... "La perte du moi" ....  "Je suis en deuil ".... Non ce n'est pas une maladie , non cela ne se traite pas par des pilules , il ne s'inscrit pas non plus dans un temps précis ..... Je suis en deuil ....... Ton récit me parle  énormément....

Quelle vérité ... Merci
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: souci le 13 décembre 2015 à 21:01:58

   " L'écriture a ceci de mystérieux qu'elle parle" , dixit Paul Valéry.

    L'écriture parle, elle chante, parfois, aussi ...

    Elle chante la voix des larmes et des rires, la voix des songes et des visages ...

    Elle dit et souplement elle danse, aussi, autour des mots autour du sens et ...

    Elle flotte comme une flamme, elle dit sans toujours dire, elle se tait sans arrêter le fil du silence ...

    Calligraphie modeste et têtue, dépôt des armes ... à jamais.

    JE SUIS UNE FEMME EN DEUIL.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 13 décembre 2015 à 23:23:25
Oui Eva Luna, Fleurdecoton, Souci, nous vivons des deuils qui nous ont désormais basculés dans une autre dimension de la vie; compagnon de vie, enfant, neveu, ils nous font toucher du doigt cet invisible, cet innommable  qui ne se laisse pas définir mais qui se vit seulement et nous transforme à tout jamais.
Je suis devenue étanche face à certains aléas de la vie qui pouvaient m'atteindre avant. Je fais dorénavant le tri sans état d'âme entre le superflu et l'essentiel. Je ne m'encombre plus de faux problèmes ni de relations bancales. Cela avait déjà commencé avec l'annonce de la maladie.
Mais maintenant, je me sens étonnamment, paradoxalement plus forte, je n'ai plus peur. Je ne tremble plus à l'idée de demain, à l'idée d'une nouvelle souffrance que lui distillerait sa maladie, d'une nouvelle torture morale que lui infligera son épreuve. Je ne tremble plus de le voir seul devant sa mort inéluctable. Je ne tremble plus de mon impuissance à le protéger et à partager cette épreuve qui ne peut se vivre que seul. Je ne tremble plus devant ma vie sans lui. J'y suis.
La maladie est morte à sa mort, et sa mort me restitue  Pierre. Je peux enfin le penser sereinement même si c'est dans l'immense frustration de son absence. Je peux ressentir enfin sa douce présence, son regard indulgent et tendre qui me soutient et me réconforte.
Je n'ai pas peur de la solitude, d'ailleurs je ne me sens pas seule, aussi étonnant que cela puisse paraître. Et je suis devenue intraitable aussi sur tout ce qui concerne le deuil.
Je poursuis mon chemin de vie fidèle à nos valeurs. Je soigne ma fille, je l'éduque, je l'entoure, la gâte et la tance. Je soigne mes amis intimes orphelins d'un ami précieux. C'est une manière pour moi de le faire vivre encore.
Je vous embrasse tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: agapimou le 14 décembre 2015 à 11:04:47
Chère Piera,
Merci pour ce magnifique et si émouvant témoignage d'amour, si fort, si vibrant!
Je ressens tout ce que tu dis, écris, ressens,...
Merci Piera, et à bientôt sur ce forum!

Belle et douce journée à toi,
Agapimou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 14 décembre 2015 à 12:12:57
Chère Piera,

Tes messages sont d'une grande acuité et d'une force qui me touchent profondément.

Je ne tremble plus devant ma vie sans lui. J'y suis. . Cette phrase me bouleverse depuis que je j'ai lue. Elle décrit si bien  ce que je ressens confusément.

Puis me permettre une question ? Que veux tu dire quand tu écris  :
 Et je suis devenue intraitable aussi sur tout ce qui concerne le deuil.
Je sens quelque chose de primordial dans cette phrase sans arriver à bien le saisir.
Si tu as un peu de temps, je serais très heureuse de te lire.

Infiniment merci, ainsi qu'à toutes celles et ceux qui apportent tant d'amour sur ce forum.

Milou

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: nina68 le 14 décembre 2015 à 14:56:44
Piera, je suis nouvelle sur ce forum mais je me retrouve dans ce que tu dis. Moi aussi je plus forte en quelque sorte, car je n'appréhende plus les souffrances que sa maladie lui a faite endurer,  depuis sa mort j'essaie de penser à lui à ce que qu'il était avant sa maladie (qui nous a  pris tant de choses).
J'ai pleuré en te lisant mais cela m'a fait du bien
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 20 décembre 2015 à 10:26:18
Voilà, chère Milou, ma réponse tardive à ta question.
Je suis intraitable sur ce qui concerne le deuil.
Oui, je dois admettre ce constat.
Si je retiens une leçon de notre épreuve, c'est bien d'avoir appris à m'écouter, prendre le temps de m'entendre, et de me faire confiance. Pierre m'a laissé un bien, sacrément précieux, merci mon amour. Tu as su ne jamais te laisser prendre par la frénésie médicale, ni entrer en matière pour des thérapies qui ne te convainquaient pas, t'écouter d'abord, et faire le tri pour préserver l'essentiel. Quelle sagesse, mon homme ! 
J'essaie de poursuivre sur cette voie parce qu'elle est sage et me correspond maintenant, je l'ai faite mienne. Est-ce cela l'héritage de nos défunts ? J'aime à le croire, j'intègre mon homme, je le fais moi.
Je me suis écoutée en interrompant mon travail alors qu'on me l'offrait comme dérivatif.
J'ai refusé d'entendre mon médecin qui me proposait une reprise en novembre pour m'éloigner de mon deuil.
J'ai refusé des invitations qui me coûtaient et accepté celles qui me faisaient du bien.
J'ai écarté les gens toxiques et choyé les amis.
Je vis au rythme de ma nouvelle vie.
J'ai besoin de longs moments de solitude pour apprivoiser son absence et je les défends bec et ongles. J'ai besoin de prendre pleinement la mesure de son absence. D'ailleurs, je me refuse même à faire des escapades qui me blessent plus qu'elles ne m'apportent.
Au comment ça va ? Je m'autorise à répondre, invariablement, précisément que je ne réponds plus à la question parce que je ne peux pas y répondre. Mon état est tellement fluctuant.
Le traditionnel sapin de Noël ne trône pas dans notre salon, c'était Pierre qui s'en occupait avec notre fille. Ils le choisissaient et le décoraient ensemble. Alors, j'en ai confectionné un avec des bouts de bois glanés sur la terrasse  histoire de faire dans la continuité mais dans le changement pour le marquer, l'inscrire.
J'ai fait le tour des psy, avec des demandes bien précises et je me retrouve au point de départ. Ils ont eu, pour la plupart, la fâcheuse erreur de me dire qu'il n'y avait pas besoin d'être « spécialiste » du deuil pour ma thérapie. Et cela n'a pas manqué, on me parle dépression ce que je n'admets pas. Une m'a dit que je ne voulais pas lâcher mon homme ! Facile, trop simpliste à mon goût ! Quel topos !
Voilà le deuil est résumé,  circonscrit chez les psy (enfin les incompétents que j'ai vus), dépression  !
Alors, oui, je suis intraitable, je n'accepte pas ces lieux communs, faciles et rassurants pour les autres.
Une autre chose à laquelle je développe une allergie, ce sont les soi-disant phases du deuil.
Elles disent tout et  rien en même temps, et surtout brouillent les pistes. Le deuil pour moi est un continuel va-et-vient. Des jours, je me sens d'une énergie débordante, la vie me semble possible et ne me coûte pas d'efforts, et des jours, je sens une chape de plomb sur moi et tout m'insupporte, me semble insipide, vain, vide, et j'invoque mon homme, je l'appelle, je le hèle désespérément.
Le deuil est une chose bien plus subtile qui ne se laisse pas enfermer dans des carcans rassurants.
Il mobilise tellement de choses. La mort nous confronte à l'impossible. Cette fluctuation m'épuise et en même temps, je dois reconnaître que quelque chose se passe, évolue, c'est encore très ténu mais je sens dans ces jours où je vais bien que c'est parce que je sens, que au-delà de sa mort,  mon homme est là, je sens son regard bienveillant sur moi comme pour me soutenir dans mes efforts de vie. Et je veux croire qu'il sera toujours là et que rien n'y personne ne pourra me ravir cette douce présence, au-delà de la mort.
Je lis dans tous vos témoignages, toute cette souffrance pour essayer de tricoter avec l'impossible, tous ces questionnements, ces désespoirs mais dans chacun j'y lis un tel amour, une telle recherche de vrai, aussi bien dans la colère, la rage et la douceur, j'y vois, là, la vraie humanité. Merci à vous tous.
Je vous embrasse tous tendrement.






Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 20 décembre 2015 à 15:27:47
merci de cet éclairage puissant...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 20 décembre 2015 à 20:29:22
Chère Piera,

Infiniment merci pour ta réponse.  Elle est d'une grande intensité et d'une grande vérité.

C'est tout à fait ce que je ressens, avec bien sûr les nuances propres à ma vie, à ce qu'était notre couple, notre histoire.

Oui, nous sommes en deuil. Des êtres humains confrontés  à la mort. Tout simplement. Il n'y a pas de travail à faire, d'étapes à franchir.

Et nous avons le droit des continuer à décider ce qui est bon pour nous, avec nos moyens, dans le chaos de nos émotions. 

Je t'embrasse.
Milou

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: fleurdecoton le 20 décembre 2015 à 22:29:20
@ Pierra

"La mort nous confronte à l'impossible ": je retiens cette phrase qui sonne en moi ... J'ai mis du temps depuis le 9 janvier 2013 à " accepter cette mort" et il arrive encore parfois à être arrachée de mon sommeil pour entendre " mais elle est morte"?!!!!!

J'ai pour impression que la mort nous explique bien des choses que tous les psy de la terre ont du mal à comprendre .... La mort au début c'est l'arrachement violent d'une partie de notre être ... Le psy ne peut qu'accompagner cette douleur ... Comme une infirmière qui change le pansement d'une plaie .... C'est tout ....mais c'est nous qui ressentons, vivons cette amputation .... Mais la mort aussi subtile qu'elle en est, transforme petit à petit cet arrachement en un autre lien comme si cette amputation se comblait de ce lien qui nous unissait à l'autre .......
Étrange un deuil .... Un deuil de quoi d'ailleurs ? Je me la pose la question .. Je fais le deuil de ce qui vit encore en moi ? Non c'est impossible ..., et c'est là que la mort nous confronte à l'impossible .... Nous ne pouvons faire le deuil d'un amour exceptionnel , il nous accompagnera jusqu'à la fin

Merci d'être sincère , et authentique

A bientôt
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: alberte le 21 décembre 2015 à 21:11:03
Bonsoir à tout le monde,
Votre récit me parle, je m'y retrouve. Mon époux, mon tendre amour, est "parti" il y a 4 ans et 3 mois et pour moi c'est hier.
Une personne m'a dit je vous vois toujours triste vous ne souriez pratiquement jamais, quel est votre problème ?
J'ai répondu, oui je suis triste, j'ai perdu mon mari.
Ah bon il y a longtemps ? Non ai je répondu, il y a 4 ans et trois mois le 13 décembre.
Réponse : mais c'est vieux ça, il faut oublier un peu !!
Je n'ai rien dit, je me suis tournée et je suis partie.
Voilà comment beaucoup de personnes réagissent envers les personnes endeuillées.
Je vous embrasse très fort.
Alberte
Titre: Re : Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Gwenn8001 le 30 décembre 2015 à 05:18:34

""...d'ailleurs je ne me sens pas seule, aussi étonnant que cela puisse paraître. Et je suis devenue intraitable aussi sur tout ce qui concerne le deuil...."
Je poursuis mon chemin de vie fidèle à nos valeurs. Je soigne ma fille, je l'éduque, je l'entoure, la gâte et la tance. Je soigne mes amis intimes orphelins d'un ami précieux. C'est une manière pour moi de le faire vivre encore.
[/quote]
MErci Piera, je suis complètement d'accord avec vous, mais moi je me sens seule vis a vis les autres ...je suis seule avec une fille de deux ans et une bebe de 3 mois...j'ai peur de n'est pas être forte,  de ne pas pouvoir leur protéger, je me sens vulnerable... maintenant, même si je sens sa présence en moi, cela ne me suffit pas, je besoin de lui ici, physiquement... comme avant
Et pour les phases de deuil!...je suis entièrement d'accord avec vous, merci, merci, de votre récit... je ressens les mêmes sensations... Merci de partager
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 30 décembre 2015 à 11:50:06
Chère Gwenn,
Je pensais souvent à toi, à toi enceinte, à toi donnant la vie alors que ton amour n'est plus et que tu as tant besoin de sa présence auprès de toi pour accueillir ce nouvel être.
J'aimerais lui souhaiter la bienvenue à ce petit bout, fruit de votre amour.
Je me sentais aussi très vulnérable aux premiers mois de vie de ma fille, parce que je me sentais pleinement responsable de cette vie que j'avais décidée pour elle.
Ta vulnérabilité est double pour toi. Tu as des enfants qui sont complètement dépendants de toi, je comprends, s'ajoute la fatigue des nuits discontinues, du rythme perturbé. La fatigue ajoute à la douleur parce qu'on est diminué.
As-tu des gens auprès de toi qui peuvent t'aider, te soulager un peu ?
Je pense très fort à toi et t'embrasse tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 30 décembre 2015 à 12:05:29
Je me souviens du temps avant la maladie, j'étais insouciante, légère et mes rires sonores résonnaient partout. J'étais pleinement consciente de notre bonheur.
J'étais son élue et il était le mien.
La mort, la maladie ne me concernaient que de très loin et quand je passais devant un hôpital je frissonnais en pensant à mon père et à tous ces malades et proches qui souffrent mais j'étais soulagée de ne pas avoir à en franchir le seuil.
Un mur se dresse désormais entre nous, endeuillés, et ceux qui n'ont pas vécu ce drame humain mais peut-on leur en vouloir ? Doit-on leur en vouloir ?
Moi-même, je sens toute la difficulté de bien saisir sa mort, très souvent, encore trop souvent et c'est ce qui rend cette douleur  insupportable, je n'arrive pas à croire complètement à sa mort, je le cherche et l'appelle encore, je ne veux pas y croire, j'aimerais me réveiller de ce cauchemar. Je suis dans le pire cauchemar de ma vie celui d'avoir perdu l'homme de ma vie. Cette douleur-là ne peut pas être entendue par ceux qui n'y sont pas confrontés parce qu'elle est tout bonnement insaisissable et insupportable.
Je n'attends pas des autres qu'ils puissent entendre ce que moi-même je redoutais le plus au monde.
Par contre, je me positionne dans ma nouvelle vie, je ne mets pas de masque ou alors si j'en mets c'est pour moi, uniquement pour moi, pour m'aider, me forcer un peu parfois à sortir de cette torpeur douloureuse. Quand je ne vais pas bien, je ne le tais pas. Ma décision d'interrompre mon travail participe de cette volonté d'inscrire le deuil socialement aussi. J'ai besoin de faire entendre que je ne suis plus la même, que la battante est meurtrie et qu'elle a besoin de temps maintenant pour elle, pour  se penser et se panser. 
Je suis trop déconstruite pour pouvoir poursuivre sans interruption. J'ai besoin d'une pause pour m'accueillir, accueillir son absence et me reconstruire.
Je ne peux pas être dans une continuité, un abyme s'est creusé entre ma vie d'avant et ma vie aujourd'hui. Vais-je construire un pont ? Sauter dans le vide ? Ou vais-je pouvoir réunir les deux ? Encore trop frais, trop tôt, je suis encore trop atteinte, éparpillée, il me faudra encore beaucoup de temps pour me réunir.
Pour nous, la vie s'est arrêtée, interrompue sur cette mort-là, et on reste hébété de constater que pour le reste du monde  tout continue comme avant. Et oui ce constat est atroce, aberrant, douloureux, mais voilà cette mort-là nous confronte tout simplement à l'absurde. Comment continuer à vivre, comment vivre alors que l'être que nous avons perdu et que nous avons tant aimé n'est plus ?
Et pourtant, le soleil continue à se lever, la mer respire encore, mon pouls continue à battre...
A mûrir...

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 30 décembre 2015 à 14:36:40
Absurdité de la vie...qui se révèle dans toute son ampleur après la mort d'un essentiel à nos vies...
je crois que plus jamais la légèreté d’avant ne reviendra...
au mieux une nouvelle légèreté dérobée à la tristesse mais marquée d'une certaine  gravité..
c'est pas gai gai comme perspective mais c'est la seule que je perçois...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Aujardin le 30 décembre 2015 à 19:01:59
Bonjour Piera,
J'aime lire tes messages. Tu sais écrire, ce que nous ressentons au plus profond de nous. Je me retrouve totalement dans tes écrits.
Eric est parti maintenant depuis près d'un an et demi. Il allait avoir 44 ans. Pendant des mois, j'ai recherché dans le regard des autres hommes son regard. Ses yeux pétillants, pleins d'amour qui me disaient, j'aime la vie avec toi. Et puis un jour j'ai compris que cela ne servait plus à rien. je ne le retrouverai plus son regard à lui, ni son sourire plein d'amour et d'admiration. Je suis vide, morte de l'intérieur. Ces bras me manquent, nos discussions aussi. Notre vie de couple manque à ma vie.  Comme beaucoup je fais semblant pour les enfants, pour les proches qui sont inquiets. Peut on aimer à nouveau la vie quand une telle épreuve nous arrive ? Peut on à nouveau lui faire confiance après qu'elle  ait tout détruit ? Quel est l’intérêt de continuer quand tout peut s’écrouler en  un instant sans raison, comme ca ?.
je cherche mais je ne trouve pas de réponse à mes questions...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: carabistouille le 30 décembre 2015 à 21:07:51
Bonjour

Tout est dit. Je ne vous connais pas. Nous pourrions nous être croisées, sans nous voir, puisque nous ne voyons
plus rien, ni personne. Puisque nous sommes mortes parmi les vivants.
J'ai juste envie de vous embrasser et vous serrez  fort. Même si nous savons aussi que face à la douleur
nous restons seuls.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: fleurdecoton le 30 décembre 2015 à 21:29:43
@ Pierra

Es ce la mort qui est absurde ou plutôt la vie qui l'est ? C'est une question qui m'a longtemps taraudé l'esprit .... Du moins l'un sans l'autre cela ne fonctionne pas ... Du moins ce que j'ai retenu si nous souffrons autant et s'ils nous manquent autant ... C'est peut être qu'ils vivent ailleurs .....

Beaucoup de temps pour se penser .... La continuité viendra d'elle même , elle en découlera de l'amour qui nous lie a l'autre .... Comme si cet amour vient panser  cette blessure .... Donner et recevoir .... Je l'avais compris différemment à l'époque , j'ignorais que cette symphonie de l'amour continue à se jouer .... Même apres .....

A bientôt
Titre: Re : Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Gwenn8001 le 31 décembre 2015 à 04:29:34
Merci Piera, Maïwenn a 3 mois, Youna 2 ans et demi...J'arrive pas a comprendre encore...comment cela a peut arriver
Je ne sais pas ou je suis, ni comment je tiens debout... quelle tragédie ...quelle tristesse
Je suis entouré pour mes parents et frères, sans eux je n'aurais pas pu tenir,
J'ai très peur, maintenant, parce que je viens de décider d'aller vivre avec nos filles,  en Bretagne, au départ avec ma belle mère et son compagnon,  loin, très loin de ma famille...
Mais je crois que c'est le mieux pour elles et pour moi... J’espère ne pas me tromper...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Jeanne.v le 31 décembre 2015 à 10:15:41
Bonjour à toutes

 vous avez su écrire votre ressentie, qui est aussi le mien
oui nous sommes des femmes en deuil, et comme l'habit noir qui était symbole du deuil n'existe plus!,,,,

la langue française  est  avare en mot pour parler de deuil=
 on dit veuf ou veuve quand on a perdu un époux /épouse
on dit orphelin/orpheline quand on a perdu un ou ses parents

mais on dit quoi quand une maman et papa on perdu leur enfant?????  pas de mot alors maintenant  on dit =  parents endeuillés,  maman endeuillée , papa endeuillé ! ,,,

je suis une femme endeuillée,  une maman endeuillée,  la mort de ma fille a fait qu'au bout de 8 mois, je me suis transformée  physiquement et moralement. Il m'arrive de ne pas me reconnaître dans la glace, mes yeux sont délavés  d'avoir trop pleuré,  mon corps est plié  de douleur d'avoir subi l'onde de choc de la disparition de mon enfant

la légèreté  pour moi est désormais  aux abonnésabsents  , redonner un sens à ma vie? ! pas pour l'instant

on m'à dit "le plus dur c'est aprivoiser l'absence"

je vous embrasse toutes les femmes endeuillées,  une nouvelle épreuve nous attend  commencer l'année sans la personne aimée

jeanne


"
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 01 janvier 2016 à 23:57:15
  Bonsoir Piera.
 Ton récit m'a profondément émue.  Je sais ce que tu èprouve, j'ai moi-même perdu mon compagnon il y a 7 mois (ça vas même faire 7 mois précis demain, ce triste anniversaire me rend plus mélancolique que d'habitude  :'(), et, comme pour toi, notre amour ètait complet. IL s'appelait Pierre, en plus.
  Oui, les personnes extérieures à notre peine ne peuvent pas vraiment comprendre-pas du tout pour certaines-à moins de vivre ou d'avoir vécu la même chose. Ce que bien sûr on ne souhaiterais pas à son pire ennemi. Si mon pire ennemi subissait la même perte, j'aurais un mot de compassion pour lui. Ici, nous nous comprenons.
  Oui c'est comme si nous avions deux vies: la vie quotidienne, visible que nous devons bien poursuivre, et l'autre, infiniment intime, qui ne concerne que nous et ceux que nous avons aimé.
   Je suis sûre que de là où il est, ton Pierre est fier de toi puisque tu continue à vivre, courageusement, en dépit de cette peine incommensurable. Vous avez vécu une très belle histoire, tu peut être assurée de l'avoir rendu heureux avant que son destin veuille qu'il parte.

  Je vois ce que tu veux dire: à partir d'un certain laps de temps, ceux qui ne comprennent pas et ne sont pas ouverts ne comprennent pas qu'on n'ai pas encore "fait notre deuil". Alors que mon compagnon ètait décédé depuis 4 mois, on commençait à me dire: "4 mois. Oh ben alors, ça doit commencer à aller beaucoup mieux!" Voire même: "6 mois? Ca peux aller..." Oh oui, ça peux aller  ::) il ne faut pas ècouter ce genre de propos stupide, ils ne savent pas.

  Je te souhaite tout le courage possible, et de pouvoir, peu à peu, èvoquer vos merveilleux souvenirs d'une manière plus apaisée  :-*
 
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 02 janvier 2016 à 13:51:17
Merci Stana et vous tous.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 02 janvier 2016 à 13:54:33
Voilà passage en 2016, mon coeur, nouvelle année qui commence.
Le dernier jour de l'année, j'étais sereine en me levant (incredibile, non ci avrei pensato!) et j'ai décidé de ne pas honorer les invitations mais de rester seule. J'ai préféré de ne pas me retrouver dans une ambiance que je ne pouvais pas partager, je n'étais pas dans la joie mais dans le besoin de recueillement. J'avais besoin de nous penser, mon amour, même si je sais que nos amis avaient le coeur serré.
J'ai débouché le champagne comme à notre habitude, 16h23, 2 coupes et un tête à tête avec cette merveilleuse photo où ton sourire rayonne et m'irradie, si toi !
Notre puce m'a appelée le matin, elle était toute gaie et pimpante.  J'étais émue et touchée de lui souhaiter ce premier anniversaire sans son papa chéri. Mais, j'étais aussi touchée et émue de voir cette belle complicité et cette douceur qui se tissent entre nous et nous protègent, nous adoucissent un peu la douleur de ton manque. Notre fille va bien, mon coeur, elle s'épanouit malgré le vide que tu laisses et elle est en train de devenir une chouette nana. Elle m'a envoyé des photos l'après-midi où elle souffle ses 16 bougies ! J'étais touchée de l'attention des amis qui l'accueillent.
J'ai trinqué avec parrain et marraine, après j'ai voulu passer un moment avec toi. Je suis allée chercher Baudelaire que tu m'avais réclamé vers la fin, poète de nos débuts. J'ai voulu te lire à haute voix des poèmes qu'on adorait ensemble mais ma voix s'est brisée. J'ai renoncé en m'excusant, même, dans Baudelaire je ne trouvais pas les mots assez forts pour te dire tout ce que j'ai sur le coeur, mon coeur, alors je me suis tue et je t'ai serré très, très fort contre moi.
J'ai réussi à ne m'endormir qu'à 3h du mat !! en me tançant un peu mais avec beaucoup d'indulgence.
J'ai mis le réveil parce que j'avais décidé d'accepter une invitation, le lendemain du réveillon. Des amis organisaient un apéro après le visionnement d'un film (auquel je n'ai rien compris d'ailleurs..) C'était très sympa et discussion houleuse autour du film... Notre ami repart faire ses passionnantes fouilles et il voulait nous réunir avant son départ.
Voilà, tu auras compris j'ai décidé un changement de régime pour la nouvelle année. Je sors du périmètre qu'il m'était difficile et douloureux de franchir. Je suis même retourner faire du sport !
De là, j'ai été dormir  au bord du lac chez nos amis chers.
Voilà, ma vie sociale reprend son cours. J'accepte les invitations et ça me fait du bien. On parle de toi, de moi, de la puce. Ton absence s'inscrit dans nos vies, tes réparties nous manquent mais tu es là je crois à travers tous ces gens qui ont eu la chance de t'aimer.
Aujourd'hui, pluie et grisaille, pas un pet de neige, ça râle en montagne...
Demain, balade en montagne en espérant que la pluie ne sera pas de la partie.
Semaine prochaine, virée à Lyon avec la puce, surprise...
Je vais de ce pas retourner dans mes cartons  faire un peu de tri et de place...
Chers amis du forum, j'ai lu beaucoup de messages ces jours qui m'ont beaucoup touchée, je vous serre, tous, tendrement dans mes bras. Je voulais vous partager mes efforts de ces jours pour sortir de mon gouffre jusqu'à la prochaine déferlante qui ne manquera pas de m'assaillir mais je sais maintenant qu'elle viendra et je l'attends...

 
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 04 janvier 2016 à 14:20:01
Au-delà du fait que la tristesse est immense, le manque une torture, je dois reconnaître qu'il y a de plus en plus de moments où plutôt que les moments où cette douleur n'entrave pas  toute action, soit physique, soit de pensée, sont de plus en plus longs.
Je reconnais aussi que, parfois, je dois m'auto-déterminée à me laisser aller au bien . C'est là un des points de l'impossible du deuil, comment  précisément être bien alors que l'être auquel on tenait le plus au monde n'est plus ?
Jusque là, j'étais dans le comment être tout simplement ? maintenant, je passe au comment être bien ? Pas facile, parce que l'humeur fluctue, je suis bien, absorbée dans une activité et tout à coup, une pensée, un air musical me rappelle l'absence et là, je m'effondre, je sombre dans mon gouffre.
Je m'interroge aussi sur le droit à être bien malgré l'absent.
Est-ce renoncer au lien, que de choisir de vivre, et  vivre ne veut pas dire survivre seulement pour moi. aujourd'hui ?
Ai-je le droit d'aller et d'être bien ?
Arriverai-je à m' autoriser à l'être, à aspirer à une vie pleine dans tous les sens du terme, remplie de mes aspirations, de mes passions alors que Pierre n'est plus ?
Et comment faire pour aller bien alors que jusque là tout se construisait à deux ?
Il faut désormais se penser seul, se projeter seul, et c'est une grande difficulté, parfois elle semble même insurmontable parce que cette solitude ne découle pas d'un choix. J'ai le sentiment qu'on m'a arraché mon homme. Oui, la mort est violence parce qu'elle impose à jamais pour toujours cette insupportable absence!
Je l'avais élu amour  de mes jours et de mes nuits, on avait enfin trouvé un équilibre harmonieux, doux, bon, joyeux. Ma vie avait et prenait tout son sens, précisément, dans cet amour-là.
Comment retrouver le sens ?
Pierre est mort mais l'amour lui n'est pas mort à sa mort, je le sais et je le sens aujourd'hui.
Je me sens encore portée par cet amour et je le sens encore tellement présent dans notre vie.
J'ai lu les messages de Federico et de Fleurdecoton  à propos du lien avec nos chers morts.
Et ces messages résonnent très fort aujourd'hui.
Se libérer de la peur de la perte du lien, c'est peut-être cela le sens que je croyais perdu et c'est à ça que je veux m'attacher aujourd'hui.
J'ai envie de croire que ce sera précisément grâce à ce lien et malgré la douleur de son absence, que je parviendrai à être, à être bien aussi et vivre ma vie avec mon Pierre, désormais, à jamais en moi, comme intégré dans toutes mes actions et décisions en harmonie et en lien avec cet amour exceptionnel et inconditionnel.  La route va être longue, je le sais mais c'est vers ça que je veux tendre aujourd'hui.
Je vous embrasse tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 04 janvier 2016 à 22:21:23
Chère Piera,

Merci pour ton beau message.

Je souhaite que ta vie soit plénitude, emplie de l'amour et de la force de  Pierre. 

Le chemin est rude pour redonner sens et vie à cet amour arraché. Mais il  est bien là, au plus profond de toi.

Tes mots m'aident beaucoup à comprendre ce que je ressens. Merci de ta générosité.

Je t'embrasse.
Milou

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 05 janvier 2016 à 17:15:04
Tous nos efforts pour tricoter avec cette mort me bouleversent.
Je crois qu'on est tous vrai dans notre épreuve que ce soit dans la tristesse, rage, colère, désespoir, dérision, volonté de vivre, refus de survivre à l'autre, avec tout cela parfois confondu, emmêlé, imbriqué à ne plus savoir comment on s'appelle...
Je crois que si je peux tirer une leçon de cette épreuve, c'est précisément qu'elle nous confronte à nos propres limites avec lesquelles on ne peut plus mentir ni se mentir.
Le superflu et le superficiel sont tombés sans crier gare à l'annonce du diagnostic et il ne nous restait plus que l'essentiel c'est-à-dire notre être à l'autre avec tout ce que cela comporte de don entier de soi. Finis les faux problèmes, finies les chamailleries de pouvoir, finies les prises de tête sur des sujets qui n'avaient plus de sens tout à coup, mais enfin se voir, se regarder et s'accepter dans notre force et notre faiblesse comme deux êtres aimants qu'on allait séparer et face à cette séparation inéluctable il ne reste plus que tout l'amour qu'on se voue l'un à l'autre et à notre puce.
Voilà, je ne retire aucune gloriole de ça le prix est trop cher payé, mon homme n'est plus et même si je sens qu'il est là au fond de moi et que rien ni personne ne l'en délogera jamais, dieu qu'il me manque, dieu qu'il manque à ma vie !
Mais c'est sur ses traces que je veux continuer, il est resté debout, jusqu'au bout au propre comme au figuré, et voilà je ne me sens pas de m'abandonner à ce gouffre qui m'appelle, je ne veux plus lui tendre les bras, j'aimerai vivre bien parce que je pense que c'est ce que Pierre nous souhaite à toutes les deux. Il se sentait tellement triste et coupable de nous abandonner !
Je vous embrasse tous tendrement.




Titre: Re : Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: fleurdecoton le 05 janvier 2016 à 18:59:57

Je crois que si je peux tirer une leçon de cette épreuve, c'est précisément qu'elle nous confronte à nos propres limites avec lesquelles on ne peut plus mentir ni se mentir.
Le superflu et le superficiel sont tombés sans crier gare à l'annonce du diagnostic et il ne nous restait plus que l'essentieet face à cette séparation inéluctable il ne reste plus que tout l'amour qu'on se voue l'un à l'autre et à notre puce.


J’apprécie tes réflexions ....Que reste t -il : L'essentiel ..... l'amour .... le choix d'une vie ..... l’épreuve de la mort nous ramène à  la sève de la vie : l'amour, c'est a dire l'essentiel.....comment ne pas continuer à vivre quand la vie coule en toi dans tes veines , quand ton héritage est essentiellement de l'amour ?  comment ne pas rendre hommage a pierre si ce  n'est que de porter cet amour ?????

vois tu, et si tu me permets, s'il y'a bien quelque chose qui meurt , c'est le coeur !or quand la sève de la vie coule en nous ....je crois bien qu'il s'agit d'une séparation ....

merci de nous partager tes réflexions, ton parcours   

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 07 janvier 2016 à 22:32:49
  Vous avez pus vous parler, vous dire adieu, profiter consciement de ces derniers moments passés ensemble. C'est très dur, mais tu dis toi-même que toutes vos petites chamailleries ont pus être ècartées, qu'il ne restait plus que votre amour, j'espère que tu peux y puiser un minimum de réconfort.
  Il te manquera toujours mais continue à vivre, et à vivre le mieux possible, pour toi et pour votre enfant est en effet ce qu'il faut faire; c'est aussi la meilleure manière d'honorer sa mémoire.
  Courage! Je pense à toi.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 08 janvier 2016 à 12:06:12
Oui Stana, du courage il en faut beaucoup, trop!
2 jours d'escapade avec ma fille qui se soldent pour moi par une immense douleur .
J'ai emmené ma fille et sa meilleure amie (orpheline de père et de mère!!!), je me force et m'oblige à organiser des sorties pour ma fille et cette amie à laquelle je suis très attachée mais dieu que c'est difficile, le coeur n'y est pas. Je me fais souvent l'effet d'un automate, un pantin articulé ou plutôt désarticulé, dont les mouvements sont automatiques.
Flux et reflux de ce désespoir, ça m'épuise, je n'en vois pas le bout !
Merci pour ton message d'encouragement, et encore une fois et ce ne sera pas la dernière, je salue ce forum devenu ma terre d'asile !
Je vous embrasse tous tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 08 janvier 2016 à 12:35:11
Chère Piera,

Oui, courage, ténacité, acceptation, consentement, force, espérance, deuil, deuil, deuil...

Tomber mille fois et se relever mille fois.

Oui ce forum est une terre d'asile ou les endeuillés se croisent et se réconfortent, se reconnaissent entre eux, alors qu'ils sont devenus des étrangers dans leur propre monde.

Je t'embrasse pour te donner un peu de courage, même si j'en ai bien peu en ce moment. Partageons nos maigres ressources pour faire un pas de plus ensemble.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 08 janvier 2016 à 13:51:28
Oui, Milou, tout ça et plus encore pour trouver, peut-être, un jour, le ressort pour continuer, vraiment, pleinement...
Je t'embrasse tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Nikky le 11 janvier 2016 à 12:54:29
Piera, après avoir écrit tout à l'heure  quelques mots sur ce forum , je découvre tes messages ;

tu dis : "Des jours, je me sens d'une énergie débordante, la vie me semble possible et ne me coûte pas d'efforts, et des jours, je sens une chape de plomb sur moi et tout m'insupporte, me semble insipide, vain, vide, et j'invoque mon homme, je l'appelle, je le hèle désespérément.
Le deuil est une chose bien plus subtile qui ne se laisse pas enfermer dans des carcans rassurants.
Il mobilise tellement de choses. La mort nous confronte à l'impossible. Cette fluctuation m'épuise et en même temps, je dois reconnaître que quelque chose se passe, évolue, c'est encore très ténu mais je sens dans ces jours où je vais bien que c'est parce que je sens, que au-delà de sa mort,  mon homme est là, je sens son regard bienveillant sur moi comme pour me soutenir dans mes efforts de vie. Et je veux croire qu'il sera toujours là et que rien n'y personne ne pourra me ravir cette douce présence, au-delà de la mort. "

j'ai exprimé moins joliment que Toi ce qui se passe pour moi depuis ces derniers temps alors que mon Pierre à moi  m'a brusquement quitté il y a trois ans demain;  alors,  tes mots , je me les approprie totalement !

je voudrais  raconter quelquechose de magnifique qui m'est arrivée les instants qui ont précédés le  départ  de mon Mari à sa salle de gym où il est allé mourir !!
habituellement  lorsqu'il partait un moment ,  Pierre me disait : "à tout à l'heure, ma ptite femme "   
ce matin là, appuyé sur le rebord d'un meuble, attendant que son café s'égoutte, il attendait bras croisés, je le revois encore,  il  me regardait ,  il m'a alors  demandé de venir auprès de  Lui,  il a entouré ses bras autour de ma taille  et , en me regardant dans les yeux , il m'a dit : " tu sais , je pense sans arrêt à Toi, je t'ai tout le temps dans la tête " ???? 
 puis il a posé un baiser sur mes lèvres !
ce sont nos derniers instants ensemble ;  magnifiques mais toutefois inhabituels !
 il y a des mystères dans nos vies car pour lui , pour moi, rien ne présageait ce qui allait arriver ! 
comme si, d'un ailleurs,  lui étaient insuflées ces pensées  pour me dire adieu !
pour vous dire vrai, c'est ce que je crois parce que je crois comme je vous l'ai dit dans un autre post,  à la survie de l'esprit et que nous sommes aidés par ceux que nous aimions et qui nous ont quittés !
très amicalement;
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 11 janvier 2016 à 20:31:34
Nikky,
Très touchée par ton témoignage de ce dernier baiser, je n'ose imaginer le choc de l'annonce de sa mort !!!!!
Nous sommes entièrement constitués de liens, pour moi, c'est une évidence, amour, amour filial, maternel, paternel, amitié. Je suis ce que je suis par tous les liens que j'ai pu tisser et que je continue à tisser.
J'ai déjà vécu une mort celle de mon père qui a été une déflagration dans ma vie de jeune adulte.
J'avais vécu dans le déni de sa maladie, de sa mort.
J'ai pris mes jambes à mon cou à sa mort parce que je ne voulais pas affronter son absence et surtout je ne supportais pas de voir ma mère seule.
Je peux parler de mon père maintenant avec humour, tendresse, et ne plus pleurer quand je l'évoque non, mais me dire que j'ai  une sacrée chance de l'avoir eu comme père.
La colère, la rage, la rogne sont passées et me reste, à jamais, cet amour qu'il m'a portée et que je lui vouais.
Mon père et sa mort, aussi, ont participé à la construction de la femme que je suis aujourd'hui.
Et même si aujourd'hui, je suis en fragments, je sais que chacun de ces fragments contient Pierre.
Nous avons fait un bon bout de chemin ensemble, j'aurais aimé que ce chemin ne s'arrête jamais...
Je sais, du moins j'espère, que ma douleur s'atténuera et que j'arriverai à cet apaisement-là !
Notre amour ne s'arrête pas à la mort, c'est notre force et notre "torture" tout à la fois.
Je t'embrasse tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 12 janvier 2016 à 10:32:43
  Moi aussi je me retrouve beaucoup dans le témoignage de Nikki: moi aussi mon compagnon est décèdé alors que personne ne pouvait soupçonner ce qui allait arriver-puisque ce fut accidentel -et pourtant il avait un pressentiment depuis deux mois, il m'avait dit plusieurs fois: "Je ne sais pas pourquoi, j'ai l'impression que je ne vais plus vivre très longtemps. Je le sais, je le sens." Bien sûr je n'en croyais rien . Il m'avait dis aussi plusieurs fois que s'il devait lui arriver quelque chose, il voudrait que je sois forte, que je devais continuer à vivre et à bien vivre, à vivre pour moi.

  Et aussi concernant la foi dans le fait qu'il existe toujours, quelque part, et qu'il veille sur moi,. C'est pourquoi je fais l'impossible pour me conformer à ses volontés, je veux qu'il puisse être fier de moi. Je crois fermement que notre âme, notre esprit, notre psychisme ou quelque soit le mot qu'on lui donne, ne peux pas être détruit.

  Nous sommes plusieurs à avoir les mêmes ressentis sans nous être concertés, ça ne peux pas être un hasard.

  Piera, j'espère de tout mon cœur que tu continue à faire face, et que tous vos beaux souvenirs deviendront, de plus en plus, une source d'apaisement plus que de souffrance.

  A vous deux: de là où ils sont, nos Pierre peuvent être fiers de nous je pense, et peut-être même qu'ils sont heureux que nous puissions échanger dans cette èpreuve  ;)
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 17 janvier 2016 à 09:47:38
  J'espère que tu ne vas pas trop mal ces temps-ci. Si tu as besoin de t'ouvrir, n'importe quand, tu sais que tu peux nous parler.

  A bientôt peut-être!  :-*
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 19 janvier 2016 à 07:23:25
merci Stana .

c'est un chemin long et difficile.

Je t'embrasse

Noëlle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 19 janvier 2016 à 07:52:27
Chers compagnons du forum,
J'ai passé un cap pour moi important, celui de ne plus avoir comme  option possible celle
de mettre fin à mes jours parce que je réalise à quel point je tiens à ma fille et qu'elle devient
une vraie raison pour que je tienne le coup ! Et oui, j'en étais là, terrible pour une mère, non ?
En ce moment, j'ai besoin de retrouver  Pierre dans des zones que je connaissais mais que je
n'avais pas explorées alors je parcours ses lectures. Je lis un de ses écrivains préférés que
du vivant de Pierre je n'arrivais pas à lire et c'est comme si à travers ses lectures, j'essayais
de pénétrer mon homme, comme si  je pouvais saisir des pans de lui qui me sont donnés à lire
dans ses choix de lecture. Je comprends son intérêt pour cet écrivain et je regrette un peu de ne pas
 l'avoir partagé de son vivant. Je prends ça comme un héritage et je me dis que c'est une manière de
poursuivre le dialogue avec lui.
Les toits sont blancs et il fait enfin froid, c'est l'hiver et c'est la ronde des oiseaux à nos fenêtres pour venir picorer les graines que je leur mets généreusement, égoïstement pour jouir de leur spectacle pétillant. 
Je vous embrasse tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 19 janvier 2016 à 11:29:35
  Merci pour les nouvelles piera  :)   Oui, nous faisons tous du mieux que nous pouvons, chacun à notre èchelle, chacun à notre rythme, on n'a pas le choix.
  Pour les lectures je vois ce que tu veux dire^^

  Pierre-le mien-lisait peu mais il aimait beaucoup Huxley et Kerwak. Je connais un peu le premier-j'aime bien-mais concernant Kerwak, il m'avait juste fais lire des extraits de ses poèmes, mais je les lirai bientôt attentivement, ce sera une nouvelle manière de me sentir proche de lui, d'essayer de le comprendre.

  lol les oisaux c'est trop mignon^^il se trouve que justement ce matin j'avais un reste de pain beurré, et je l'ai émietté sur le rebord de la fenêtre. Aussitôt les oiseaux sont arrivés et je les ai regardé picoré avidement ce festin improvisé^^sur la neige c'ètait trop beau!...Hé bien, même si ça a un côté égoïste, nous faisons tout de même plaisir à ces petites créatures  :D ce genre de "petit plaisir" gratuit du quotidien, c'est toujours ça de prix!!

  Bisous!!
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 19 janvier 2016 à 11:41:42
oui, cueillir les petits plaisirs...
Bisous gazouilleux, Stana
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 19 janvier 2016 à 17:03:50
Bonjour,

J'ai la souris qui tremble et le clavier indécis...
Je lis vos messages depuis de longues semaines, à toutes et à tous.
Je m'approprie vos douleurs, et je voudrais tant exorciser la mienne ! je la triture, je la malaxe, je l'étire, je l'éructe, je la hurle. Mais elle est bien accrochée, nous vivons toutes les deux, en mauvaise intelligence, mais inséparables.

Pour lui, je reprendrai ces mots :

"Il était mon Nord, mon Sud, mon Est et mon Ouest"

En Italie, en Espagne, en Grèce, en Irlande, en Ecosse et tant d'autres pays.
J'ai déposé mes valises en Souffrance...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 19 janvier 2016 à 18:47:01
  Je suis contente que tu pense comme moi piera  :)

  Faïk, j'espère que les èchanges sur ce forum t'apporteront un peu de réconfort  :-*
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 19 janvier 2016 à 19:05:00
Oui Faïk, on vit l'impensable, l'impossible et pourtant on vit, moi qui pensait en mourir...
Lire, partager, écrire, éructer cette douleur comme tu dis pour essayer de l'émietter.
Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 19 janvier 2016 à 19:36:43
Merci d'avoir saisi ce petit fil, si ténu, lancé dans l'espace...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 19 janvier 2016 à 20:44:25
Faïk,
Tu as poussé une des bonnes portes.
Ici, tu peux aussi poser tes valises, un peu, beaucoup..., des oreilles attentives, sensibles, folles parfois t'écoutent, entendent cette douleur-là.
Tu peux aussi créer ton propre file avec ton sujet à toi, venir dire, écrire, déverser ou écouter en silence toutes ces personnes merveilleuses d'humanité de ce forum que le deuil traverse et transperce.
Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 20 janvier 2016 à 00:20:19
Eh bien, puisque j'ai poussé la porte, je veux bien prendre une petite place parmi vous, Et puisque que c'est l'hiver depuis si longtemps déjà, me réchauffer un peu et laisser mes oripeaux à l'entrée. Déguenillée, détricotée, je voudrais tant reprendre le fil et la trame de ma vie ...



Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 20 janvier 2016 à 13:07:32
Le fil, ifl, fli, ilf, le feu-il, il faut le prendre et le reprendre même et surtout à l'envers, se le tricoter, retricoter. détricoter sur une trame désormais béante, lui retrouver un sens, lui retrouver une forme et même si je sens que cette béance est et sera, je sens aussi que je dois continuer avec et malgré elle, pour moi, pour lui, pour notre fille.
Je marche seule dans ma ville, je me rappelle de cette hâte, de cette impatience qui m'habitait avant, cette envie d'être déjà de retour pour être avec toi.
Maintenant, je ne suis plus errante, titubante, aveugle comme il y a encore quelques temps, cette hâte, je la retrouve  pour notre fille, je rentre pour elle, pour l'accueillir à son retour des cours, pour être présente à ses côtés, pour lui offrir une oreille attentive à ces discussions apparemment anodines sur ses anecdotes d'écoliers où elle se dit sans le savoir.
Cette présence à ses côtés est mon baume actuel. On se partage des anecdotes, on t'évoque maintenant sans que les larmes viennent brouiller mes dires et l'arrêtent dans ton évocation parce que tout comme toi elle est pudique de ses sentiments et n'aime pas que je pleure, défense ou protection...
Ce matin, rendez-vous avec le médecin et l'infirmière du service de santé du travail, et bien je dois dire que je suis scotchée de leur humanité, de leur capacité à m'entendre, je vais reprendre à dose homéopathique la casquette de mon métier. Je suis à la fois heureuse de cette reprise et pleine d'appréhension mais, c'est ma décision.
Aujourd'hui, jour gris sur la ville, crachin pas coutumier de la région,  sentiment d'être ailleurs.
La cuisine fleure bon l'ail, notre fille rentre de l'école, nous aurons un petit moment ensemble autour d'un délicieux repas et chacune vaquera à ses occupations.
Voilà, mon coeur, tu vois, je suis debout...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 20 janvier 2016 à 14:08:17
Etre debout, Piera, cela semble si difficile...

Pour l'instant, je me repais de vos mots. Et encore ce verbe ne me semble pas vraiment adéquat, car je suis déjà repue, mais de fatigue et de désolation. Je ne voudrais pas non plus recevoir sans rien donner en retour, mais je me sens tellement dépouillée, Je ne peux que vous souhaiter un peu de légèreté dans l'air...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 20 janvier 2016 à 14:23:38
  Si nos mots t'apaisent, tu n'es pas là pour rien, que ce soit pour toi ou même pour d'autres personnes^^je m'explique: nous avons tous besoin de raisons de continuer à vivre, et nous sentir utiles, d'une façon ou d'une autre, en fait largement partie, et je peux te dire que lire que nous te faisons un certain bien me met du baume au cœur  :)

  Bon courage à tous les deux  :-* :-*
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 20 janvier 2016 à 14:58:17
Merci Stana de m'avoir dispensé un peu de miel...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 21 janvier 2016 à 11:02:10
Angoisse du matin, chagrin.

Je vois des ponts jetés par les uns et les autres au travers des nombreuses discussions de ce forum. Et aujourd'hui ce mot même de forum prend tout son sens : un lieu de rencontres, de va et vient continuels, mais que les uns traversent, muets de douleur et d'autres hurlant de souffrance. Y aura t-il, un jour, de nouveau, une place publique inondée de soleil, où réchauffer nos âmes si douloureuses et nos corps meurtris ? je suis une âme en peine,..
Grâce à Dieu, je suis athée !... mais je crois à l'enfer, puisque j'y suis !
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 21 janvier 2016 à 13:54:54
Tendrement avec toi Faïk
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 21 janvier 2016 à 13:58:26
Se laisser porter par sa douleur, l'accueillir, la laisser nous mener au fond du gouffre oui, ne pas en avoir peur même si parfois elle nous mène au bord de l'irréparable.
Je l'ai côtoyé longtemps ce gouffre, et il vient me visiter de temps en temps, il était déjà présent  du temps de la maladie, maladie qui me confrontait à mon insoutenable impuissance, à cette maladie plus forte que tout qui nous séparait déjà, parce qu'elle lui imposait une épreuve que je ne pouvais qu'accompagner mais pas partager. Elle dressait cette ligne de démarcation insupportable entre deux êtres aimants, elle donnait à voir cette séparation que l'on tente de ne pas voir quand on aime, cette impossibilité de pénétrer l'autre, ses tourments que l'on devine  face à sa mort inéluctable sans pouvoir y porter le moindre remède. On reste triste et silencieux spectateur de sa débâcle intérieure. Mon traumatisme est là, avoir été témoin impuissant de son tourment, témoin silencieux, je n'avais pas de mots pour le rejoindre parce qu'il est un territoire où on ne peut plus rejoindre l'autre, celui de sa proximité avec sa propre mort. On est seul face à la mort et même tout l'amour qu'on se vouait l'un à l'autre n'a pas pu nous donner de franchir cette ligne de démarcation, et ça c'était tout bonnement insupportable pour moi.
C'est ce constat qui me hante aujourd'hui.
Pierre ne s'est jamais posté en victime, n'est jamais devenu amer, Il a encaissé son diagnostic, un direct du droit qui nous a basculés dans un cauchemar. Il ne criait pas à l'injustice, j'ai même l'impression avec le recul que sa bienveillance s'est accrue. Il devenait encore plus précautionneux avec les êtres qu'il aimait. Il se préoccupait de tous. Comme si la maladie l'avait rendu encore plus empathique. C'était un être sans attente, tout ce qu'il recevait, il le considérait comme un don dont il devait se réjouir et  non pas avoir à prétendre.
C'est cette ligne-là que je fais mienne depuis sa maladie et que je souhaite garder, maintenir, c'est le plus bel héritage qu'il m'ait légué, là.
Les amis inadéquats, je ne les vois pas en ce moment mais j'essaie de ne pas les juger, ils ne savent pas ou ne veulent pas savoir mais à quoi bon les condamner, je suis une femme en deuil tout « simplement » mais cela pour moi ne me donne  ni le droit de me poster en victime, ni le droit de juger. Comment aurais-je agi à leur place ? Qu'aurais-je fait à leur place ?
Les maladresses nous atteignent parce que nous sommes déjà si fragiles, si démunis, si meurtris alors chacun y répond comme il peut ou garde le silence. Moi, j'essaie de les évacuer parce qu'elles ne sont que le signal de ce point de fracture entre nous, les endeuillés et ceux qui n'ont pas encore été confrontés à la perte d'un être indispensable à notre vie. Parfois aussi, je sors mes griffes et j'égratigne parce que parfois l'indignation et la colère sont plus fortes.
Comme le dit si bien Claude, il n'y a pas de recette, chacun vit sa perte avec son patrimoine affectif propre, à tout un chacun de trouver sa forme de réconciliation avec la vie ou non.
Je resterai inconsolable de son absence, je le sais, mais je ne veux pas m'ériger en martyre pour autant.
Tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 21 janvier 2016 à 14:53:50
Chère Piera,

Je n'ai pas de meilleure consolation que de sentir que l'épreuve que je traverse est à la fois totalement intime et absolument universelle.

Infiniment merci pour ta sincérité et ta générosité. Ton écriture est un baume sur mes cicatrices.

Si je pouvais, je te prendrai dans mes bras. Sans rien dire. Nous savons que nous savons.

Je t'embrasse et j'embrasse tous les lecteurs et toutes les lectrices de ce forum qui partagent leur souffrance et cheminent ensemble, côte à côte, pas à pas.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 21 janvier 2016 à 15:39:23
Je perçois ton cheminement, Piera, et cette volonté farouche de transcender le départ de la personne aimée, par la  préservation ou la transmission  des valeurs qui l'ont animée. Mais ce patrimoine, mon patrimoine,  je ne suis pas sûre de pouvoir l'accueillir, la colère et le chagrin laissent si peu de place !  Cet héritage est pour l'instant en déshérence.
Bien que nos mots soient différents, je reconnais toutes les étapes de cette incursion en "Terra incognita", celle de la maladie, de l'accompagnement, du renoncement, de la lutte, de la communion, du néant. Je suis actrice et en même temps spectatrice de ma vie présente, sur le devant de la scène et dans les coulisses. Je ne suis plus une, mais éparpillée.
Je pressens que ce qui a été bâti pendant ces longues années, et pourtant si courtes, ne doit pas être perdu, mais ma terra incognita à moi est désolée et stérile et j'ai bien peur que rien ne puisse désormais y pousser ! Je crois avoir perdu la capacité de voir le beau et le bon autour de moi, mais je sens, ici, et dans tes messages, une petite lueur, fragile, mais bien tangible. J'ai besoin de lumière...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 21 janvier 2016 à 16:15:54
A Milou,

De l'intime et de l'universalité de nos chagrins : c'est une question que je me suis longtemps posée. Et qui reste sans réponse satisfaisante pour moi : l'humanité souffrante n'a donc t-elle rien appris ?  Pourquoi sommes-nous si désarmés face à ces chagrins renouvelés, de toute éternité ?
La joie se partage facilement, on l'accueille sans efforts, pas d'apprentissage, pas de stratégies. Pas vu de manuel "Maitrisez votre joie, Reconnaître les étapes du bonheur"... 
Peut-être alors que le" bonheur" de vivre est inné, et participe de notre humanité.
Douleur unique, douleur universelle, douleur toujours. Mais sérénité demain ?



Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 21 janvier 2016 à 16:32:46
Milou,
Merci pour tes mots doux et ton accolade on aimerait parfois vraiment pouvoir prendre dans nos bras en silence, ces personnes du forum qui cheminent dans les méandres du deuil. Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 21 janvier 2016 à 17:07:11
Faïk,
Je ne voudrais pas te paraître intrusive  mais arrives-tu à mettre des  mots sur  ton vécu ?
L'éparpillement, la fragmentation, oui j'ai connu, tu vois je le mets au passé aujourd'hui parce que je sens que j'ai réussi à réunir un semblant de moi. Ce que je sais aussi c'est que mon état est très fluctuant, le gouffre n'est jamais loin, je me retrouve comme sur mon bateau voguant avec un doux alizé et tout à coup un gros grain et c'est le coup de tabac où tu penses que tu ne vas pas t'en sortir !
Je t'embrasse tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 21 janvier 2016 à 19:48:44
Des mots, j'en ai à foison, je pourrais si je le voulais, explorer tout le registre lexical de la douleur !
Ce que je vis, d'autres l'expriment également, dans la douceur, la colère, la tendresse.
Vécu : participe passé de vivre. Ou comment le "vivre" est passé.
C'est difficile de mettre des mots sur ce que l'on pense avoir vécu, alors que ce vécu se dilue constamment dans  le présent et dans l'avenir. J'ai l'impression que tout est confondu, et que pour mettre des mots sur ce vécu, il faudrait en être assez éloignée pour le distinguer correctement.
S'il s'agit de chronologie, oui, je peux parfaitement distinguer les événements et les inscrire dans le temps. Maintenant, y mettre des mots qui ne soient pas vides de sens, c'est une autre affaire. Mais est-ce utile ? est-ce nécessaire surtout  ?




Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 21 janvier 2016 à 19:59:38
Merci pour votre douceur et votre tendresse, et pour le temps passé à tricoter des mots de réconfort...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 21 janvier 2016 à 21:59:34
Bonsoir Faïk,
Quand je te lis, je te comprends ;  mais je ne trouve pas les mots, ni pour exprimer ma souffrance, ni pour consoler les autres.
Je me permets de te donner ce texte à lire : des mots qui m'ont parlé, que j'aurais aimés qu'on me dise, parce qu'on aurait compris et ça m'aurait fait un peu de bien dans ma tourmente.  Je t'embrasse  fort.
J’ai pas les mots " Grand Corps Malade

Il est de ces événements qui sortent tout le reste de nos pensées
Certaines circonstances qui nous stoppent net dans notre lancée

Il est de ces réalités qu’on n’était pas prêts à recevoir

Et qui rendent toute tentative de bien être illusoire

J’ai pas les mots pour exprimer la puissance de la douleur

J’ai vu au fond de tes yeux ce que signifiait le mot malheur

C’est un souvenir glacial comme ce soir de décembre

Où tes espoirs brûlants ont laissé place à des cendres

J’ai pas trouvé les mots pour expliquer l’inexpliquable

J’ai pas trouvé les mots pour consoler l’inconsolable

Je n’ai trouvé que ma main pour poser sur ton épaule

Attendant que les lendemains se dépêchent de jouer leur rôle

J’ai pas les phrases miracles qui pourraient soulager ta peine

Aucune formule magique parmi ces mots qui saignent

Je n’ai trouvé que ma présence pour t’aider à souffrir

Et constater dans ce silence que ta tristesse m'a fait grandir

J’ai pas trouvé le remède pour réparer un cœur brisé

Il faudra tellement de temps avant qu’il puisse cicatriser

Avoir vécu avec elle et apprendre à survivre sans

Elle avait écrit quelque part que tu verserais des larmes de sang

Tu as su rester debout et j’admire ton courage

Tu as su garder la tête haute et tu traverses cet orage

A côté de ton épreuve tout me semble dérisoire

Tout comme ces mots qui pleuvent que j’écris sans espoir

Pourtant les saisons s’enchaîneront saluant ta patience

En ta force et ton envie j’ai une totale confiance

Tu ne seras plus jamais le même mais dans le ciel dès demain

Son étoile t’éclairera pour te montrer le chemin
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 21 janvier 2016 à 22:55:24
Je ne suis pas patiente
Je ne suis pas confiante
Les étoiles meurent aussi

Merci Noëlle.
Merci à Noël, ma nativité, ma naissance, ma douleur.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: loma le 22 janvier 2016 à 07:51:09
J’ai pas les mots " Grand Corps Malade
en musique

https://www.youtube.com/watch?v=otOLRmyUo9Q
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 22 janvier 2016 à 19:22:40
  Merci pour le partage loma, je suis sûre que nous pouvons tous nous y retrouver.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 24 janvier 2016 à 18:46:16
"Mais est-ce utile ? est-ce nécessaire surtout  ? "
Ca m'a été très utile, salvateur je dirai même, pour ne pas me laisser emporter par la folie de la douleur.
Les mots paraissent toujours en deçà, mais je crois quand même en leur pouvoir, je crois au pouvoir de la parole, c'est le seul pouvoir auquel je crois d'ailleurs, moi qui ait vécu avec mon beau taiseux . J'ai appris à les choisir avec soin, à les pétrir, à les malaxer, à leur tourner autour jusqu'à ce que je trouve le mot le plus proche de mon état, de ma pensée, de ma colère, de ma rage, de ma douleur pour les dire ou les écrire,  pour les mettre en ordre pour qu'ils fassent sens dans cette vie basculée, bousculée où plus rien n'avait de sens parce qu'on m'en a tué l'essence.
Je réalise en écrivant que je formule au passé. C'est ça aussi la magie des mots, inscrire le changement, le donner à dire, à lire, à entendre, par devers soi.
Oui, je fais le récit de ma vie, je lui donne ordre, poids, consistance, je lui prête foi, je le fais mien, notre vie est récit et je veux que ma vie soit MON récit pas celui de ma folie. Je ne veux pas me laisser emporter par la déferlante, fatiguée de son roulement, de sa tyrannie, de sa dictature. 
Je veux rester debout aujourd'hui, pour moi, pour lui, pour notre fille.
Il ne me reste que les mots, mots échangés, partagés, hurlés, murmurés, plus que souvenirs, ce sous-venir qui perce à travers eux, qui pointe en moi, alors oui je me repais d'eux, je les visite et les revisite encore pour qu'ils ne m'échappent pas, pour les enkyster dans le papier, pour les inscrire et qu'au moins eux ne me quittent pas, et qu'ils soient désormais ma trame vitale, mon écharpe, mon étole de contention de ma vie avec lui.
Oui, il ne me reste plus que les mots et je suis sans voix parfois,  mais la voie se dessine malgré le chaos, le ravage, précisément dans cette monstration-là.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 24 janvier 2016 à 18:52:27
Mon coeur,
Première balade, belle et lumineuse, le soleil dans ces hêtres et ces chênes, oui, j'aime, c'est bon de retourner dehors, de marcher, le long de ces sentiers familiers, dans cette belle et généreuse nature, celle qui nous a aidés, soutenus, consolés, de notre désespoir pendant la maladie. Marches silencieuses ou bavardes, côte à côte ou loin l'un de l'autre, il n'y avait que ces beaux paysages pour tenir en respect mon angoisse, de voir ces sommets blancs au loin, de revoir la silhouette familière des arbres, c'était une bouffée de sérénité, de fraîcheur qui me réconciliait un temps avec le monde. Cette campagne  était  ma ligne de fuite, elle devient  mon horizon d'attente, désormais. 
J'appréhendais ce matin, j'avais peur de renoncer  une fois de plus, une fois encore... Chaque fois, j'étais convaincue de faire la balade, j'en avais tellement envie, mais le matin immanquablement, c'était au-dessus de mes forces, impossible de sortir de la maison, de cette cuisine tant aimée, notre pièce de vie, devenue ma pièce de vie, de ma survie,  mon cocon, ma cellule de clausura.
Impossible de sortir du périmètre de sécurité qu'était devenue notre maison, notre quartier. Impossible même de m'imaginer conduire sur cette route, tant empruntée.
Impossible de m'imaginer seule, en dehors de ce périmètre comme si je devais me dissoudre  dans ces lieux où  tu ne serais pas, où tu ne serais plus. 
Ce matin, c'était la même, identique nature que quand tu étais là et pourtant c'était si différent, j'étais toute présente à elle, à la sentir, à la humer, à recueillir le moindre rayon, oui, c'est peut-être une manière de ne pas me dissoudre, être présente entièrement, complètement à l' ici maintenant (non je ne suis pas tombée sur la tête, mon coeur, ou plutôt si ! la vie m'a mis cul par-dessus tête et j'essaie de survivre avec les moyens du bord), je devine ton sourire... non, je ne deviens pas mystique.
Mais je remarque que le fait d'être très présente à ce que je vis au moment présent est une véritable aide pour ne pas me faire engloutir par le gouffre, jamais loin.
Et puis oui, cette nature m'a rappelé que je vis, que je suis vivante, moi, qui ai le sentiment d'être morte, dans cette mort-là. C'était un bonheur tout simple d'être les pieds sur ces sentiers boueux, c'était bon de s'asseoir sur cette pierre chaude et regarder au loin les sommets enneigés, oui Pierre, et même si je retenais les larmes et j'étouffais les cris, c'était bon de me sentir vivante dans ce paysage familier, complice de notre amour.  Et tant pis, si le retour en voiture fut un cauchemar  inondé de  larmes et tant pis si j'en pleure, si j'en crève, je sais que j'y retournerai parce que bordel que c'est bon de se sentir vivant ! Oui, je suis indécente, obscène même, pour toi jamais, je sais, mais à mes yeux, un peu, aujourd'hui mais je finirai bien par le vivre sereinement ce retour à la vie que je sens poindre et qui se cabre encore et qui résiste encore.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 02 février 2016 à 09:29:48

Après avoir quasiment vécu mon deuil in clausura, après avoir fait une véritable descente dans mes entrailles, j'ai besoin de me confronter à l'extérieur, besoin d'affronter le regard de la vie, des autres, des moins intimes, des pas intimes du tout.
Ces temps, je me bouge, je me secoue, m'oblige, me pressurise parce que j'ai décidé qu'il était temps pour moi. Je me secoue parce que j'ai le sentiment de cautionner une sorte de victimisation chose contre laquelle je lutte par dessus tout, depuis toujours.
J'essaie de relativiser ce qui m'arrive pour m'extraire des griffes de la douleur et de la frustration.
C'est une autre manière d'inscrire le deuil. Je suis désormais seule, dehors, dans ces rues, dans ces lieux sillonnés ensemble. Au début ça m'a fait mal, horriblement mal, j'ai cru que je n'en serai pas capable, qu'il me faudrait rebrousser chemin, rentrer dans ma tanière panser ma plaie béante.
Et non, finalement je constate que c'est possible, je dois admettre l'évidence,  je peux le faire.
Je peux même aller au spectacle seule et j'assume d'en pleurer.
Je m'aperçois aussi que je ne suis pas  gênée de mes larmes, je me donne le droit de pleurer, dehors, hors de ma tanière.
Ce n'est pas de l'exhibitionnisme, ce sont  des larmes irrépressibles.
J'accepte d'avoir ces larmes, signe de ma vulnérabilité.
Elles sont simplement le témoin de mon deuil que les autres du dehors ignorent ou non et je dois dire que ce n'est pas important pour moi.
Autre chose aussi que je réalise quand je suis à l'extérieur, Pierre se convoque à mes côtés. Je ne me sens jamais seule, j'ai le sentiment qu'il m'accompagne et ça c'est nouveau pour moi. Je sens sa douce présence à mes côtés comme pour m'encourager, comme s'il était satisfait, soulagé de me voir reprendre le chemin de la vie. 
Comme je ne suis ni mystique, ni croyante, je sais  bien sûr que c'est moi  qui le convoque, que j'ai besoin de le sentir près de moi pour me donner la force d'être debout dehors où rien que l'idée me semblait insurmontable. Peut-être ai-je besoin de me rassurer, de me dire qu'il adhère à ma décision de prendre le chemin de la vie ?
Serait-ce aussi pour lutter contre cette mauvaise conscience (héritage de notre culture) jamais loin malgré tous les gardes-fous s'insinuerait-elle pour me glisser à l'oreille des insanités du style mais comment peux-tu rire ? apprécier un spectacle ? être bien alors qu'il est mort ?
Est-ce une manière  de concilier l'oxymore de ma vie ? Par ma force d'imagination, ma force de récit le convoquer à mes côtés, le faire être, le faire exister, nier sa mort.
Le faire être à mes côtés c'est aussi me dire que mon récit est plus fort que sa mort.
Je me demande quand le soufflé va retomber pour  réaliser que tout ça c'est de la construction, ma construction, de l'artifice pour tenir debout et que quand je réaliserais que même ça m'est nié alors je m'effondrerai vraiment, pour de bon ?
Est-ce cela l'impossible du deuil ? Jamais fini ? Il faut que j'accepte d'avoir à tricoter avec lui ma vie durant, pas facile comme compagnon !





Titre: Re : Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Helpa le 02 février 2016 à 10:53:29
Autre chose aussi que je réalise quand je suis à l'extérieur, Pierre se convoque à mes côtés. Je ne me sens jamais seule, j'ai le sentiment qu'il m'accompagne et ça c'est nouveau pour moi. Je sens sa douce présence à mes côtés comme pour m'encourager, comme s'il était satisfait, soulagé de me voir reprendre le chemin de la vie. 
Comme je ne suis ni mystique, ni croyante, je sais  bien sûr que c'est moi  qui le convoque, que j'ai besoin de le sentir près de moi pour me donner la force d'être debout dehors où rien que l'idée me semblait insurmontable. Peut-être ai-je besoin de me rassurer, de me dire qu'il adhère à ma décision de prendre le chemin de la vie ?

Bonjour Piera,

Tu n'es ni mystique, ni croyante, mais tu es ouverte. Ce qu'il faut, je crois, c'est ne pas nier ses sensations, mais les accueillir sans préjugé. A partir de là, tu auras peut-être des signes ou des coïncidences (des synchronicités) qui t'amèneront à penser qu'il n'est pas loin de toi et qui t'aideront à aller de l'avant. C'est ce que je te souhaite de tout coeur.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 02 février 2016 à 12:25:49
merci Piera,
Je vais très mal chaque jour de plus en plus, et je comprends de moins en moins ce que je fais encore sur cette terre. Et je viens de lire ton post et merci beaucoup, parce que te lire m'a fait beaucoup de bien. J'espère un jour avoir ces mêmes sentiments que toi, pouvoir refaire le parcours que j'ai fait avec mon trésor, revivre seule (mais avec sa présence) tout ce que nous aurions partagé et vécu ensemble.
J'ai d'ailleurs déjà fait une brève expérience comme ça : j'ai dû me rendre dans le vignoble (alsacien) et je suis allée dans une cave à vins dans laquelle nous n'étions jamais ensemble Philippe et moi. J'ai goûté les vins comme s'il était avec moi, j'ai choisi ceux qui lui auraient plu, j'ai pris mon temps et j'ai eu l'impression que comme avant il était là avec moi. J'ai mis les cartons dans la voiture, contente, j'avais l'impression que comme d'habitude nous avons fait cela tous les deux.
Pour moi c'est une lueur d'espoir Piera qui me sied bien aujourd'hui.
Je t'embrasse

Noëlle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 02 février 2016 à 13:47:17
  Je te comprends Noelle, moi c'est pareil, c'est important pour moi de sentir sa présence, même intengible, à mes côtés, et de le vivre avec une vraie paix intèrieure-enfin, pa toujours...mais ces instants de grace où le temps est comme suspendu, où un répit plus ou moins long a lieu, je te confirme que c'est possible à plus ou moins long terme. Tans que ça ne nous empêche pas de vivre, de continuer, il n'y a aucun mal, au contraire.

  Je te comprends particulièrement aujourd'hui, puisque ça fait 9 mois jour pour jour que Pierre nous a quitté. C'est toujours difficile ces jours-là.

  Je t'embrasse tristement et te souhaite de connaître un nouvel instant de paix, très bientôt  :'( :)
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 02 février 2016 à 14:29:42
Merci Stana,

je suis de tout coeur avec toi, ce jour,  particulièrement.

je t'embrasse

Noëlle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Claude1952 le 02 février 2016 à 15:35:47
Une chose est certaine à mes yeux : rien de bon ne sortira d'un deuil. Ce ne sont que pleurs et souffrance, gémissements, puis mélancolie et vague-à-l'âme, il semble que les blessures saignent moins au fil des années, mais on n'en sort jamais intact, moi ça fait dix ans et j'ai encore des réflexes d'endeuillé " débutant ".
C'est du courage qu'il faut, ça permet de traverser tant bien que mal les ans sans l'autre.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 03 février 2016 à 11:28:40
Noëlle,
Je suis heureuse si j'ai pu te mettre un peu de baume au coeur.
Je me sentais tellement amère en écrivant.
Amère, parce que j'ai peur que cette consolation de la présence de Pierre à mes côtés disparaisse comme elle est venue, qu'on me l'enlève elle aussi, que je réalise que ce n'était en fait qu'un doux mirage.
Il faut apprendre à vivre avec les caprices de notre nouveau compagnon, le deuil.
Il est fidèle je le préférerai volage !
Il est omniprésent, je le préférerai aux abonnés absents !
Il ne manque jamais, au grand jamais de se rappeler à nous !
Et quand on essaie de lui claquer la porte au nez, il y glisse un pied pour pénétrer malgré nous et démarcher son lot de douleurs, il y en a pour tous les goûts, tous les âges, personne n'est épargné, même pas les enfants.
Je dois apprendre à accepter, à accepter vraiment, pas juste en surface ce qui m'arrive, je n'y arrive pas encore. Je dois l'accueillir ce nouveau compagnon encombrant, indécent qui s'invite partout jusque dans mon lit, jusque dans mes bras, jusque dans mon coeur.
Je ne dois plus opposer de résistance, c'est ça le deuil ?
Me laisser faire ? Me laisser dévaster, envahir, anéantir ?
Lui laisser prendre toute la place, toute ?
Aujourd'hui, j'aimerai me dissoudre tout simplement pour ne plus penser, ne plus avoir mal, j'aimerai m'endormir et ne plus me réveiller à ce cauchemar.





Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Claude1952 le 03 février 2016 à 12:10:22
Oui, malheureusement rien n'y fait, sauf que vivre est vivre et que si l'on poursuit la route c'est qu'on y trouve un tout petit peu d'intérêt. Reste à savoir ce qui nous motive vraiment et de s'y adonner à fond. Moi c'était depuis toujours la musique et j'ai commencé par écrire une douzaine de chansons parlant du deuil, de la douleur, et.c, puis j 'en ai fait un CD et ça a été le début d'un autre commencement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 03 février 2016 à 12:15:09

Je me sentais tellement amère en écrivant.
Amère, parce que j'ai peur que cette consolation de la présence de Pierre à mes côtés disparaisse comme elle est venue, qu'on me l'enlève elle aussi, que je réalise que ce n'était en fait qu'un doux mirage.


Chère Piera,

Rien ni personne ne t'enlèvera ce que tu nommes un doux mirage, parce que l'amour que tu as pour Pierre n'est ni une illusion, ni un mirage. Cet un amour partagé dont tu es tout à fait sûre. La mort de Pierre n'a rien changé à cette certitude de ton amour pour lui.

La douleur lancinante, absolue, vient de l'absence, du manque et de cette terrible obligation devant laquelle la mort nous place : l'accepter, telle qu'elle est, c'est-à-dire sans concession, ou bien résister et tenter de négocier avec elle dans une quête de sens et de consolation.

Chacun trouve sa voie dans ce chemin étroit. Et les signes existent, puisque certains les perçoivent. La question n'est pas de savoir s'ils ont ou non une réalité.

L'amour est mystérieux et se manifeste à chacun par des voies impénétrables.

Pourquoi aimes tu Pierre ? Pourquoi le sens tu à tes côtés ?  Faut-il chercher une réponse à ces questions ?

L'amour est. Il n'a pas besoin d'explication. L'esprit ne doit pas demander des comptes au cœur. La quête de réponse entraîne vers la peur de perdre ce qui est déjà perdu : Pierre vivant, présent, amoureux, compagnon de tes jours et de tes nuits.

Il n'y aura pas de seconde perte, elle a déjà eu lieu.

Consentir au mystère, consentir à la mort. Accepter cet état de manque et espérer que la souffrance ne nous abîme pas pour continuer à être.

En te lisant, je suis certaine d'une chose : tu reste intacte malgré ta douleur.  Tu gardes en toi de merveilleuses qualités de partage, de générosité. Et je t'en remercie car elles me sont précieuses pour trouver mon chemin dans mon deuil impossible.

Je t'embrasse.
Milou

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: fleurdecoton le 03 février 2016 à 13:24:45
@ Pierra

Avant d'être mystique ou croyante , il faut écouter son coeur sans y opposer une quelconque résistance .... Et c'est ce que tu fais ...... Ton coeur est vivant ..... Tu entends et vois par ton coeur .....

Et c'est ce que j'essaye de détruire toutes les barrières intellectuelles,  ou de raisonnements qui m'empêchent d'accéder à mon coeur , car le coeur lui ne raisonne pas et n'intellectualise pas ..... 

Je crois sincèrement qu'ils meurent définitivement et nous aussi quand notre coeur se meure ....et là nous avons que la douleur ....

A bientôt


Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Claude1952 le 03 février 2016 à 13:52:44
Moi je crois très sincèrement que seule la mémoire maintient la vie passée, le souvenir de la personne disparue. Personnellement j'en suis au troisième livre qui est consacré d'une façon ou d'une autre à Marilyn et donc sa mémoire ne risque pas d'être altérée et son souvenir ne risque pas de disparaitre. Ce qui m'agace, c'est quand quelqu'un s'amuse à me dire, sans respect pour ma vue sur la question ( après tout c'est MON deuil et Marilyn est MA disparue ) :
- Elle est là, près de toi, parmi nous, elle vit encore avec nous.
J'écarte de ma route toute personne osant s'exprimer ainsi, car même s'il n'y a pas malveillance, il y a manque d'information sur qui je suis et sur qui Marilyn était.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 03 février 2016 à 14:19:04
Milou,
Ton message m'a beaucoup touchée. Merci pour tes mots même s'ils me font pleurer.
J'aimerais tellement croire que ce doux mirage restera parce que quelle douceur quand je le sens à mes côtés.
Je ne me pose aucune question sur mon amour pour Pierre. Mon amour pour Pierre a toujours été une évidence, on s'est reconnus tout de suite. Ca fait cliché mais j'assume, au premier regard, j'ai su que c'était lui. Et ça me fait d'autant plus rager d'en être séparée parce que je ne m'étais trompée!!!
C'est cette même force que j'ai toujours sentie dans les témoignages de ce forum, la puissance de nos amours que je retrouve et que nous partageons ici. 
Depuis hier, je n'arrive plus à contenir mes pleurs.
En ce moment, beaucoup de choses se passent, je finalise, entre autre, les papiers de succession, jamais bon tout ça.
Je ne veux rien de ce qu'il me laisse s'il n'est pas là pour en jouir, je trouve insupportable de constater à quel point il a été précautionneux, juste, loyal pour nous mettre à l'abri, nous préserver au mieux.
Aujourd'hui, j'en hurle, j'aurais aimé qu'il se révolte un peu, contre cette vacherie de maladie, contre la vie, contre je ne sais pas, j'aurais aimé qu'il s'abandonne un peu et qu'il cesse de me protéger, de nous protéger ! Oui, aujourd'hui je le pense et je le pleure, je me revois le surprendre à la fenêtre regardant dehors, les yeux remplis de larmes et nos regards qui se croisent impuissants devant la mort qui se tient à ses côtés.
Sombritude te revoilà, toujours prête à venir voir ce que j'ai dans le ventre ...


Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 03 février 2016 à 15:34:53

Chère Piera, je voudrais te prendre dans mes bras pour t'apporter le réconfort que j'aimerais tant recevoir. Mais nous savons toutes les deux que la seule personne capable de nous réconforter n'est plus là.

Aujourd'hui est un jour de larmes et de révolte. Un jour du souvenir des regards douloureux et impuissants.

Demain sera un autre jour.

Ce soir, lorsque mon tour sera venu, je relirai tes beaux messages des jours plus sereins. Et ils seront ma bouée pour ne pas sombrer jusqu'à demain matin. Je sais que tu en écriras d'autres car l'amour de ton mari te portera, malgré son absence infinie.

Je t'embrasse.
Milou
Titre: Re : Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 03 février 2016 à 16:22:57
Jour de larmes partagées...

"Seule la mémoire maintient la vie passée, le souvenir de la personne disparue."

Et quand la mémoire n'est plus, qu'elle se dilue dans le temps et l'espace ?
Pour avoir souvent  consulté de vieilles archives, je me suis souvent demandé, à la lecture de noms, oubliés, de prénoms, plus jamais murmurés, ce qu'il advenait de tout cet amour, de ces joies, de ces douleurs.
Les pleurs de Piera, ses doutes, sa souffrance auront-ils un jour un sens, pour elle, mais aussi pour nous et pour tous ceux qui suivront ?

Aujourd'hui je me contenterai de :

Souvenir: se présenter, venir au secours.

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Claude1952 le 03 février 2016 à 17:31:43
Très sincèrement je ne pense pas qu'un deuil ait un quelconque " sens ", je crois que l'homme veut toujours trouver un sens à tout, mais en fait qu'est ce qu'un deuil sinon la période de souffrance d'avoir perdu définitivement une personne chère ? On reste en deuil toute sa vie à partir du décès traumatisant et ça évolue un peu au sens où on s'habitue, non pas à la perte mais à la souffrance de cette perte, comme un mutilé s'habitue à la privation d'un membre, il adapte sa marche au manque de membre, trouve un autre équilibre, précaire et maladroit, et il en sera ainsi de nous tous.
Donc pour moi il n'y a pas de sens à chercher raison pour laquelle beaucoup sont très désemparés, car après avoir été désemparés par la mort d'une personne aimée, les voilà désemparés par leur conscience de l'inutilité d'y chercher un sens. Ca n'a pas de sens, la mort, c'est absurde et c'est tout. Le survivant en sort amoindri. Voilà.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 03 février 2016 à 18:18:00
Fleur, merci pour ton message dans le flot de larmes je ne l'ai pas vu..
Oh Fleur j'aimerai te croire, croire qu'on ne peut pas m'enlever ça parce que là j'en crèverai !
J'aimerai arriver à cette force tranquille dont tu irradies.
Tes interventions me font toujours du bien, m'apaisent. Merci

Faïk,
Tellement heureuse de te lire...
Je ne suis pas sûre d'avoir bien saisi ton message, aujourd'hui je suis incapable de rien, de réfléchir, de raisonner. J'ai le sentiment de me retrouver comme à l'annonce de sa maladie, totalement démunie et tordue de douleurs-
Je t'embrasse tendrement, très tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 03 février 2016 à 18:54:40
"Ça n'a pas de sens, la mort, c'est absurde et c'est tout."
La mort nous jette en Absurdie...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 03 février 2016 à 19:17:24
" Je ne pense pas qu'un deuil ait un quelconque " sens ", je crois que l'homme veut toujours trouver un sens à tout "

L'homme étant un être doué de raison, il raisonne et il semble "raisonnable" qu'il s'interroge sur le sens de la mort et tout son cortège d'émotions.

On dit que le coeur a des raisons que la raison ignore, eh bien peut-être que la raison est le secours  d'un coeur défaillant.

Chercher du sens n'est pas nécessairement en trouver, mais cette quête peut être salutaire quand tout est réduit à néant.
Quête existentialiste, quête du graal, peu importe, l'essentiel pour chacun d'entre nous, est de trouver les ressources nécessaires pour continuer.

A Piera, toute tordue de douleur, larmes contre larmes, et coeurs au diapason,

Au diable la raison !
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: loma le 03 février 2016 à 19:53:53
Piera,
il est des moments où je ne peux qu'ajouter mes larmes aux tiennes, on se retrouve face à l'inacceptable et à l'impossible ...

de plus si j'ai bien compris, tu es en pleine "partie administrative", avec toute son absurdité, sa fatalité ... alors que tu as besoin de recueillement et de quiétude.

Je t'envoie un peu de mon Mistral qui souffle fort aujourd'hui, afin qu'il balaie ces noires idées et éclaircisse ton ciel

je t'embrasse
loma
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 03 février 2016 à 21:11:37
J'en suis arrivée à me dire que la mort d'un aimé essentiel à nos vies n'a pas de sens...et qu'il me faut désormais trouver à donner un sens à ma vie d'après...et c'est pas facile...c'est laborieux, il me faut faire des efforts...cette quête de sens m'occupe  bien le cerveau...sans être sûr d'en trouver un, c'est la quête qui compte, je crois...moi aussi.
Je suis une maman en deuil...et ça fait peur...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Nora le 03 février 2016 à 22:02:21
https://www.youtube.com/watch?v=U2kn0Q3UHOc
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Claude1952 le 03 février 2016 à 22:08:05
Un grand pas est fait vers l'avenir sans la personne décédée lorsqu'on a enfin compris que chercher à trouver un sens à cette connerie de décès c'est perdre son temps. Le souvenir sera beaucoup plus riche et intact lorsqu'on aura renoncé à essayer de trouver dans tout cela ce qui ne s'y trouve pas. Les gens continuent à être très affectés, après des siècles, par la mort et ce qui tourne autour, c'est bien qu'ils n'ont pas compris, et s'ils n'ont pas compris c'est qu'il n'y a rien à y comprendre, à part que c'est la fin d'une vie. Et que c'est le début d'une existence sans, que cela nous convienne ou non. Or, cela ne nous conviendra jamais. Mais cela est.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 03 février 2016 à 23:28:49
Vous avez parfaitement le droit Claude de ne croire en rien,  de ne pas comprendre que d'autres endeuillés ne pensent pas comme vous ; vous avez le droit au fonds de vous d'être complètement cynique, de développer (intérieurement) une noirceur et un pessimisme absolu ..... Il me semblait néanmoins que ce forum devait apporter un peu d'apaisement , de compassion, un minimum de bien-être aux endeuillés, tout ceci sans jugement, dans la bienveillance et la tolérance.
Je comprends tout à fait que dix ans après avoir perdu  l'être cher  et avoir refait votre vie, vous soyez toujours malheureux. Je me permets néanmoins de vous remercier de bien vouloir aussi comprendre que d'autres endeuillés (plus novices ) ont droit à la parole, à leurs croyances, sans être forcément des imbéciles. J'ai perdu mon tout il y a un peu plus de six semaines, je me demande chaque matin pourquoi je me lève, et quand je vous lis, je n'ai qu'une envie c'est de me recoucher.
Noëlle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Pascale le 04 février 2016 à 00:12:59
Voilà qui est clair.

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 04 février 2016 à 00:53:06
A Claude

" Or, cela ne nous conviendra jamais. Mais cela est ".

Mais cela est, c'est vrai. Mais rien n'empêche d'y réfléchir : je vis avec elle tous les jours, elle m'a beaucoup pris, il est juste que j'en apprenne un peu plus sur elle... 

Etre dans la réflexion n'est jamais perte de temps... dire que la mort est une connerie relève déjà de la réflexion... ou pas...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: fleurdecoton le 04 février 2016 à 07:16:41
@ Pierra

Nul ne peux t'enlever ce que ton coeur te révèle .... Du fond de ton etre ou âme , l'amour a jailli ..... Comme du noyau ou de la graine,  une fleur avec ses couleurs et son parfum sort .... Méditer

Je t'embrasse

A bientôt

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 04 février 2016 à 11:02:26
Milou, Faïk, Fleur, EvaLuna, Noëlle, Ioma, Nora, Pascale, pardon si j'en oublie, merci infiniment de votre  douce et consolante présence à mes côtés.
Impression d'une monstre gueule de bois, incapable encore de réfléchir mais je cogite signe que je suis encore envie, en vie...
Je vais me bercer un peu avec cette consolante parole de Fleur "Nul ne peux t'enlever ce que ton coeur te révèle" Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: linou le 04 février 2016 à 11:17:22
Vous avez parfaitement le droit Claude de ne croire en rien,  de ne pas comprendre que d'autres endeuillés ne pensent pas comme vous ; vous avez le droit au fonds de vous d'être complètement cynique, de développer (intérieurement) une noirceur et un pessimisme absolu ..... Il me semblait néanmoins que ce forum devait apporter un peu d'apaisement , de compassion, un minimum de bien-être aux endeuillés, tout ceci sans jugement, dans la bienveillance et la tolérance.
Je comprends tout à fait que dix ans après avoir perdu  l'être cher  et avoir refait votre vie, vous soyez toujours malheureux. Je me permets néanmoins de vous remercier de bien vouloir aussi comprendre que d'autres endeuillés (plus novices ) ont droit à la parole, à leurs croyances, sans être forcément des imbéciles. J'ai perdu mon tout il y a un peu plus de six semaines, je me demande chaque matin pourquoi je me lève, et quand je vous lis, je n'ai qu'une envie c'est de me recoucher.
Noëlle


Bravo Noelle

Je te rejoins complètement dans ce que tu dis et tu ressens.  Tu as osé dire ce que je pensais tout bas et me mettais en colère!
Merci à toi

Linou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 04 février 2016 à 12:36:42
"Autant l'attachement à une école de pensée ferme l'esprit, autant l'attachement à la liberté freine la réflexion"

Laissons penser, pensons, mais avec compassion.


Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Pascale le 04 février 2016 à 15:37:19
Piera, enrobe toi de douceur, laisse doucement venir la douleur jusqu'à ce qu'elle te fasse peur, la laisser t'envahir jusqu'à l'épuisement, elle te glisse dans un sommeil sans rêve, et tu te réveilles parce que la vie t'appelle. Je ne te dirai pas courage c'est un mot que j'ai appris à ne plus aimer du tout.. Mais tiens bon et que prenfs des forces à qui t'en donne.. Tu y arriveras à trouver cette autre façon d'aimer qui naîtra de cette épreuve..

Force et paix à toi..

Pascale
Titre: Re : Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Bulle 777 le 04 février 2016 à 16:11:47

En ce moment, beaucoup de choses se passent, je finalise, entre autre, les papiers de succession, jamais bon tout ça.
Je ne veux rien de ce qu'il me laisse s'il n'est pas là pour en jouir, je trouve insupportable de constater à quel point il a été précautionneux, juste, loyal pour nous mettre à l'abri, nous préserver au mieux.

Piera,

J'ai ressenti le même sentiment lorsque j'ai fait les papiers de succession de ma mère... (qui, elle malheureusement n'avait rien prévu  :-(
Des pleurs à nouveau, une immense tristesse qui resurgit, ... un retour en arrière, hélas.
A chaque étape où il faut ranger ses affaires etc, cela réactive la souffrance du deuil !
Sans doute des étapes nécessaires, "normales" et ...cruelles !

Compassion...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 05 février 2016 à 10:52:35
Estocade de derrière les fagots pour me rappeler que dans le deuil c'est pas moi qui aurais le dernier mot.
Je me fais l'effet d'un cheval qui se cabre devant la douleur, je m'y oppose, je ne m'y abandonne pas, je n'en veux plus, je l'ai assez vue, je ne veux plus qu'elle me terrasse.
Et si j'avais tout faux ? si au contraire, j'acceptais de me laisser faire ou plutôt défaire ? Si je l'accueillais jusque dans mes derniers replis ? J'avais cru l'avoir fait mais je comprends aujourd'hui que je n'en étais qu'au seuil, ces jours, j'en visite les entrailles et j'ai le sentiment qu'elles sont infinies.
Je revisite aussi tous les moments douloureux de la maladie, en réécoutant un morceau que tu écoutais souvent, j'ai cru entendre ce que tes mots  ne disaient pas, ta détresse, ton désarroi, ta solitude, oh ! mon amour ! quelle vacherie cette épreuve !
Je te revois dire combien tu étais heureux avec tes 2 femmes mais ce bel amour n'a pas su te préserver, de sujet pleinement consentant d'une vie pleine de sens (je me demande maintenant après ce qui nous est arrivé, si j'avais raison de vivre dans cette insouciance et ce bonheur que je regarde comme indécent aujourd'hui du haut de ma douleur, j'ai le sentiment que ce n'était pas moi cette femme rayonnante!) on devient objet malléable et totalement soumis à cette fichue maladie.
On n'est plus rien, on perd le sens de notre être, on devient mélanome choroïdien  et on vit désormais au gré de ses caprices. On négocie notre agenda avec les médecins, on planifie nos vacances avec les traitements, on part bardés de certificats médicaux expliquant ce qu'il faut faire en cas de...
On apprend à vivre avec un noeud-là, paf ! dans le plexus, ce plexus devenu béton armé que je n'arrive plus à dénouer...
Et pourtant on l'a vécu, on l'a traversé cette épreuve côte à côte, parfois seul à seul, mais ensemble.
Mais je n'ai rien pu faire, impuissante, c'est ça que je rumine ces jours.
Mercredi prochain, nous serons une poignée de tristes sires à t'inhumer.
Il m'en a fallu du temps pour me décider, je ne savais pas ce que je ferai de tes cendres. Et puis, un jour c'était une évidence, tu reposerais au cimetière. Cimetière, ce lieu où l'on dort tout simplement, ce lieu où tu dormiras pour l'éternité. J'ai choisi l'emplacement avec soin, de magnifiques arbres près de toi et dans une trouée j'aperçois les sommets enneigés, voilà, dessus je poserai une simple pierre locale de ta taille à toi, sur toi mon Pierre et j'irai chercher au bord de la rivière une pierre sur laquelle graver ton nom et « tes dates »  (c'est ça le résumé d'une vie???- réduit à 2 dates!!!!) Et puis j'aimerai trouver un ange pour que mes yeux se posent sur lui et qu'il me console un peu.







Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 05 février 2016 à 11:16:06
" Et moi, je te le déclare :  tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise".

Puisse chacun d'entre nous trouver son église,

Porte toi bien Piera



Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 05 février 2016 à 11:59:44
Piera,

Faire son deuil, ou se laisser faire par le deuil... Que décidons nous dans cette dévastation ?  Pas grand chose, je crois.
Juste la volonté de ne pas sombrer complètement, et encore...

Tu as bien fait d'être insouciante pendant que le bonheur était là. Il n'y a aucune indécence. Tu étais toi même. Ne te reproche rien, cette torture s'ajoute inutilement à ton chagrin.

J'ai perdu mon père très jeune et je n'ai jamais connu l’insouciance, même dans les moments les plus heureux de ma vie. Comme je le regrette maintenant !

Tu ne dois pas expier cette vie qui t'es donnée et que la maladie à prise à ton compagnon. Tu ne le mérites pas et la maladie n'a pas le droit de dévaster aussi ta vie.  Elle t'a déjà assez fait de mal comme çà.
C'est un peu trivial comme posture. Mais il faut bien trouver un combat à mener pour soi, quand on a perdu celui mené pour sauver son homme.

J'aurai une pensée pour toi mercredi prochain.
Cimetière, lieu de repos pour les âmes qui nous ont ont quittées et lieu de recueillement pour les âmes en peine.
Triste et nécessaire chemin à prendre en laissant couler les larmes.


Je t'embrasse.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: linou le 05 février 2016 à 13:16:10
Aujourd'hui cela fait deux mois....
J'ai été à l'église mettre une bougie à Sainte Rita dans l'espoir d'apaiser mon cœur meurtri.
Tout est dur, tellement dur.
J'ai peur d'être sans lui, je le suis mais je donnerai tout pour le revoir un jour, une heure, entendre sa voix, avoir ses bras autour de moi. Il me manque tant.
Comment on fait pour survivre, oui c'est de la survie...
Hier j'ai pensé à toute la souffrance qu'il a enduré pour rester près de moi, mon petit Mamour. Je t'aime mon cœur.
Je t'aimerai toujours. J'espère que de là-haut tu veilles sur moi et que tu me guides. 

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 05 février 2016 à 17:48:59
Ma chère Linou,
samedi ça fera sept semaines que l'amour de ma vie n'est plus là. Je partage ta peine, et par moment quand j'ai l'impression que je vais un court instant un peu mieux,  je pense qu'il est là, pas très loin et m'insuffle un peu de sa force pour que je puisse continuer. Comme je te comprends Linou. C'est bon d'essayer de se faire du bien comme on peut, avec un rituel ou des pensées ou une espérance ; sans cela je crois qu'on peut devenir fou.
Pour le moment Linou, je ne pense pas à l'avenir ; j'essaie de vivre chaque journée, heure par heure.
Je vois une psychologue qui a plusieurs cordes à son arc dont l'hypnose. ça me fait beaucoup de bien.

Je pense à toi,

Je t'embrasse

Noëlle
Titre: Re : Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 05 février 2016 à 22:44:39
Vous avez parfaitement le droit Claude de ne croire en rien,  de ne pas comprendre que d'autres endeuillés ne pensent pas comme vous ; vous avez le droit au fonds de vous d'être complètement cynique, de développer (intérieurement) une noirceur et un pessimisme absolu ..... Il me semblait néanmoins que ce forum devait apporter un peu d'apaisement , de compassion, un minimum de bien-être aux endeuillés, tout ceci sans jugement, dans la bienveillance et la tolérance.
Je comprends tout à fait que dix ans après avoir perdu  l'être cher  et avoir refait votre vie, vous soyez toujours malheureux. Je me permets néanmoins de vous remercier de bien vouloir aussi comprendre que d'autres endeuillés (plus novices ) ont droit à la parole, à leurs croyances, sans être forcément des imbéciles. J'ai perdu mon tout il y a un peu plus de six semaines, je me demande chaque matin pourquoi je me lève, et quand je vous lis, je n'ai qu'une envie c'est de me recoucher.
Noëlle
Merci de dire toutes ces hoses chère Noelle, je suis d'accord avec toi comme tu le sais^^
  Claude n'a aucune mauvaise intention, j'en suis sûre, à mon avis il vit son deuil à sa manière, la manière qui pour lui est la seule valable. S'il puise un vrai réconfort dans sa certitude que sa défunte femme (j'allais dire paix à son âme, mais je ne veux pas faire à autrui ce que je ne voudrais pas qu'on me fasse: parler d'un ton péremptoire de ce qui est opposé à son approche personnelle) existe uniquement dans ses souvenirs et apprécie de les revivre en pensée, tans mieux pour lui, nous sommes tous différents. Sans doute est-il tellement habituée à voire les choses de cette manière que les remettre en doute serait inconfortable pour lui puisque ça èbranlerait ses certitudes, et par là même cette tranquilité d'esprit qui lui est propre.
  Ce qu'il ne faudrait pas faire c'est assèner ce qui sont pour lui des vérités à des personnes qui n'ont pas la même approche que lui, et ont leurs propres convictions, leur propre réconfort, sans même ajouter: "C'est mon opinion" mais comme quelque chose d'incontestable.
  Ilk y a encore quelques années, ce genre de propos aurait pu m'ébranler, me terrifier même, mais plus maintenant, ma foi est de 99%, et cette paisible certitude, ègale à la sienne manifestement ne peut m'être ôtée  ;)
  Comme je l'ai déjà dis-mais je vais le résumer vite fait^^-j'avais déjà cette foi très profonde depuis quelques années, elle n'est pas apparue et ne s'est même pas renforcée depuis mon deuil, elle est restée égale à elle-même, donc il ne s'agit pas d'une forme de déni. Elle est mon plus doux réconfort, et quoiqu'on puisse me dire (j'ai connu des gens infiniment plus indélicats depuis le 02 mai, et même si je ne les ai jamais crus, une telle méchanceté, consciente ou non, m'a déchiré le cœur) je n'en dévirai jamais.
  Mon compagnon était athée. Je me suis dis, avec un petit sourire tranquille, quelques jours après son départ, en dépit de l'atroce souffrance: "Maintenant, il sais." Et oui je le sais que c'est Danièle Mittérand qui l'a dit en premier  :D

  Ne t'en fais surtout pas Noelle, l'absence de preuve n'est pas scientifiquement la preuve de l'absence^^et nos bien-aimés sont les pierre d'angle-que dis-je les Pierre d'angle si tu vois ce que je veux dire  :)-de notre survie, ils ne sont pas loin et ne veulkent que notre bonheur.
  C'est du moins ma conviction.
  Mais moi je le dis...

  Je t'embrasse.
 
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: agapimou le 05 février 2016 à 23:09:10
Chère Piera,

"j'ai le sentiment que ce n'était pas moi cette femme rayonnante!"

Je comprens bien ce que tu veux dire, surtout quand je parviens à regarder quelques photos de nous deux,... ce qui m'est difficilement possible sans être envahie par un raz de marée mélancolique!

Moi aussi j'ai l'impression de ne plus être cette même femme , heureuse de vivre à tes côtés, souriante, espiègle, amoureuse!

Moi aussi je ressens cette insouciance d'"avant,"....Avec mon homme à mes côtés, je ne risquais rien, il était mon pilier dans l'existence, quelqu'un de sûr, de fiable, de solide!

Mais je pense, Piera, que ce bonheur que nous avons vécu fait notre force, notre richesse.

Et ce que nous avons été, nous le sommes encore, tu ne crois pas?
Ce que nous avons été fait partie de notre mémoire de femme....elle ne s'éteint pas.
La relation avec notre amour nous a construite, nous nous sommes épanouies au fil des jours, des semaines, des années grâce au lien si puissant que nous avions avec notre homme..

Cette femme que nous avons été existe toujours, c'est comme cela que nous étions, que nous vivions à ses côtés, qu'il nous aimait, et qu'il nous aime encore....c'
C'est comme cela que je ressens cette dure période que je traverse, mais sans doute que chacune d'entre nous ressent les choses à sa manière.

Bien sûr que je ne suis plus insouciante et gaie, je ne ris plus aux éclats comme avant, je ne nage pas dans le bonheur, et les rayons de soleil n'irradient pas mon quotidien, bien sûr!....j'ai même cru mourir de chagrin tellement ton départ m'a laissée anéantie, exsangue!.......quand ton coeur s'est arrêté,  j'ai bien cru mon amour que le mien s'arrêterait de battre aussi......

Mais le bonheur que nous avons vécu est un capital, c'est comme cela que je le vois et le ressens, comme un capital dans l'existence, comme un plus, et non comme un moins!....je suis très heureuse et pleine de gratitude d'avoir pu vivre ce bel amour...même si la nostalgie m'envahit souvent et c'est peu de le dire !(ça ne fait que cinq mois...)

Ce que j'ai vécu avec mon mari nous appartient et ne reviendra plus jamais ainsi, chaque relation, chaque amour est unique !

Mais je refuse cette idée d'une métamorphose, d'une transformation radicale après un deuil, comme si on laissait tout définitivement derrière soi......comme si nous étions des voyageurs sans bagages!

La femme que j'étais, je la sens encore à l'intérieur de moi, peut-être même quelque  part "intacte"; même si je suis infiniment meurtrie et que mon coeur saigne...

Je suis encore la femme qu'il aimait, je ne suis pas une autre

Je t'embrasse Piera
Titre: Re : Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 05 février 2016 à 23:30:59
" Et moi, je te le déclare :  tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise".

Puisse chacun d'entre nous trouver son église,

Porte toi bien Piera
Ca m'émeut beaucoup de lire ça  :( :)
  Je me souviens que l'été dernier, je me promenais avec mon compagnon, et qu'à l'entrée d'une église on a un peu discuté avec un prêtre. Bien qu'athée, Pierre était très respectueux des croyances d'autrui, et quand, à un moment, le curé lui a repelé cette phrase de Saint-Pierre, ça l'a fait sourire avec un attendrissement amusé-une expression que je connaissais très bien^^
  Moi j'ai trouvé ça adorable, et cette phrase m'est restée, c'est pourquoi maintenant je me dis: "La Pierre d'angle qui permet à ma vie de ne pas s'èffondrer; sans cette Pierre d'angle, l'édifice ne tiendrait pas".
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 06 février 2016 à 00:31:21
merci Stana,
Philippe et moi n'étions pas croyons ou du moins pas en un Dieu unique. Ensemble nous avons entamé un chemin vers une forme de spiritualité. Et bien sûr que depuis que mon amour est parti, je me souviens de nos échanges à ce propos, de notre évolution  commune, tout en me rappelant à quel point mon "autre" était cartésien ; et bien évidemment que je poursuis ce cheminement maintenant, même si je n'ai aucune certitude. Ce que nous vivons tous ici semble tellement insurmontable que finalement l'essentiel n'est-il pas  qu'on se comprenne,  que les paroles de certains d'entre  nous soient simplement un appel au secours ou pour d'autres, ressenties comme  un réconfort ? En tout cas pour moi, j'avoue souvent trouver un apaisement ici.
Je ne témoigne pas beaucoup, mais je te lis toujours ; je sais ta douleur et je pense très souvent à toi.

je t'embrasse
Noëlle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 06 février 2016 à 00:44:17
  Merci à toi Noelle. Moi aussi je connais ton immense douleur et je pense tous les jours à toi.

  Je vois ce que tu veux dire: moi aussi j'ai une spiritualité qui m'est propre, sans avoir besoin d'étiquette. C'est une question individuelle.
  Tes paroles sont apaisantes aussi pour moi et, j'en suis sûre, pour d'autres encore  :)
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 09 février 2016 à 13:43:16
Hier, je suis allée sur ta tombe, drôle d'effet ce possessif !
Le poème d'Hugo résonne étrangement à mes oreilles aujourd'hui, je commence à ressentir cette même urgence d'aller me recueillir sur ta tombe. J'ai planté des fleurs et même un mimosa, clin d'oeil, mon coeur ! J'aurais voulu tapisser ta tombe comme un sous-bois mais c'est presque ça.
Hier, le vent soufflait follement dans ces grands arbres qui t'entoureront et j'avais le sentiment d'une présence à mes côtés. Les branches s'agitaient doucement malgré les rafales, je crois que j'ai bien choisi ta place, ces grandes cathédrales végétales veilleront sur toi comme elles ont veillé sur moi en me murmurant des mots doux. Et juste à côté, il y a une jolie tombe avec des fleurs comme on les aime, toutes simples, et il y a une grosse pierre avec son nom à lui, c'est seulement hier que j'ai réalisé que vous aviez presque le même âge à votre mort. Et j'ai eu une pensée émue pour elle qui l'a perdu 10ans plus tôt, il y a 10ans, nous, notre bonheur était tonitruant.
A demain, mon coeur, amour de ma vie, amour de mes nuits.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 10 février 2016 à 13:44:42
Oh come t’inganni
se pensi che gl’anni
non hann’ da finire,
bisogna morire.
È un sogno la vita
che par sì gradita,
è breve gioire,
bisogna morire.
Non val medicina,
non giova la China,
non si può guarire,
bisogna morire.
Non vaglion sberate,
minarie, bravate
che caglia l’ardire,
bisogna morire.
Dottrina che giova,
parola non trova
Che plachi l’ardire,
bisogna morire.
Non si trova modo
di scoglier ‘sto nodo,
non val il fuggire,
bisogna morire.
Commun’è statuto,
non vale l’astuto
‘sto colpo schermire,
bisogna morire.
La morte crudele
a tutti è infedele,
ogn’uno svergogna,
morire bisogna.
È pur ò pazzia
o gran frenesia,
par dirsi menzogna,
morire bisogna.
Si more cantando,
si more sonando
la Cetra, o Sampogna,
morire bisogna.
Si muore danzando,
bevendo, mangiando;
con quella carogna
morire bisogna.
I Giovani, i putti
e gl’Huomini tutti
s’hann’a incenerire,
bisogna morire.
I sani, gl’infermi,
i bravi, gl’inermi
tutt’hann’a finire,
bisogna morire.
E quando che meno
ti pensi, nel seno
ti vien a finire,
bisogna morire.
Se tu non vi pensi
hai persi li sensi,
sei morto e puoi dire:
bisogna morire.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 10 février 2016 à 15:34:23
Chère Piera,

Je ne comprends pas mais je devine.
Que c'est beau à lire !

De tout cœur avec toi.

Je t'embrasse.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 12 février 2016 à 13:13:36
je suis au bout des mots, à bout de mots...


Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 12 février 2016 à 13:14:10
Sale la nebbia sui prati bianchi
come un cipresso nei camposanti
un campanile che non sembra vero
segna il confine fra la terra e il cielo.

Ma tu che vai, ma tu rimani
vedrai la neve se ne andrà domani
rifioriranno le gioie passate
col vento caldo di un'altra estate.

Anche la luce sembra morire
nell'ombra incerta di un divenire
dove anche l'alba diventa sera
e i volti sembrano teschi di cera.

Ma tu che vai, ma tu rimani
anche la neve morirà domani
l'amore ancora ci passerà vicino
nella stagione del biancospino.

La terra stanca sotto la neve
dorme il silenzio di un sonno greve
l'inverno raccoglie la sua fatica
di mille secoli, da un'alba antica.

Ma tu che stai, perché rimani?
Un altro inverno tornerà domani
cadrà altra neve a consolare i campi
cadrà altra neve sui camposanti.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 12 février 2016 à 14:47:27
je suis au bout des mots, à bout de mots...

Piera,
il n'y a peut être plus rien à dire...Juste penser à lui et accepter qu'il ne soit plus là pour ne plus le chercher autour de toi et le retrouver en toi.
Je ne sais pas...
Je t'envoie toute mon affection.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 23 février 2016 à 17:34:50
" je me sens parfois la fille de mes enfants";

Ma fille m'a  dit il n'y a pas longtemps :"les rôles sont inversés ; avant quand je venais à la maison, j'étais bien entre vous deux,je me sentais comme dans un cocon, maintenant ce n'est plus pareil ; tu n'es plus la même maman ; je me dis que peut être un jour tu redeviendras comme avant ? ..." Je sais que je ne redeviendrai plus jamais "comme avant", du temps de ce grand amour partagé avec mon tout. Peut être un jour, sera t il possible que je reprenne ma place de maman ? Même adultes, les enfants ont besoin quelquefois d'être des enfants pour leurs parents.
Noëlle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: arfaca le 23 février 2016 à 20:50:04
Bonsoir Noëlle
Moi aussi j ai l impression de n être plus la mère de mes enfants  (ils ont 20ans)ce sont eux qui prennent soin de moi qui veillent à ce que je ne reste pas seule .Bien sûr eux ils ont leurs amis et c est normal,moi je n ai pas tjs envie d aller chez les gens car la encore je ne trouve plus ma place.
Je sens que je ne leur apporte plus le même soutien ,conseil,réconfort que celui  qu' on pouvait leur offrir avec leur père .On essaie de vivre comme avant mais je me rends compte que c est difficile :les discussions ne sont plus les mêmes et même les désaccords et 'coups de gueule"ne sont plus là. ....tellement peur de briser à nouveau cette nouvelle vie "rafistolée"...j aimerai tant reprendre ma vie de femme et de maman...triste désarroi!
Bises
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 29 février 2016 à 15:57:16
29.02.1984-29.02.2016
32 anni, tanti, tanti e pure ci sei sempre, presente, dolcemente e costantemente presente, non un giorno che non ci sei pensandoti o semplicemente sentendoti vicino e così vorrei fosse per Lui. Pensarlo con questa stessa tenerezza, dimenticare l'amarezza dell'assenza, dell'abbandono, di una vita che non ha più senso. Oggi aiutami tu, ti prego  a ritrovare il cammino della serenità perchè io oggi non reggo più questo dolore o allora , dimmi promettimi di portarmi  lontano, lontano da qui!
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 29 février 2016 à 17:08:45
A l'aise en anglais... mais en italien, je prends mon dictionnaire et tenterai :

Tanti anni per noi anche, eravamo così giovani,

Tutti i miei pensieri


Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 29 février 2016 à 18:53:39
Oh Piera,
De tout cœur avec toi, dans toutes les langues de la terre et du ciel.
Tendrement.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 29 février 2016 à 22:35:05
Merci grazie d'être là di essere qua !
Dolcezza e tenerezza nient'altro non desidero nient'altro perché il mio amore è morto, si morto e non tornerà mai più, mai più, me l'hanno detto le nuvole, me l'hanno detto i bambini, me l'hanno detto gli angeli, non ho voluto crederli, no, ma oggi li credo, oggi lo so, oggi lo sento, non tornerà mai più il mio tenero, caro, e grande amore.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: souci le 01 mars 2016 à 00:22:51
https://www.youtube.com/watch?v=FpOEN93LX-E (https://www.youtube.com/watch?v=FpOEN93LX-E)

    Et un bon gratin de cannelloni aux spinaci pour domano matini (ou domane matino), et gelato, et cappucino ...
    avec les copines, bien sûr !
    Bisou, Martine.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: loma le 01 mars 2016 à 07:37:52
quand il n'y a plus de mots, quelquefois la musique ....

http://www.lacoccinelle.net/244892.html

étant du sud, je devine les paroles, ou je les ressens, mais j'ai mis la traduction
tendrement avec toi, loma
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 01 mars 2016 à 10:42:47
Pour rester dans l'alimentaire, ma douce Souci, ma vie ressemble à un plat de lasagne, des strates qui se superposent mais ne se ressemblent pas, ah!ah ! l'humour revient c'est un signe...
Des jours, je vais  bien, je vis simplement sans me poser une seule question, c'est juste comme ça une évidence. Je vaque avec plaisir à mes occupations, je me marre, je cuisine, je cause, je lis, je vis quoi!
Et des jours sans crier gare c'est plus possible, c'est tout simplement impossible, insupportable, je veux qu'il soit là, là avec moi, avec nous. Alors oui ces jours c'est terrible, c'est moche et il n'y a de la place pour rien d'autre, rien d'autre.
J'aimerai avoir son humour, ses estocades pour faire tomber le pathos quand je me prends un peu trop au sérieux ! Mais ces jours-là, rien n'est possible, aucun recul, je prends tout dans les gencives et ça fait mal, mais ça, copines du forum, je ne vous apprends rien...
Merci d'être là et désolée de vous imposer mon italien (Faïk, tu t'en sors haut les mains!) parfois je ne peux parler qu'en italien c'est comme ça...
Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 01 mars 2016 à 11:44:52
(http://www.aht.li/2839748/Ma_linea_a.jpeg)
Italien, anglais, espagnol, poèmes, cris, larmes, peu de mots, beaucoup... tout pareil !
Pour rester en Italie, la Linea, revue et corrigée. Ligne brisée... la ligne courbe serait un rêve actuellement et la droite n'est plus ou n'a jamais été qu'un souvenir,

Je pense à vous,
Portez-vous bien
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 01 mars 2016 à 13:40:47
  J'aime beaucoup tes dessins faïk, tu les choisis bien  :) je pense que nous sommes nombreux à nous retrouver dans ce dernier notamment: le moral en dent de scies, c'est bien ça, oui  :'( :)

  J'espère que tu n'es pas dans une trop mauvaise phase aujourd'hui.
 :-*
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: arfaca le 01 mars 2016 à 23:15:53
Cette ligne brisée représente bien aussi ma vie. Comme Tu le dis Piera ,certains jours tout va ;on se dit qu' on se sort la tête de l eau et puis sans crier gare tout s ecroule et cette absence est horrible ,elle bloque toute progression vers l avant .L avenir reste noir et sans issue et toujours se poser la question "comment vivre dans Lui" et pourquoi? "
Alors il faut puiser parfois dans les souvenirs, dans l amour reçu et donné;dans ce qu' il aimerait que l'on soit ...Survivre et s'accommoder de cette douleur me demande bcp d efforts ....les autres ne s en rendent pas compte...c est bien là le triste sort de nous "les endeuillé s"
C est pour cela que passer un temps avec vous me permet d apaiser ma souffrance.
Tendres pensées à vous tous
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 05 mars 2016 à 18:06:02
Aujourd'hui je sens, je sais, je le vis ce non retour, tu ne reviens pas homme de ma vie, tu ne reviendras plus, plus jamais.
Je suis triste extrêmement triste et je n'ai plus envie de me raconter des salades du style je te sens près de moi, non je ne te sens pas près de moi, près de moi là il y a du vent, il y a du rien. Tu n'es pas là !
Rare samedi où je ne suis pas aux puces avec nos zigotos de puciers alors oui ce jour je l'ai senti passer, genre colique néphrétique du cerveau.
Je n'ai pas envie de cette vie sans toi ! Je n'en veux pas ! Tout de toi me manque, ton regard oh mon coeur tes yeux justement eux que ce maudit mélanome a choisi mais même lui n'a pas réussi à l'altérer, non là il n'a pas eu le dernier mot.
Pierre, Pierre, Pierre je ne peux pas vivre sans toi, je ne peux pas vivre sans toi je ne peux vivre sans toi et surtout je ne veux pas vivre sans toi je ne veux pas vivre sans toi.
Pourquoi je devrai endurer ça ??? Pourquoi ? J'ai trop mal là !
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: arfaca le 05 mars 2016 à 18:40:59
Même ressenti ce jour,pourquoi jé n en peux plus?Marre de cacher cette douleur.marre d attendre ...ça ira mieux,le temps fera passer!!!je n en veux plus non plus de cette vie sans toi,de cette maison  sans toi ....résister pour les autres ,pour les enfants même ça c est trop dur...je voudrai disparaître ne plus avoir mal,les enfants ne me verraient plus souffrir,peut etre pourront ils mieux avancer ainsi,je n apporte plus rien à personne que de la tristesse! Se raccrocher aux souveni ne me suffit pas,je te veux toi...reviens maintenant, je te veux...et là encore pourquoi je te parle je le sais tu ne reviendras pas
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: FREDIE le 05 mars 2016 à 18:43:27
oh comme tu écris bien et comme tes mots ressemble étrangement à ceux que je voudrais écrire.  Car aujourd'hui, c'est un jour sans, en même temps, il n'y a jamais de jour où je me sente mieux. Mais je voudrais tellement le rejoindre, j'ai une place à côté de lui réservée, je voudrais la prendre maintenant pour etre à côté de lui car je n'en peux plus de ne plus le sentir, de ne plus le voir, de ne plus l'entendre, de tout faire toute seule , de décider toute seule, de conduire toute seule, en conclusion de ne plus être à côté de mon amour avec qui j'étais mariée depuis 26 ans. Et je sens encore son linge qui n'a pas été lavé mais je cherche un signe qui me dit qu'il n'ait pas loin, mais je ne ressent rien qu'un vide immense. Je ferme les yeux pour me souvenir de lui mais je ne revois que les quatre derniers jours en soins palliatifs où il était inconscient et où il est parti sans que nous puissions nous dire au revoir.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: arfaca le 05 mars 2016 à 19:46:53
Fermer les yeux ,se  souvenir...les derniers jours avant sa mort m ont filé entre les doigts...comment j aurai pu savoir que nous vivions nos derniers instants ...il est parti à  l aube de ses 48 ans;betement d un accident. ..jé n arrive même plus à me souvenir de nos ultimes moments ...Après 3jours de déplacements professionnels, un retour tard dans la nuit,notre dernière étreinte puis un lever tôt. ..un dernier baiser doux ...etun " à  ce soir!"
Ce soir n arrivera pas n arrivera plus jamais. ..J attends,j attends....
On ne s est rien dit. ..pas même un dernier petit souffle pour llui dire tout mon amour...cela fait 18 mois que ces mots sont en travers de ma gorge et m empeche de respirer  de vivre. .
Triste souvenir ;l image des secouriistes de l hélico du Samu et de ma fille qui hurle et retiens les secouristes   par les bras pour qu ils  continuent ....mais en vain
C est fini
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 05 mars 2016 à 21:45:50
Chère Piera,
L'absence est la pire des compagnes. Elle ne propose que le vide, les larmes et le regret du temps passé.
Il n'y a aucun compromis.
Juste passer les jours, l'un après l'autre, sans rien en attendre.
Et espérer sans même savoir ce que l'on espère.

Je souhaite que cette nuit et la prochaine journée t'apportent un peu d'apaisement.
Je suis de tout cœur avec toi et je t'embrasse.
Milou




Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: arfaca le 05 mars 2016 à 22:55:26
Triste journée ...

Attendre,espérer, aimer pour toujours. ..
Overdose de manque....à en mourir.

Demain dimanche il faudra attendre encore.

Cette nuit ,oser esperer de lui de ses bras de sa chaleur!
Je vous embrasse tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 06 mars 2016 à 10:01:59
Merci infiniment copines du forum et navrée de rajouter de la peine à la vôtre et vous asséner ma sombritude mais ce mois de mars a de la peine à passer pour moi, il me reste en travers de la gorge et je ne sais pas si je suis de l'étoffe des mères courage qui tienne pour leur enfant...
Très tendrement avec vous
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 06 mars 2016 à 10:14:03
Navré(é)s, nous le sommes déjà.... donc il ne peut y avoir de rajout à notre peine. Mais un  petit rayon de soleil dans ces échanges qui me fait dire : nous ne sommes pas tou(te)s seul(e)s...

Porte-toi bien Piera
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 06 mars 2016 à 11:28:00
Aujourd'hui, colère pour moi, je lui en veux, oui, c'est terrible, indécent, affreux, monstrueux, je lui en veux de m'avoir tant choyée, de m'avoir tant gâtée, de m'avoir tant aimée et de s'en être allé et de me laisser là.
Je prononce ces mots qui font écho  pourquoi m'as-tu abandonnée ?
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: linou le 06 mars 2016 à 11:59:57
Ohhhhh Piera,
S' ils nous ont gâté,  aimé plus que tout, c'est qu'on était les femmes de leur vie, leur moitié.
Je comprends tout à fait ta frustation, on était trop heureuse et là tout s'écroule.  Plus rien, l'absence. On est pas habituée,  on a jamais connu de tsunami. On est dans un vide immense....avec un trop plein d'amour.
Je t'embrasse Piera,
Linou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 06 mars 2016 à 12:05:54
Tu n'as pas été abandonnée, aucune de nous ne l'a été...
Ils n'ont pu retenir leur vie...
Cette colère ne doit pas être, Piera....je te tiens la main, ils ne nous ont pas abandonnées...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 06 mars 2016 à 13:06:01
Je n'ai pas sa vaillance
Je n'ai pas sa puissance
Je n'ai pas sa beauté
Je n'ai pas sa bonté
Je n'ai pas sa sagesse
J'ai le sentiment d'être punie, de n'avoir pas été digne de cet amour puissant, d'avoir été une usurpatrice et que sa mort me révèle toute mon insuffisance.
J'aimerai me dissoudre c'est bien ça, le deuil-dilue.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: linou le 06 mars 2016 à 22:51:41
Piera, tu as été'digne, tu as accompagné Pierre jusqu'au bout. C'est ce qu'il desirait le plus....une epouse aimante, aux petits soins, présente à ses côtés. Quel amour....que de partages.

Piera, peu de femmes sont aussi fortes. Quand j accompagnais mon amour à ses seances de chimios, ses examens, beaucoup de'patients étaient seuls. J'en avais mauvais pour eux, ils n ont'pas eu cette presence aimante à leur côté.  Alors non, rejouis toi tu'etais là....tu'lui'a prodigué tous les soins. Tu es bien "suffisante" de son amour....
bisous tous tendres
Linou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 07 mars 2016 à 11:31:06
Oh ! Linou, merci pour tes mots de réconfort !
Pour lui et avec lui j'aurais remué ciel et terre
Pour lui j'aurais décroché la lune.
Pour lui je ne sais pas ce que j'aurais fait mais c'était sans effort, sans sacrifice...
Mais sans lui ...
J'espère que le rayon de soleil de ce matin me sortira un peu de mon trou noir.
Tendrement avec vous.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 07 mars 2016 à 14:20:37
Chère Piera,

Vivre la mort comme une punition, c'est aussi la vivre comme une injustice. C'est aussi culpabiliser de survivre.

Pourquoi lui, pourquoi moi ? pourquoi nous ?
Qu'avons nous fait, qu'ai je fait pour mériter cela ?
Qu'aurais je du faire pour éviter cela ?
Comment aurait-il vécu ma propre mort ?
Aurait -il été plus fort que moi ?  Mille fois oui, car mon homme était vaillant, puissant, beau, bon, sage.

Il aurait su, lui.
Il n'aurait pas faibli, lui.

Lui qui était mon soutien, mon rempart, ma force.

Mais, chère Piera, tes messages sont
vaillants
puissants
beaux
bons
sages.

Tu n'es pas insuffisante. Juste humaine et impuissante face à l'inéluctable.
Comme nous tous et toutes ici.

Pourquoi les amoureux ne naissent-ils pas et ne meurent-ils pas ensemble ? Pourquoi ?

Je t'embrasse
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 07 mars 2016 à 16:56:31
Milou,
Merci infiniment ! Ton message est un baume qui n'a pas d'équivalent !
Jours de découragement, ce ne seront pas les derniers.
Succession toujours pas réglée, banquiers en dessous de tout !
Ma fille qui me reproche de ne pas m'être occupé d'elle pendant la maladie de son père et de ne pas être assez vaillante...
Voilà ce qui m'a fait mal, très mal.
Mais je ne peux pas lui en vouloir, elle fait tellement la forte qu'elle y croit !
Alors que je n'aimerai qu'une chose la consoler dans mes bras.

Quelle torture de  survivre à mon homme mais notre fille a besoin de moi, rescapée du naufrage, toute amputée, chancelante, vacillante que je sois...
Je te serre dans mes bras, ma douce Milou
Très tendrement 
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 29 mars 2016 à 13:56:53
Piera,

Je lis et relis ton message du 13 décembre, encore et encore. Tout y est dit.

Nous sommes toujours là, bien lasses de cette bataille contre l'absurde.
Heureusement, les écrits restent et le partage adoucit l'intensité de la  solitude.

Mars s'en va, avril arrive.
Pleurer au soleil est peut être plus doux...

Je pense bien à toi.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Nandou_Guanaco le 30 mars 2016 à 18:03:10
Après 40 ans de mariage mon mari jamais malade, il n' a jamais connu ni arrêt maladie, ni chômage, a déclaré un cancer de la vessie fulgurant, comme il en existe seulement un sur cent. Ancien fumeur (a fumé 20 ans), il a payé ce poison au prix fort d' un cancer de haut grade, terriblement douloureux, et même sous la torture de sa maladie il ne voulait pas mourir, jamais il n' a abdiqué, il a toujours cru qu' il survivrait. Sa maladie a duré deux ans, je suis sonnée, il avait 62 ans, tout juste retraité, nous avions fait plein de projets de douce retraite en bord de mer, on ira à la pêche, je jardinerai, on s' occupera des petites filles,  etc plein de petits plaisirs simples qui font la vie belle. J' ai 60 ans, je dois être naïve, je n' avais jamais imaginé que mon mari puisse mourir aussi subitement et de maladie en prime puisqu' il n' avait jamais rien, lui qui  ne savait même pas où se trouvait l' armoire à pharmacie à la maison et ne savait pas que la fièvre c' était avoir tantôt chaud, tantôt froid...  Je me shoote aux médicaments,  je ne vois que cette solution pour tenir.  Je me croyais forte, je savais pourtant que nous étions tous mortels mais je ne savais pas que je serais le "conjoint survivant", oui, survivant, le mot est bien trouvé, on survit. Comme on peut. Amitiés à tous.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: cdi le 30 mars 2016 à 19:23:42
Triste bienvenue Nandou
c'est vrai qu' on attent toute notre vie pour la retraite et de finir nos vies main dans la main mais en cours de route une main a  lachée prise c'est horrible surtout de partir comme cela avec beau coup de souffrance mon mari est parti un matin et n'est jamais revenu et je l'attent toujours sache que tu n'es pas seule viens parler,exprimer ta douleur et ci cela peut d'aider aussi à diminuer les médicaments de tout coeur avec toi courage
cdi
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: arfaca le 30 mars 2016 à 21:22:19
Nous sommes les survivants alors il faut survivre en  vivant cette nouvelle vie..la réinventer pour qu' elle soit moins douloureuses. ...abandonner nos projets de longue vie ensemble et se tourner peut etre vers d autres horizons sans oublier, car la peur d oublier est là. ...et angoisse...mais non, vivre ce n est pas l  oublier c est lui faire honneur et lui montrer tout notre amour sans jamais abdiquer.
Merci pour votre aide
Amitiés
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: malone le 05 avril 2016 à 20:09:27
Bonjour,
Nous aussi nous avions des projets plein la tête, on avait passé la pratique pour le permis bateau et après l'opération nous n'avions plus que la théorie et partir voguer sur les flots en août.
Il avait demandé sa mutation pour la Bretagne où nous souhaitions y passer notre retraite, il nous restait 7 ans à travailler.
Mon mari a subi plusieurs opérations à l'origine bénine mais qui à chaque fois ont tourné au cauchemar : staphilo doré, septicémie,  fissure du colon...pendant tous ses séjours à l'hôpital jamais je ne lui ai lâché la main j'y étais tous les jours à partir de midi jusque vers 23h , pour le soutenir, pour lui dire combien je l'aimais, lui apporter tous les jours son journal et nous faisions ensemble les mots croisés et le sudoku comme à la maison, il m'appelait la nuit parce qu'il n'arrivait pas à dormir et avait besoin de parler, il était mon réveil, il m'appelait le matin à 7h pour que je me lève, pour que j'aille travailler. Mais voilà la dernière hospitalisation lui a été fatale, même pas dû à l'opération, en arrivant il m'a dit qu' il avait avalé de travers son potage du midi, on a passé l'après midi ensemble, il était fatigué mais rien d'anormal après une opération et tout d'un coup il s'est mis à grelotter et moi  aussi j'ai eu froid  alors qu'il faisait 30° dehors et qu' il n'y avait pas de clim, et son visage s'est crispé j'ai appelé aussitôt les infirmières et là tout a dégénéré, ils l'ont emmené en soins intensifs, je revois encore son dernier regard qui me hante, sa dernière parole me dire ne t'inquiète pas à tout à l'heure je t'aime, mais il est parti 48 heures après.
Je me dis qu'heureusement que j'étais là quand c'est arrivé parce que les infirmières étaient passées pour un contrôle 10 minutes avant et tout était bon. Je n'ose imaginer si je n'avais pas été là, combien de temps il aurait agonisé seul dans sa chambre, heureusement il a été pris en charge très vite et j'espère que sa souffrance a très vite été soulagée.
Depuis  une détresse inimaginable, plus de goût, seule terriblement seule face à ce vide immense qu'il a laissé, on s'aimait tellement, jamais une journée sans se téléphoner 3/4 fois ou échanger des sms juste pour savoir si ca allait et se dire que l'on s'aimait . Il me manque terriblement et je n'arrive pas à me reconstruire, tellement envie de le retrouver pour qu'il me prenne dans ses bras.
Encore une journée à pleurer dans  mon coin à l'abri des regards, et quand on me demande si ça va, je réponds oui et je change de sujet, on me dit comme tu as maigri, oui parce que je fais du sport et j'ai une alimentation saine alors qu'en fait je ne mange plus, sauf de temps en temps le midi au travail pour montrer aux collègues que ça va.
En plus de notre détresse, il faut faire semblant pour faire croire que ça va bien maintenant afin d'éviter de parler de notre immense chagrin et éviter de s'effondrer, alors que je préférerai rester au fond de notre lit toute la journée à penser à lui, à imaginer nos projets, être seule et tranquille pour  l'emporter dans mes rêves.
Que c'est dévastateur de perdre son conjoint.  Avec le recul, je me demande s'il ne vaudrait pas mieux déménager très vite après, puisque de toute façon il restera dans notre coeur à jamais et que nous devons survivre pour nos enfants... peut-être serait ce moins douloureux que de rester vivre dans la maison où l'on a partagé tellement de moments de bonheur qui de toute façon ne seront plus ?
Quelqu'un d'entre vous a quitté par choix l'environnement où vous avez vécu avec votre conjoint ? N'est ce pas moins difficile pour se reconstruire ?
Merci pour votre écoute précieuse,  ces échanges avec vous qui vivez la même douleur, ça fait du bien de pouvoir écrire ce que l'on ressent.
Biz à tous et que cette soirée vous soit douce.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: ever le 05 avril 2016 à 23:26:43
Je suis une femme en deuil, je suis veuve avec mon alliance à mon doigt et mon petit garçon est orphelin de père... Les mots sont lourds et épais....
Merci de tes mots Piera si juste et si bien écrits. J'espère trouver un peu de ta force et de ta volonté...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 20 avril 2016 à 15:14:19
Je continue à parcourir le forum malgré mon silence, je reste soeur de cette douleur qui nous bouleverse et qui nous a tous basculés dans cette autre dimension de la vie, dans cette douleur parfois insupportable, terrible mais mais et là je parle pour moi, cette mort m'a conduite certes douloureusement, certes terriblement vers une autre dimension qui me semble bien plus intense, bien plus forte, essentielle j'ai envie de dire de la vie. Pas de malentendu, j'aurais préféré que mon homme soit toujours là en vie, pour lui et pour nous mais il est mort et cette mort m'oblige à m'interroger, m'oblige à faire ce chemin vers moi, ce chemin vers cet essentiel à la vie que je n'aurai certainement pas fait sans ce séisme.
Prendre toujours autant de précaution pour parler de son état, la conscience toujours aiguisée du basculement tangible.
Je voulais vous partager quand même  cette sorte d'accalmie que je vis après une véritable descente aux enfers de la profonde douleur de son manque, de la profonde souffrance de sa mort et de l'absurdité de mon être au monde sans lui.
Certes, je suis accompagnée d'un psychiatre qui m'aide à tirer le fil que j'ai fini par saisir dans tous les sens du terme. Certes, mon ado à la maison m'oblige à sortir de ma torpeur douloureuse en réclamant une maman. Et je m'abreuve aussi de conférences qui m'aident à me comprendre et surtout à me trouver.
Pierre est mort et j'ai le sentiment que j'avais un ange à mes côtés, tellement je me sentais à l'abri de TOUT quand il m'ouvrait ses bras, mais cet ange n'a pas disparu, il n'est pas perdu.
Sa mort m'a ouvert à une autre dimension de moi, devinée, sentie mais jamais explorée et tant qu'il était présent elle ne m'était pas nécessaire. Mais là elle est devenue vitale si je voulais reprendre un tant soit peu vie. Notre amour me porte malgré son absence, je trouve extraordinaire au sens premier, cet amour que nous nous sommes portés, cet amour puissant et essentiel qui a donné toute sa couleur, toute sa chaleur et toute sa lumière à ma vie à notre vie mais tout ça n'est pas mort, c'est en moi puissamment ancré, je le sais maintenant.
Des revers j'en connaîtrais encore mais j'ai le sentiment d'avoir retrouvé un centre, un axe en moi qui me fait tenir debout. Je ne pense pas à demain, je ne veux pas m'angoisser pour l'avenir.
Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 20 avril 2016 à 15:30:33
Quel plaisir de te lire Piera ... c'est comme si je retrouvais une amie...

Je perçois le frémissement d'un apaisement ... la certitude que tout ce qui a été bâti perdurera à jamais, et cette découverte ou redécouverte de soi-même... je m'en réjouis pour toi, et j'espère que ce petit coin de ciel bleu diluera toute la  noirceur des derniers mois... si le ciel n'est pas encore azuré, un gris pâle, un bleu pastel, quelques gros nuages parfois, sont des promesses de jours meilleurs...

Porte-toi bien
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 20 avril 2016 à 15:59:14
Oh! FaïK! Amie je te sens oui!
Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 20 avril 2016 à 18:25:32
Merci Piera pour ce partage : je comprends ce que tu vis et ça me donne de la force et de l'espoir. Hier ça faisait quatre mois que l'amour de ma vie m'a laissée seule poursuivre ma route. Ces semaines sans lui, ce manque de lui, ce vide, n'avoir plus personne sur qui  s'appuyer, se reposer, avec qui partager, et tous ces souvenirs, et cette impression qu'on va mourir, et malgré les semaines qui passent cette sorte de folie dans laquelle je sombre par instant, tout ça m'a fait prendre conscience que cet incommensurable amour que nous avons vécu ensemble doit me permettre un autre cheminement, ne doit pas être inutile. Je suis sur cet autre chemin, qui sera long, mais qui me laisse aussi croire que ce lien que j'ai peur de perdre avec mon amour, ne doit pas obligatoirement n'être que dans la souffrance.
Noëlle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 20 avril 2016 à 21:10:46
Comme vous, Noëlle, Piera, je sens qu'il y a un chemin à prendre, mais ce chemin, je ne pourrais l'emprunter qu'en me sentant "accompagnée" par sa présence. Je suis trop remplie de son absence pour le sentir à mes côtés...

En mode tumbleweed, "herbe qui tourne, au gré des vents, dans le désert et la désolation, dans un silencieux périple à la recherche d'un endroit plus propice..."
Je vire et je volte, des routes se présentent à moi, mais aucune ne m'a semblé encore assez sûre pour que je l'emprunte.
Mais vous me montrez la voie à suivre...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: linou le 20 avril 2016 à 23:30:17
Merci Piera,
je pleure en te lisant, mais quand je vois ce que tu écris, je me dis que je peux aussi espérer ressentir tout notre amour, son amour....un infime espoir.....j'attends, je patiente.....tout son être me manque, j'ai tant envie de sentir ses doigts, sa bouche, son corps....une partie a été arrachée. J'aimerai comme toi Piera ressentir la même chose...bientôt 5 mois de solitude, de silence, de manque. Merci pour ton message plein de bienveillance. On en a tant besoin.
Linou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 21 avril 2016 à 10:37:30
Chères Linou, Noëlle et Faïk,
J'aimerai vous dire que j'ai une petite longueur d'avance sur vous, 10 mois et puis nous savons aussi que le deuil n'est pas linéaire, il oscille et nous vacille sans crier gare.
Patience, indulgence avec soi-même et écoute de soi, ne pas céder à la pression, accueillir ce qui arrive et essayer de garder une lueur aussi ténue soit-elle.
Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Bulle 777 le 21 avril 2016 à 21:42:11
Une autre dimension...C'est cà !

Un élargissement de nous-mêmes...quand la douleur côtoie la transformation de notre être.

Une sorte de leçon du deuil  que nous saisissons à certaines heures, certains jours, par flash...

Pensées,

Bulle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 08 mai 2016 à 09:32:13
Moment d'accouchement, de partorimento sur le papier de mon état intérieur.
Je constate à la lecture de tous nos écrits combien reviennent de manière récurrente presque obsessionnelle ce que nous appelons « les autres », une ligne de fracture nous en sépare.
Au début de la perte, je formais une sorte de bulle avec ma douleur, ma souffrance, les autres n'existaient pas je ne leur donnais aucune légitimité. Ma douleur était mon siège, mon lieu, mon droit. Elle m'écartait du monde et des autres. Cette douleur était toute dédiée à mon homme, revivre son épreuve, le revoir, le reparcourir, l'accompagner encore. Parcourir ses lectures, écouter sa musique pour le pénétrer un peu plus. Etre véritablement à son écoute sans la peur au ventre de sa douleur, de sa souffrance, de sa solitude face à la mort. Un accompagnement posthume qui m'a conduite là où je suis maintenant.
La mort m'a appris le recueillement.
La mort m'a appris le silence.
La mort m'a appris la solitude.
La mort m'a appris à voir.
La mort m'a conduite vers une autre vie profonde, intense celle-là mais invisible pour beaucoup.
La mort m'a conduite vers un essentiel, riche, puissant.
La mort m'a appris une plus grande exigence encore dans le rapport à l'autre.
La mort m'a appris à écouter aussi.
La mort m'a ouvert les yeux.
La mort m'a appris à sentir une présence invisible certes mais une présence puissante de mon homme et inaltérable.
La mort m'a appris la confiance en la VIE.
Je choquerai en disant cela certes mais je suis passée désormais dans ce que je désirais si ardemment non pas dans l'amer de la perte mais dans la reconnaissance à la VIE de m'avoir permis de rencontrer mon homme et d'avoir pu partager cet amour extraordinaire qui nous unit à jamais.
Période transitoire peut-être avant une nouvelle déferlante peu importe je savoure cet état fécond, silencieux, doux mais puissant.
Tendrement vôtre.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 08 mai 2016 à 10:06:09
  Piera, ton dernier post me touche tout particulièrement, j'ai eu les larmes aux yeux en te lisant, mais davantage d'émotion que de chagrin-ou alors c'est une très douce tristesse nimbée de lumière  :( :)
  Ce qui me frappe c'est comme je me retrouve mot pour mot-sans en retrancher un seul-dans tout ton message, j'aurais pus l'ècrire. Sache que je sais exactement ce que tu veux dire et que tes paroles me réchauffent le cœur. Je ne suis pas seule à èprouver toutes ces choses, en ces termes donc  :)
  J'espère de tout mon cœur que cet état d'esprit vas se prolonger, pour toi comme pour moi. Il y aura forcément encore de très mauvais moments, mais pouvoir avoir de ces embellies, qui finissent par primer sur la souffrance, c'est un don merveilleux.
  Passe un bon dimanche  :-*
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 09 mai 2016 à 09:18:05
Le chemin du deuil est un chemin long, difficile, éprouvant, exigeant, sans concession possible, sans compromis non plus. Il nous faut l'emprunter alors que nous ne nous y reconnaissons pas, alors que nous  refusons de nous y reconnaître, alors que nous ne voulons pas  croire que cela nous arrive à nous, alors que nous refusons de croire que l'être essentiel à notre vie nous a été ravi.
Combien de jours, combien de nuits ai-je attendu son retour ? Cette attente cruelle, cette attente impitoyable qui signait ma folie à venir. Cette attente qui me faisait être dans un écartèlement sismique entre mon passé et cet avenir infernal. Cette dichotomie de l'être qui anéantissait toute velléité, toute tentative, toute vie.
Je crois qu'il faut passer par cet anéantissement-là pour trouver une force, une « raison » au ne pas mourir, à lui survivre.
J'ai accepté de revisiter toutes mes certitudes passées, accepter de revisiter mon être au monde, et ce  qui constituait ses fondamentaux. Je vais paraître pompeuse mais son Fondamental a été l'Amour avec un grand A, celui qui m'a guidée, celui qui m'a fait tenir debout, celui qui m'a permis de rencontrer mon homme, cette rencontre solaire qui a fait éclore cet amour puissant entre nous.
Voilà mon guide, voilà ma force. La mort aurait-elle raison de cet Amour-là, de cet Amour qui m'a tissée, m'a abreuvée toutes ces années durant ?
Qu'est-ce qui est plus fort ? Cet amour qui siège encore en moi, que je sens indestructible ou ce semblant de vie (je le dis sans mépris aucun) que vivent ceux qui n'ont pas vécu ce séisme qui nous oblige à chercher notre essentiel à la vie. Le deuil est pour moi mon épreuve initiatique, ma renaissance dans un nouvel être au monde où mon homme est et sera parce que par notre amour, par sa mort, il m'y a conduite.
Pierre fait désormais et à jamais partie de ce nouveau moi lavé du superflu, du superficiel, qui se cherche encore, qui chemine et cheminera encore sa vie durant.
Tendrement vôtre.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 09 mai 2016 à 09:40:08
Stana,
Mon dimanche fut doux, merci.
J'ai reparcouru cette montagne que nous sillonnions ensemble, ces sous-bois tapissés d'anémones et d'aspérules. J'ai même vu un chamois solitaire lui aussi. On s'est observé longtemps avant qu'il ne s'en aille.
Et puis dans mon jardin délaissé, abandonné, j'ai planté des pommes de terre pour les partager à l'automne avec nos amis.
Je t'embrasse tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 09 mai 2016 à 10:28:35
  Ton témoignage est vraiment très beau piera  :)

  Je suis heureuse de savoir que tu as passé un bon dimanche. J'adore la nature, et particulièrement les fleurs, je te comprends^^le charmois, ça devait être adorable!  :D j'espère que tu passeras bien d'autres moments de ce genre ce printemps et cet été.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 09 mai 2016 à 13:26:58
Période transitoire peut-être avant une nouvelle déferlante peu importe je savoure cet état fécond, silencieux, doux mais puissant.

Chère Piera,

Tout est impermanence.
Rien n'est jamais définitif, sauf la mort, nous ne le savons que trop bien.

Alors, après tant de larmes et de chagrin. il faut savourer cet instant, comme un appel vers la vie, même si cette vie est autre et totalement différente.

Peu importe ce que sera demain puisque la vie est ici et maintenant.

Je suis heureuse pour toi et je te remercie de venir écrire qu'il est encore possible de vivre - autrement, mais vivre - après l'inconcevable mort de celui sans lequel on ne croyait pas pouvoir vivre du tout.

Ton message fait briller la faible lueur de mon espérance.

Je t'embrasse.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Nandou_Guanaco le 09 mai 2016 à 14:48:41
Heureusement qu' il y a beaucoup de poésie dans vos écrits, ça adoucit les meurtrissures de la vie, ça me fait du bien de vous lire même si ça ne me rend pas moins malheureuse, au moins j' apprécie votre compagnie. Merci à toutes.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 09 mai 2016 à 22:05:06
Ma chère Milou,
Je te serre tendrement dans mes bras.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 18 mai 2016 à 09:05:52
Chemin épineux, sinueux,  fait d'allers-retours.
Un pas vers un mieux qui nous fait accéder à quelque chose qu'on pensait encore impossible la veille, pour moi par exemple mon travail. Retourner dans ce lieu familier teinté de légèreté et de bien-être me semblait insurmontable et là j'y vais le coeur presque léger parce que je me sens suffisamment « reconstituée » pour aborder cet ancien monde devenu nouveau à mes yeux d'endeuillée.
Mais retourner dans notre jardin où les fleurs continuent à éclore malgré mon incurie continue à être douloureux. Faire les courses parfois s'avère aussi une épreuve de force, réaliser encore que nous ne sommes plus trois mais deux et parfois par contre je les fais aussi le coeur léger !
Ces allers-retours sont éreintants et décourageants. Toujours dans cet entre-deux qui signe ma coupure définitive ou momentanée au monde des autres, je ne sais pas mais je sens que ce sera long, très long pour parvenir un jour peut-être à une véritable sérénité entre ce que je porte en moi et mon dehors. Mon homme tout bien au chaud dans mon coeur continue à me manquer cruellement.
Tendrement vôtre.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 18 mai 2016 à 10:22:06
"L'insoutenable légèreté de l'être"...

Continuer son chemin, entre la légèreté et la pesanteur...

Porte-toi bien Piera
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 18 mai 2016 à 11:25:10

Piera,
Je partage cette sensation de vide de celui qui m'a faite entière, en manque de lui, en manque de nous.
Les larmes au bord des yeux, toujours incrédule de cette effroyable réalité : je ne le verrai plus jamais, il ne me prendra plus jamais dans ses bras, nous ne nous dirons plus rien.

Mais quoi de plus normal ?  Que pouvons nous espérer de plus ?
Le bonheur de sa présence à nos côtés était une évidence, tellement facile à vivre.
Le malheur de son absence est aussi une évidence, mais tellement difficile à vivre.

Apprendre la résignation de la perte, écarter la colère, trouver en soi l'énergie de vivre au jour le jour, faire taire l'esprit qui divague et égraine les regrets et les remords, renoncer à comprendre pourquoi ce qui nous anéantit un jour nous parait léger le lendemain pour ne pas devenir folle de ne pas comprendre, supporter la compagnie des gens heureux, insupportablement heureux, se dire qu'ils marchent sur un fil bien fragile, celui de la vie que l'on croit éternelle et protégée de tout.

Tu fais un grand pas en retournant travailler. La vie appelle, plus forte que tout, comme le premier brin d'herbe après une catastrophe nucléaire.

La mort tiraille et la vie appelle, ou le contraire, la mort appelle et la vie tiraille.
Entre les deux, des êtres humains, humbles et faibles, qui avancent coûte que coûte, sans même savoir pourquoi, cherchant des réponses, espérant en trouver, croyant en trouver, se battant entre eux  pour des vérités toutes relatives.

Depuis la nuit des temps.
Depuis que les hommes et les femmes naissent, vivent, aiment, pensent et meurent.

Tu trouveras - Nous trouverons - la sérénité, n'en doutons pas.
Mais, cette sérénité ne nous apparaîtra pas comme est apparu notre amour : un regard et une certitude soudaine, absolue et définitive.
La sérénité n'est pas un coup de foudre. C'est un long chemin en soi, le long duquel chaque pas demande un effort solitaire et qui n'a pas d'autre but que vivre le présent, tel qu'il est et non tel que l'on voudrait qu'il soit.

Tenons nous la main. Aimons nos hommes. Ils nous manquent tellement.
Je t'embrasse.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 30 mai 2016 à 11:20:58
C'est quand j'écoute, quand je vois, quand je réalise tout ce que nous partagions que le gouffre s'ouvre à nouveau sous mes pieds. Quand toutes ces questions auxquelles tu me donnais si souvent une réponse éclairante, quand tu me distillais au goutte à goutte tout qui se nichait en toi et dont tu étais si pudique ou plutôt si discret que je réalise l'étendue de ma perte.
Tu sais, je pense et repense sans cesse à toi mon amour, je te visite et te revisite inlassablement, obstinément, je te sonde et te resonde encore et encore à l'aune de cette mort qui signe notre séparation non voulue, non désirée, non consentie. Ce que je croyais être de la modestie était tout autre mon coeur et j'aurais aimé pouvoir te le dire, pouvoir te dire que je t'avais entendu, compris mais je n'en étais encore qu'aux marges. Mais maintenant, je sais et j'en pleure. Tu avais compris, tu avais fait ce chemin que je fais maintenant que la mort m'a amenée à parcourir. Tu étais déjà dans ce travail intérieur mon amour mais en silence. Tu avais cette écoute, cet entendement que la mort m'a donnée. Tu étais dans ce monde mais pas de ce monde comme je le suis maintenant. Ce que j'appelais modestie n'était rien d'autre que la docte ignorance. Réaliser que l'on sait que l'on ne sait pas. Tu étais déjà dans l'ailleurs mon coeur, ce centrage que je sentais en toi c'était ça, être toujours dans cet essentiel aux êtres et à la vie. C'était ça aussi ta bonté, ton indulgence, ton intelligence, ta force et ta beauté. Je réalise le grand cadeau, ce beau cadeau que la vie m'a donné , cette rencontre exceptionnelle, cet amour puissant qu'il m' a été donné de partager avec toi mon coeur mais aujourd'hui j'en pleure et j'espère que demain il me donnera la force de supporter ton absence.
Je t'aime encore et toujours au-delà de tout.
Tendrement vôtre.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Bulle 777 le 30 mai 2016 à 12:23:34

Piera,
sans connaitre ton homme, je comprends ce que tu as si joliment écrit !

Dans notre cheminement, il y a des moments forts où nous saisissons des sentiments et pensées qui sont d'habitude complexes et insaisissables. J'ai l'impression que seuls le deuil  et l'absence, peuvent amener à cette compréhension fine.

Pensées,
Bulle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 30 mai 2016 à 16:40:04
"La docte ignorance"

Expérimenter des cheminements de pensées aussi complexes soient-ils ne me donnent même pas l'illusion d'avancer dans ce chemin de deuil. Mes éclairs de compréhension et les siens, d'hier, ont fait et font encore pschitt à la lumière de cette réalité d'aujourd'hui :  il est parti, je suis seule et tous nos questionnements, toute cette "finesse" de réflexion se heurtent toujours à la brutalité de la mort. Mais bon, théoriser sa perte m'apportera peut-être un jour l'apaisement... je persiste donc...

Je pense à vous.


Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 30 mai 2016 à 20:38:57
"tous nos questionnements, toute cette "finesse" de réflexion se heurtent toujours à la brutalité de la mort."

oui, et en même temps mettre en mots, mettre en forme... ça use le chagrin...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 30 mai 2016 à 22:48:19
Mettre en forme, mettre en mots, dans l'urgence, extérioriser par tous les moyens cette souffrance et peut-être, intérioriser ce lien tant attendu, j'ai l'impression de ne faire que ça depuis des mois. Mais y a t-il une alternative ?
Le fait que je puisse "exprimer" comme l'eau d'une éponge toute cette douleur, eh bien... toute cette rhétorique du néant ne me rend pas plus avertie. J'ai "appris" des choses depuis leur départ, et pourtant ... connaissance n'est pas sapience. En attendant, usons, usons...

Merci à Piera, à Eva Luna, merci à tous de partager votre ressenti, que la nuit vous soit douce,

Faïk
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 31 mai 2016 à 01:02:42
J'aime la langue imagée que tu sécrètes...
J'aimerai penser aussi en images...

Je nous vois bien en éponges essorées et dégoulinantes...
de jus de chagrin...flots de larmes et flots de mots...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 31 mai 2016 à 17:37:52
C'est quand j'écoute, quand je vois, quand je réalise tout ce que nous partagions que le gouffre s'ouvre à nouveau sous mes pieds.

Piera,

Plus le temps passe et plus l'absence prend sa dimension infinie.
De tout cœur avec toi.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 04 juin 2016 à 19:04:27
  Ton texte est magnifique Piera, c'est un très touchant message d'amour aressé à ton amour. Tu as fais un beau cheminement, malgrès la douleur, tu continue de vivre pour lui, pour vos beaux souvenirs à ce que je vois. C'est un très bel hommage que tu lui rend à tout egars  :( :)
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 12 juin 2016 à 00:22:21
Senza fine, tu trascini la nostra vita
senza un'attimo di respiro per sognare
per potere ricordare
perche abbiamo gia' vissuto
Senza fine, tu sei un attimo senza fine
non hai ieri non hai domani
tutto e' ormai nelle tue mani
mani grandi, mani senza fine

Non m'importa della luna
non m'importa delle stelle
tu per me sei luna e stelle
tu per me sei sole e cielo
tu per me sei tutto quanto
tutto quanto voglio avere

Senza fine, tu sei un attimo
senza fine non hai ieri non hai domani
tutto e' ormai nelle tue mani, mani grandi
mani senza fine

Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 12 juin 2016 à 09:55:56
Je ne suis pas douée pour les langues  ;) mais j'ai apprècié la sonorité des mots, on sens que c'est beau  :)
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 13 juin 2016 à 08:32:36
13 juin 2015 – 13 juin 2016
Tu manques cruellement, atrocement, férocement, sismiquement, douloureusement, monstrueusement, terriblement, jamais doucement, jamais légèrement, à ma vie.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 13 juin 2016 à 10:11:13
13 juin 2015 – 13 juin 2016

Juste  un petit tiret qui relie deux dates, qui sépare notre vie d'avant de notre survie d'aujourd'hui...
Combien de tourment, de souffrance, de désespoir, d'attente contenus dans ce petit tiret, comme un trait de plume sur ces 12 mois passés ?

Aujourd'hui 13 juin 2016 s'ouvre un autre temps Piera, qui je l'espère sera un plus léger,

Amicalement, chaleureusement, affectueusement, fraternellement ...

Faïk
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Nandou_Guanaco le 13 juin 2016 à 10:16:35
Quel fardeau à porter tout ça pour le restant de nos jours, pfiou, le temps compte triple en plus, quelle horreur, rien que d' y penser, ça me glace le sang.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: souci le 13 juin 2016 à 12:33:50

   Chère Piera,

   Je viens saluer l'an un de ton deuil, que tu as vécu tout en douleur et en raffinement émotionnel ...

    Un an, un cycle ...
    Nous continuons nos vies en deuil ...
    Nous continuons de parcourir le labyrinthe dont le centre est ... évidé, mais empli d'une présence si forte qu'elle rend la réalité insipide ...
    Amitié, chère Piera, en ce jour particulier.
    En illustration, une très vieille page d'enluminure celtique.
    Bisou, Martine.

    (http://www.aht.li/2908832/Image329.jpg)
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 13 juin 2016 à 12:47:25
"parcourir le labyrinthe dont le centre est ... évidé, mais empli d'une présence si forte qu'elle rend la réalité insipide ..."
c'est ça...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 13 juin 2016 à 13:40:15
(http://www.aht.li/2908832/Image329.jpg)

Livre de Durrow, livre de Kells ...

Que de souvenirs... nos yeux éblouis dans ce lieu magique du Trinity College of Dublin, où nous étions, toi, moi, eux, Nicolas & Pimprenelle, avec nos bonnets et pulls irlandais pour affronter les frimas, les joues rosies et les yeux pétillants du bonheur d'être tous ensemble, bientôt attablés au pub à déguster une  Guinness stout, The wild rover en fond musical de notre vie aussi colorée que cette enluminure...

Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 13 juin 2016 à 17:23:25
Chère Piera,

De tout cœur avec toi, dans cette intense, immense, infinie solitude.
Milou

    Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumières,
    Vains objets dont pour moi le charme est envolé ?
    Fleuves, rochers, forêts, solitudes si chères,
    Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé !

Lamartine



Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Nora le 13 juin 2016 à 19:58:15
Une pensée pour toi, Piera, en ce jour particulier.

Un an, étape attendue avec appréhension, et pourtant il ne s'y passe, et il ne se passera rien, de plus ou de moins.

Journée qui nous fait mesurer le temps, et nous laisse dans l'incrédulité, celle de leur mort toujours, et celle de notre vie, sans eux.

Moment qui fait ressurgir des souvenirs enfouis, oubliés.

Espace de recueillement, de pensées, d'amour pour eux, et de certitude de les garder enfouis là, au fond de notre coeur.

Instants de profonde tristesse, d'intense solitude, de manque cruel

Et demain un an et un jour. Nous poursuivons notre deuil.

Je t'embrasse

Nora
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 13 juin 2016 à 22:39:56
Les amis, les indéfectibles, ceux qui sans monstration ou démonstration sont là toujours infailliblement, je les ai réunis ce soir  autour d'un buffet habituel dans notre antre, voilà ils viennent de partir, chacun vit son deuil à sa manière, chacun pleure Pierre à sa manière, la maison est remplie de fleurs et leurs paroles et leurs rires flottent encore dans mon salon silencieux. Ma fille a finalement accepté d'être présente à cette soirée, sa présence fut un baume pour moi.
J'ai demandé à mes amis d'écrire ou de dessiner quelque chose sur Pierre, une pensée, une anecdote, un gag, peu importe et je réunirai tout cela dans un carnet à l'intention de ma fille pour ses 18ans.
Un an et je me demande encore comment je tiens debout.
Chères amies du forum vos paroles me touchent au-delà de ce que vous pouvez imaginer.
Vous constituez aussi pour moi un soutien indéfectible et je vous en remercie.
Je ne participe plus beaucoup mais je continue à vous lire chacune et chacun et mon coeur se tord toujours autant encore en écho à votre douleur.
Tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 13 juin 2016 à 22:46:01
Douce nuit Piera ...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 13 juin 2016 à 23:56:25
  Bonsoir Piera. Je te souhaite tout le courage possible en cette période si marquante. Ce douloureux anniversaire est une étape difficile, je le sais puisque je viens de la vivre  :'( continue de penser à tous vos beaux souvenirs.

  Moi hier ça a fait un an et un mois que le corps de mon compagnon a été mis en terre, et je pense toujours autant à lui, bien que je me sois sentie plus sereine ces jours-ci, et même heureuse si l'on peux dire, il y a toujours cette douce mélancolie mais je me suis sentie bien. Pourvu que ça dure...
  Je te souhaite du fond du cœur de retrouver bientôt, toi aussi, un peu plus de douceur.
  J'ai une pensée particulière pour toi aujourd'hui-enfin cette nuit. On est encore le 13 juin.
 :-*
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: ichti le 14 juin 2016 à 05:07:58
Je pense  fort a toi  Piera
Ichti
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Noëlle le 14 juin 2016 à 07:33:34
De tout coeur avec toi Piera.
Noëlle
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: loma le 14 juin 2016 à 20:04:55
Je suis sincèrement avec toi Piera,

en ce jour cela fait exactement 16 mois que Marc a été enterré, le jour de la Saint Valentin, ironie du sort.
Un an , on a passé toutes les "premières fois", les premières fois "sans" ... On se sent épuisé, lessivé, étonné d'être soi même encore en vie. Ma vie ressemble un peu à une sorte de vidéo timelapse, tout tourne autour de moi, s'agite, et je suis là plantée, fascinée, plus en communion avec la nature, avec autre chose, à le chercher ... Le temps défile différemment, il n'a plus d'importance et en même temps je me demande combien d'années sas lui
 une petite vidéo pourra peut-être mieux me faire comprendre :
https://vimeo.com/166271454
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: ichti le 14 juin 2016 à 22:20:14
https://www.youtube.com/watch?v=XjVUzfb_oBo

15 juin 2015 - 15 juin 2016

A la fin nous nous retrouverons mon amour,
Ichti
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 14 juin 2016 à 23:13:27
Pensées pour toi Ichti et pour cet anniversaire si douloureux demain ...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 24 juin 2016 à 14:40:09
Femme comblée je l'ai été tout au long de notre union mon coeur.
On se retrouvait sur tellement de plans que j'en ai le tournis.
Aide-moi stp à supporter ton manque qui se fait encore plus criant aujourd'hui!
Aide-moi à accepter ce choix que je fais de te survivre!
Je te cherche dans les moindres recoins du monde, de ma tête et de mon corps, tout porte ton empreinte.
Comment concilier cette oxymore, tu n'es plus mais tu te fais encore plus présent par ton absence?
J'ai le sentiment que je pourrais mourir  de ce manque-là.
Tendrement vôtre
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: kompong speu le 24 juin 2016 à 14:48:38
https://www.youtube.com/watch?v=9bLD0tVep9M
 pour toutes et tous en manque de votre amour
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: cdi le 24 juin 2016 à 17:18:08
Je pourrai mourir de ce manque- là oui c"est vrai piera  , grosse crise de larmes aujourd'hui en tournée j'ai même vue mon docteur: en larme mais il ne m' a rien dit "courage" et son amie prend de l'  euphytose ca t' airera , pour une aide morale je repasserai ...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 30 juin 2016 à 18:57:25
Mon amour,, mon coeur,
Ton amour puissant me galvanise et même si la mort t'a emporté, elle n'a pas réussi à t'arracher de ma tête et de mon corps. Ton amour est ma force, ton amour est précisément ce qui me pousse à la VIE. J'ai de l'amour à revendre et je n'ai plus peur de perdre. Je ne t'ai pas perdu!
Voilà où j'en suis aujourd'hui dans la certitude de cette force, et que la déferlante reste coite, aujourd'hui je refuse de l'entendre!
Tendrement vôtre.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 30 juin 2016 à 19:02:35
  Je me retrouve à 100% avec tout ce que tu viens de dire piera, j'aurais pus écrire ces mots moi-même, et ça me fait chaud au cœur de savoir que quelqu'un èprouve exactement la même chose que moi  :-*
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 30 juin 2016 à 19:09:29
Oui Stana!
Mais certitude toujours sur le fil dans un équilibre précaire...
Mais je tenais à vous partager mon état du moment.
Tendrement vôtre.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 01 juillet 2016 à 11:51:13
Un jour à l'abri des déferlantes ... loin des brisants ... un peu de répit dans la lutte ...

Porte-toi bien



Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 08 juillet 2016 à 10:18:04
Chères copines du forum,
Juste vous partager un heureux évènement auquel je peux participer maintenant sans douleur j'espère. Les parents adoptifs de la meilleure amie de ma fille se marient demain dans la belle Bourgogne que nous aimions tant.
Que la douceur de ce soleil vous berce un peu et vous apaise.
Tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: souci le 08 juillet 2016 à 13:27:03

    Merci, Piera,

     c'est important de nous faire partager ces légers "mieux".

    Bien sûr, on ne s'y trompe pas, la vie reste fort âpre après une grande perte.

    Pourquoi elle est si cruelle, la vie ?

    Pas savoir.

    Alors on drague les méandres du désespoir, et parfois on y trouve une poche de bonne humeur, de quoi faire une petite trêve. Et c'est bien.
    Fais-toi tutta bella et souris tendrement aux choses de la vie.
    Ah, la Bourgogne, c'est fort beau, j'ai eu la chance de la visiter en voyage de fin d'études, nous avions fait le tour des églises romanes ...
    Je m'étais pas mal trébuché dans les marches et les chandeliers en admirant le nez en l'air les chapiteaux sculptés, ce qui avait bien fait rigoler les autres ... je me suis pètée la poire à Tournus, à Paray-le-Monial, à Autun ... mais peut-être était-ce dû aussi à ce fameux petit "Côtes de Beaune" ...

    Amitiés, Martine.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: malex le 08 juillet 2016 à 17:10:15
Aujourd'hui la déferlante m'a menée  sur ce fil.  J'avais l'impression que ça allait mieux et je replonge . Alors je reviens boire à cet océan de compréhension . Merci à ceux qui le remplissent de leurs maux avec des mots si justes . J'y  guette , non pas un phare pour me ramener sur le rivage mais au moins une petite lueur d'espoir d'aller "mieux" un jour.....
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Nandou_Guanaco le 09 juillet 2016 à 09:45:37
C' est ça le deuil, le reflux et le reflux de la marée, tu vas bien un jour pour aller plus mal le lendemain, mais au moins m' a expliqué la psychiatre, vous savez que vous pouvez aller mieux. Et puis le couperet du docteur est tombé: de toute façon, un deuil c' est à vie! Donc à vie, je vais aller mieux, moins bien, mal, mieux, moins bien, très mal etc, quand je pense que j' étais une personne d' humeur constante et stable, rien ne me déviait de ma trajectoire, je gardais la tête toujours froide, eh ben, quel chamboulement, c' était sans compter sur le deuil, je découvre ce qu' est la déstructuration de la personnalité suite au deuil du conjoint. Eh oui, je suis le "conjoint survivant",  expression si juste, oui, survivante, heureusement que le temps qui passe me rapproche de lui, seule source d' optimisme.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: malex le 09 juillet 2016 à 11:32:52
"conjoint sur-vivant"! 
sur- monter, sur- passer, sur -vivre ....   ce préfixe "sur" rime avec "dur".
Oui c'est dur d'être sur- vivant pour rassurer ses enfants, ses amis  son entourage.
Quand on retourne à sa solitude, "ils"ne savent pas que l' on se transforme en sous- vivant.
Se ressourcer dans le "sous" pour affronter les "sur"
Ces allers retours sont épuisants.
   
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: souci le 09 juillet 2016 à 13:24:02

      Salut les filles,

      Ni sur- ni sous-, juste vivante, mais où est passée ma tête ?
      J'ai une pastèque à la place ...
      Bah ! ça fera l'affaire ...
      Coucou à tout le monde !

     
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 23 août 2016 à 14:27:10
Des semaines de silence, semaines de vacance et vacances.
Cet été 2 évènements importants, reprendre la mer, naviguer après 25 ans d'interruption, une sorte de défi face à ma peur et mon manque de confiance.
L'autre celui de m'abandonner à l'amour d'un autre, autre défi pour moi.

Si j'ai relevé haut la main ce challenge avec la navigation , je dois dire que celui d'accepter d'être avec un autre que lui est cuisant.
Terrible de constater que si pendant quelques jours j'ai pu croire que c'était possible, je dois reconnaître  que l'absence de Pierre se fait encore plus cruelle aujourd'hui.
J'ai une grande colère en moi, une terrible colère contre la vie de m'avoir arraché mon homme et de m'obliger à assouvir mon amour dans d'autres bras pour constater que je suis encore plus orpheline aujourd'hui. Deuil impossible!
Le fait d'être avec un autre tout aimant, tout tendre, aussi charmant soit-il ne m'apaise en rien. Au contraire, ça ne fait qu'exacerber son manque, son absence et l'exceptionnel de notre histoire.
J'ai le sentiment que ce “défi” que je me suis imposée me fait découvrir un aspect du deuil que je supputais, celui de sa permanence.
Tout me semble encore plus absurde et inaccessible. Sentiment de jouer à vivre encore plus exacerbé aujourd'hui et pourtant j'aimerais tellement y croire.Tellement croire que je pourrais encore aimer un jour et accepter d'être aimée en retour par un autre que lui mais pour l'instant encore trop blessée, trop meurtrie.
Les assauts du deuil sont terribles et terrifiants. Ils me paralysent littéralement. Je suis comme dédoublée, celle qui veut y croire et celle qui immanquablement se tourne vers ce passé qui la happe.
Jusque là, j'avais le sentiment ou plutôt l'espoir que je n'étais pas en colère. Aujourd'hui, constat amer d'une colère démesurée, oui colère face à sa maladie, face à sa mort, face à mon impuissance à le tirer des griffes de la mort. Colère d'avoir été séparée de l'homme de ma vie, colère qu'on interrompe cette belle histoire, et colère de ne pas arriver à cicatriser, de ne pas arriver à dépasser, de ne pas réussir à vivre sereinement et accepter les lois de notre état de mortel. Colère de me refuser à l'amour de cet autre.

Alors de rage et de désespoir, j'essaie de faire le ménage à défaut de pouvoir le faire dans ma tête, je le fais chez moi, ranger, trier, mais toujours cette impossibilité de me séparer de ce qui était à lui. Je garde tous ses livres même ceux que je ne lirai pas, je garde tous ses CD même ceux que je n'écouterai pas. Et chaque livre lui appartenant me rappelle combien il me manque, combien d'écueils encore il me reste à affronter pour un jour peut-être arriver à vivre vraiment.
Alors je guette chaque recoin et je lave, nettoie, dépoussière comme pour soulager ce fardeau qui m'écrase. Aujourd'hui, éreintée de cette lutte, je voudrais m'endormir enfin.
Tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 24 août 2016 à 11:49:28
  Piera, je pense que dans ce domaine plus que dans tout autre encore, il ne faut se forcer à rien, particulièrement quand on est en deuil. C'est une pulsion de vie qui t'as donné le désir de connaître à nouveau ce merveilleux partage qu'est l'amour physique et spirituel. Parfois ça fonctionne, d'autres fois non, c'est toujours aléatoire dans un premier temps. Tu n'es peut-être pas encore préte à vraiment aimer à nouveau, dans ce genre de situation il peux s'agir d'une "relation-pansement", je ne dis pas que c'est forcément ça, toi seule peut savoir, mais je pense que c'est une possibilité (je sais que ce serait mon cas) Si tu dois un jou connaître de nouveau un bel amour rèciproque, avec cet homme ou un autre, tu le sauras au plus profond de toi. Ca ne signifira pas que tu oublie un tans sois peu ce grand amour qui n'est plus là ici-bas, tout en retrouvant une autre forme de bonheur; il sera toujours dans ton cœur et dans tes pensées, et je te conseille de t'assurer que l'homme comprendra et acceptera ton besoin de te receuillir en pensant à ton cher Pierre, d'accomplir éventuellement tes petits rituels de deuil, de vivre ta foi personnelle...tout le monde n'a pas cette ouverture d'esprit mais c'est possible. L'avenir te le dira...
  Oui il y a des moments où l'absence se fait de nouveau plus dure. Je te souhaite de retrouver, très bientôt, un peu plus de sérénité.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 24 août 2016 à 12:32:32
Chère Stana,
Je te remercie pour ta réponse, toujours prête à donner, tendre la main, merci.
L'évolution de notre cheminement me semble important à partager c'est dans cette idée que j'ai posté ce message intime. J'ai conscience que cette histoire intervient tôt, conscience aussi du pansement mais ce que j'ai découvert et auquel je ne m'attendais pas c'est la violence de ma réaction face au  fait d'être simplement avec un autre que lui. Une sorte de rage, de désespoir, de me sentir, pathétique et dédoublée à me dire mais non c'est pas toi qui vis ça, pas toi qui es là!
Réalité de cette “irréalité-là” insupportable! Et la personne en question n'a rien à voir et c'est terrible d'ailleurs.
Cela m'a permis de prendre conscience de cette grande colère que je pensais apaisée.
Malgré cela, j'ai le sentiment d'aller mieux, de tenir plus solidement sur mes jambes, j'avance.
Autre chose aussi que je découvre c'est que le lien avec Pierre est là, bien là, je suis sereine par rapport à lui mais pas par rapport à son absence. En ce moment, elle se fait encore plus cruelle.
Prends soin de toi.
Tendrement.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: qiguan le 24 août 2016 à 13:59:34
Tu peux peut être ouvrir un sujet en plus de ton témoignage ici
dans
http://forumdeuil.comemo.org/apres-la-grande-souffrance-la-reconstruction/ 
cela peut aider d'autres personnes ...
merci pour ton mp
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 24 août 2016 à 16:55:33
Chère Piéra,

Le deuil est une profonde blessure qui cicatrise très lentement.

Chaque tentative pour s'affranchir de ce long temps de cicatrisation le rappelle cruellement.

A quoi bon t'en vouloir de ces moments de paix ?
Ils ont réveillé une douleur qui était cachée sous la fine cicatrice mais qui n'avait sans doute pas trouvé à s'extérioriser jusqu’à présent.

La colère et la révolte contre la maladie et la mort font hurler de douleur.  Elles sont naturelles et ne disent qu'une seule chose :  nous sommes des êtres humains ployés sous le poids du chagrin et de l'inacceptable perte.

Il ne sert à rien de ne pas vouloir les éprouver. Elles sont là, tapies au fond de soi, prêtes à surgir à chaque moment.
Mais elles ne doivent pas prendre le pouvoir,  ni pour nous mal juger, ni pour décider de notre conduite, ni pour nous laisser croire que notre avenir est sans espérance.

Merci de partager ton chemin.
Ps : oui, le ménage est un excellent moyen de liquéfier ces émotions violentes, de même que le désherbage et le ramassage des feuilles mortes....débrancher le cerveau et discipliner  les gestes dans des activités simples....faire le menage de sa maison et de son jardin pour faire le ménage en soi...

Bien avec toi.
Milou
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 01 novembre 2016 à 13:43:42
Je vais aller sur ta tombe mais je n'y déposerai rien sauf si je découvre une fleur, un caillou en chemin qui me fera de l'oeil. Je vais m'asseoir sur cette pierre et je caresserai le mimosa qui a poussé et je lèverai mes yeux sur le pin comme pour lui demander de veiller sur toi, mon amour.
Je sais déjà ce que provoquera chez moi rien que l'approche du cimetière, cette résistance qui m'arrêtera, me ralentira,  me fera trébucher, cette  incrédulité qui explosera, cette  douleur tenace, jamais loin qui m'anéantira tout à coup à cette approche. Ce même sentiment d'incrédulité, le même aussi intense aussi tenace qui littéralement me terrassera.
J'ai cru que par la force de notre amour rien ne pouvait nous séparer jamais, j'ai juste oublié la maladie et la mort.
Je nous croyais à l'abri pour toujours bien au chaud dans notre tendresse,  j'ai juste oublié la maladie et la mort.
J'ai cru que ça allait durer toujours ce bonheur bon, beau et fort, j'ai juste oublié la maladie et la mort.
J'ai cru que toujours tu serais là à mes côtés, infaillible, vaillant, beau et fort,  j'ai juste oublié la maladie et la mort.
J'ai cru que toujours tu me tiendrais dans tes bras,  j'ai juste oublié la maladie et la mort.
J'ai cru que toujours ton doux regard m'accompagnerait partout,  j'ai juste oublié la maladie et la mort.
Et j'ai dû apprendre à vivre avec cette terreur de cette maladie qui t'éloignait toujours plus de moi, de nous, du monde et j'ai dû apprendre à vivre avec cet assourdissant silence et j'ai dû apprendre à vivre dans ton absence mais dieu que tu me manques mon homme, dieu que c'est dur la vie sans toi.
Cette irréversibilité de la mort me fait hurler de douleur, de rage, de désespoir.
Tendrement avec vous.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Eva Luna le 01 novembre 2016 à 13:53:45
Les toujours dont  nous rêvions...oubliant la mort ...,et la maladie pour toi... durement dispersés par la Mort irréversible...nous laissent terrassées et incrédules...sommées d'apprendre à vivre avec leur absence...
Ton cri de douleur, de rage et de désespoir  résonne fort ici et ta tendresse adoucit l'onde de choc...

En partage de chagrins infinis...
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 02 novembre 2016 à 09:57:06
Il y a bien longtemps que tu es venue sur le forum ...

Nous avons tous cru ... avons-nous été si imprudents, si naïfs que tout nous a été contesté ?
Plus rien ne fait illusion maintenant ...

Je pense à toi
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: souci le 02 novembre 2016 à 12:37:27

   en partage de chagrins infinis, M.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: kompong speu le 02 novembre 2016 à 16:11:42
Piera
que ce soit pour ton homme , tu as ecrit ce que j'aurais pu dire a mon fils hier un an après son depart
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: diane1961 le 02 novembre 2016 à 21:00:29
Je suis une femme de 55 ans récemment endeuillée par la perte brutale de mon Amour depuis 5 ans. L'un habitait au Havre, moi à Laval mais, la distance ne freinait pas notre amour qui ne cessait de grandir....Nicolas n'avait que 41 ans lorsque son cœur a cessé de battre le 7 octobre dernier...Je suis rongée de chagrin, de la perte de ma "moitié", de ce vide, ce silence bref, de tout....Je suis désemparée, désorientée...j'ai repris le boulot 15 jours après mais, je marche à coté de mes pompes. j'ai comme un poids sur mes épaules et je zigzague dans mon quotidien....De mon mariage, j'ai eu 7 enfants mais, je n'ai pas à les "casser" avec ma peine....Nicolas laisse un fils de 15 ans....Comment faire face? Pourquoi me dit-on que je vais faire une dépression ?....J'essaie de "rebondir" mais, le cœur n'y est pas ....
Tendresse à vous tous
Diane
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 03 novembre 2016 à 08:54:01
Toujours aussi touchée par vos témoignages, messages, imprégnés d'une belle humanité, je ne suis pas très causante mais je vous lis toujours avec douceur et tendresse.
Merci pour vos retours.
Tendrement avec vous.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 04 novembre 2016 à 18:27:52
  J'espère de tout mon cœur que ça n'a pas été trop dur Piera  :'(  ton témoignage me touche profondément. Je trouve que c'est une belle idée que tu as eue là, de ne pas apporté de fleurs mais prévoir de ramasser, éventuellement, un joli caillou, ceuillir une fleur éventuellement, en route...s'en remettre au hasard qui n'en est pas toujours  ;) 

  Je ne te comprends que trop: moi non plus je n'aurais jamais imaginer que mon compagnon pouvait mourir, surtout au bout d'un an de relation  :'( est-ce-qu'on y pense, à la mort, quand on est heureux avec quelqu'un? Est-ce-qu'on peux envisager qu'il puisse mourir? C'est inimaginable, impensable! On ne peux tout simplement pas l'envisager. Comment le destin pourrait-il nous enlever un amour aussi fusionnel, aussi complet?...On pense que l'amour vient à bout de tout, immunise contre tout...et pourtant si, il peux vraiment arriver n'importe quoi à n'importe qui.
  Merci de nous lire toujours.
  Je pense à toi  :-* :-* 
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 28 novembre 2016 à 18:52:55
Les jours, les mois ont passé et même si, et bien que, je tienne debout, je « gère » ma vie ou serait-ce ma vie qui me gère ? Bref, j'endosse ma casquette de mère, de fille, de soeur, d'amie, de marraine, ma casquette professionnelle aussi et même celle d'amoureuse mais et je dis bien MAIS je suis et reste encore, par devers, par dessus, avec, et contre TOUT une femme en deuil.
L'homme de MA vie est mort et il me manque toujours aussi cruellement, terriblement et douloureusement.
Les déferlantes s'espacent mais reviennent toujours aussi fidèles et terribles.
Et parfois, souvent, trop souvent, je me demande à quoi bon, et j'ai une terrible envie, une envie irrépressible de m'endormir pour de bon.
Tendrement avec vous.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: souci le 28 novembre 2016 à 19:13:53

    Bonsoir, piera,

    à l'Ouest rien de nouveau ...
    à l'Est, on attend que ça se lève ...

    Bien solidairement, Martine.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: *Ephémère* le 09 février 2017 à 00:26:50
Voilà.
Cette incroyable énigme : comment cela a-t-il pu arriver ?
Dans cet impensable, les questions sans réponse.
La tempête qui arrache les arbres,
Les tourments qui volent nos nuits.
Et l'orage qui vient noyer nos regards et inonder nos joues.
Jusqu'aux matins soleil,
Qui nous rendent à la vie,
Et qui réveillent le temps des souvenirs sans les larmes.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Mononoké le 09 février 2017 à 10:28:00
elia
je t'envoie tendresse et affection, j'aimerai tellement pouvoir t'aider, ne serait-ce qu'un peu
tendrement
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Anneso85 le 11 février 2017 à 10:37:03
Tendres pensées pour toi en ce mois de février. Beaucoup de douceur et tout soutien possible.
Et MERCI à toi pour tes mots si beaux, si justes.
Prends soin de toi
Anneso
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: piera le 17 mai 2018 à 18:01:08
Chers compagnons de route,
Les années ont passé, bientôt trois ans, maintenant.
Trois ans de traversée du désert, de descentes aux enfers régulières, cycliques où le découragement m'assaille, où les forces m'abandonnent où je n'ai plus envie que d'une chose, mourir, m'endormir et ne plus rien ressentir, ni rien éprouver mais surtout que cette douleur cesse.
Et puis parfois, je relève la tête et la vie reprend cahin-caha mais une chose est sûre, c'est une autre vie que la mienne, désormais.
Ces hauts, ces bas m'ont rendue à l'évidence, le passé est définitivement révolu, fini, terminé.
Jusqu'à cette prise de conscience, je pleurais, certes, sa mort, mais je pleurais aussi ma vie passée, ma vie avec lui, ma vie de femme comblée, épanouie et rayonnante.
Je pleurais de frustration, de rage qu'on m'ait arraché non seulement mon homme mais toute cette insouciance de ma vie heureuse. Cette insouciance d'une vie qui ignore la mort, qui se refuse à la voir, qui la nie et la nargue.
Cette insouciance-là n'est plus et ne pourra plus jamais être.
Je crois que c'est en partie cela qui m'a ouvert les yeux et ouvert aussi la conscience.
C'est cette conscience-là qui  fait de moi la femme que je suis en train de devenir.
Une femme qui se cherche dans de nouvelles relations, une femme, je ne veux pas paraître prétentieuse, plus clairvoyante, au regard aiguisé sur la vie et les autres.
Je suis devenue à la fois plus vulnérable mais paradoxalement aussi plus forte, plus intransigeante et plus vraie. Le paraître que je n'ai jamais aimé m'est devenu insupportable, le mensonge intolérable et mon regard balaie les faux-semblants. Je me relis et je me dis quelle prétention !
Et pourtant, je sens tout cela. Cette épreuve m'a rendue affreusement exigeante.
Avant si j'avais conscience de mon bonheur, je n'ai jamais réalisé à quel point  l'amour que je partageais avec mon homme était exceptionnel. Un amour exigeant, construit, entretenu, un amour inconditionnel, des échanges futiles, anodins, profonds, sincères, des différends aussi que l'on tentait de dépasser mais jamais d'ignorer, un partage fécond et surtout une indépendance et une confiance aveugle. J'étais libre de mes mouvements, libre de mon emploi du temps mais notre amour était le moteur de cette énergie, de cette curiosité qui me poussait au dehors pour venir nourrir notre relation. Je n'étais pas sa moitié. Il n'était pas la mienne. Nous étions bien différents mais cette différence et ce respect de l'espace de l'autre a nourri cet amour qui n'a fait que se renforcer avec le temps.
J'avais le sentiment que c'était normal, que les couples amis autour de nous partageaient ce même amour. Je réalise, aujourd'hui, à quel point ces couples-là sont rares. C'est principalement dans ce forum que je les rencontre. Je découvre ces grandes (courtes ou longues peu importe) histoires, des histoires tronquées, amputées, c'est à travers vos récits  poignants que je me sens vraiment au diapason avec vous, inconnus du forum, c'est là que j'entends l'écho de ce que j'ai vécu et de ce que je vis.  Je constate aussi avec tristesse et amertume que la plupart des couples vivotent, s'accommodent, voire se supportent.
Je sais aujourd'hui que je veux vivre, je sais aujourd'hui que je veux aimer à nouveau, être aimée en retour mais pas à n'importe quelle condition. J'ai pris beaucoup de distance avec mon cercle social. Je ne veux pas que l'on m'enferme dans celle que j'étais. Continuer à fréquenter certaines personnes que je continue à apprécier, par ailleurs, me coûte parce que j'ai le sentiment que cela appartient au passé. J'ai besoin de rencontrer de nouvelles personnes, de construire un autre cercle qui correspond à cette femme que je suis en train de devenir. Et puis, je suis devenue beaucoup plus solitaire. J'ai besoin de temps et d'espace pour accueillir ce renouveau. J'ai besoin d'apprivoiser ce changement.
Je me serai bien passée de cette épreuve, j'aurais tellement aimé vivre encore à ses côtés mais j'ai arrêté de me taper la tête contre les murs, arrêter de hurler à l'injustice. Oui, je pleure encore, oui je suis triste encore, 3 ans c'est long et c'est court, 23ans de vie commune, j'ai eu le temps de m'accoutumer au bonheur.
J'ai choisi de lui survivre, pour moultes raisons, la première, notre fille, je suis le parent survivant.
Je ne lui ai pas caché ma tristesse. Je ne lui ai pas caché ma détresse mais je suis restée debout.
Je l'ai fait certes par devoir mais surtout par amour. Cette survivance me coûte une énergie folle mais je sens que je retombe petit à petit sur mes pieds. J'ai la chance d'avoir un métier que j'aime. Je dirais même que c'est le seul point stable après ce tsunami. Dans mon métier, je suis restée identique, dans mon métier je me reconnais, j'ai un point d'ancrage et je crois que cela m'a été d'un grand secours.
J'ai même tissé une relation amoureuse, mais notre histoire et la femme que je suis, m'a rendue exigeante, je ne veux pas d'un soutien, je ne veux pas juste d'un réconfort. Je ne veux pas être rassurée, je veux une vraie histoire qui me fasse palpiter. Je veux retrouver cet amour fort et intense, je sais que cela est possible. Et si je ne rencontre pas l'homme et bien je préfère rester seule, je ne suis pas prête à des compromis de confort. Ils me coûtent de ne pas pouvoir me regarder dans la glace. En ce moment, je serre les dents, je serre les poings mais j'ai le sentiment d'avancer un peu.
J'ai trouvé une aide fabuleuse en une psychiatre très compétente. Elle ne m'abreuve pas d'antidépresseurs mais elle m'aide à connaître celle que je suis. Je me reconstruis grâce à ces entretiens féconds, douloureux mais porteurs. Cette thérapie pour moi est salutaire. Un bon psychiatre, je pense que c'est précieux.
Voilà, je tenais à vous partager cela, je continue à parcourir le forum, le coeur gros souvent, aucune histoire ne me laisse indifférente, elles parlent toutes d'amour et encore d'amour, ce moteur qui nous permet d'être au monde même si on nous a arraché un essentiel à nos vies.
Tendrement.
Piera
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Mononoké le 17 mai 2018 à 18:22:56
merci Piera,
pour ce témoignage qui transpire l'authenticité.
sincèrement
Mononoké

(si c'est pas trop indiscret, où habites-tu? ton psychiatre pourrait intéresser des personnes, ici, qui n'habitent pas trop loin et qui pourraient t'envoyer un mp pour te demander ses coordonnées)
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Faïk le 17 mai 2018 à 20:41:09
C'était bon de te lire à nouveau Piera, tout simplement ...

Faïk
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: vortex le 17 mai 2018 à 21:51:53
C'est un superbe texte,

Et je partage certaine de vos observation. une exigence plus grande, vulnérabilité mais aussi d'avantage de force de caractère, chose à l'antipode. mais encore horreur du mensonge et ou manipulation.
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: qiguan le 18 mai 2018 à 16:02:52
Citer
J'ai besoin de temps et d'espace pour accueillir ce renouveau.
...
Prendre le temps qu'il faut ...
Tendrement à toi
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: milou le 19 mai 2018 à 00:53:29
Chère Piera,

Heureuse de te lire et en même temps si triste, si triste...

Trois ans.

Tu as tout dit.

Je t'embrasse.
Milou.
 
Titre: Re : je suis une femme en deuil "tout simplement"
Posté par: Stana le 20 mai 2018 à 08:42:06
Bonjours Piera. Merci de nous donner de tes nouvelles  :) :-* j'ai souvent pensé à toi. Moi aussi, 3 ans...
Oui, suivre chacun notre propre cheminement, faire de notre mieux, de la manière que nous sentons être la mieux pour nous, c'est la seule chose à faire. Ils auront toujours une place privilègiée dans notre cœur.
 :-*