Pareillement, après 40 ans de mariage, comme on n' ignore plus rien de nos vies respectives, que nos enfants sont adultes, j' ai consacré les dernières heures de sa vie à préparer mon mari pour le grand voyage. Il était plongé dans le coma des soins palliatifs mais entendait tout ce que je disais, j' ai pu lui dire qu' il allait retrouver avec joie son papa, ses cousins, ses oncles et tantes, grands-parents et amis partis avant lui et pour ce qui est de nous, eh bien tu veilleras sur nous, tu me feras des signes, je veux des signes ai-je bien insisté, je voulais surtout savoir pourquoi il avait eu ce maudit cancer lui qui avait une santé de fer jusque là et puis soudain un cancer rare, galopant, non maîtrisable, une chance sur cent seulement de tomber sur ce cancer de la vessie même s' il était programmé pour avoir un cancer comme son papa avant lui. Son papa l' a eu moins mauvais et a pu vivre jusqu' à presque 84 ans, et mon mari est décédé à 62 ans alors qu' il avait une vie saine sans aucun excès. Il est venu dans les deux jours m' expliquer le pourquoi et le comment, je l' ai raconté dans un autre post et depuis j' ai des signes. Hier soir il est venu m' effleurer le visage, les bras, j' ai senti tantôt un courant chaud tantôt un courant froid. Il a insisté sur mon bras gauche, pour bien me faire comprendre que c' était lui car en fin de vie, j' étais à sa gauche et sitôt que je reprenais ma place je lui caressais le bras gauche. Les derniers mots qu' il avait pu prononcer et que j' ai mis un quart d' heure à comprendre "ta main est froide" et quand je lui avais demandé si c' était bien ce qu 'il avait dit, il avait acquiescé de soulagement. Et puis le grand sommeil profond, l' apnée, la respiration qui s' essouffle et le lendemain matin, il a attendu que je m' absente deux heures sachant que j' avais une heure de route aller-retour, prendre ma douche et du linge, au retour, il était tout chaud mais mort, le sourire aux lèvres, une semaine qu' il ne souriait plus, un sourire presque ironique. J' aurais pu assister à son dernier soupir mais le destin n' a pas voulu, en route j' ai été retardée 20 mn par un accident de la route qui a coûté la vie à un homme de 50 ans alors qu' un chauffard à qui il n' est rien arrivé avait provoqué cet accident. Quand j' ai su l' histoire le lendemain dans le journal, sachant que mon mari avait horreur de la solitude quand il faisait quelque chose d' important, je me suis dit, alors voilà, il s' est trouvé un compagnon de route, ils sont morts en même temps à 10 km de distance, ils sont partis ensemble faire le grand voyage. J' ai trouvé ce hasard peu commun.