Bonsoir,
cet amour là sera de toute façon UNIQUE et (le) restera toujours.
On ne refait pas sa vie (combien de fois ai-je entendu cette phrase "as-tu refait ta vie?", ma réponse type: "ben, pour quoi faire?"), on la continue...comme on peut.
J'ai rencontré un nouveau compagnon (pour moi c'était un peu trop tôt, mais en fin de compte, qu'est-ce que ça veut dire?), qui comprend beaucoup de choses et est d'une patience d'ange. De ce point de vue, j'ai de la chance et jamais je ne jugerai personne sur ce sujet: un autre amour un jour. C'est beaucoup trop perso.
Il y a peu, notre fils aîné, à qui je disais un truc pas très malin lors d'une engueulade (c'est un ado normal, quoi) du genre "ton père n'accepterait pas ça " a piqué une colère monstre et a hurlé "oui, mais Papa, il est mort, il va falloir que tu finisses par accepter ça". Je vous laisse imaginer notre état après... Nous avons fini en larmes tous les deux, dans les bras l'un de l'autre. Il avait mis le doigt sur un gros nœud, pour moi et du coup pour lui. Les enfants sont incroyables pour ça. Oui, je peux dire aujourd'hui avec ferveur: les enfants sont des guides, même si nous les guidons aussi. Ils savent parfaitement appuyer là où ça coince, le tout est d'arriver à les entendre, on n'est pas toujours prêt à ça...J'ai toujours essayé de privilégier le dialogue avec eux, jamais de tabou sur leur père mort trop tôt, c'est bien mais pas toujours confortable...et je ne regrette rien.
Pour le moment, Carine, sache que nous sommes avec toi et te comprenons réellement.
Oui, ta vie, votre vie a changé brutalement et c'est un vrai chemin de faire "avec" ça, sans lui.
Même si je vais mieux, même si c'est "ancien" (qu'est-ce que 10 ans dans une vie?), jamais je n'oublierai ce que j'ai traversé et je souhaite pouvoir dire ce que j'aurais tellement aimé qu'on me dise: "oui, c'est raide, tu en baves, pose-toi, raconte-nous ton histoire". Et je voudrais te dire aussi: "tu vas avoir envie de tout donner pour ton petit, mais il est capital que tu prennes soin de toi avant tout". Cela peut te choquer, mais c'est une réalité. Moi, j'ai mis toute mon énergie pour les garçons et c'est ok, ils vont du mieux possible. Mais je m'étais oubliée en route. Je trouve aujourd'hui des solutions pour remédier, mais j'ai rajouté une souffrance inutile à l'inexorable douleur de perdre l'homme de ma vie. Cela n'aurait pas mis mes fils en danger, que je les confie un peu (ils avaient 6 et 4 ans) et que je m'autorise à hurler ma douleur, à pleurer chaque jour, à écrire, comme Marcel, ce que je n'ai pas pu dire à mon amour, mort sur la route, loin de nous qui l'aimions tant, écrire, encore et encore. Ce que je fais maintenant d'ailleurs, et pas qu'ici

. Donc, si je peux te signaler ce piège possible, je le fais volontiers.
A vous tous, je voudrais dire combien je vous admire pour vos cheminements, pas choisis, tellement douloureux et pleins de courage.
Je vous embrasse tous, sœurs et frères dans la peine, liés par ces épreuves que nous traversons et cette conscience que nous avons maintenant, et pour toujours. De tout mon cœur.
Nath